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CASS. CIV. 3e, 12 janvier 2017

Nature : Décision
Titre : CASS. CIV. 3e, 12 janvier 2017
Pays : France
Juridiction : Cour de cassation Ch. civile 3
Demande : 16-10324
Décision : 2017-37
Date : 12/01/2017
Numéro ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:C300037
Nature de la décision : Cassation avec renvoi
Mode de publication : Legifrance
Décision antérieure : CA AMIENS (1re ch. civ.), 1er octobre 2015
Numéro de la décision : 37
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CERCLAB - DOCUMENT N° 6688

CASS. CIV. 3e, 12 janvier 2017 : pourvoi n° 16-10324 ; arrêt n° 37

Publication : Legifrance . Bull. civ.

 

Extrait : « Tous les copreneurs solidaires sont tenus au paiement des loyers et des charges jusqu’à l’extinction du bail, quelle que soit leur situation personnelle, et que la stipulation de solidarité, qui n’est pas illimitée dans le temps, ne crée pas au détriment du preneur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations respectifs des parties au contrat ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR DE CASSATION

TROISIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU JANVIER 2017

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

N° de pourvoi : 16-10324. Arrêt n° 37.

DEMANDEUR à la cassation : OPAC d’Amiens, devenu l’Office Public d’Habitat d’Amiens

DÉFENDEUR à la cassation : Monsieur X. et Madame Y.

M. Chauvin (président), président. SCP Monod, Colin et Stoclet, SCP Sevaux et Mathonnet, avocat(s).

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

 

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE                                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Amiens, 1er octobre 2015), rendu en référé, que, le 20 août 2010, l’OPAC d’Amiens, devenu l’Office Public d’Habitat d’Amiens, a donné à bail un appartement à M. X. et à Mme Y., le contrat comportant une clause de solidarité ainsi rédigée : « Il est expressément stipulé que les époux, quel que soit leur régime juridique, les personnes liées par un PACS, les colocataires sont tenus solidairement et indivisibles de l’exécution du présent contrat. Pour les colocataires, la solidarité demeurera après la délivrance d’un congé de l’un d’entre eux pendant une durée minimum de trois années à compter de la date de la réception de la lettre de congé » ; que, Mme Y. ayant donné congé avec effet au 7 mars 2011, M. X. est demeuré seul dans le logement ; que, le 30 juillet 2013, le bailleur a délivré aux preneurs un commandement visant la clause résolutoire afin d’obtenir le paiement d’un arriéré de loyer puis les a assignés devant le juge des référés en constatation de la résiliation du bail ;

 

Sur les première et deuxième branches du moyen unique :

VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée)                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu l’article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable au litige ;

 

CHAPEAU (énoncé du principe juridique en cause)                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ;

 

RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que, pour dire nulle et réputée non écrite la clause de solidarité et rejeter la demande dirigée contre Mme Y., l’arrêt retient que cette clause est discriminatoire en ce qu’elle prévoit une situation plus défavorable pour les colocataires par rapport aux couples mariés ou liés par un pacte civil de solidarité, pour lesquels aucune sanction n’est prévue en cas de congé donné par l’un des deux au bailleur, et qu’elle introduit un déséquilibre entre les parties contractantes au préjudice des colocataires et en faveur du seul bailleur, lequel se réserve le pouvoir d’apprécier, sans limitation dans le temps, la durée pendant laquelle il pourra réclamer le règlement des sommes dues en vertu du bail au colocataire lui ayant donné congé ;

 

CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION                                                        (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Qu’en statuant ainsi, alors que tous les copreneurs solidaires sont tenus au paiement des loyers et des charges jusqu’à l’extinction du bail, quelle que soit leur situation personnelle, et que la stipulation de solidarité, qui n’est pas illimitée dans le temps, ne crée pas au détriment du preneur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations respectifs des parties au contrat, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

 

Et sur la troisième branche :

VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée)                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu l’article 1202, alinéa 1er, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016 ;

 

CHAPEAU (énoncé du principe juridique en cause)                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que la solidarité ne se présume point ; qu’il faut qu’elle soit expressément stipulée ;

 

RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que l’arrêt retient encore que la clause de solidarité est imprécise quant aux sommes restant dues, à défaut d’indiquer s’il s’agit seulement des loyers et charges restés impayés ou des loyers et des indemnités d’occupation ;

 

CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION                                                        (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Qu’en statuant ainsi, alors qu’en l’absence de stipulation expresse visant les indemnités d’occupation, la solidarité ne pouvait s’appliquer qu’aux loyers et charges impayés à la date de résiliation du bail, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                              (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 1er octobre 2015, entre les parties, par la cour d’appel d’Amiens ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Douai ;

Condamne Mme Y. aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze janvier deux mille dix sept.

