6246 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Régime de l’action - Recevabilité - Rôle des victimes - Consentement
- 6244 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Régime de l’action - Recevabilité - Action de l’Autorité de la concurrence
- 6245 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Régime de l’action - Recevabilité - Action du ministre
- 6247 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Régime de l’action - Recevabilité - Rôle des victimes - Mise en cause
- 6248 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Régime de l’action - Recevabilité - Rôle des victimes - Information
CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 6246 (10 juillet 2020)
PROTECTION CONTRE LES DÉSÉQUILIBRES SIGNIFICATIFS DANS LE CODE DE COMMERCE (ART. L. 442-1-I-2° C. COM.)
RÉGIME DE L’ACTION - RECEVABILITÉ - RÔLE DES VICTIMES - CONSENTEMENT
Nécessité d’obtenir le consentement des victimes (non). L’ordonnance du 24 avril 2019 a confirmé la solution dégagée par la jurisprudence antérieure en se contentant de viser l’information des victimes et encore, lorsque le ministre souhaite demander la nullité des clauses et la restitution de l’indu : selon l’art. L. 442-4-I C. com., « Le ministre chargé de l'économie ou le ministère public peuvent demander à la juridiction saisie d'ordonner la cessation des pratiques mentionnées aux articles L. 442-1, L. 442-2, L. 442-3, L. 442-7 et L. 442-8. Ils peuvent également, pour toutes ces pratiques, faire constater la nullité des clauses ou contrats illicites et demander la restitution des avantages indument obtenus, dès lors que les victimes de ces pratiques sont informées, par tous moyens, de l'introduction de cette action en justice. »
L’action du Ministre chargé de l’économie, exercée en application des dispositions l’anc. art. L. 442-6-III [L. 442-4] C. com., n’est pas soumise au consentement des fournisseurs du distributeur poursuivi. Cass. com., 8 juillet 2008 : pourvoi n° 07-16761 ; Bull. civ. IV. n° 103 ; Cerclab n° 3534 ; D. 2008, 3046, note M. Bandrac ; D. 2010, pan. p. 2892, obs. D. Ferrier ; JCP G 2008. 1. 218, n° 18, obs. M. Chagny ; JCP E 2008, n° 30, p. 8, note A.-M. Luciani ; JCP E 2009, 1739, obs. G. Decocq ; Contr. conc. consom. 2008, comm. 237, note M. Malaurie-Vignal ; Rev. Lamy conc. 2008, 43, obs. M. Behar-Touchais ; Lettre distrib. 2008-7/8, p. 1, obs. J. Raynard, cassant CA Versailles (12e ch. sect. 2), 3 mai 2007 : RG n° 05/09223 ; Cerclab n° 3986 ; D. 2007, p. 1656, obs. E. Chevrier ; JCP E 2007, 2303, n° 9, obs. G. Decocq et 2429, note Kœring (si le Ministre de l'économie, grâce à cette habilitation législative, dispose d'un pouvoir et d'une qualité propres à agir à ces fins, il exerce cette action par substitution à la victime des pratiques en cause dont il met en œuvre les droits privés et non de manière autonome et dans le respect des droits fondamentaux ; est irrecevable l'action exercée par le Ministre de l'économie, en violation de l'art. 6 § 1 Conv. EDH, sans en informer les fournisseurs titulaires des droits et qu'il a poursuivie sans les y associer alors que, de surcroît, plusieurs d'entre eux avaient expressément exprimé leur volonté contraire), sur appel de T. com. Nanterre (7e ch.), 15 novembre 2005 : RG n° 04F01493 : Dnd - Cass. com., 8 juillet 2008 : pourvoi n° 07-13350 ; Cerclab n° 3535, rejet du pourvoi contre CA Paris, 20 décembre 2006 : Dnd - Cass. com., 16 décembre 2008 : pourvoi n° 08-13162 ; Cerclab n° 3648 ; JCP G 2009. 1. 138, obs. M. Chagny, rejetant le pourvoi contre CA Nîmes (2e ch. com. sect. B), 17 janvier 2008 : RG n° 05/01724 ; Cerclab n° 3652 (idem), sur appel de T. com. Aubenas, 8 mars 2005 : Dnd - Cass. com., 5 mai 2009 : pourvoi n° 08-15264 ; Cerclab n° 3998 (l’action du Ministre chargé de l’économie, exercée en application des dispositions de l’anc. art. L. 442-6-III [L. 442-4] C. com., est une action autonome de protection du fonctionnement du marché et de la concurrence qui n’est pas soumise au consentement ou à la présence des fournisseurs).
