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CA PARIS (pôle 5 ch. 6), 12 mai 2017

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 5 ch. 6), 12 mai 2017
Pays : UE
Juridiction : Paris (CA), Pôle 5 ch. 6
Demande : 15/05493
Date : 12/05/2017
Nature de la décision : Avant dire droit
Mode de publication : Jurica
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CERCLAB - DOCUMENT N° 6877

CA PARIS (pôle 5 ch. 6), 12 mai 2017 : RG n° 15/05493 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Considérant en conséquence qu'il y a lieu de révoquer l'ordonnance de clôture, de renvoyer l'affaire à la mise en état en invitant les parties à conclure sur le caractère abusif ou non de la clause monnaie de compte au regard des dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation, devenu L. 212-1 du même code en vertu de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 5 CHAMBRE 6

ARRÊT DU 12 MAI 2017

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 15/05493 (5 pages). Décision déférée à la cour : jugement du 10 février 2015 - tribunal de grande instance de PARIS – R.G. n° 13/03943.

 

APPELANTS :

Monsieur X.

né le [date] à [ville], Représenté et ayant pour avocat plaidant Maître Franck F., avocat au barreau de PARIS, toque : G0750

Madame Y.

née le [date] à [ville], Représentée et ayant pour avocat plaidant Maître Franck F., avocat au barreau de PARIS, toque : G0750

 

INTIMÉES :

SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

agissant poursuites et diligences de son Président du Conseil d'Administration en exercice et/ou tous représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, RCS PARIS n° XXX, Représentée par Maître François T., avocat au barreau de PARIS, toque : J125, Ayant pour avocat plaidant Maître Philippe M., avocat au barreau de PARIS, toque : J002

SELARL P. C. C., Notaires associés

Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, Représentée et ayant pour avocat plaidant Maître Hervé-Bernard K. de la SCP K., avocat au barreau de PARIS, toque : P0090

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 6 février 2017, en audience publique, devant la cour composée de : Madame Françoise CHANDELON, présidente de chambre, Madame Marie-Ange SENTUCQ, conseillère, Madame Muriel GONAND, conseillère, qui en ont délibéré. Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions de l'article 785 du code de procédure civile.

GREFFIÈRE, lors des débats : Madame Corinne de SAINTE MARÉVILLE

ARRÊT : - Contradictoire - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Madame Françoise CHANDELON, présidente et par Madame Josélita COQUIN, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu le jugement rendu le 10 février 2015 par le tribunal de grande instance de Paris qui a débouté Monsieur X. et Madame Y. de l'intégralité de leurs demandes et les a condamnés aux dépens augmentés de la somme de 1.000 euros au profit de BNP Paribas Personal Finance et de celle de 1.000 euros au profit de la Selarl P.-C.-C., venant aux droits de la SCP P.-G.-T., au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu l'appel interjeté par Monsieur X. et Madame Y. à l'encontre de ce jugement ;

Vu les conclusions signifiées le 2 juin 2015 par Monsieur X. et Madame Y. qui demandent à la cour vu les articles 1108 et suivants du code civil, vu les articles 1131 et suivants du code civil, vu l'article L. 122-2 du code monétaire et financier, vu l'article 1382 du code civil, d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions et statuant à nouveau, de dire et juger qu'ils ont été victimes de tromperie de la part de la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE et que leur consentement a été vicié, que le contrat de prêt signé le 25 mai 2009 est nul et de nul effet en application des articles 1108 et suivants du code civil, en conséquence, d'ordonner qu'ils rembourseront en euros le seul capital versé à l'occasion de la conclusion du contrat de prêt, déduction étant faite (par compensation) de l'intégralité des sommes qu'ils auront versées à la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE au jour de cette compensation,

à titre subsidiaire, de dire et juger que la clause d'indexation en Francs Suisses figurant au contrat de prêt signé le 25 mai 2009 est contraire à l'article L. 122-2 du code monétaire et financier et est illicite, de prononcer la nullité pure et simple de cette clause d'indexation, de dire et juger que l'annulation de cette clause qui est un élément substantiel du contrat de prêt signé le 25 mai 2009, entraîne de facto la nullité dudit contrat de prêt du 25 mai 2009, à titre plus subsidiaire encore, de leur donner acte qu'ils demandent la conversion du prêt litigieux en un prêt en euros, de dire et juger que, dans le délai d'un mois à compter de la délivrance de la présente assignation, la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE établira un nouveau contrat de prêt aux conditions suivantes :

- Montant du prêt : 134.700 Euros correspondant au montant initial du prêt ayant servi au paiement du prix d'acquisition des deux Lots de Copropriété dépendant de la [...].

- Taux d'intérêt annuel : au taux actuel du marché compte tenu de la baisse actuelle des taux d'intérêt.

- Durée du prêt : 25 ans.

- Montant des échéances : à calculer en fonction du taux d'intérêt qui sera retenu.

