CASS. CIV. 1re, 3 juin 2015
CERCLAB - DOCUMENT N° 6923
CASS. CIV. 1re, 3 juin 2015 : pourvoi n° 14-15655 ; arrêt n° 606
Publication : Legifrance
Extrait : « Vu les articles 1134, 1147 et 1184 du code civil ; […] si le contrat de prêt d’une somme d’argent peut prévoir que la défaillance de l’emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut, sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d’une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR DE CASSATION
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 3 JUIN 2015
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
N° de pourvoi : 14-15655. Arrêt n° 606.
DEMANDEUR à la cassation : Monsieur X.
DÉFENDEUR à la cassation : Société Laser Cofinoga
Mme Batut, président. Mme Dreifuss-Netter, conseiller rapporteur. M. Ingall-Montagnier (premier avocat général), avocat général. SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Rousseau et Tapie, avocat(s).
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Vu les articles 1134, 1147 et 1184 du code civil ;
CHAPEAU (énoncé du principe juridique en cause) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que, si le contrat de prêt d’une somme d’argent peut prévoir que la défaillance de l’emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut, sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d’une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle ;
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que la société Laser Cofinoga a consenti, le 23 juillet 2009, à M. X., un prêt personnel remboursable par mensualités ; que celui-ci ayant cessé ses paiements à partir du mois de juin 2010, la société s’est prévalue de la déchéance du terme par lettre recommandée avec avis de réception du 16 janvier 2011, puis l’a assigné en remboursement ;
RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que, pour accueillir la demande, l’arrêt énonce qu’il ne résulte pas des stipulations contractuelles que le prêteur soit tenu de mettre en demeure l’emprunteur préalablement au constat de la déchéance du terme ;
CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Qu’en statuant ainsi, en l’absence de stipulation expresse dispensant le créancier de mise en demeure, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 13 février 2014, entre les parties, par la cour d’appel de Pau ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Bordeaux ;
Condamne la société Laser Cofinoga aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Laser Cofinoga ; la condamne à payer la somme de 1.500 euros à M. X. ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois juin deux mille quinze.
ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils pour M. X.
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Il est reproché à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir constaté la défaillance de M. X. dans le remboursement des échéances du prêt, dit et jugé que la société Laser Cofinoga a pu valablement prononcer la déchéance du terme le 16 janvier 2011 et d’avoir condamné, en conséquence, M. X. à lui payer la somme de 14.546,57 euros augmentée des intérêts au taux conventionnel de 8,72 % à compter du 24 mars 2011, outre la somme de 500 € au titre de l’indemnité conventionnelle ;
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Aux motifs que, au fond, le contrat stipule ceci : « article 5-3 : en cas de défaillance de votre part, dans les remboursements, le prêteur pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu’à la date de règlement effectif les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre le prêteur pourra vous demander une indemnité égale à 8 % du capital restant dû ; article 6-2 : la défaillance prévue à l’article 5-3 ci-dessus sera constituée par le non-paiement à bonne date d’une échéance ; Résiliation : le présent contrat pourra être résilié au profit du prêteur en cas de défaillance ci-dessus définie ce qui entraîne l’application des dispositions visées aux articles 5-3 à 5-7 » ; qu’il ne résulte donc pas des stipulations contractuelles que le prêteur soit tenu de mettre en demeure l’emprunteur préalablement au constat de la déchéance du terme, mais qu’il a la faculté d’exiger le paiement intégral des sommes dues en cas de défaillance de l’emprunteur, laquelle est caractérisée par le non-paiement d’une échéance et non pas par l’inexécution d’une mise en demeure ; qu’aucune disposition légale, même celles applicables au crédit à la consommation, auxquelles