CASS. COM., 13 septembre 2017
CERCLAB - DOCUMENT N° 7078
CASS. COM., 13 septembre 2017 : pourvoi n° 15-22837 et 15-23070 ; arrêt n° 1073
Publication : Legifrance
Extrait : « Mais attendu que l’arrêt retient qu’en l’absence d’engagement ferme de volume de commande dans les marchés en cause, la clause d’indemnisation institue une marge de tolérance d’un taux de 5 %, non excessif ou abusif, dont le dépassement donne lieu à indemnisation dans des conditions égalitaires pour chacune des parties selon que le volume est excédentaire ou insuffisant, de sorte que cette clause ne caractérise pas des conditions commerciales ou obligations injustifiées ; qu’en l’état de ces constatations et appréciations, rendant inopérantes les recherches invoquées par les deuxième et troisième branches et faisant ressortir que l’une des conditions de mise en œuvre de la responsabilité, prévue par l’article L. 442-6-I-2° b) dans sa rédaction applicable, n’était pas remplie, la cour d’appel, qui a effectué les recherches invoquées aux première et quatrième branches, a légalement justifié sa décision ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR DE CASSATION
CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT DU 13 SEPTEMBRE 2017
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
N° de pourvoi : 15-22837 et 15-23070. Arrêt n° 1073.
DEMANDEUR à la cassation : Société EDF et ERDF
DÉFENDEUR à la cassation : Société Nexans France
Mme Mouillard (président), président. SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Piwnica et Molinié, SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot, avocat(s).
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
Joint les pourvois n° G 15-22-837 et M 15-23.070 qui attaquent le même arrêt ;
Statuant tant sur les pourvois principaux n° G 15-22.837 formé par la société EDF et M 15-23.070 formé par la société ERDF, que sur les pourvois incidents relevés par la société Nexans France :
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 2 juillet 2015), que saisi d’une plainte de la société EDF, le Conseil de la concurrence, devenu l’Autorité de concurrence, a, par une décision du 26 juillet 2007, dit établi que la sociétés Nexans France (la société Nexans) et la société Pirelli énergie câbles et systèmes France, devenue la société Prysmian câbles et Systèmes France (la société Prysmian), ont enfreint, avec d’autres entreprises, les dispositions de l’article L. 420-1 du code de commerce et de l’article 81 du Traité CE, devenu 101 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) à l’occasion d’une mise en concurrence et d’un appel d’offres successivement engagés par la société EDF et a prononcé une sanction pécuniaire à leur encontre ; que la société EDF a apporté à la société ERDF l’ensemble des éléments relatifs à son activité de gestionnaire de réseau de distribution d’électricité ; que ces deux sociétés ont assigné les sociétés Nexans et Prysmian en annulation des marchés passés, restitution des sommes versées et, subsidiairement, en réparation du préjudice causé par leurs pratiques ; que leur reprochant divers manquements lors de la procédure d’appel d’offres et dans l’exécution des contrats, la société Nexans a demandé reconventionnellement la réparation de ses préjudices ;
Sur les premiers moyens des pourvois principaux, rédigés en termes identiques, réunis :
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que les sociétés EDF et ERDF font grief à l’arrêt du rejet de leurs demandes alors, selon le moyen :
1°/ que la nullité de plein droit découlant des dispositions des articles 101 §2 du TFUE et L. 420-3 du code de commerce revêt un caractère absolu et peut être invoquée même par une partie à l’entente ; que la bonne foi n’est donc pas une condition nécessaire à la mise en œuvre de la nullité absolue des contrats ; qu’en retenant, pour exclure toute annulation du premier marché dit transitoire que « la société EDF ne peut de bonne foi, ayant procédé à (la dénonciation des pratiques devant le Conseil de la concurrence) qui démontre qu’elle avait connaissance de ces pratiques et de leurs conséquences, mais ayant néanmoins poursuivi les négociations et ayant signé les contrats en cause, allégué que ces mêmes contrats sont nuls comme se rapportant aux faits dénoncés », la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
2°/ que les pratiques anticoncurrentielles dénoncées par un acheteur ne sont véritablement connues par celui-ci dans toute leur ampleur que par la décision de l’Autorité de la concurrence les sanctionnant ; qu’en affirmant, pour exclure toute annulation des marchés litigieux en dépit de l’existence des ententes avérées ayant entaché leur conclusion, que la société EDF avait eu connaissance des pratiques et de leurs conséquences dès la saisine du Conseil de la concurrence, la cour d’appel a violé de plus fort les articles 101 § 2 du TFUE et L. 420-3 du code de commerce ;
3°/ que pour être recevable, la plainte déposée par une entreprise devant le Conseil de la concurrence devenue Autorité doit seulement être étayée par des éléments suffisamment probants, à charge ensuite pour les services d’instruction d’établir la réalité de la pratique anticoncurrentielle suspectée ; que les pratiques anticoncurrentielles mises en œuvre par des fournisseurs ne sont véritablement connues par un acheteur dans toute leur ampleur que par la décision de l’Autorité de la concurrence les sanctionnant ; qu’en estimant que la seule dénonciation de présomptions d’entente était suffisante pour considérer que la signature par la société EDF du premier marché dit transitoire ne se rapportait pas à l’entente prohibée, la cour d’appel a, de nouveau, violé les articles 101 § 2 du TFUE et L. 420-3 du code de commerce, ensemble les articles L. 462-5 et L. 462-8 du code de commerce ;
4°/ que toute personne accusée d’une infraction est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie ; qu’en reprochant à la société EDF d’avoir conclu des marchés avec des sociétés dont elle avait seulement dénoncé certains faits au Conseil de la concurrence quand leurs culpabilités n’étaient pas encore établies, la cour d’appel qui a méconnu la présomption d’innocence a violé les articles 6 § 2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et 48-1 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ;
