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CA PARIS (pôle 5 ch. 4), 22 mars 2017

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 5 ch. 4), 22 mars 2017
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 5 ch. 4
Demande : 14/26013
Date : 22/03/2017
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 20/12/2014
Référence bibliographique : Juris-Data n° 2017-005299
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CERCLAB - DOCUMENT N° 6780

CA PARIS (pôle 5 ch. 4), 22 mars 2017 : RG n° 14/26013 

Publication : Jurica

 

Extrait : 1/ « Or, le grief de menace de rupture brutale visé à l'article L. 442-6-I-4° du code de commerce ne peut être invoqué que si les manœuvres dénoncées interviennent en cours de contrat et non, lorsque la rupture est déjà consommée, comme tel est le cas en l'espèce, le contrat ayant été résilié le 14 janvier 2014 à effet au 31 mars 2014 et l'appel d'offre datant de juillet 2014. Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande d'indemnisation sur ce fondement. »

2/ « L'article 10 du contrat de sous-traitance fixe les tarifs des prestations et les conditions de paiement et l'« Article 11-Commission » dispose que le prestataire (la société Net 31) s'engage à reverser annuellement une « commission » en fonction de son chiffre d'affaires effectué sur l'année, soit au-delà de 60.000 euros au 31 décembre, 5 % du chiffre d'affaires hors taxes généré.

Il en ressort que cette commission constitue un complément de rémunération, librement négocié entre les parties dès l'origine du contrat, dont les conditions d'attribution sont définies de manière objective. Partie du prix du contrat, elle est la contrepartie du chiffre d'affaires octroyé au sous-traitant au-delà d'un certain seuil, ce dont il résulte, contrairement à ce que soutient la société Net 31, qu'elle est causée de sorte qu'il n'y a pas lieu d'en prononcer l'annulation.

En outre, cette commission n'apparaît pas disproportionnée par rapport au montant du chiffre d'affaires qui en conditionne l'octroi. Elle ne contrevient donc pas aux dispositions de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce sus visé, dès lors que sa mise en œuvre aboutit à l'octroi d'avantages réciproques et proportionnés.

Enfin, le contrat contenant la clause litigieuse ayant été conclu le 28 mars 2006, la société Net 31 ne saurait exciper des dispositions de l'article 21 IV de la loi du 4 août 2008, dite LME, devenu le nouvel article L. 442-6-I-2° du code de commerce et prévoyant la responsabilité de la personne qui soumet ou tente de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans la mesure où il n'est applicable qu'aux contrats conclus à compter du 1er janvier 2009.

Il sera ajouté qu'au regard de l'ancien article L. 442-6, I, 2° b du code de commerce, applicable en la cause, qui sanctionnait le fait pour une personne « d'abuser de la relation de dépendance dans laquelle il tient un partenaire ou de sa puissance d'achat ou de vente en le soumettant à des conditions commerciales ou obligations injustifiées.», la société Net 31 ne justifie, par la production d'aucun élément, ni que lors de la conclusion du contrat, elle ait été contrainte, sous quelque forme que ce soit, de souscrire le contrat comportant la clause litigieuse, ni qu'elle ait été placée dans une situation de dépendance économique, ni que les parties n'aient pas loyalement et en connaissance de cause convenu de leurs relations commerciales. C'est donc à juste titre que les premiers juges ont rejeté sa demande d'indemnisation formée à ce titre. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE

PÔLE 5 CHAMBRE 4

ARRÊT DU 22 MARS 2017

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 14/26013 (8 pages). Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 décembre 2014 -Tribunal de Commerce de BORDEAUX - RG n° 2014F0122.

