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T. COM. ANGERS, 8 février 1995

Nature : Décision
Titre : T. COM. ANGERS, 8 février 1995
Pays : France
Juridiction : Angers (TCom)
Demande : 94/008029
Date : 8/02/1995
Nature de la décision : Rejet
Date de la demande : 21/04/1994
Décision antérieure : CA ANGERS (1re ch. A), 16 septembre 1996
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CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 660

T. COM. ANGERS, 8 février 1995 : RG n° 94/008029

(sur appel CA Angers (1re ch.), 16 sept. 1996 : RG n° 9501158 ; arrêt n° 579/96)

 

Extrait : « Attendu que Mr X. revendique l'application de la loi du 22 décembre 1972 étant donné qu'à l'évidence un cordonnier maroquinier qui se voit installer un système d'alarme dans ses locaux professionnels ne conclut pas un acte qui a un rapport direct avec l'exercice de sa profession. Il se trouve dans la même situation que n'importe quel consommateur profane, ce qui justifie l'application de la loi de 1972 au démarchage dont il a fait l'objet ».

 

TRIBUNAL DE COMMERCE D’ANGERS

AUDIENCE PUBLIQUE

JUGEMENT DU 8 FÉVRIER 1995

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 94/008029.

DEMANDEUR(S) :

SAM COGSERVICES

[adresse], Représentant(s) Maître MAROT

 

DÉFENDEUR(S) :

Monsieur X.

[adresse], Représentant(s) SCP BEUCHER ET CIE - p/ Maître FURHER [N.B. sans doute plaidant par]

 

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors du débat et du délibéré :

PRÉSIDENT : Monsieur EVENO

JUGES : Monsieur LE BOMIN - Monsieur SOULEZ-LARIVIERE

GREFFIER : Mademoiselle ALLINE

[minute page 2]

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

I – FAITS ET PROCÉDURE :

Le 21 avril 1994, la SAM COGESERVICES à [ville A.] a assigné Mr X. maroquinerie a [ville B.] a lui payer la somme de 13.581,93 francs correspondant au solde d'un contrat de location longue durée pour financer du matériel de télésurveillance ;

Cette somme se décomposait comme suit :

- 3 loyers impayés nov. 93 - janv. 94 - fév. 94 :                      1.610,10 francs

- Intérêts de retard :                                                                70,32 francs

- Clauses pénales :                                                                  160,11 francs

- 20 loyers à échoir :                                                               10.674,00 francs

- Clauses pénales :                                                                  1.067,40 francs

                                                           SOIT :                         13.581,93 francs

Outre intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la lettre de résiliation ;

Ainsi que 2.500 francs par application de l'article 700 du NCPC et les dépens, avec exécution provisoire du jugement à intervenir ;

 

II – PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

A) COGESERVICES est créancière de Mr X. en vertu d'un contrat de location longue durée d'un montant frais et agios de 25.617,60 francs remboursable en 48 mensualités de 533,70 francs pour financer du matériel de télésurveillance ;

La créance de la société COGESERVICES est exigible conformément aux clauses et conditions du contrat et elle est fondée d'en poursuivre le recouvrement pour le solde restant du de 13.581,93 francs outre intérêts de retard, frais de procédure et accessoires ;

Pour tenter d'échapper à ses obligations dérivant du contrat de location, Mr X. prétend que le contrat serait nul en raison de la loi du 22 décembre 1972 et plus particulièrement de son article 2 ;

COGESERVICES réplique qu'à l'examen des termes du contrat et des énonciations qui y sont faites, l'intégrité du consentement de Mr X. a été respectée ;

Il précisé de plus que Mr X. a signé le 19 septembre 1991 deux contrats indissociables ;

- le premier de location avec la société concluante ;

- le deuxième d'intervention avec la société PROSERCOM ;

Le contrat de location a été proposé à Mr X. par l'intermédiaire de PROSERCOM  intervenant en qualité de [minute page 3] fournisseur ;

Or, si effectivement le contrat de location ne comporte pas le nom du démarchant, en revanche, celui d'entretien signé le même jour et au même endroit avec PROSERCOM  comporte clairement le nom du démarcheur ainsi que sa signature ;

Ainsi, Mr X. ne peut soutenir que son consentement aurait été atteint des lors qu'il connaissait parfaitement l'identité du démarcheur ;

COGESERVICES estime que l'attitude de Mr X. est constitutive d'une confirmation de son engagement ;

Il est constant que Mr X. n'a pas usé de la possibilité de retrait de son engagement dans les sept jours qui ont suivi ;

De plus, il a exécuté pendant de nombreux mois les obligations mises à sa charge et notamment le règlement des loyers ;

Enfin, il a utilisé le matériel jusqu'au 19 octobre 1993, date de démontage provoqué à sa seule initiative et à la suite de nombreux impayés ;

Pour toutes ces raisons, COGESERVICES demande au tribunal de :

- condamner Mr X. à lui payer 13.581,93 francs outre les intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la lettre de résiliation, et autres accessoires de droit ;

- condamner Mr X. a 5.000 francs par application de l'article 700 du NCPC ainsi qu'aux entiers dépens ;

- ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir ;