- Etablissement d'un nouveau tableau d'amortissement qui tiendra compte de tous les versements qu'ils ont effectués depuis le 10 juin 2009 ;

à titre infiniment subsidiaire, de dire et juger que la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a failli à son obligation de conseil et d'information et a engagé sa responsabilité, de condamner en conséquence la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sur le fondement de l'article 1382 du code civil à leur verser la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi, de dire et juger que la SCP P., G. et T., notaires associés à [ville T.], a failli à son obligation de conseil et a engagé sa responsabilité, de condamner en conséquence ladite SCP notariale P., G. et T. à leur verser la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,

dans tous les cas, de condamner la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE et la SCP notariale P., G. et T., au paiement de la somme de 15.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

 

Vu les conclusions signifiées le 30 juillet 2015 par la société BNP Paribas Personal Finance qui demande à la cour, vu les articles L. 112-2 du Code monétaire et financier, les articles 1108 et suivants du Code civil, les articles 1131 et suivants du Code civil, l'article 1382 du Code civil, de déclarer mal fondé l'appel interjeté par Monsieur X. et Madame Y., de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et de condamner Monsieur X. et Madame Y. au paiement de la somme de 10.000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

Vu les conclusions signifiées le 2 juillet 2015 par la Selarl P.-C.-C. (anciennement SCP P.-G.-T.) qui demande à la cour, vu les dispositions de l'article 1382 du Code Civil, de dire et juger M. X. et Mme Y. mal fondés en toutes leurs demandes, fins et conclusions à son encontre, de confirmer, en conséquence, le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. X. et Mme Y. de leur action en responsabilité à son encontre et les a condamnés au paiement d'une somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, y ajoutant, de condamner M. X. et Mme Y. au paiement d'une somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés devant la Cour et ce par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de les condamner en tous les dépens de première instance et d'appel ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

Considérant que Monsieur X. et Madame Y. ont, au cours de l'année 2009, fait procéder à une étude de leur situation fiscale et patrimoniale en ayant recours aux services de la société Lesesame Capital, à la suite de laquelle ils ont décidé de procéder à une opération de défiscalisation se matérialisant par l'acquisition d'un appartement à usage locatif, dans la [...] ; qu'ils ont financé cette acquisition d'un montant de 134.700 euros en souscrivant un prêt Helvet Immo ; que l'offre de prêt leur a été adressée le 26 mars 2009 ; qu'ils l'ont acceptée le 15 avril 2009 ;

Considérant que l'office notarial P.-G.-T., aux droits duquel vient la Selarl P.-C.-C., notaire à [ville T.], a reçu, le 25 mai 2009, l'acte de vente du bien immobilier, et l'acte de prêt ;

Considérant qu'invoquant le bouleversement de l'équilibre économique du contrat de prêt consécutif à l'augmentation significative du franc suisse, ce qui les conduisait à régler des sommes nettement plus importantes que celles initialement fixées au contrat, et après avoir vainement recherché une solution amiable par l'intermédiaire de leur conseil, le 21 février 2012, Monsieur X. et Madame Y. ont fait assigner la société BNP Paribas Personal Finance et la SCP de notaire P.-G.-T. devant le tribunal de grande instance de Paris qui a rendu le jugement déféré et les a déboutés de toutes leurs demandes ;

Considérant que Monsieur X. et Madame Y. réitèrent devant la cour les demandes formées devant le tribunal en augmentant le montant des dommages-intérêts réclamés ;

Considérant que dans deux arrêts rendus le 29 mars 2017 (16-13050 et 15-27231), la première chambre civile de la cour de cassation, examinant des pourvois relatifs à des affaires où était en cause la même formule de prêt consenti par le même établissement de crédit, a

- rappelé que la Cour de justice des Communautés européennes a dit pour droit que le juge national est tenu d'examiner d'office le caractère abusif d'une clause contractuelle dès qu'il dispose des éléments de droit et de fait nécessaires à cet effet et que, lorsqu'il considère une telle clause comme étant abusive, il ne l'applique pas, sauf si le consommateur s'y oppose (CJCE arrêt du 4 juin 2009Pannon C-243/08) ;

- retenu qu'il résultait des éléments de fait et de droit débattus devant la cour, que selon le contrat litigieux,

* les mensualités étaient susceptibles d'augmenter, sans plafond, lors des cinq dernières années (pourvoi 16-13050)

* toute dépréciation de l'euro par rapport au franc suisse avait pour conséquence d'augmenter le montant du capital restant dû et, ainsi, la durée d'amortissement du prêt (pourvoi 15-27231)

de sorte qu'il lui incombait de rechercher d'office, notamment si le risque de change ne pesait pas exclusivement sur l'emprunteur et si, en conséquence, la clause litigieuse n'avait pas pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat au détriment du consommateur ;

- cassé les arrêts pour violation de la législation sur les clauses abusives ;

Considérant en conséquence qu'il y a lieu de révoquer l'ordonnance de clôture, de renvoyer l'affaire à la mise en état en invitant les parties à conclure sur le caractère abusif ou non de la clause monnaie de compte au regard des dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation, devenu L. 212-1 du même code en vertu de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Révoque l'ordonnance de clôture,

Renvoie l'affaire à la mise en état du 19 septembre 2017 à 13h30,

Invite les parties à conclure sur le caractère abusif ou non de la clause monnaie de compte au regard des dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation, devenu L. 212-1 du même code en vertu de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016,

Dit que l'ordonnance de clôture pourra intervenir le 19 septembre 2017 et que l'audience des plaidoiries est fixée au 9 octobre 2017 à 09 h 00.

LE GREFFIER                    LE PRÉSIDENT