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CA PARIS (pôle 2 ch. 5), 25 avril 2017

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 2 ch. 5), 25 avril 2017
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 2 ch. 5
Demande : 16/00980
Décision : 2017/135
Date : 25/04/2017
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 23/12/2015
Numéro de la décision : 135
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CERCLAB - DOCUMENT N° 6844

CA PARIS (pôle 2 ch. 5), 25 avril 2017 : RG n° 16/00980 ; arrêt n° 2017/135

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « Considérant que l'action engagée par Mme X. dérive indéniablement du contrat d'assurance dès lors que l'appelante soutient le caractère abusif de certaines de ses dispositions afin de pouvoir mobiliser la garantie invalidité totale ou partielle ; qu'elle est donc soumise à la prescription biennale de l'article L. 114-1 du code des assurances (qui ne peut être utilement soutenue par l'assureur) et cette prescription est exclusive de l'application du délai de prescription des articles 1304 ou 2224 du code civil ».

2/ « Considérant que le fait que la clause définissant la qualité de retraité soit parfaitement claire, précise et compréhensible lorsqu'elle énonce que les garanties prennent fin à la date de la retraite ou à la retraite anticipée de l'assuré, quelle qu'en soit sa cause est indifférent, le caractère ambigu d'une clause dont il est argué qu'elle serait abusive n'étant nullement une condition d'application des dispositions des articles L. 132-1 (devenu L. 212-1) et suivants du code de la consommation ;

Considérant qu'il ressort du premier article de la notice d'information de l'assurance (Qui peut être assuré) que les garanties souscrites par Mme X. (alors âgée de 52 ans) pouvaient l'être jusqu'à l'âge de 65 ans, seuls les assurés de plus de 65 ans n'étant éligibles qu'à la garantie décès et que cet âge constitue la date butoir des garanties invalidité et incapacité de travail et donc le terme conventionnel des obligations de l'assureur à ce titre ; Que l'article relatif aux retraités, contient une restriction substantielle de garantie dès lors qu'il écarte de leur bénéfice, les assurés qui voient liquider, en cours d'exécution du contrat, leurs droits aux assurances vieillesse, en application des dispositions relatives à l'inaptitude au travail ; que cette liquidation s'impose à l'assuré du fait de son état d'invalidité et donc de la réalisation de l'événement garanti ; qu'il s'ensuit que l'assureur est déchargé systématiquement de ses obligations à l'égard des adhérents en invalidité ayant atteint l'âge légal de mise à la retraite, alors qu'il continuera à percevoir, ainsi qu'il est expressément prévu, la prime convenue qui prend en compte la couverture des risques jusqu'au terme du prêt ou si cet âge est atteint avant ce terme, jusqu'au 65ème anniversaire de l'assuré ;

Qu'il s'évince de ce qui précède que l'assureur est déchargé de ses obligations qui sont la contrepartie du versement des primes alors qu'il aurait dû garantir le risque et que l'assuré toujours tenu au règlement des primes, ne bénéficie plus des indemnités qui lui étaient dues alors qu'il se trouve dans une situation de retraite imposée, ce qui caractérise le déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties visé à l'article L. 132-1 (devenu L. 212-1) du code de la consommation ; que dès lors, l'assureur ne peut pas opposer à Mme X. la limitation de garantie susmentionnée, celle-ci étant réputée non écrite, la garantie invalidité partielle ou totale ayant pour terme le 31 décembre qui suit le 65ème anniversaire de l'assurée (et non le terme du prêt) ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 2 CHAMBRE 5

ARRÊT DU 25 AVRIL 2017

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 16/00980. Arrêt n° 2017/135 (9 pages). Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 décembre 2015 - Tribunal de Grande Instance de Paris - R.G. n° 15/11776.