 

APPELANTE :

SARL NET 31 BLAGNAC

Immatriculée au RCS de Toulouse sous le numéro XX, ayant son siège social [adresse], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, Représentée par Maître Marie-Catherine V. de la SCP GRV ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

 

INTIMÉE :

SAS AVIAPARTNER TOULOUSE

ayant son siège social [adresse], N° SIRET : YY, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, Représentée par Maître Frédérique E., avocat au barreau de PARIS, toque : K0065, Ayant pour avocat plaidant Maître Michel K., avocat au barreau de MARSEILLE

 

PARTIE INTERVENANTE :

Maître D., ès qualités de mandataire liquidateur de NET 31 BLAGNAC

ayant son siège social [adresse], Représenté par Maître Marie-Catherine V. de la SCP GRV ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 janvier 2017, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Irène LUC, Présidente et Madame MOUTHON-VIDILLES, Conseillère, chargée du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Irène LUC, Présidente de chambre, Madame Dominique MOUTHON VIDILLES, Conseillère, rédacteur, Monsieur François THOMAS, Conseiller, qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : M. Vincent BRÉANT

ARRÊT : - contradictoire, - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Madame Irène LUC, Présidente et par Monsieur Vincent BRÉANT, greffier auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

La société Net 31 Blagnac (ci après « la société Net 31 ») est une entreprise spécialisée dans le nettoyage des installations aéroportuaires et des aéronefs.

La société Aviapartner Services, devenue Aviapartner Toulouse (ci-après « la société Aviapartner ») est un prestataire de services aéroportuaires basé uniquement sur le site de l'aéroport de Toulouse Blagnac, qui propose à ses clients des services d'assistance en escale (gestion du fret, enregistrement et embarquement des passagers...).

Par contrat du 28 mars 2006, la société Aviapartner a sous-traité à la société Net 31, pour l'escale de Toulouse, le nettoyage des cabines des aéronefs appartenant aux compagnies aériennes ayant contracté avec elle. Ce contrat à effet au 1er avril 2006 a été conclu pour une durée d'un an renouvelable tacitement sans détermination de durée, sauf dénonciation par l'une ou l'autre des parties avec un préavis de deux mois signifié par lettre recommandée avec accusé de réception conformément à l'article 8.

Le 14 janvier 2014, la société Aviapartner a informé la société Net 31 qu'elle mettait fin au contrat à sa date d'échéance, soit le 31 mars 2014.

Le 30 juillet 2014, la société Aviapartner a lancé un appel d'offres pour le nettoyage des cabines des aéronefs sur l'ensemble de ses escales en France, excepté celles de Marseille et Lille, auquel la société Net 31 a postulé pour les escales de Toulouse et Bordeaux.

Le 2 octobre 2014, à la suite de divers échanges entre les deux sociétés concernant l'offre émise par la société Net 31, la société Aviapartner a informé cette dernière qu'elle n'était pas attributaire du marché pour les escales de Toulouse et de Bordeaux pour lesquelles elle avait soumissionné.

Autorisée par ordonnance du tribunal de commerce de Bordeaux du du 21 octobre 2014, la société Net 31 a assigné à bref délai, par exploit du 23 octobre 2014, la société Aviapartner Services sollicitant la restitution de commissions qu'elle estimait indûment perçues et une indemnisation au titre de la ruine de son fonds de commerce du fait de pratiques restrictives de concurrence.

Par jugement en date du 12 décembre 2014, le tribunal de commerce de Bordeaux a :

- débouté la société Net 31 de ses demandes d'annulation des dispositions de l'article 11 du contrat du 28 mars 2006 et en paiement de commissions par la société Aviapartner Services,

- jugé que la société Aviapartner n'avait pas abusé de sa position pour obtenir un avantage injustifié de la société Net 31,

- débouté la société Net 31 de sa demande de dommages et intérêts au titre de la perte de son fonds de commerce,

- débouté la société Net 31 de sa demande indemnitaire sur le fondement de l'article L. 442-6- I-5° du code de commerce,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire du présent jugement,

- condamné la société Net 31 à payer à la société Aviapartner Services la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Net 31 aux dépens.

Par déclaration du 20 décembre 2014, la société Net 31 a interjeté appel du jugement du tribunal de commerce de Bordeaux.

Par jugement du 5 mai 2015, la société Net 31 a été placée en liquidation judiciaire et Maître Jocelyne D. a été désignée en qualité de mandataire liquidateur, laquelle est intervenue en cause d'appel.

