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CA METZ (4e ch.), 5 octobre 2006

Nature : Décision
Titre : CA METZ (4e ch.), 5 octobre 2006
Pays : France
Juridiction : Metz (CA), 4e ch.
Demande : 03/01752
Décision : 06/01258
Date : 5/10/2006
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Juris Data
Date de la demande : 11/06/2003
Décision antérieure : TI SARREBOURG, 28 avril 2003
Numéro de la décision : 1258
Décision antérieure :
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CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 671

CA METZ (4e ch.), 5 octobre 2006 : RG n° 03/01752 ; arrêt n° 06/01258

Publication : Juris-Data n° 319673

 

Extrait : « Il convient de rappeler que sont ici invoquées par l'association de l'École de Musique de la Région de Sarrebourg les dispositions du code de la consommation relatives au démarchage à domicile et non pas celles relatives aux clauses abusives. Or, ainsi que l'a relevé le premier juge, l'article L. 121-21 du code de la consommation limite clairement sa protection aux personnes physiques, les dispositions protectrices en matières de clauses abusives, qui s'appliquent certes aux associations pourtant dotées de la personnalité morale, ne pouvant être étendues à la matière du démarchage à domicile.

Cependant conformément aux règles traditionnellement applicables en matière de protection du consommateur et en l'absence de disposition contraire de la loi, les parties sont libres de soumettre, par une manifestation de volonté dépourvue d'équivoque, aux dispositions du Code de la consommation relatives au démarchage à domicile, les opérations de commercialisation qui n'en relèveraient pas. Il leur suffit de le préciser à la convention ou de viser les articles du code de la consommation applicables pour que le contrat soit placé sous l'empire des dispositions relatives au démarchage à domicile. En l'espèce figurent expressément parmi les conditions générales de location la reproduction intégrale des articles 2, 2 bis, 3 et 4 de la loi n° 93-949 du 26 juillet 1993 codifiés dans le code de la consommation sous les articles L. 121-23 à L. 121-26. Il faut donc considérer qu'en l'espèce les parties se sont volontairement soumises aux dispositions légales protectrices sur le démarchage à domicile ;

Cependant dans le cadre de la même convention, les extraits de la loi susvisés sont expressément stipulés « non applicables aux professionnels dans le cadre de leur activité ». Or la SA PARFIP FRANCE soutient que le contrat a été conclu par l'association de l'École de Musique de la Région de Sarrebourg dans le cadre de son activité professionnelle. Néanmoins, il n'existe pas de rapport direct entre l'activité de formation musicale exercée par l'association de l'École de Musique de la Région de Sarrebourg et la location d'une machine à café, peu important que cette opération ait été réalisée pour les besoins de l'école de musique. Celle-ci est donc en droit d'invoquer les dispositions protectrices du code de la consommation ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE METZ

QUATRIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 5 OCTOBRE 2006

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 03/01752. Arrêt n° 06/01258.

 

APPELANTE :

ASSOCIATION ÉCOLE DE MUSIQUE DE LA RÉGION DE SARREBOURG

représentée par son Président, [adresse], représentée par Maître BETTENFELD-FONTANA-RIGO, en la personne de Maître VOGIN, avocats à la Cour

 

INTIMÉE :

SA PARFIP FRANCE

représentée par son [adresse], représentée par Maître Laure-Anne BAI-MATHIS, avocat à la Cour

 

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

PRÉSIDENT : M. LEBROU, Président de Chambre.

ASSESSEURS : Mme SAINT EVE, Conseiller Mme SOULARD, Conseiller

GREFFIER PRÉSENT AUX DÉBATS : Mme LOUVET

DATE DES DÉBATS : Audience publique du 22 juin 2006. L'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 5 octobre 2006.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] Selon contrat du 22 mai 2001, la SA FONTEX a consenti à l'association de l'École de Musique de la Région de Sarrebourg la location d'une machine à café moyennant le paiement d'un loyer mensuel de 1.076.40 Francs TTC, ce pour une durée de quatre ans renouvelable.

Par ordonnance du 24 septembre 2002, le juge du Tribunal d'Instance de Sarrebourg a enjoint à l'association de l'École de Musique de la Région de Sarrebourg de payer à la SA PARFIP FRANCE, cessionnaire de la SA FONTEX, la somme de 8.302.43 €, outre les intérêts au taux légal à compter de la signification.

Par courrier enregistré le 21 octobre 2002, l'association de l'École de Musique de la Région de Sarrebourg a formé opposition à cette ordonnance d'injonction de payer.