 

APPELANTE :

Madame X.

née le [date] à [ville], Représentée par Maître Alain F. de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044, Assistée de Maître Augustin D'O., avocat au barreau de PARIS, toque : G0508, substitué par Maître Adrien R., avocat au barreau de PARIS, toque : G0508

 

INTIMÉES :

SA SOCIÉTÉ GÉNÉRALE

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège, N° SIRET : XXX, Représentée et assistée de Maître Dominique F. de la SELARL D. F., avocat au barreau de PARIS, toque : K0139

SA GENERALI VIE

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège, N° SIRET : YYY, Représentée et assistée de Maître Marie-Laurence M., avocat au barreau de PARIS, toque : K0164

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 février 2017, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Monsieur Christian BYK, Conseiller, et Madame Patricia LEFEVRE, Conseillère, entendue en son rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Catherine LE FRANÇOIS, Présidente de chambre, Monsieur Christian BYK, Conseiller, Madame Patricia LEFEVRE, Conseillère.

Greffier, lors des débats : Madame Catherine BAJAZET

ARRÊT : - contradictoire - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile - signé par Madame Catherine LE FRANÇOIS, présidente et par Madame Catherine BAJAZET, greffier présent lors de la mise à disposition.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Selon offre préalable de prêt acceptée le 29 avril 2006, Mme X. et son époux empruntaient une somme de 183.526 euros auprès de la SOCIÉTÉ GENERALE. Mme X. a adhéré au contrat d'assurance collective souscrit par le prêteur auprès de la SA GENERALI VIE couvrant les risques décès, perte totale et irréversible d'autonomie et incapacité temporaire totale de travail. L'adhésion de Mme X. (à hauteur de 40 % du capital assuré) a été acceptée par l'assureur moyennant une surprime au titre de la garantie décès et l'exclusion de la garantie incapacité de travail et invalidité totale ou partielle des complications métaboliques, vasculaires et neurosensorielles résultant du diabète dont elle souffre.

Le 19 mars 2014, le régime social des indépendants dont dépend Mme X. a reconnu son état d'invalidité totale et définitive, lui notifiant l'attribution d'une pension d'invalidité à effet du 1er février 2014. Ses droits à la retraite ont été liquidés au titre de l'inaptitude au travail, à effet du 1er septembre 2015.

Ayant en vain tenté de mobiliser la garantie invalidité souscrite auprès de la SA GENERALI VIE et se voyant opposer les dispositions conventionnelles prévoyant la cessation de cette garantie dès la prise d'effet de la retraite, Mme X. a, par acte du 7 août 2015, fait assigner la SA GENERALI VIE et la SOCIÉTÉ GENERALE devant le tribunal de grande instance de Paris afin de voir constater le caractère abusif de la clause de la police qui lui est opposée et la violation par le banquier, souscripteur du contrat d'assurance, de son devoir de conseil et de mise en garde. Par jugement en date du 10 décembre 2015, le tribunal a rejeté les fins de non-recevoir soulevées par la SA GENERALI VIE tirée du défaut d'intérêt à agir et de la prescription et les demandes de Mme X. formées à l'encontre de la SA GENERALI VIE. Il a condamné la SOCIÉTÉ GENERALE à lui payer la somme de 4.500 euros à titre de dommages et intérêts et à une indemnité de procédure de 2.500 euros, Mme X. devant supporter la charge des dépens exposés par la SA GENERALI VIE et la SOCIÉTÉ GENERALE ceux exposés par Mme X.

Par déclaration d'appel du 23 décembre 2015, Mme X. a interjeté appel. Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 1er mars 2016, elle demande à la cour, à titre principal, d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a considéré que la clause litigieuse n'était pas abusive et constatant cet abus, de juger que la SA GENERALI VIE doit maintenir ses prestations jusqu'à l'échéance du prêt immobilier (en 2022) et ce, sous astreinte, sollicitant, en outre, sa condamnation au paiement d'une indemnité de procédure de 10.000 euros et aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile. A titre subsidiaire, elle soutient la confirmation du jugement déféré en ce qu'il retient la responsabilité de la SOCIÉTÉ GENERALE et son infirmation sur l'indemnisation allouée, sollicitant sa condamnation au paiement de la somme de 9.528,57 euros correspondant aux intérêts du prêt du 7 septembre 2015 au 7 décembre 2022, outre une indemnité de procédure de 10.000 euros et les entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 25 avril 2016, la SA GENERALI VIE soutient l'infirmation du jugement en ce qu'il a écarté la prescription, demandant à la cour de constater que les demandes de Mme X. sont prescrites en application des articles 1304 et 2224 du code civil et de confirmer la décision du tribunal sur le fond du dossier. A titre subsidiaire, elle sollicite la commission d'un expert, afin de déterminer notamment si l'état de santé de Mme X. répond à la définition contractuelle de l'invalidité. Enfin, elle réclame la condamnation de l'appelante au paiement d'une somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 26 avril 2016, la SOCIÉTÉ GENERALE demande à la cour de constater que Mme X. est irrecevable et à tout le moins mal fondée en ses demandes et, en conséquence, de l'en débouter et d'infirmer le jugement en ce qu'il est entré en voie de condamnation à son égard, sollicitant la condamnation de l'appelante au paiement de la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 30 janvier 2017.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE, LA COUR :