5°/ qu’en retenant, pour rejeter l’action en nullité concernant le second marché passé par la société EDF, qu’il « est établi que les prix auxquels la société EDF a contracté ne sont pas ceux issus de l’appel d’offres, tout en constatant que la société EDF a ensuite négocié ces prix avec chacun des fournisseurs retenus, desquels elle a obtenu une baisse de 2,5 % », ce dont il résulte que la baisse généralisée de prix de 2,5 %, obtenue par la société EDF auprès de tous les fournisseurs retenus a bien été négociée à partir des prix de chacun de ses fournisseurs résultant de l’appel d’offres et se rapporte donc bien à l’entente prohibée, la cour d’appel qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations a violé les articles 101 § 2 du TFUE et l 420-3 du code de commerce ;
RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Mais attendu que seuls encourent l’annulation, sur le fondement des articles L. 420-3 du code de commerce et 101 §1 et 2 TFUE, les engagements, accords ou décisions constituant des pratiques anticoncurrentielles au sens de ces textes ; que l’arrêt retient exactement, par motifs adoptés, que les engagements qui peuvent être annulés en application de ces textes sont seulement ceux qui ont caractérisé les échanges d’informations sanctionnés par l’Autorité de concurrence et que les contrats de fourniture passés postérieurement par la société EDF ne sont pas, par eux-mêmes, des accords interdits, dès lors qu’ils ne correspondent pas aux pratiques anti-concurrentielles sanctionnées et n’en ont pas été les instruments ; que le moyen, qui postule le contraire, n’est pas fondé ;
Sur les seconds moyens des mêmes pourvois, rédigés en termes identiques, réunis :
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que les sociétés EDF et ERDF font le même grief à l’arrêt alors, selon le moyen :
1°/ qu’en matière anticoncurrentielle, l’existence d’un préjudice s’infère au moins partiellement de l’infraction elle-même ; qu’ainsi la victime d’une entente subit nécessairement un préjudice ; qu’en décidant au contraire, pour débouter les sociétés EDF et ERDF de leurs demandes d’indemnisation que la société EDF « n’apporte pas les éléments permettant d’établir avec certitude le préjudice qu’elle dit avoir subi si bien qu’en l’absence de préjudice il n’y a pas lieu de déterminer si en se livrant aux pratiques sanctionnées par le Conseil de la concurrence, les sociétés Nexans et Prysmian avaient commis une faute civile à l’égard de la société EDF, la cour d’appel a violé l’article 1382 du code civil, ensemble les articles 101 du TFUE et L. 420-1 du code de commerce ;
2°/ qu’en reprochant aux sociétés EDF et ERDF de ne pas démontrer l’existence d’un préjudice certain par la production d’une analyse contrefactuelle tout en reconnaissant que ce mode de preuve doit être admis en son principe, la cour d’appel qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations a violé l’article 1382 du code civil, ensemble les articles 101 du TFUE et L. 420-1 du code de commerce ;
3°/ que le fait que l’acheteur ait exprimé sa satisfaction sur les prix auprès des participants à l’entente ne l’empêche pas d’obtenir réparation de son préjudice après la condamnation de ces derniers pour entente ; qu’en retenant, pour débouter les sociétés EDF et ERDF de leurs demandes de dommages et intérêts, que « EDF a elle-même fait part de sa satisfaction quant au niveau des prix qu’elle avait obtenus de ses fournisseurs », la cour d’appel a violé l’article 1382 du code civil, ensemble les articles 101 du TFUE et L. 420-1 du code de commerce ;
4°/ que le juge ne peut pas refuser d’évaluer un préjudice anticoncurrentiel dont il constate l’existence au prétexte que les éléments fournis sont insuffisants ; qu’en refusant en réalité, sous couvert d’absence de préjudice certain, d’évaluer le préjudice après avoir considéré que la méthode de calcul proposée ne lui semblait pas pleinement satisfactoire, la cour d’appel a violé l’article 1382 civil, ensemble les articles 101 du TFUE et L. 420-1 du code de commerce ;
RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Mais attendu qu’après avoir relevé que le calcul de l’évolution contrefactuelle des prix pouvait se fonder sur les prix remis en réponse au second appel d’offres par la société NKT, qui n’avait pas participé aux pratiques sanctionnées, de sorte que ses prix pouvaient être considérés comme les prix du marché, l’arrêt constate que dans chaque lot pour lequel cette dernière a remis une offre, figurait au moins un prix remis par un autre participant, inférieur à son propre prix, ce qui fragilise l’un des postulats fondamentaux du calcul des sociétés EDF et ERDF, et en déduit que si la pertinence de la méthode d’évaluation du préjudice suivie par les sociétés EDF et ERDF n’est pas remise en cause dans son principe, son application est discutable ; qu’il retient que les éléments sur lesquels ces sociétés fondent leur préjudice sont incertains, qu’il s’agisse, pour le premier marché, d’une augmentation des prix du marché transitoire, d’un effet sur les prix qui résulterait des surcapacités, du système d’enchères inversées ou de l’augmentation de la productivité et, pour le second, d’une pression à la baisse par le passage de quatre à six fournisseurs, dès lors que ce changement ne concerne qu’une partie du marché ; qu’en l’état de ces constatations et appréciations souveraines, faisant ressortir que la preuve de l’existence du préjudice n’était pas rapportée, la cour d’appel, sans méconnaître les conséquences légales de ses constatations, a légalement justifié sa décision ; qu’inopérant en sa troisième branche qui critique des motifs surabondants, le moyen n’est pas fondé pour le surplus ;
Sur les premiers moyens des pourvois incidents, rédigés en termes identiques, réunis :
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que la société Nexans fait grief à l’arrêt du rejet de ses demandes en réparation de ses préjudices alors, selon le moyen :