Dans le même sens pour les juges du fond : l’action exercée par le Ministre chargé de l’économie en application de l’anc. art. L. 442-6 [L. 442-1] C. com., issu de l’ordonnance du 1er décembre 1986 et de ses modifications ultérieures par la loi dite NRE du 15 mai 2001, n’a nul besoin, avant d’être introduite, d’obtenir l’avis ou l’accord des fournisseurs du distributeur poursuivi. CA Colmar (1re ch. civ. sect. B), 12 juin 2008 : RG n° 05/05738 ; Legifrance ; Cerclab n° 3235, sur appel de TGI Strasbourg (compét. com.), 25 novembre 2005 : Dnd. § Dans le même sens : CA Reims (ch. civ. 1re sect.), 5 novembre 2007 : RG n° 06/01898 ; Cerclab n° 4328 ; Juris-Data n° 2007-365306 (absence de violation de l’art. 6-1 Conv. EDH dans l’absence de consentement des victimes ; la restitution est une conséquence de la nullité des clauses et la volonté des victimes est indifférente), sur appel de T. com. Châlons-en-Champagne, 15 juin 2006 : Dnd - CA Rennes (2e ch. com.), 20 janvier 2009 : RG n° 07/07013 ; arrêt n° 21 ; Legifrance ; Cerclab n° 3291, sur appel de T. com. Saint-Nazaire, 24 octobre 2007 : Dnd - CA Rennes (2e ch. com.), 20 janvier 2009 : RG n° 08/00246 ; Cerclab n° 4334 ; Juris-Data n° 2009-005280, sur appel de TGI Dinan, 13 novembre 2007 : Dnd - CA Versailles (12e ch. sect. 2), 24 septembre 2009 : RG n° 08/05366 ; Cerclab n° 3293, sur appel de T. com. Nanterre (6e ch.), 28 mars 2007 : RG n° 2006F01964 ; Cerclab n° 4356 ; Juris-Data n° 2007-363867 - CA Bastia (ch. civ.), 30 septembre 2009 : RG n° 07/00993 ; Cerclab n° 3903, sur appel de T. com. Ajaccio, 3 décembre 2007 : RG n° 06/1419 ; Dnd - T. com. Créteil (1re ch.), 13 octobre 2009 : RG n° 2008F00629 ; Cerclab n° 4355 - CA Versailles (12e ch. sect. 1), 29 octobre 2009 : RG n° 08/07356 ; Cerclab n° 4332 ; Juris-Data n° 2009-015907 - T. com. Lille, 6 janvier 2010 : RG n° 2009/5184 ; Cerclab n° 4251 ; D. 2010. p. 1000, note J. Sénéchal ; JCP G. 2010. 516, obs. M. Chagny ; Contr. conc. consom. 2010/3. Comm. n° 71, note N. Mathey ; RDC 2010/3. p. 928, obs. M. Behar-Touchais ; Rev. Lamy conc. 2010, n° 23, p. 43, note M. Behar-Touchais ; Lettre distrib. n° 1-2010, note J.-M. Vertut - CA Aix-en-Provence (2e ch.), 15 septembre 2010 : RG n° 08/10314 ; arrêt n° 2010/346 ; Cerclab n° 4308 (absence de violation de l’art. 6 Conv. EDH ; l'action du Ministre, qui vise à la défense de l'ordre public économique général, lequel n'est pas limité aux intérêts immédiats des fournisseurs, est autonome et peut être engagée même contre leur volonté), sur appel de T. com. Manosque, 6 mai 2008 : RG n° 2006/000120 ; Dnd - CA Nîmes (2e ch. sect. B com.), 10 mars 2011 : RG n° 08/04995 ; Cerclab n° 3272, cassé sur un autre point par Cass. com., 9 octobre 2012 : pourvoi n° 11-19833 ; Cerclab n° 3979 - CA Nîmes (ch. com. 2 B), 26 janvier 2012 : RG n° 09/05026 ; Cerclab n° 3674 (arrêt limitant cette solution au consentement préalable à l’action, mais réservant aux victimes le droit d’interrompre l’action ; V. ci-dessous), sur appel de T. com. Avignon, 2 octobre 2009 : RG n° 2007/040080 ; Dnd - CA Nîmes (ch. com. 2 B), 26 janvier 2012 : RG n° 09/05027 ; Cerclab n° 3673 (idem), sur appel de T. com. Avignon, 2 octobre 2009 : RG n° 2007/040081 ; Dnd - CA Paris (pôle 5 ch. 5), 2 février 2012 : RG n° 09/22350 ; Cerclab n° 3621 ; Lettre distrib. 