Par jugement du 28 avril 2003, le Tribunal d'Instance de Sarrebourg a :

- Constaté, par l'effet du jugement, la mise à néant de l'ordonnance d'injonction de payer

- Condamné l'association de l'École de Musique de la Région de Sarrebourg à payer à la SA PARFIP FRANCE la somme de 7.713.23 €, majorée des intérêts au taux légal à compter de la signification de l'ordonnance d'injonction de payer ;

- Condamné l'association de l'École de Musique de la Région de Sarrebourg à restituer à ses frais le matériel objet du contrat de location entre les mains de la SA PARFIP ;

- Ordonné l'exécution provisoire du jugement ;

- condamné l'association de l'École de Musique de la Région de Sarrebourg à payer à la SA PARFIP FRANCE la somme de 350 € en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

- rejeté les autres demandes ;

- l'a condamnée aux dépens.

Pour statuer ainsi, le Tribunal d'Instance a écarté l'application des dispositions des articles L. 121-21 et 121-23 du code de la consommation au motif que ces dispositions protectrices ne visent que les personnes physiques à l'exclusion des personnes morales.

Ensuite, pour rejeter le moyen tiré de la nullité du contrat pour dol, il a constaté que l'association de l'École de Musique de la Région de Sarrebourg se prévalait d'un simple courrier dépourvu de toute valeur contractuelle pour soutenir que la société FONTEX lui avait fait une proposition de mise à disposition « sans investissement » de sa part ; que la défenderesse avait en tout état de cause signé le contrat visant expressément le paiement de loyers.

[minute page 3] Enfin sur la demande en paiement, il a fait application des clauses contractuelles et de l'article 1152 du Code Civil lui permettant de réduire la clause pénale à la somme symbolique d'un euro.

Par voie de conséquence, il a ordonné la restitution du matériel par l'association de l'École de Musique de la Région de Sarrebourg aux frais de celle-ci.

Par déclaration du 11 juin 2003, l'association de l'École de Musique de la Région de Sarrebourg a interjeté appel de ce jugement.

Par conclusions récapitulatives déposées le 25 avril 2006, elle demande à la Cour de :

- la recevoir en son appel et la dire bien fondée en celui-ci ;

- infirmer le jugement entrepris ;

- et statuant à nouveau ;

- constater que le contrat conclu est soumis de plein droit aux dispositions de l'article L. 121 et suivants du code de la consommation, et subsidiairement constater la soumission volontaire dudit contrat aux dispositions précitées ;

- constater que le contrat ne fait nulle mention du démarcheur, ne prévoit pas la faculté de renonciation prévue par l'article L. 121-5 et, plus généralement, ne reproduit pas de façon apparente les articles L. 121-23 à L. 121-26 du code de la consommation ;

- en conséquence déclarer le contrat nul et de nul effet ; subsidiairement déclarer le contrat nul pour cause de dol ;

- lui donner acte de ce qu'elle ne s'oppose pas à l'emprise du matériel et dire que les frais d'enlèvement resteront à la charge de l'intimée ;

- condamner la SA PARFIP FRANCE à lui restituer la somme de 316,55 €, correspondant au dépôt de garantie et aux loyers prélevés, outre les intérêts au taux légal à compter des conclusions du 20 janvier 2003 valant mise en demeure ;

- condamner la SA PARFIP FRANCE à lui payer une somme de 1.000 € à titre de dommages et intérêts, outre une somme de 1.000 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

- la condamner aux dépens de première instance et d'appel.

[minute page 4] Par conclusions en date du 8 juin 2006, la SA PARFIP FRANCE conclut à voir :

- constater l'irrecevabilité des demandes de l'association de l'École de Musique de la Région de Sarrebourg ;

- en conséquence, débouter l'association de l'École de Musique de la Région de Sarrebourg de sa demande tendant au prononcé de la nullité du contrat pour dol ;

- débouter l'association de l'École de Musique de la Région de Sarrebourg de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- en conséquence, confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;

- condamner l'association de l'École de Musique de la Région de Sarrebourg à lui verser la somme de 1.500 € au titre des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

- condamner la SA PARFIP FRANCE aux dépens.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Vu les conclusions récapitulatives déposées pour l'appelante le 25 avril 2006 et pour l'intimée le 8 juin 2006, auxquelles la Cour se réfère pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties ;

 

Sur l'applicabilité des dispositions protectrices des articles L. 121-21 et suivants du code de la consommation :

Il convient de rappeler que sont ici invoquées par l'association de l'École de Musique de la Région de Sarrebourg les dispositions du code de la consommation relatives au démarchage à domicile et non pas celles relatives aux clauses abusives.