B) Mr X. estime qu'en application de la loi du 22 décembre 1972, le contrat est nul. Ce qui est contesté par la société COGESERVICES ;

L'article 8 e de la loi du 22 décembre 72 exclut uniquement de son champ d'application les contrats qui ont un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre de l'exploitation commerciale. Or à l'évidence un cordonnier maroquinier qui se fait installer un système d'alarme ne conclut pas un acte qui a un rapport direct avec l'exercice de sa profession. De plus, il y a absence des mentions obligatoires dans le contrat de location :

- absence du nom du démarcheur,

- absence de l'adresse du lieu de conclusion du contrat ;

- absence d'indication des conditions d'exécution du contrat et notamment des modalités [et] délais de livraison du matériel donne en location ;

- absence d'indication de façon apparente du texte intégral des articles 2, 3 et 4 et de la possibilité de rétractation ;

Enfin, pour tenter de pallier l’absence des [minute page 4] mentions obligatoires, COGESERVICE essaye de faire croire à l'indivisibilité entre le contrat de location et le contrat d'abonnement de télésurveillance, mais COGESERVICES n'en rapporte pas la preuve ;

De plus, le contrat de location stipule que le tribunal compétent est celui du domicile du locataire soit ANGERS ;

Alors que le contrat de télésurveillance indique en article 12 les tribunaux de NANTES ;

En conclusion, il s'agit bien de deux contrats complètement distincts ;

Du fait de cette nullité du contrat, la nullité étant toujours rétroactive, Mr X. estime que les parties doivent être remises dans l'état où elles se trouvaient avant la conclusion du contrat ;

Il a restitué le matériel dans l'état ou il avait été remis. La société PROSERCOM a récupéré le matériel le 19 octobre 1993 ; la société COGESERVICES doit donc lui rembourser la somme de 12.275,10 francs correspondant aux 23 échéances de 533,70 francs qu'il a acquittés depuis le 19 septembre 1991 ;

Mr X. demande en outre que COGESERVICES soit condamnée a lui payer 5.000 francs au titre des frais irrépétibles qu'il a dû engager ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

III – MOTIVATIONS :

Attendu que Mr X. revendique l'application de la loi du 22 décembre 1972 étant donné qu'à l'évidence un cordonnier maroquinier qui se voit installer un système d'alarme dans ses locaux professionnels ne conclut pas un acte qui a un rapport direct avec l'exercice de sa profession. Il se trouve dans la même situation que n'importe quel consommateur profane, ce qui justifie l'application de la loi de 1972 au démarchage dont il a fait l'objet ;

Par ailleurs, il y a absence des mentions obligatoires prévues par l'article 2 de la loi dans le contrat de location ainsi qu'absence d'indivisibilité entre les deux contrats (location et abonnement de télésurveillance), la société COGESERVICES n'en apportant pas la preuve ;

Tout conduit au contraire à retenir une complète indépendance entre les deux contrats ;

- l'un est location de biens ;

- l'autre concerne des prestations de services ;

Et ils ont été conclus avec des personnes morales différentes ;

Pour toutes ces raisons, il apparaît que les contrats sont nuls en application de la loi du 22 décembre 1972 ;

[minute page 5] Dans ces conditions, non seulement Mr X. n'est pas redevable de la somme de 13.581,93 francs qui lui est réclamée par COGESERVICES, mais en plus en raison de la rétroactivité de la nullité, COGESERVICES doit lui rembourser la somme de 12.275.10 francs correspondant aux 23 échéances de 533,70 francs qu'il a acquittées ;

Le tribunal estime cependant que Mr X. a utilise le matériel de télésurveillance du 19 septembre 1991, date du contrat au 19 octobre 1993, date de récupération du matériel par PROSERCOM, soit 25 mois à 533,70 francs, ce qui correspond a une somme de 13.342,50 francs ;

Ayant déjà réglé la somme de 12.275,10 francs, elle viendra en déduction de la somme ci-dessus ;

Mr X. devra donc régler a COGESERVICES seulement 13.342,50 francs - 12.275,10 francs soit 1.067,40 francs ;

Attendu que Mr X. a été contraint d'engager des frais irrépétibles qu'il apparaît inéquitable de laisser à sa charge et qui peuvent être évalués à 2.000 francs ;

Attendu que les dépens seront a la charge de CGESERVICE qui a succombe ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Après avoir délibéré, statuant en audience publique, contradictoirement et en premier ressort ;

Le Tribunal déclare nuls les contrats de COGESERVICE ;

En conséquence, COGESERVICES doit rembourser une somme de 12.275,10 francs a Mr X. et ce dernier doit régler une somme de 13.342,50 francs au titre de l'utilisation du matériel ;

Dit qu’il aura compensation entre ces deux sommes ;

Condamne Mr X. à payer à COGESERVICES la somme de 1.067,40 francs ;

Condamne COGESERVICES à verser à Mr X. la somme de 2.000 francs au titre de l'article 700 du NCPC ;

Condamne COGESERVICES aux entiers dépens ;

Rejette toute autre demande ;

Ainsi fait, jugé et prononcé à l'audience publique du tribunal de commerce d’ANGERS, du mercredi 8 février 1995, par le Président, les juges et le greffier sus-nommés.