2012/3, p. l, obs. J.-M. Vertut (l'intérêt de ces dispositions législatives d'ordre public est de permettre l'action du Ministre pour obtenir la condamnation des opérateurs ayant commis des pratiques illicites à des sanctions, sans possibilité pour des parties privées de paralyser leur application de par leur seule volonté), pourvoi rejeté par Cass. com. 10 septembre 2013 : pourvoi n° 12-21804 ; Cerclab n° 4624 - CA Colmar (1re ch. civ. sect. B), 18 avril 2012 : RG n° 09/04851 ; arrêt n° 306/2012 ; Cerclab n° 3861 (l'action du Ministre, action principale autonome, n'a nul besoin, avant d'être introduite, d'obtenir l'avis ou l'accord des agents économiques privés concernés), sur appel de TGI Strasbourg, 28 septembre 2009 : Dnd - CA Paris (pôle 5 ch. 4), 1er octobre 2014 : RG n° 13/16336 ; Cerclab n° 5030 ; Juris-Data n° 2014-023551 (action non soumise au consentement des fournisseurs, conformément à l’arrêt du 4 juillet 2008), sur appel de T. com. Evry (3e ch.), 26 juin 2013 : RG n° 2009F00729 ; Dnd - CA Paris (pôle 1 ch. 1), 15 septembre 2015 : RG n° 15/07435 ; Cerclab n° 5312, contredit sur T. com. Paris, 24 mars 2015 : RG n° 2014027403 ; Dnd - CA Paris (pôle 5 ch. 4), 27 septembre 2017 : RG n° 16/00671 ; Cerclab n° 7064 - CA Grenoble (ch. com.), 31 janvier 2019 : RG n° 12/02494 ; Cerclab n° 7957, sur appel de T. com. Romans-sur-Isère, 28 mars 2012 : RG n° 07J70079 ; Dnd - CA Paris, 29 juin 2016 : Dnd (l’action du ministre, qui est autonome, n’est pas soumise au consentement ou à la présence des fournisseurs), pourvoi rejeté par Cass. com., 26 septembre 2018 : pourvoi n° 17-10173 ; arrêt n° 819 ; Cerclab n° 8159 - T. com. Paris (1re ch.), 2 septembre 2019 : RG n° 2017050625 ; Cerclab n° 8250 (Amazon ; l’action du ministre n'est pas soumise au consentement des cocontractants).
V. cependant : jugé que le droit d'action reconnu à l'autorité publique nécessite, tant au regard des dispositions de l'art. 6 § 1 Conv. EDH, que de celles des art. 4 et 16 de la déclaration des droits de l'homme de 1789, que le partenaire lésé puisse, non seulement engager lui-même l'action ou se joindre à celle de l'autorité publique, mais encore puisse s'opposer à cette action en y mettant un terme. CA Nîmes (ch. com. 2 B), 26 janvier 2012 : RG n° 09/05026 ; Cerclab n° 3674 (arrêt estimant que l’action ne suppose pas par ailleurs l’assentiment préalable du contractant), sur appel de T. com. Avignon, 2 octobre 2009 : RG n° 2007/040080 ; Dnd - CA Nîmes (ch. com. 2 B), 26 janvier 2012 : RG n° 09/05027 ; Cerclab n° 3673, sur appel de T. com. Avignon, 2 octobre 2009 : RG n° 2007/040081 ; Dnd (idem). § N.B. Cette solution est contraire au caractère autonome de l’action du Ministre et à l’absence d’obligation d’obtenir le consentement des victimes, affirmée par la Cour de cassation, même si ces deux arrêts estiment que le droit de mettre un terme à l’action n’est pas assimilable à l’exigence d’un assentiment préalable. En tout état de cause, il est difficile de voir comment les victimes pourraient s’opposer à la demande d’une amende civile, dont le prononcé est indépendant de celui d’éventuelles nullités et restitutions.