1°/ qu’engage la responsabilité, de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, pour tout opérateur économique d’abuser de la relation de dépendance dans laquelle il tient un partenaire ou de sa puissance d’achat ou de vente en le soumettant à des conditions commerciales ou obligations injustifiées ; qu’en l’espèce, la société Nexans faisait valoir qu’abusant de la situation de quasi-monopole dont elle bénéficiait sur le marché des câbles moyenne tension destinés à l’alimentation du réseau français, la société EDF lui avait imposé la stipulation d’une clause lui permettant, en cas de cas de non-respect de ses engagements d’achat, de ne verser qu’une indemnisation sans rapport aucun avec le préjudice effectivement subi par son fournisseur et ainsi de s’affranchir, à moindre coût, de ses obligations contractuelles ; qu’ainsi, la société Nexans faisait valoir que les commandes adressées par la société EDF au titre du marché intermédiaire de février/mai 2002, n’avaient représenté que 71,2 % du volume prévu au contrat et que l’application de la clause contestée avait permis à la société EDF de fixer l’indemnisation allouée à Nexans à 163.000 euros alors qu’elle avait été privée d’une marge brute de 4.716.000 euros ; qu’en refusant d’indemniser Nexans du préjudice qu’elle avait subi au titre de l’inexécution, par la société EDF, du marché intermédiaire, au motif qu’elle avait d’ores et déjà été indemnisée en application de la clause susvisée et que la marge de 5 % prévue par cette clause n’apparaissait « ni excessive, ni abusive », sans rechercher, comme elle y était invitée, si le fait, pour la société EDF, d’imposer à son fournisseur une clause lui permettant de réduire, dans de telles proportions, le montant de l’indemnité allouée à ce dernier en cas d’inexécution de ses obligations, ne constituait pas un abus de dépendance ou de puissance d’achat, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 442-6, 2° b) du code de commerce dans sa rédaction applicable en l’espèce ;
2°/ qu’aux termes de l’article L. 442-6, 2° b) du code de commerce, dans sa rédaction applicable en l’espèce, engage la responsabilité, de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers, d’abuser de la relation de dépendance dans laquelle il tient un partenaire ou de sa puissance d’achat ou de vente en le soumettant à des conditions commerciales ou obligations injustifiées ; qu’en écartant l’action indemnitaire de la société Nexans France au motif qu’il n’existait pas de situation de dépendance entre les parties, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la société EDF qui, à l’achat, représentait pas moins de 70 % du marché des câbles HTA, et qui était un acteur incontournable pour tout câblier souhaitant avoir accès à ce marché, n’avait pas, en imposant à Nexans France une clause d’indemnisation lui permettant de s’affranchir de ses obligations moyennant le versement d’une indemnité sans rapport aucun avec le préjudice que celle-ci pourrait effectivement subir, abusé de sa puissance d’achat, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 442-6, 2° b) du code de commerce dans sa rédaction applicable en l’espèce ;
3°/ qu’aux termes de l’article L. 442-6, 2° b) du code de commerce, dans sa rédaction applicable en l’espèce, engage la responsabilité, de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout opérateur économique d’abuser de « la relation de dépendance » dans laquelle il tient un partenaire en le soumettant à des conditions commerciales ou obligations injustifiées ; que « la relation de dépendance » s’entend de toute forme de sujétion, économique ou juridique, dans laquelle un opérateur économique se trouve placé vis-à-vis de son partenaire commercial sur un marché déterminé ; qu’en l’espèce, la société Nexans France faisait valoir que la société EDF lui avait imposé une clause d’indemnisation lui permettant de s’affranchir à moindre coût de ses obligations contractuelles, profitant ainsi de la situation de dépendance dans elle tenait la société Nexans France sur le marché des câbles moyenne tension destinés à l’alimentation du réseau français ; que cette situation de sujétion vis-à-vis de la société EDF résultait, comme l’exposait Nexans France du fait notamment que la société EDF dernière représentait la quasi-totalité de la demande, qu’elle définissait elle-même les normes techniques des câbles échangés sur ce marché et qu’elle disposait d’un pouvoir d’homologation des produits fabriqués par ses fournisseurs et de leur outil de production, ce qui en faisait un acteur incontournable pour l’accès et le maintien sur ce marché spécifique ; qu’elle rappelait qu’elle intervenait sur ledit marché depuis près de 30 ans et qu’une usine entière employant deux cent cinquante-six salariés était entièrement dédiée à la fabrication des câbles moyenne tension destinés au réseau français ; qu’elle ajoutait que le marché des câbles moyenne tension destinés à l’alimentation du réseau français constituait, comme l’avait retenu le Conseil de la concurrence, un marché parfaitement autonome sur lequel la société EDF disposait d’un quasi-monopole (ibid) ; qu’en estimant que « Nexans France ne répondait pas aux critères juridiques de la dépendance économique ni à ceux de la relation de dépendance » au motif que, de façon générale, la part de marché réalisée par elle avec la société EDF était faible, que ses produits bénéficiaient d’une grande notoriété compte tenu de sa position de leader mondial dans le secteur de l’industrie du câble et que Nexans France disposait de solutions alternatives et de débouchés facilement accessibles, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le marché des câbles moyenne tension à destination du réseau électrique français ne constituait pas un marché autonome, et si la société EDF n’avait pas abusivement exploité la situation de dépendance dans laquelle elle tenait la société Nexans France pour l’accès et le maintien sur ce marché, en lui imposant une clause d’indemnisation lui permettant de s’affranchir à moindre coût de ses obligations contractuelles, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 442-6 2° b du code de commerce ;
4°/ qu’en s’abstenant de rechercher si en imposant, dans ces circonstances, une clause réduisant dans de telles proportions l’indemnité allouée à son fournisseur en cas d’inexécution de ses obligations, la société EDF n’avait pas commis un abus au sens de l’article 1382 du code civil, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de cette disposition ;
RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Mais attendu que l’arrêt retient qu’en l’absence d’engagement ferme de volume de commande dans les marchés en cause, la clause d’indemnisation institue une marge de tolérance d’un taux de 5 %, non excessif ou abusif, dont le dépassement donne lieu à indemnisation dans des conditions égalitaires pour chacune des parties selon que le volume est excédentaire ou insuffisant, de sorte que cette clause ne caractérise pas des conditions commerciales ou obligations injustifiées ; qu’en l’état de ces constatations et appréciations, rendant inopérantes les recherches invoquées par les deuxième et troisième branches et faisant ressortir que l’une des conditions de mise en œuvre de la responsabilité, prévue par l’article L. 442-6-I-2° b) dans sa rédaction applicable, n’était pas remplie, la cour d’appel, qui a effectué les recherches invoquées aux première et quatrième branches, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n’est pas fondé ;
Et sur les seconds moyens des mêmes pourvois, rédigés en termes identiques, réunis :
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que la société Nexans fait grief à l’arrêt du rejet de sa demande en réparation du préjudice subi au titre des manquements commis par les sociétés EDF et ERDF dans l’exécution des marchés alors, selon le moyen :
1°/ que la preuve de l’exécution d’une obligation incombe à son débiteur ; qu’en déboutant la société Nexans France de sa demande indemnitaire fondée sur le non-respect par la société EDF de ses engagements d’achat pris dans le cadre du marché 2002/2004, au motif que « la société Nexans France ne démontre pas que ses niveaux de réalisation en année 1 et 2 étaient contraires aux stipulations du contrat », la cour d’appel a inversé la charge de la preuve et violé l’article 1315 du code civil ;
2°/ que pour s’opposer aux demandes indemnitaires de la société Nexans France fondées sur le non-respect des volumes d’achat définis dans le marché 2002/2004, les sociétés EDF et ERDF faisaient valoir que ce marché avait finalement été exécuté sur 32 mois et non 24 mois, comme prévu initialement, et que, sur ces 32 mois, le taux d’achat, par rapport aux quantités initialement prévues, était de 109 % ; qu’en écartant les demandes indemnitaires de Nexans France au motif encore que « sur la durée du contrat, le taux de réalisation s’est avéré supérieur aux prévisions, puisqu’il s’est élevé à 109 % », sans rechercher, comme elle y était invitée, si la société EDF n’avait pas respecté ses engagements sur une durée plus longue que la durée initialement prévue et si le retard ainsi accusé par la société EDF et le caractère erratique des commandes qui lui avaient été adressées, n’avaient pas été à la source de préjudice, chiffré par un cabinet d’expert et consistant notamment dans une perte de productivité, dans l’immobilisation de l’outil de travail sur une durée plus longue, et dans le placement consécutif de cent quinze salariés en chômage technique, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1147 du code civil ;
RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Mais attendu qu’après avoir relevé que les marchés en cause ne comportaient pas d’engagement ferme de volumes de commandes, l’arrêt retient que sur la durée d’exécution du contrat, le taux de réalisation s’est avéré supérieur aux prévisions puisqu’il s’est élevé à 109 % ; que de ces constatations et appréciations faisant ressortir la bonne exécution des marchés et rendant inopérantes les recherches invoquées à la seconde branche, la cour d’appel, qui n’a pas inversé la charge de la preuve, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n’est pas fondé ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS : REJETTE les pourvois principaux et incidents ;
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens, à l’exception de ceux exposés par la société Prysmian câbles et Systèmes France qui resteront à la charge des sociétés EDF et ERDF ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize septembre deux mille dix-sept.
ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Moyens identiques produits AUX POURVOIS PRINCIPAUX n° G 15-22.837 et M 15-23.070 par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour les sociétés EDF et ERDF.
PREMIER MOYEN DE CASSATION (Nullité des marchés)
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Il est fait grief à l’arrêt confirmatif attaqué d’avoir débouté les sociétés EDF et ERDF de l’ensemble de leurs demandes et condamné celles-ci in solidum à payer à chacune des deux sociétés intimées la somme de 80.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
AUX MOTIFS QUE (…) sur la demande de nullité fondée sur l’article L. 420-3 du Code de commerce (…) sur le bien-fondé de la demande les sociétés EDF et ERDF demandent à la Cour de constater que les contrats passés avec les sociétés Nexans et Prysmian à l’issue des procédures de mise en concurrence sont nuls par application de l’article L. 420-3 du Code de commerce ; qu’elles font valoir que ces contrats se rapportent, au sens de cet article, aux pratiques anticoncurrentielles sanctionnées par le Conseil de la concurrence ; que les société Nexans et Prysmian s’opposent à cette demande, et soutiennent que l’article L. 420-3 ne s’applique qu’aux cas dans lesquels l’acte dont la nullité est demandée est le « support même » de la pratique prohibée ou qu’il a un objet ou un effet anticoncurrentiel ; que dès lors, dans le cas d’espèce, la nullité ne saurait être invoquée, comme l’a jugé le tribunal, qu’à l’encontre des documents qui ont caractérisé les échanges d’information sanctionnés par le Conseil de la concurrence ; que la société EDF a poursuivi la négociation du premier marché, dit marché transitoire, et signé les contrats en résultant avec les sociétés Nexans et Prysmian alors que, comme la Cour l’a relevé plus haut, elle avait dénoncé les pratiques de ces mêmes sociétés au Conseil de la concurrence et les avait explicitement mises en cause comme ayant mis en œuvre une entente prohibée ; que, dès lors, la société EDF ne peut de bonne foi, ayant procédé à cette dénonciation qui démontre qu’elle avait connaissance de ces pratiques et de leurs conséquences, mais ayant néanmoins poursuivi les négociations et ayant signé les contrats en cause, allégué que ces mêmes contrats sont nuls comme se rapportant aux faits dénoncés ; qu’à l’inverse, la société EDF avait la possibilité, après avoir dénoncé au Conseil de la concurrence les pratiques de ses fournisseurs, de refuser de donner suite à l’appel d’offres au terme duquel les sociétés Nexans et Prysmian ont été attributaires, dès lors qu’elle estimait que cet appel d’offres était vicié par l’entente dénoncée ; qu’elle aurait également pu négocier avec les autres fournisseurs, concurrents des sociétés Nexans et Prysmian quand bien même ils avaient participé à l’entente ; qu’en toute hypothèse, il résulte de la chronologie des engagements pris que ceux-ci ne peuvent pas se rattacher à l’entente prohibée qui avait été dénoncée antérieurement à leur conclusion par l’auteur même de la dénonciation ; qu’au surplus, s’agissant du deuxième marché, il est établi que les prix auxquels EDF a contracté ne sont pas ceux issus de l’appel d’offres, puisque EDF a ensuite négocié ces prix avec chacun des fournisseurs retenus, desquels elle a obtenu une baisse de 2,5 % ; qu’il résulte de l’ensemble de ces constatations que les conditions de la nullité posées par l’article L. 420-3 précité ne sont donc pas réunies (…) ;