 

LA COUR,

Vu les dernières conclusions notifiées et déposées le 3 janvier 2017 par la société Net 31 et Maître D. ès-qualités, par lesquelles il est demandé à la cour de :

- recevoir la société Net 31 en son appel,

- donner acte à Maître D. de son intervention en qualité de mandataire judiciaire de la société Net 31,

- réformer en son entièreté le jugement rendu par le tribunal de commerce de Bordeaux le 12 décembre 2014,

vu les dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce,

vu l'état des dépendances économiques de la société Net 31 à l'égard de la société Aviapartner,

- constater que la société Aviapartner a obtenu de son partenaire commercial un avantage ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu et en tous les cas manifestement disproportionné,

- annuler les dispositions de l'article 11 du contrat du 28 mars 2006,

- s'entendre en conséquence condamner la société Aviapartner au paiement de la somme des commissions indues perçues, soit 98.772,07 euros,

- dire que la société Aviapartner a tenté d'obtenir sous la menace d'une rupture brutale des relations commerciales des avantages tarifaires qu'elle a elle-même qualifiés d'anormaux,

- constater que la société Aviapartner ne lui a pas ménagé un préavis suffisant,

- constater que par cette faute, la société Aviapartner a provoqué la ruine du fonds de commerce de la société Net 31,

- condamner la société Aviapartner au paiement de la somme de 500.000 euros à titre de dommages et intérêts, somme à parfaire, le cas échéant, à dire d'expert,

- condamner au paiement de la somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 ainsi qu'aux entiers dépens de la présente procédure ;

 

Vu les dernières conclusions notifiées et déposées le 29 décembre 2016 par la société Aviapartner Services devenue Aviapartner Toulouse, intimée, par lesquelles il est demandé à la cour de :

vu les dispositions des articles 9 et 1591 du code civil,

vu l'article L. 442-6-I du code de commerce,

- déclarer mal fondé l'appel interjeté par la société Net 31,

- confirmer le jugement du tribunal de commerce de Bordeaux,

- débouter la société Net 31 de l'intégralité de ses demandes fins et prétentions, en ce qu'elles sont infondées au fond et injustifiées quant au chiffrage,

- reconventionnellement la condamner au paiement d'une somme de 15.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- fixer cette somme au passif de la société Net 31,

- condamner la société Net 31 aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître E. en application de l'article 699 du code de procédure civile ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

Sur la rupture brutale des relations commerciales :

La société Net 31 soutient que la société Aviapartner ne lui a pas ménagé la possibilité de bénéficier d'un préavis, que la résiliation du contrat soit datée du 14 janvier 2014 ou, si l'on considère que la relation s'est poursuivie après cette date, du 2 octobre 2014 de sorte que la relation contractuelle a été rompue de manière brutale par la société Aviapartner. Elle affirme que la perte de la substance de son fonds de commerce est la conséquence de cette rupture brutale et évalue son préjudice à 500.000 euros correspondant à 50 % de son chiffre d'affaires réalisé sur l'exercice clos le 31 décembre 2013.

La société Aviapartner réplique que la lettre du 14 janvier 2014 constitue le point de départ du préavis. Elle ajoute que cette lettre ainsi que la connaissance par la société Net 31 dès janvier 2014 de son intention de recourir à un nouvel appel d'offre, manifestent sa volonté de ne plus poursuivre les relations contractuelles antérieures. Elle affirme que le préavis ayant couru dès janvier 2014, il a ainsi été de 11 mois (de janvier à décembre 2014), ce qui est raisonnable. Elle considère qu'au titre du préjudice subi du fait de la perte du fonds, la somme avancée par l'appelante est à la fois disproportionnée et dénuée de caractère sérieux.

[*]

L'article L. 442-6-I-5° du code de commerce dispose qu'engage sa responsabilité et s'oblige à réparer le préjudice causé, celui qui rompt brutalement une relation commerciale établie, sans préavis tenant compte de la durée de la relation commerciale.

En l'espèce, les parties s'accordent à reconnaître l'existence de relations commerciales établies à compter du 1er avril 2006, date du contrat de sous-traitance. En revanche, elles s'opposent sur leur durée ainsi que sur l'existence d'un préavis.