Or, ainsi que l'a relevé le premier juge, l'article L. 121-21 du code de la consommation limite clairement sa protection aux personnes physiques, les dispositions protectrices en matières de clauses abusives, qui s'appliquent certes aux associations pourtant dotées de la personnalité morale, ne pouvant être étendues à la matière du démarchage à domicile.

Cependant conformément aux règles traditionnellement applicables en matière de protection du consommateur et en l'absence de disposition contraire de la loi, les parties sont libres de soumettre, par une manifestation de volonté dépourvue d'équivoque, aux [minute page 5] dispositions du Code de la consommation relatives au démarchage à domicile, les opérations de commercialisation qui n'en relèveraient pas. Il leur suffit de le préciser à la convention ou de viser les articles du code de la consommation applicables pour que le contrat soit placé sous l'empire des dispositions relatives au démarchage à domicile. En l'espèce figurent expressément parmi les conditions générales de location la reproduction intégrale des articles 2, 2 bis, 3 et 4 de la loi n° 93-949 du 26 juillet 1993 codifiés dans le code de la consommation sous les articles L. 121-23 à L. 121-26. Il faut donc considérer qu'en l'espèce les parties se sont volontairement soumises aux dispositions légales protectrices sur le démarchage à domicile.

Cependant dans le cadre de la même convention, les extraits de la loi susvisés sont expressément stipulés « non applicables aux professionnels dans le cadre de leur activité ». Or la SA PARFIP FRANCE soutient que le contrat a été conclu par l'association de l'École de Musique de la Région de Sarrebourg dans le cadre de son activité professionnelle. Néanmoins, il n'existe pas de rapport direct entre l'activité de formation musicale exercée par l'association de l'École de Musique de la Région de Sarrebourg et la location d'une machine à café, peu important que cette opération ait été réalisée pour les besoins de l'école de musique. Celle-ci est donc en droit d'invoquer les dispositions protectrices du code de la consommation.

 

Sur la nullité du contrat pour non respect des dispositions sur le démarchage à domicile :

L'article 2 de la loi du 26 juillet 1993 devenu l'article L. 121-23 du code de la consommation prévoit que :

« les opérations visées à l'article 1er doivent faire l'objet d'un contrat dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion du contrat et comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :

1° noms du fournisseur et du démarcheur ;

etc ...

faculté de renonciation prévue à l'article L. 121-25, ainsi que les conditions d'exercice de cette faculté et, de façon apparente, le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26. »

Or il ressort de l'exemplaire original du contrat versé aux débats que si les articles susvisés ont été reproduits de manière apparente en page 2, prévoyant notamment la faculté de renonciation, en revanche l'identité du démarcheur n'y est pas indiquée.

En conséquence il y a lieu, par application des dispositions de l'article L. 121-23 susrappelées, de prononcer la nullité du contrat souscrit par l'association de l'École de Musique de la Région de Sarrebourg.

Par suite il y a lieu d'ordonner la restitution du matériel loué, mais aux frais de l'intimée, de même que la somme de 316.55 €, versée au titre du dépôt de garantie et du [minute page 6] premier loyer, majorée des intérêts au taux légal à compter du. 20 janvier 2003, date de conclusions déposées devant le premier juge et valant mise en demeure.

Le jugement entrepris sera donc infirmé en toutes ses dispositions.

 

Sur la demande reconventionnelle en dommages et intérêts :

L'association de l'École de Musique de la Région de Sarrebourg ne précise - et ne justifie - nullement en quoi elle a subi un préjudice résultant d'une faute commise par la SA PARFIP, et qui serait distinct de celui qui sera réparé par l'application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts ne peut qu'être rejetée.

 

Sur les dépens et l'application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile :

La SA PARFIP FRANCE, qui succombe en ses prétentions, sera condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel ainsi qu'au paiement d'une indemnité de 1.200 € par application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement,

Déclare l'appel bien fondé ;

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau ;

Prononce la nullité du contrat liant les parties ;

En conséquence,

Ordonne la restitution du matériel donné en location aux frais de la SA PARFIP FRANCE ;

[minute page 7] Condamne la SA PARFIP FRANCE à payer à l'association de l'École de Musique de la Région de Sarrebourg la somme de 316.55 €, outre les intérêts au taux légal à compter du 20 janvier 2003 ;

Déboute l'association de l'École de Musique de la Région de Sarrebourg de sa demande en dommages et intérêts ;

Condamne la SA PARFIP FRANCE à payer à l'association de l'École de Musique de la Région de Sarrebourg la somme de 1.200 € en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Condamne la SA PARFIP FRANCE aux dépens d'appel.

Le présent arrêt a été prononcé publiquement le 5 octobre 2006 par Monsieur LEBROU, Président de Chambre, assisté de Madame GASNER-PAQUET, Greffier, et signé par eux.