ET AUX MOTIFS ENCORE QUE (…) cependant, d’une part, quel que soit l’attachement, indiscutable, d’EDF au respect par ses fournisseurs des règles de la libre concurrence, force est de constater qu’alors qu’elle nourrissait de forts soupçons d’entente entre eux, elle n’en a pas moins poursuivi et mené à son terme l’appel d’offres dans lequel ces fournisseurs étaient engagés ; qu’en effet, quoiqu’ayant saisi le Conseil de la concurrence le 14 novembre 2001, en mettant explicitement en cause les participants à l’enchère électronique qui s’était tenue le 27 septembre précédent, et ayant complété cette saisine par l’envoi de nouvelles pièces le 29 novembre 2001, EDF, au lieu d’interrompre la procédure et de renoncer à contracter, dans de telles conditions, a mené à son terme cette procédure et a conclu, en janvier 2012, les contrats de fourniture avec les sociétés Nexans et Prysmian ; qu’EDF a ensuite qualifié pourtant les mêmes entreprises qu’elle avait mises en cause devant le Conseil de la concurrence, pour participer à l’appel d’offres du deuxième marché (…) ;
ET AUX MOTIFS ENFIN QUE (…) en ce qui concerne la remise de 2,5 %, la société Nexans soutient que EDF a exigé, dans le cadre du marché 2002-2004, sans contrepartie, une baisse automatique du prix des câbles de 2,5 % chaque année ; qu’elle expose que dans le cadre de la négociation de gré à gré qu’elle a engagée avec chacun des six candidats qui lui avaient remis des offres, EDF a obtenu des remises de 2,5 % sur les prix applicables après la première année du contrat ; que cependant ‘on ne saurait reprocher à EDF d’avoir, conformément au règlement de son appel d’offres, négocié de gré à gré les prix de chaque lot, étant rappelé, de surcroît, que les pratiques sanctionnées ont pu avoir une incidence sur le prix au moment de l’appel d’offres ; que dès lors, les modalités finales de détermination du prix du marché en cause ne peuvent être considérées comme créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ; qu’elles ne peuvent pas plus, pour la même raison, être considérées comme démontrant une faute commise par EDF de nature à engager sa responsabilité sur le fondement de l’article 1382 du code civil ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
1°) ALORS QUE la nullité de plein droit découlant des dispositions des articles 101 § 2 du TFUE et L. 420-3 du Code de commerce revêt un caractère absolu et peut être invoquée même par une partie à l’entente ; que la bonne foi n’est donc pas une condition nécessaire à la mise en œuvre de la nullité absolue des contrats ; qu’en retenant, pour exclure toute annulation du premier marché dit transitoire que « la société EDF ne peut de bonne foi, ayant procédé à (la dénonciation des pratiques devant le Conseil de la concurrence) qui démontre qu’elle avait connaissance de ces pratiques et de leurs conséquences, mais ayant néanmoins poursuivi les négociations et ayant signé les contrats en cause, allégué que ces mêmes contrats sont nuls comme se rapportant aux faits dénoncés », la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
2°) ALORS QUE les pratiques anticoncurrentielles dénoncées par un acheteur ne sont véritablement connues par celui-ci dans toute leur ampleur que par la décision de l’Autorité de la concurrence les sanctionnant ; qu’en affirmant, pour exclure toute annulation des marchés litigieux en dépit de l’existence des ententes avérées ayant entaché leur conclusion, que la société EDF avait eu connaissance des pratiques et de leurs conséquences dès la saisine du Conseil de la concurrence, la cour d’appel a violé de plus fort les articles 101 § 2 du TFUE et L. 420-3 du Code de commerce ;
3°) ALORS QUE pour être recevable, la plainte déposée par une entreprise devant le Conseil de la concurrence devenue Autorité doit seulement être étayée par des éléments suffisamment probants, à charge ensuite pour les services d’instruction d’établir la réalité de la pratique anticoncurrentielle suspectée ; que les pratiques anticoncurrentielles mises en œuvre par des fournisseurs ne sont véritablement connues par un acheteur dans toute leur ampleur que par la décision de l’Autorité de la concurrence les sanctionnant ; qu’en estimant que la seule dénonciation de présomptions d’entente était suffisante pour considérer que la signature par EDF du premier marché dit transitoire ne se rapportait pas à l’entente prohibée, la cour d’appel a, de nouveau, violé les articles 101 § 2 du TFUE et L. 420-3 du Code de commerce, ensemble les articles L. 462-5 et L. 462-8 du Code de commerce ;
4°) ALORS toute personne accusée d’une infraction est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie ; qu’en reprochant à la société EDF d’avoir conclu des marchés avec des sociétés dont elle avait seulement dénoncé certains faits au Conseil de la concurrence quand leurs culpabilités n’étaient pas encore établies, la cour d’appel qui a méconnu la présomption d’innocence a violé les articles 6 § 2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et 48-1 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ;
5°) ALORS QU’en retenant, pour rejeter l’action en nullité concernant le second marché passé par EDF, qu’il « est établi que les prix auxquels EDF a contracté ne sont pas ceux issus de l’appel d’offres, tout en constatant que EDF a ensuite négocié ces prix avec chacun des fournisseurs retenus, desquels elle a obtenu une baisse de 2,5 % », ce dont il résulte que la baisse généralisée de prix de 2,5 %, obtenue par EDF auprès de tous les fournisseurs retenus a bien été négociée à partir des prix de chacun de ses fournisseurs résultant de l’appel d’offres et se rapporte donc bien à l’entente prohibée, la cour d’appel qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations a violé les articles 101 § 2 du TFUE et l 420-3 du Code de commerce.