Il est constant que par lettre recommandée avec accusé de réception du 14 janvier 2014, la société Aviapartner a mis fin au contrat à effet au 31 mars 2014, date de son terme, soit avec un préavis de 2,5 mois. Il ressort des termes de cette lettre que c'est sans ambiguïté, que la société Aviapartner a notifié à la société Net 31, au moins deux mois à l'avance conformément aux dispositions de l'article 8 du contrat, sa décision de ne pas renouveler le contrat à son terme et de mettre ainsi fin aux relations commerciales qu'elles entretenaient depuis 2006, en respectant le préavis contractuel de non-renouvellement, peu important à cet égard les raisons exactes qui l'ont conduite à prendre cette décision, cette société étant libre de changer de partenaire commercial et de ne pas reconduire le contrat à son terme. C'est donc vainement que la société Net 31 soutient qu'elle aurait été dans une période d'incertitude juridique totale et qu'aucun préavis juridiquement qualifiable ne lui a été notifié.

Il s'en est suivi, à compter du 31 mars 2014, une période de relations précaires au cours de laquelle la société Aviapartner Services a organisé un appel d'offres, confirmant ainsi son intention de ne pas poursuivre les relations commerciales aux conditions antérieures, appel d'offres auquel a participé la société Net 31 de sorte que cette dernière ne peut utilement soutenir que la relation s'étant poursuivie après le 31 mars 2014, la société Aviapartner Services aurait renoncé à la rupture laquelle serait intervenue brutalement le 2 octobre 2014, date à laquelle elle a été informée qu'elle n'était pas attributaire du marché. Le caractère provisoire de ces relations de mars à octobre 2014, les fait nécessairement échapper à l'application de l'article L.442-6, I, 5° du code de commerce. La durée des relations commerciales établies est donc de 8 ans (28 mars 2006- 31 mars 2014), la lettre du 14 janvier 2014 constitue le point de départ du préavis et la durée du préavis réellement effectué au cours duquel les conditions contractuelles ont été maintenues, a donc été de 10 mois (14 janvier- octobre 2014), aucun élément n'établissant que la société Net 31 ait continué à intervenir postérieurement au rejet de son offre, soit d'octobre à décembre 2014, comme affirmé par la société Aviapartner.

Il résulte de l'article L. 442-6-I-5° du code de commerce que la brutalité de la rupture résulte de l'absence de préavis écrit ou de l'insuffisance de la durée de ce préavis au regard des relations commerciales antérieures. L'évaluation de la durée du préavis à accorder est fonction de toutes les circonstances de nature à influer son appréciation au moment de la notification de la rupture, notamment de l'ancienneté des relations, du volume d'affaires réalisé, du secteur concerné, de l'état de dépendance économique de la victime, des dépenses non récupérables engagées par elle et du temps nécessaire pour retrouver un partenaire.

La société Net 31 fait valoir son état de dépendance économique absolue lors de l'appel d'offres, la société Aviapartner Services étant son seul donneur d'ordres et se trouvant en situation de quasi-monopole sur la plupart des aéroports français pour ce qui concerne la réalisation de prestations de nettoyage d'aéronefs du fait du rachat de la société Map Handling. Elle affirme qu'elle était dans l'impossibilité de se tourner vers d'autres donneurs d'ordre lui permettant de faire fonctionner son entreprise dans des conditions comparables.