Considérant que la SA GENERALI VIE ne conteste pas la décision déférée en ce qu'elle a retenu que, faute de rappel des dispositions légales, elle ne pouvait opposer à son assurée la prescription biennale de l'article L. 114-1 du code des assurances, mais elle prétend que le juge n'a pas répondu à son moyen tiré de l'application de la prescription de droit commun des articles 1304 (nullité d'un contrat) et 2224 (action personnelle mobilière) du code civil à une action tendant à voir déclarer abusive une clause d'une police d'assurance ; qu'elle affirme que cette prescription était expirée au jour de l'introduction de l'instance, puisque ayant couru à compter de la signature des contrats ; que Mme X. objecte que la prescription biennale lui est inopposable et que la prescription de droit commun n'a couru qu'à compter du refus de l'assureur de prendre en charge le sinistre ;

Considérant que l'action engagée par Mme X. dérive indéniablement du contrat d'assurance dès lors que l'appelante soutient le caractère abusif de certaines de ses dispositions afin de pouvoir mobiliser la garantie invalidité totale ou partielle ; qu'elle est donc soumise à la prescription biennale de l'article L. 114-1 du code des assurances (qui ne peut être utilement soutenue par l'assureur) et cette prescription est exclusive de l'application du délai de prescription des articles 1304 ou 2224 du code civil ;

Que l'action de Mme X. à l'encontre la SA GENERALI VIE est, ainsi que l'a retenu le tribunal, recevable :

Considérant au fond, que rappelant les dispositions du code de la consommation relatives aux clauses abusives, l'avis n° 06-01 rendu par la commission ainsi que les termes d'un arrêt de la cour de cassation en date du 22 mai 2008, Mme X. affirme le caractère abusif de la clause rappelant qu'elle n'a été mise à la retraite qu'en raison de son inaptitude au travail due à une invalidité totale et définitive, la clause conventionnelle vidant de sa substance, la garantie invalidité ; qu'elle ajoute que le fait qu'une clause soit claire et compréhensible est indifférent ; que la SA GENERALI VIE réplique que le caractère abusif ou non d'une clause s'apprécie en fonction du déséquilibre significatif qu'elle crée ou non entre les droits et obligations des parties et affirme que l'article L. 133-2 notamment visé par l'appelante nécessite pour recevoir application que la clause soit ambiguë, ce que retient également l'arrêt qu'elle produit ; qu'elle évoque également le fait que Mme X. a atteint l'âge légal de la retraite et à titre subsidiaire, elle prétend qu'une mesure d'instruction est nécessaire, eu égard à la définition conventionnelle de l'invalidité totale ou partielle ;

Considérant qu'il ressort de la notification adressée à Mme X. par le RSI que sa mise à la retraite est intervenue « au titre de l'inaptitude au travail » à la date où elle avait atteint l'âge de 61 ans et sept mois, soit l'âge prévu à l'article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale auquel renvoie l'arrêté du 4 juillet 2014 portant approbation des règlements des régimes d'assurances invalidité décès des travailleurs non-salariés ; que dans son article 12, ce règlement impose la liquidation du régime de retraite d'un affilié inapte au travail, ayant atteint cet âge légal de départ à la retraite ;

Considérant que la notice d'information commune aux contrats 7027 (souscrit par l'appelante) et 7168 (proposé aux adhérents de plus de 65 ans) précise que le risque invalidité permanente totale ou partielle est garanti et énonce :

- sous le titre « garanties et cotisations » :

« Quels sont les risques que peuvent garantir les contrats :

(...) L'invalidité permanente totale ou partielle : taux d'invalidité supérieure ou égale à 33 %, le taux étant déterminé par voie d'expertise médicale à l'aide des taux d'incapacité permanente fonctionnelle et professionnelle figurant dans le tableau indiqué dans le contenu des garanties.