SECOND MOYEN DE CASSATION (Moyen subsidiaire relatif aux dommages et intérêts)
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Il est fait grief à l’arrêt confirmatif attaqué d’avoir débouté les sociétés EDF et ERDF de l’ensemble de leurs demandes et condamné celles-ci in solidum à payer à chacune des deux sociétés intimées la somme de 80.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
AUX MOTIFS QUE sur la demande subsidiaire de dommages et intérêts, les appelants soutiennent qu’en échangeant entre eux des informations lors des appels d’offres qu’avait organisés EDF, les intimés se sont livrés à des agissements fautifs qui ont causé à EDF un préjudice dont ils demandent réparation sur le fondement de l’article 1382 du code civil ; qu’en premier lieu, les appelants soutiennent que les constatations faites par le Conseil de la concurrence dans sa décision caractérisent la faute qu’elles reprochent aux sociétés Nexans et Prysmian et qui consiste dans une violation des règles d’ordre public protégeant le libre jeu de la concurrence ; que les sociétés Nexans et Prysmian le contestent et font valoir, en particulier, que la décision du Conseil de la concurrence, prise de surcroît selon la procédure de l’article L. 464-2 III du Code de commerce, donc sans établissement préalable d’un rapport, ne suffit pas, par elle-même, à caractériser une faute civile, dont les appelants ne rapportent pas la preuve, que la société Nexans soutient, en outre, qu’EDF a fait peser sur ses fournisseurs habituels une menace grave d’éviction du marché et a eu, à leur égard, un comportement fautif consistant à mettre en place un système d’enchères inversées et d’élimination de candidats, à imposer sans contrepartie une réduction de prix et à appliquer une clause d’indemnisation, en cas de volumes achetés inférieurs aux prévisions contractuelles, hors de proportion avec le dommage réellement subi ; que la société Nexans soutient que par de tels agissements, EDF a conduit ses fournisseurs à participer à une « concertation défensive » ; qu’elle produit à l’appui de cette thèse une « Analyse de la concurrence dans la filière des câbles électriques HTA en France », dont l’auteur conclut, notamment, que l’entente en cause était « une réaction face à la menace d’éviction du rang des fournisseurs de câbles MT d’EDF et celle de subir la ‘malédiction du vainqueur en cherchant à s y maintenir par des prix économiquement non soutenables» (pièce n° 22) ; qu’en second lieu, les appelants soutiennent que la faute qu’ils reprochent aux intimés leur a causé un préjudice, car les prix remis par les fournisseurs ayant participé aux appels d’offres ont été significativement plus élevés que ce qu’ils auraient été si ces fournisseurs ne s’étaient pas entendus ; qu’ils en déduisent que ce préjudice est égal à la différence entre le prix auquel EDF a effectivement payé les câbles qui étaient l’objet de ces appels d’offres, et le prix auquel EDF les aurait achetés si les fournisseurs n’avaient pas échangé d’informations et s’ils s’étaient trouvés en situation d’une pleine concurrence ; que pour le chiffrage de ce préjudice, EDF et ERDF s’appuient sur des études réalisées, à leur demande, par le cabinet Microeconomix, dont elles ont versé les différents rapports aux débats (Evaluation du préjudice causé à la société EDF par les pratiques anticoncurrentielles de la société Nexans - pièce n° 53 ; Evaluation du préjudice causé à la société EDF par les pratiques anticoncurrentielles de la société Prysmian - pièce n° 54 ; Note en réponse aux objections de la société Nexans - pièce n° 71 ; Note en réponse aux objections de la société Prysmian - pièce n° 72 ; Rapport d’expertise économique en réponse aux critiques émises par Compass lexecon pour le compte de Nexans et Sorgem Evaluation pour le compte de Prysmian concernant l’évaluation du préjudice subi par EDF - pièce n° 73 ; Rapport d’expertise économique ne réaction au rapport du 11juillet 20 13 préparé par Compass Lexecon pour le compte de la société Nexans - pièce n° 75) ; que ces travaux concluent que le préjudice causé à EDF par les agissements fautifs des intimés s’élève, s’agissant de la société Nexans, à 900.000 euros pour le premier marché et 3.900.000 euros pour le second marché et, s’agissant de la société Prysmian, à 527 885 euros pour le premier marché et 6.969.979 euros pour le second marché ; qu’après actualisation en 2014 de ces préjudices, les appelants réclament à la société Nexans la somme totale de 5,9 millions d’euros et à la société Prysmian la somme totale de 9,1 millions d’euros, ces montants étant à répartir entre eux, à raison de 59.000 euros et 91.000 euros pour EDF et de 5.841.000 euros et 9.009.000 euros pour ERDF ; que le préjudice allégué par les appelants a été évalué au moyen d’une méthode consistant à comparer la situation de marché observée à celle, dite contrefactuelle, qui aurait prévalu si les pratiques en cause n’avaient pas été mises en œuvre ; qu’au cas d’espèce, la situation contrefactuelle a été déterminée par la méthode dite « avant-après », consistant à comparer la situation réelle au cours de la période en cause, avec la situation sur le même marché avant que les pratiques n’aient produit leurs effets, et après qu’elles aient produit leurs effets ; que s’agissant de la situation contrefactuelle, le cabinet Microeconomix considère que l’évolution théorique des prix était déterminée, entre autres facteurs, par l’évolution de la productivité, le prix des câbles ayant baissé de 30 % entre 1991 et 2001, et par l’existence de surcapacités de production dans l’industrie du câble HTA ; qu’il estime que les effets cumulés de ces deux facteurs auraient dû entraîner une baisse des prix, qu’il a chiffrée à 4 % ; qu’il retient, par ailleurs, que sur la période en cause, les conditions de concurrence ont subi deux évolutions