Mais, au moment de la rupture en janvier 2014, la société Net 31 avait plusieurs donneurs d'ordre (compagnies aériennes, bars, restaurants et boutiques) avec lesquels elle réalisait une grande partie de son chiffre d'affaires. En effet, comme le fait valoir à juste titre la société Aviapartner, il est établi que la société Net 31 a elle-même précisé dans sa réponse à l'appel d'offres, qu'elle était présente sur le marché industriel de nettoyage de bureaux pour plusieurs compagnies aériennes ainsi que pour des bars, restaurants et boutiques de luxe et que notamment, la compagnie D. Aviation lui faisait confiance pour effectuer le nettoyage de ses jets privés avant leurs livraisons et lors d'atterrissages occasionnels, ainsi que les sociétés Europ Airpost et Elior Blagnac. La société Net 31 ne peut sérieusement soutenir que ces quelques prestations de nettoyage sont absolument marginales dans son chiffre d'affaires dès lors qu'il ressort de son bilan comptable au 31 décembre 2013, qu'au moment de la rupture du contrat, sur un chiffre d'affaires global de 1.068.200 euros, le chiffre d'affaires dégagé avec la société Aviapartner Services était de l'ordre de 359.000 euros, soit moins de 40 % de son activité. Enfin, il apparaît que le rachat d'une partie des actifs de la société Map Handling par la société Aviapartner Services est intervenu en décembre 2014, soit bien postérieurement à la rupture des relations commerciales datant de janvier 2014, de sorte que c'est à tort que la société Net 31 affirme qu'elle était dans un état de dépendance absolue.

Au regard de l'ensemble de ces éléments et étant observé que la société Net 31 s'abstient de préciser le délai qui aurait dû lui être accordé, le préavis effectif de 10 mois dont a bénéficié la société Net 31, apparaît suffisant de sorte que la rupture intervenue n'est pas brutale. Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande d'indemnisation formée à ce titre.

 

Sur la menace d'une rupture brutale :

La société Net 31 s'estime également victime, dans le cadre de l'appel d'offre, d'une menace de rupture brutale en violation de l'article L. 442-6-I-4° du code de commerce, la société Aviapartner Services ayant exigé avec le concours actif de son concurrent, la société GSF qui a débauché une de ses salariés et a été finalement attributaire du marché, qu'elle revoit à la baisse les prix pratiqués pour finalement considérer que l'offre de prix qu'elle lui a faite manquait de cohérence et que la révision à la baisse manquait de réflexion.

Or, le grief de menace de rupture brutale visé à l'article L. 442-6-I-4° du code de commerce ne peut être invoqué que si les manœuvres dénoncées interviennent en cours de contrat et non, lorsque la rupture est déjà consommée, comme tel est le cas en l'espèce, le contrat ayant été résilié le 14 janvier 2014 à effet au 31 mars 2014 et l'appel d'offre datant de juillet 2014. Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande d'indemnisation sur ce fondement.

 

Sur le paiement des commissions :

La société Net 31 affirme que, comme les conditions tarifaires de son intervention étaient fixes, il n'existait aucune raison objective ni de cause juridique justifiant le paiement de la commission prévue à l'article 11 du contrat. Elle considère qu'il est manifeste que la société Aviapartner Services a obtenu un avantage qui ne correspond à aucun service commercial rendu. Elle rappelle que la loi prohibe la pratique de rétro-commissions, ce qui est le cas en l'espèce puisqu'aucune économie d'échelle n'est réalisée à partir d'un seuil de chiffre d'affaires. Elle estime qu'en l'absence de contrepartie à cette commission qui n'a aucune cause juridique, elle est fondée à se prévaloir des dispositions de l'article L. 442-6-I-1° du code de commerce. Elle ajoute que par cette clause, la société Aviapartner a créé un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties justifiant de ce fait son annulation. Elle sollicite à ce titre la somme de 98.772,07 euros qu'elle a versée depuis l'origine du contrat.

La société Aviapartner Services réplique que la relation contractuelle était équilibrée, les termes du contrat ayant été librement négociés et acceptés, qu'il existait une fixation de tarif en fonction des prestations réalisées et que si une profitabilité supérieure naissait de l'activité aéroportuaire, de son positionnement et de son savoir-faire au delà de 60.000 euros, il était naturel et commercialement admissible que le prestataire sous-traitant qui bénéficie de cette réussite, fasse bénéficier la société titulaire du marché, en l'occurrence son donneur d'ordre, d'une partie de cette profitabilité. Elle indique qu'il ne s'agit pas de commission mais d'une réduction de prix se traduisant par l'émission d'un avoir, soit d'un partage de bénéfices dans le cadre d'une relation contractuelle 'gagnant-gagnant. Elle ajoute qu'aucun élément ne démontrerait l'absence de négociation susceptible de caractériser un comportement abusif. Elle soutient en outre que le concept de déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties n'est apparu qu'à l'entrée en vigueur de la loi de modernisation de l'économie en août 2008, et n'est donc pas applicable au contrat en cause, conclu en 2006.