(...)

Quels sont les risques effectivement garantis :

a) prêts habituels (hors gros travaux) (...)

b) prêts gros capitaux (...)

c) retraités ; au sens du contrat 7027 et 7168. La retraite est la situation d'un ancien salarié ou professionnel de plus de 55 ans recevant sa pension de retraite après liquidation de celle-ci à l'âge normal de départ en retraite dans sa profession ou par anticipation quelle qu'en soit sa nature (au titre de l'inaptitude au travail par exemple) et qui n'exerce pas d'activité procurant gain ou profit. Pour les personnes déjà assurées, la survenance de la retraite entraîne la cessation des garanties et des prestations incapacité et invalidité et perte totale d'autonomie, seul le risque décès demeure garanti et les cotisations qu'il paye restent inchangées » ;

- sous le titre, « quand les garanties et les prestations cessent-elles » :

« Pour tous les risques :

à la date d'expiration normale ou anticipée du prêt (...)

Pour les risques perte totale et irréversible d'autonomie, invalidité permanente totale, invalidité permanente partielle et incapacité de travail :

dès la prise d'effet de la retraite.

Sinon au 31 décembre qui suit le 65ème anniversaire de l'assuré » ;

Considérant que le fait que la clause définissant la qualité de retraité soit parfaitement claire, précise et compréhensible lorsqu'elle énonce que les garanties prennent fin à la date de la retraite ou à la retraite anticipée de l'assuré, quelle qu'en soit sa cause est indifférent, le caractère ambigu d'une clause dont il est argué qu'elle serait abusive n'étant nullement une condition d'application des dispositions des articles L. 132-1 (devenu L. 212-1) et suivants du code de la consommation ;

Considérant qu'il ressort du premier article de la notice d'information de l'assurance (Qui peut être assuré) que les garanties souscrites par Mme X. (alors âgée de 52 ans) pouvaient l'être jusqu'à l'âge de 65 ans, seuls les assurés de plus de 65 ans n'étant éligibles qu'à la garantie décès et que cet âge constitue la date butoir des garanties invalidité et incapacité de travail et donc le terme conventionnel des obligations de l'assureur à ce titre ;

Que l'article relatif aux retraités, contient une restriction substantielle de garantie dès lors qu'il écarte de leur bénéfice, les assurés qui voient liquider, en cours d'exécution du contrat, leurs droits aux assurances vieillesse, en application des dispositions relatives à l'inaptitude au travail ; que cette liquidation s'impose à l'assuré du fait de son état d'invalidité et donc de la réalisation de l'événement garanti ; qu'il s'ensuit que l'assureur est déchargé systématiquement de ses obligations à l'égard des adhérents en invalidité ayant atteint l'âge légal de mise à la retraite, alors qu'il continuera à percevoir, ainsi qu'il est expressément prévu, la prime convenue qui prend en compte la couverture des risques jusqu'au terme du prêt ou si cet âge est atteint avant ce terme, jusqu'au 65ème anniversaire de l'assuré ;

Qu'il s'évince de ce qui précède que l'assureur est déchargé de ses obligations qui sont la contrepartie du versement des primes alors qu'il aurait dû garantir le risque et que l'assuré toujours tenu au règlement des primes, ne bénéficie plus des indemnités qui lui étaient dues alors qu'il se trouve dans une situation de retraite imposée, ce qui caractérise le déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties visé à l'article L. 132-1 (devenu L. 212-1) du code de la consommation ; que dès lors, l'assureur ne peut pas opposer à Mme X. la limitation de garantie susmentionnée, celle-ci étant réputée non écrite, la garantie invalidité partielle ou totale ayant pour terme le 31 décembre qui suit le 65ème anniversaire de l'assurée (et non le terme du prêt) ;