structurelles, consistant, dans le recours pour le premier marché à un mécanisme d’enchères inversées avec élimination du fournisseur le plus cher et, s’agissant du second marché, dans l’augmentation du nombre de concurrents soumissionnant à l’appel d’offres, deux nouveaux fournisseurs s’ajoutant aux quatre fournisseurs historiques ; que ces facteurs auraient dû entraîner une pression sur les prix à la baisse, que le cabinet Microeconomix chiffre à 6,4 % ; qu’en mesurant l’écart entre le niveau de prix théorique ainsi obtenu et les prix issus auxquels EDF a effectivement acquis les câbles, les appelants chiffrent leur préjudice aux montants ci-dessus rappelés ; que les sociétés Nexans et Prysmian soutiennent que ces éléments n’établissent pas que EDF a subi un préjudice direct, certain et actuel susceptible d’ouvrir droit à réparation ; qu’ainsi, la société Nexans prétend que les rapports du cabinet Microeconomix produits par les appelants comportent des erreurs, omissions, contradictions et incohérences qui leur enlèvent toute force probatoire ; qu’elle appuie sa critique sur les conclusions d’études réalisées, à sa demande, par le cabinet Compass Lexcon (Rapport sur l’évaluation du préjudice supposé causé à EDF par les pratiques de Nexans - pièce n° 27 ; Rapport sur l’utilisation de sa puissance économique vis-à-vis de Nexans - pièce n° 32 ; Rapport sur l’évaluation du préjudice supposé causé à EDF par les pratiques de Nexans - Rapport sur le second rapport Exconomix - pièce n° 50 ; Réponse au rapport d’expertise économique récapitulatif de Microeconomix - pièce n° 64) ; que la société Prysmian souligne que les prix remis par les candidats étaient très proches des «prix objectifs» définis par EDF avant de lancer ses appels d’offres ; qu’elle verse par ailleurs aux débats trois rapport établis à sa demande par le cabinet Sorgem Evaluation qui établissent, selon elle, que le prix n’était pas pour EDF un critère déterminant de son choix, et qu’en conséquence l’existence d’un préjudice causé par l’entente ne peut être démontrée (Rapports des 16 avril 2014, 17 décembre 2014 et 11 février 2015 - pièces n° 27, 37 et 44) ; que si la pertinence de la méthode d’évaluation du préjudice appliquée par les appelants, dont le cabinet Microeconomix rappelle qu’elle a les faveurs de la Commission européenne, ne peut être discutée dans son principe, force est de constater que les éléments fournis par les intimés conduisent à la remettre en cause dans son application au cas d’espèce ; qu’ainsi que l’observe la société Nexans, le calcul de l’évolution contrefactuelle des prix pouvait se fonder non, comme le cabinet Microeconomix l’a fait, sur des hypothèses, mais sur les prix remis, en réponse au deuxième appel d’offres, par la société NKT, puisque celle-ci n’a pas participé aux pratiques sanctionnées par le Conseil de la concurrence ; que les prix remis par cette société pouvaient, pour cette dernière raison, être considérés comme des prix du marché ; que, comme l’observe le rapport du cabinet Compass Lexecon, dans chaque lot pour lequel la société NKT a remis une offre, il y avait au moins un prix remis par un autre participant inférieur au prix remis par celle-ci ; que sans doute cette analyse est-elle contestée par les appelants, qui soutiennent que même s’il était avéré que EDF n’a pas toujours choisi le fournisseur le moins disant, elle a supporté le surprix que chaque membre de l’entente a été en mesure d’imposer ; qu’elle n’en vient pas moins fragiliser l’un des postulats fondamentaux sur lesquels les appelants ont basé le calcul de leur préjudice ; que le niveau des prix observés sur le marché transitoire, par rapport au marché qui avait été précédemment passé, est discuté par les parties, alors qu’il constitue pour les appelants un facteur important du chiffrage du préjudice qu’ils allèguent ; qu’ainsi, selon le cabinet Microeconomix, les prix du premier marché auraient augmenté de 0,3 % et 1,7 %, alors que selon le cabinet Compass Lexecon, ces mêmes prix auraient diminué de 1,96 % et 0,72 % ; que, par ailleurs, en ce qui concerne les surcapacités de production qui, selon les appelants devaient théoriquement conduire à une baisse des prix, les intimés soulignent que cet effet n’est nullement démontré, dans la mesure où ces surcapacités existaient sur les marchés antérieurs à ceux en cause ; que de même, l’effet attendu de la mise en place d’un système d’enchères inversées pour le premier marché, consistant dans une baisse des prix, s’il est théoriquement justifié, ne peut être considéré comme certain, au point de servir de base au calcul de l’indemnité sollicitée ; que l’assertion des appelants, selon laquelle la productivité augmenterait de 2,5 % par an, est contestée par les intimés qui soutiennent que ce chiffre correspond en réalité à une baisse annuelle des prix imposée par EDF, dont il n’est pas démontré qu’elle est corrélée à une augmentation de la productivité ; qu’enfin, s’agissant du deuxième marché, il n’est pas contesté que le passage de quatre à six fournisseurs, entraînant normalement, selon les appelants, une pression sur les prix à la baisse, n’a concerné qu’une partie de ce marché, de sorte qu’on ne saurait en faire un facteur déterminant du montant du préjudice allégué ; qu’en outre, comme la Cour l’a relevé plus haut, EDF a elle-même fait part de sa satisfaction quant au niveau des prix qu’elle avait obtenus de ses fournisseurs ; que dans le courrier du 24 juillet 2006 déjà cité, le président d’EDF, après avoir rappelé les circonstances l’ayant amené à saisir le Conseil de la concurrence, a confirmé à la société Nexans « que les évolutions des niveaux de prix dans le temps que nos services ont été en mesure d’obtenir de la part des fournisseurs de câbles moyenne tension, sur chaque marché de ces dix dernières années, ont été globalement jugées en