[*]

L'article L. 442-6-I-2° du code de commerce dans sa rédaction en vigueur avant le 6 août 2008 (devenu L. 442-6-I-1°) et applicable en la cause, dispose qu' : « Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait,... :...

2° D'obtenir ou de tenter d'obtenir d'un partenaire commercial un avantage quelconque ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu. Un tel avantage peut notamment consister en la participation, non justifiée par un intérêt commun et sans contrepartie proportionnée, au financement d'une opération d'animation commerciale, d'une acquisition ou d'un investissement, en particulier dans le cadre de la rénovation de magasins ou encore du rapprochement d'enseignes ou de centrales de référencement ou d'achat. »

L'article 10 du contrat de sous-traitance fixe les tarifs des prestations et les conditions de paiement et l'« Article 11-Commission » dispose que le prestataire (la société Net 31) s'engage à reverser annuellement une « commission » en fonction de son chiffre d'affaires effectué sur l'année, soit au-delà de 60.000 euros au 31 décembre, 5 % du chiffre d'affaires hors taxes généré.

Il en ressort que cette commission constitue un complément de rémunération, librement négocié entre les parties dès l'origine du contrat, dont les conditions d'attribution sont définies de manière objective. Partie du prix du contrat, elle est la contrepartie du chiffre d'affaires octroyé au sous-traitant au-delà d'un certain seuil, ce dont il résulte, contrairement à ce que soutient la société Net 31, qu'elle est causée de sorte qu'il n'y a pas lieu d'en prononcer l'annulation.

En outre, cette commission n'apparaît pas disproportionnée par rapport au montant du chiffre d'affaires qui en conditionne l'octroi. Elle ne contrevient donc pas aux dispositions de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce sus visé, dès lors que sa mise en œuvre aboutit à l'octroi d'avantages réciproques et proportionnés.

Enfin, le contrat contenant la clause litigieuse ayant été conclu le 28 mars 2006, la société Net 31 ne saurait exciper des dispositions de l'article 21 IV de la loi du 4 août 2008, dite LME, devenu le nouvel article L. 442-6-I-2° du code de commerce et prévoyant la responsabilité de la personne qui soumet ou tente de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans la mesure où il n'est applicable qu'aux contrats conclus à compter du 1er janvier 2009.

Il sera ajouté qu'au regard de l'ancien article L. 442-6-I-2° b du code de commerce, applicable en la cause, qui sanctionnait le fait pour une personne « d'abuser de la relation de dépendance dans laquelle il tient un partenaire ou de sa puissance d'achat ou de vente en le soumettant à des conditions commerciales ou obligations injustifiées.», la société Net 31 ne justifie, par la production d'aucun élément, ni que lors de la conclusion du contrat, elle ait été contrainte, sous quelque forme que ce soit, de souscrire le contrat comportant la clause litigieuse, ni qu'elle ait été placée dans une situation de dépendance économique, ni que les parties n'aient pas loyalement et en connaissance de cause convenu de leurs relations commerciales. C'est donc à juste titre que les premiers juges ont rejeté sa demande d'indemnisation formée à ce titre.

En définitive, le jugement entrepris sera confirmé en toutes ses dispositions.

La société net 31 succombant, les dépens d'appel et la somme supplémentaire de 5.000 euros qu'il y a lieu d'allouer à la société Aviapartner au titre de l'article 700 du code de procédure civile, seront fixés à son passif.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par arrêt contradictoire, publiquement par mise à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Et y ajoutant,

FIXE les dépens de l'appel au passif de la société Net 31 Blagnac,

AUTORISE Maître E., avocat, à recouvrer les dépens dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile,

FIXE la créance de la société Aviapartner Toulouse au titre de l'article 700 du code de procédure civile, au passif de la société Net 31 Blagnac, à la somme de 5.000 euros.

Le Greffier                La Présidente

Vincent BRÉANT    Irène LUC