Considérant qu'en revanche, que Mme X. n'apporte aux débats pour justifier de son invalidité totale et définitive que les décisions de son régime social ; que le contrat, qui fait la loi des parties, prévoit que le degré d'invalidité qui détermine le droit aux prestations, est calculé en fonction du taux d'incapacité fonctionnelle et du taux d'incapacité professionnelle, fixés à dire d'expert, l'indemnisation étant totale si le taux combiné selon un tableau figurant au contrat, est supérieur à 66 % et partielle s'il est compris entre 33 et 66 %, aucune indemnisation n'étant due pour un taux inférieur à 33 % ; que dès lors, une expertise s'impose et ce d'autant plus, que la cause de l'invalidité influe également sur la possibilité pour Mme X. de mobiliser cette garantie, eu égard à l'exclusion conventionnelle des complications métaboliques, vasculaires et neurosensorielles résultant du diabète dont elle souffre ; que la décision déférée sera infirmée en ce qu'elle déboute Mme X. de ses demandes et l'expertise sollicitée ordonnée aux frais avancés de l'assurée sur laquelle repose la charge de la preuve de la réunion des conditions de la garantie dont elle réclame le bénéfice ;

Considérant que la SOCIÉTÉ GENERALE a interjeté appel incident, soutenant la prescription de l'action engagée à son encontre, au visa de l'article L. 110-4 du code de la consommation (en réalité de commerce) dont elle rappelle les termes, disant que le préjudice constitué par la perte d'une chance de ne pas contracter se manifeste dès la conclusion du contrat, en déduisant une prescription acquise au 15 avril 2011 et au fond, prétendant avoir parfaitement rempli son devoir d'information en remettant les documents contractuels, la notice étant parfaitement claire et explicite quant aux causes de cessation des garanties et relevant que la perte de chance alléguée n'est pas démontrée ; que Mme X. maintient que la banque, souscriptrice du contrat d'assurance, ne l'a pas correctement informé lors de son adhésion ;

Considérant que l'article L.110-4 du code de commerce énonce que les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants et entre commerçant et non-commerçant se prescrivent par dix ans (délai passé à cinq ans, en application de la loi du 17 juin 2008), si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes ;

Que, dès lors, qu'elle recherche la responsabilité d'une société commerciale, la SOCIÉTÉ GENERALE, l'action de Mme X. à l'encontre de cette société est soumise à cette prescription qui court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance ;

Que faisant grief à l'établissement bancaire par l'intermédiaire duquel elle a adhéré à la police de groupe, de ne pas l'avoir éclairée sur l'adéquation des risques couverts à sa situation personnelle Mme X. recherche certes l'indemnisation du dommage résultant de la perte d'une chance de souscrire des garanties mieux adaptées mais, ce n'est qu'à la date où l'assureur lui a notifié son refus de garantie que son préjudice s'est révélé, soit au plutôt au 2 septembre 2014 ; que dès lors, son action engagée, le 7 août 2015, est recevable ;

Mais considérant que Mme X. affirme que mieux informée, elle aurait contracté avec un assureur lui offrant une garantie invalidité jusqu'au terme du prêt, sans faire la démonstration non seulement de l'offre, sur le marché de l'assurance, d'une police conforme à ses souhaits et d'une chance réelle d'y souscrire malgré son état de santé mais également de sa capacité financière à en supporter le coût ; que dès lors, son préjudice demeure hypothétique, la décision déférée devant être infirmée et Mme X. déboutée de ses demandes à l'encontre de la SOCIÉTÉ GENERALE tant en principal qu'au titre des frais irrépétibles ;

Considérant qu'en équité, Mme X. sera dispensée de rembourser les frais irrépétibles exposés par la SOCIÉTÉ GENERALE tant devant le tribunal que devant la cour ;