il n’est plus prétendu que la présente offre serait soumise, n’impose la délivrance d’une vaine mise en demeure avant le constat de la déchéance du terme ; que l’examen de l’historique du contrat révèle que les impayés se sont poursuivis de juin 2010 à janvier 2011 ; que se prévaloir par lettre recommandée avec avis de réception du 18 janvier 2011 de la déchéance du terme afin de saisir le tribunal de grande instance par assignation délivrée en juin 2011 ne révèle nul abus de la part du créancier ; que dans ces conditions, le jugement sera infirmé sur ce point et la société Laser Cofinoga déclarée fondée à requérir le paiement de l’intégralité des sommes dues ; qu’il s’infère des pièces communiquées par la société Laser Cofinoga et notamment de l’offre préalable, du tableau d’amortissement, de la lettre recommandée avec avis de réception notifiée le 18 janvier 2011 et enfin de l’historique du compte, qui confirme l’ensemble des paiements invoqués par M. X. dans sa pièce n° 8, que la société Laser Cofinoga rapporte la preuve de l’obligation dont elle se prévaut à l’encontre de M. X. et de sa créance ; qu’il convient de relever que le mode de calcul de la créance retenue par l’établissement financier dans ses ultimes écritures est favorable à l’emprunteur ; qu’en effet le créancier a imputé l’intégralité des acomptes versés par M. X. depuis la déchéance du terme sur le montant de la créance arrêtée à cette date en principal, intérêts de retard et une indemnité conventionnelle, sans imputer ces versements sur les intérêts de retard produits par la créance depuis lors comme les dispositions de l’article 1254 du code civil l’autorisaient à faire ; que M. X. ne peut sérieusement tout à la fois reconnaître devoir les intérêts conventionnels et prétendre que ceux-ci seraient en réalité constitutifs d’une clause pénale ; que l’établissement prêteur est fondé à se prévaloir des intérêts conventionnels à compter du 24 mars 2011, date postérieure à la lettre recommandée avec avis de réception notifiée le 18 janvier 2011 ; que comme il avait été relevé ci-avant, le créancier a consenti à limiter l’assiette de ces intérêts non pas à la somme due au jour de la déchéance mais au jour de l’arrêté de compte ; qu’eu égard au taux d’intérêt élevé du prêt consenti, de la durée de l’engagement, de la bonne foi de M. X. qui a repris les paiements à hauteur des échéances conventionnelles, il convient de juger que la clause pénale de 8 % d’un montant de 2.233,45 euros est excessive ; que ces éléments justifient qu’elle soit réduite à la somme de 500 € ; qu’il ne résulte pas des stipulations contractuelles que cette indemnité soit productive, comme les échéances impayées et le capital restant dû, d’intérêts au taux conventionnel ; que dès lors M. X. sera condamné à payer la somme de 14.946,57 euros augmentée des intérêts au taux conventionnel de 8,72 % à compter du 24 mars 2011, outre 500 € ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Alors que 1°) la banque n’est dispensée d’adresser une mise en demeure avant de prononcer la déchéance du terme d’un prêt que si le contrat prévoit expressément une résiliation de plein droit ; qu’en retenant, pour dispenser la banque de l’obligation d’adresser une mise en demeure préalable, qu’il ne résulte pas des stipulations contractuelles que le prêteur soit tenu de mettre en demeure l’emprunteur préalablement au constat de la déchéance du terme, la cour d’appel a violé les articles 1134, 1147 et 1184 du code civil ;
Alors que 2°) la déchéance du terme revêt un caractère abusif lorsqu’elle n’a pas fait l’objet d’une mise en demeure préalable ; qu’en décidant le contraire, la cour d’appel a violé l’article 1147 du code civil ;
Alors que 3°) commet un abus de droit la banque qui notifie la déchéance du terme d’un prêt à un débiteur de bonne foi sans avertissement préalable et saisit la juridiction malgré la reprise immédiate du paiement des échéances ; qu’en affirmant que la lettre recommandée avec avis de réception du 18 janvier 2011 de la déchéance du terme et la saisine du tribunal de grande instance par assignation délivrée en juin 2011 ne révélaient nul abus de la part du créancier, après avoir constaté que M. X. était un débiteur de bonne foi qui avait repris le paiement de ses échéances en février 2011 dès réception d’une lettre de la banque, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 1134 et 1147 et 1184 du code civil.
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