 

 

ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Moyen produit par la SCP Monod, Colin et Stoclet, avocat aux Conseils, pour l’Office Public de l’Habitat d’Amiens

 

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir dit nulle et réputée non écrite la clause de solidarité prévue à l’article 14 du contrat de bail du 20 août 2010 et d’avoir débouté l’OPH d’Amiens de ses demandes en paiement dirigées contre Mme Y. ;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

AUX MOTIFS QUE sur la solidarité au titre de la dette de loyers, Mme Y. ne peut sérieusement prétendre que la solidarité prévue au contrat de bail serait limitée au premier mois de location, le contrat signé par les parties ayant prévu qu’au-delà de cette période, le bail se prolongerait par tacite reconduction ; qu’elle est en revanche fondée à invoquer le caractère abusif de la clause du contrat figurant à l’article 14 du contrat sous l’intitulé « solidarité », prévoyant qu’« il est expressément stipulé que les époux, quel que soit leur régime juridique, les personnes liées par un PACS, les colocataires sont tenus solidairement et indivisibles de l’exécution du présent contrat ; que pour les colocataires, la solidarité demeurera après la délivrance d’un congé de l’un d’entre eux pendant une durée minimum de trois années à compter de la date de la réception de la lettre de congé » ; qu’en effet, d’une part, une telle clause est discriminatoire en ce qu’elle prévoit une situation plus défavorable pour les colocataires par rapport aux couples mariés ou liés par un pacte civil de solidarité, pour lesquels aucune sanction n’est prévue en cas de congé donné par l’un des deux au bailleur, d’autre part, elle introduit un déséquilibre entre les parties contractantes au préjudice des colocataires et en faveur du seul bailleur, lequel se réserve le pouvoir d’apprécier, sans limitation dans le temps, la durée pendant laquelle il pourra réclamer le règlement des sommes dues en vertu du bail au colocataire lui ayant donné congé ; qu’enfin, cette clause est imprécise quant aux sommes restant dues en une telle hypothèse à défaut d’indiquer s’il s’agit seulement des loyers et charges restés impayés ou des loyers et des indemnités d’occupation ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

1°/ ALORS QU’il résulte des articles 220, 515-4 et 1751 du code civil que le conjoint ou le partenaire uni par un pacte civil de solidarité et cotitulaire du bail, nonobstant le fait qu’il ait quitté les lieux ou ait été autorisé à résider séparément, reste tenu solidairement envers le bailleur du paiement des loyers et charges ; qu’en retenant, pour déclarer abusive la clause de solidarité expressément prévue dans le bail d’habitation de colocataires, qu’elle serait discriminatoire en ce qu’elle prévoirait une situation plus défavorable pour les colocataires que pour les couples mariés ou liés par un pacte civil de solidarité, pour lesquels aucune sanction ne serait prévue en cas de congé donné par l’un des deux au bailleur, la cour d’appel a méconnu les articles L. 132-1 du code de la consommation, ensemble les articles 220, 515-4, 1200, 1202 et 1751 du code civil ;

2°/ ALORS QUE la solidarité ne peut plus être recherchée au terme du contrat ou après le renouvellement de celui-ci ; qu’en retenant, pour dire que la clause était abusive, qu’elle introduit un déséquilibre entre les parties contractantes au préjudice des colocataires et en faveur du seul bailleur, lequel se réserve le pouvoir d’apprécier, sans limitation dans le temps, la durée pendant laquelle il pourra réclamer le règlement des sommes dues en vertu du bail au colocataire lui ayant donné congé, la cour d’appel s’est déterminée par des motifs erronés et inaptes à justifier légalement sa décision au regard des articles L. 132-1 du code de la consommation, ensemble les articles 202, 1200, 1202 et 1751 du code civil ;

3°/ ALORS QU’en application de l’article 1202 du code civil, comme pour les époux et les partenaires liés par un pacte civil de solidarité, l’indemnité d’occupation peut être également due par un colocataire après qu’il a valablement donné congé au preneur, à condition que la clause de solidarité le prévoie expressément ; qu’en retenant, pour dire la clause nulle, qu’elle est imprécise quant aux sommes restant dues en une telle hypothèse à défaut d’indiquer s’il s’agit seulement des loyers et charges restés impayés ou des loyers et des indemnités d’occupation, quand il lui appartenait de retenir qu’en cas d’absence de stipulation expresse, la solidarité ne pouvait concerner que les dettes de loyers et charges, la cour d’appel s’est déterminée par des motifs inopérants à justifier légalement sa décision au regard des articles L. 132-1 du code de la consommation, ensemble les articles 202, 1200, 1202 et 1751 du code civil.