Considérant que Mme X. et la SA GENERALI VIE qui succombent chacune pour partie seront condamnées, par moitié, aux dépens de première instance et aux dépens d'appel d'ores et déjà exposés ; que les dépens à venir seront réservés comme le seront les frais exposés par l'appelante et la SA GENERALI VIE pour assurer leur défense ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant en dernier ressort, contradictoirement et publiquement par mise à disposition de la décision au greffe,

Confirme le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris, le 10 décembre 2015 en ce qu'il a rejeté les fins de non-recevoir soulevées par la SA GENERALI VIE tirée du défaut d'intérêt à agir et de la prescription et l'infirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau et y ajoutant :

Déclare abusives les dispositions de la notice d'assurance du contrat 7027 souscrit par la SOCIÉTÉ GENERALE auprès de la SA GENERALI VIE et auquel a adhéré Mme X. - qui sous le titre « quels sont les risques effectivement garantis » ont pour effet de priver l'adhérent notamment de la garantie invalidité permanente totale ou partielle en cas de liquidation de sa retraite, par anticipation, au titre de l'inaptitude au travail ;

Pour le surplus des prétentions de Mme X. à l'encontre de la SA GENERALI VIE, ordonne une mesure d'expertise et commet pour y procéder :

Monsieur le Docteur A.

expert près la cour d'appel de Paris

demeurant [...]

Tél : [...].

Fax : [...].

Email : [...]

Avec pour mission :

- convoquer les parties par lettre recommandée avec demande d'avis de réception et leur conseil,

- se faire remettre par Mme X. l'ensemble des documents médicaux nécessaires à l'accomplissement de la mission ou se les faire communiquer mais dans le respect du secret médical et avec l'accord préalable de la patiente ;

- préciser les pathologies dont souffrait Mme X. à la date de son placement en invalidité par le RSI à effet du 1er février 2014 ;

- dire si elle était à la suite d'une maladie (dont la nature sera précisée et analysée au regard de l'exclusion des complications métaboliques, vasculaires et neurosensorielles résultant du diabète) ou d'un accident, dans un état d'invalidité totale partielle ou totale au sens du contrat, c'est à dire inapte à exercer toute activité procurant gain ou profit ; déterminer la date de reconnaissance et le départ de l'invalidité ainsi que son taux, dans le respect des dispositions conventionnelles combinant incapacité fonctionnelle et incapacité professionnelle ;

Dit que l'expert adressera un pré-rapport aux conseils des parties qui, dans les quatre semaines de la réception, lui feront connaître leurs observations auxquelles il devra répondre dans son rapport définitif ;

Dit que l'expert devra déposer son rapport au greffe de la cour dans les quatre mois de l'avis qui lui sera donné du versement de la consignation par le greffe, sauf prorogation dûment sollicitée auprès de Mme Patricia LEFEVRE magistrat chargé du contrôle des opérations d'expertise, et en adresser une copie aux conseils des parties ;

Fixe à 800 euros le montant de la somme à consigner par Mme X. avant le 1er juin 2017 à la régie de la cour d'appel et dit qu'à défaut de consignation dans le délai ci-dessus mentionné, il sera fait application des dispositions de l'article 271 du code de procédure civile ;

Désigne Mme Patricia LEFÈVRE conseiller et, en cas d'empêchement, l'un des membres de la chambre 2-5 pour contrôler l'expertise ;

Dit que l'affaire sera rappelée à la conférence de mise en état du 26 juin 2017 à 13 heures pour vérifier le versement de la consignation ;

Déclare Mme X. recevable à agir à l'encontre de la SOCIÉTÉ GENERALE ;

La déboute de ses demandes à l'encontre de la SOCIÉTÉ GENERALE ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la SOCIÉTÉ GENERALE ;

Fait masse d'une part des dépens de première instance et d'autre part des dépens d'appel d'ores et déjà exposés et dit qu'ils seront supportés par moitié par Mme X. et la SA GENERALI VIE et dit qu'ils qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Dit que les dépens à venir sont réservés comme le sont les frais irrépétibles exposés par l'appelante et la SA GENERALI VIE pour assurer leur défense.

LE GREFFIER                    LA PRÉSIDENTE