cohérence avec les niveaux de prix attendus par EDF au travers de ses propres estimations» (pièce Nexans n° 2) ; que la société Nexans produit, par ailleurs, des tableaux de prix établis par les services d’EDF, d’où il ressort que les prix obtenus à l’issue des appels d’offres se situaient en-deçà du seuil d’acceptabilité préalablement défini (pièces n° 30, 72 et 73) ; qu’il résulte de ces constatations que l’appelante n’apporte pas les éléments permettant d’établir avec certitude le préjudice qu’elle dit avoir subi ; que dès lors, sans qu’il y ait lieu de déterminer si en se livrant aux pratiques sanctionnées par le Conseil de la concurrence, les sociétés Nexans et Prysmian avaient commis une faute civile à l’égard de EDF, les appelants seront déboutés de leur demandes d’indemnisation ; que le jugement sera donc confirmé ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
1°) ALORS QU’en matière anticoncurrentielle, l’existence d’un préjudice s’infère au moins partiellement de l’infraction elle-même ; qu’ainsi la victime d’une entente subit nécessairement un préjudice ; qu’en décidant au contraire, pour débouter les sociétés EDF et ERDF de leurs demandes d’indemnisation que la société EDF « n’apporte pas les éléments permettant d’établir avec certitude le préjudice qu’elle dit avoir subi si bien qu’en l’absence de préjudice il n’y a pas lieu de déterminer si en se livrant aux pratiques sanctionnées par le Conseil de la concurrence, les sociétés Nexans et Prysmian avaient commis une faute civile à l’égard de EDF, la Cour d’’appel a violé l’article 1382 du code civil, ensemble les articles 101 du TFUE et L. 420-1 du Code de commerce ;
2°) ALORS QU’en reprochant aux sociétés EDF et ERDF de ne pas démontrer l’existence d’un préjudice certain par la production d’une analyse contrefactuelle tout en reconnaissant que ce mode de preuve doit être admis en son principe, la cour d’appel qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations a violé l’article 1382 du code civil, ensemble les articles 101 du TFUE et L. 420-1 du Code de commerce ;
3°) ALORS QUE le fait que l’acheteur ait exprimé sa satisfaction sur les prix auprès des participants à l’entente ne l’empêche pas d’obtenir réparation de son préjudice après la condamnation de ces derniers pour entente ; qu’en retenant, pour débouter les sociétés EDF et ERDF de leurs demandes de dommages et intérêts, que « EDF a elle-même fait part de sa satisfaction quant au niveau des prix qu’elle avait obtenus de ses fournisseurs », la cour d’appel a violé l’article 1382 du code civil, ensemble les articles 101 du TFUE et L. 420-1 du Code de commerce ;
4°) ALORS QUE le juge ne peut pas refuser d’évaluer un préjudice anticoncurrentiel dont il constate l’existence au prétexte que les éléments fournis sont insuffisants ; qu’en refusant en réalité, sous couvert d’absence de préjudice certain, d’évaluer le préjudice après avoir considéré que la méthode de calcul proposée ne lui semblait pas pleinement satisfactoire, la cour d’appel a violé l’article 1382 civil, ensemble les articles 101 du TFUE et L. 420-1 du Code de commerce.
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Moyens identiques produits AUX POURVOIS INCIDENTS n° G 15-22.837 et M 15-23.070 par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Nexans France.
PREMIER MOYEN DE CASSATION (sur l’inexécution du premier marché et la validité de la clause d’indemnisation)
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Il est fait grief à l’arrêt confirmatif attaqué d’AVOIR débouté la société Nexans France de ses demandes tendant à la condamnation des sociétés EDF et ERDF à lui payer la somme de 3,5 millions d’euros à titre de dommages et intérêts à raison des préjudices subis du fait des faits d’EDF dans le cadre de la passation des marchés en cause et de voir condamner solidairement EDF et ERDF à lui payer une somme de 1.851.746 euros en réparation du préjudice subi au titre des manquements commis par EDF/ERDF dans l’exécution des marchés.
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
AUX MOTIFS PROPRES QUE : « Mais considérant que, si le premier marché n’a été réalisé qu’à hauteur de 72 %, la société Nexans a reçu l’indemnisation contractuellement prévue dès lors que la marge de tolérance 65 % par rapport au montant n’a pas été atteinte ; que la Cour a jugé que la clause en application de laquelle cette indemnisation a été calculée et versée n’était ni fautive, ni abusive »
ET QUE : « En ce qui concerne la clause d’indemnisation Considérant que la société Nexans soutient que EDF lui a imposé des conditions d’indemnisation, en cas de non-exécution du contrat de sa part, l’exonérant de fait de toute obligation d’indemnisation du préjudice subi ; qu’elle juge qu’il en résulte un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, au sens de l’article L. 442-6-I-2º du code de commerce ; Considérant que les marchés en cause comportaient une même clause ainsi rédigée (pièces Nexans nº 34 et 35) : « Si, à l’issue du marché, le total hors taxes des commandes passées au Fournisseur, ramené aux prix unitaires de base, se situe en dehors des tolérances (M - 5 % à M + 5 %) : * une indemnité est versée par EDF au Fournisseur si ce total n’atteint pas M - 5 % ; * une ristourne est versée par le Fournisseur à EDF si ce total dépasse M + 5 % (...) » ; Que cette clause énonçait ensuite la formule selon laquelle l’indemnité et la ristourne étaient calculées ; Considérant que les marchés en cause ne comportaient pas d’engagement ferme de volume de commandes, puisqu’au contraire, ils instituaient une marge de “tolérance” de plus ou moins 5 % par rapport à leur montant ; que le dépassement de cette marge donnait lieu à indemnisation, dans des conditions égalitaires, d’EDF ou de la société Nexans selon que le volume de commande était excédentaire ou insuffisant ; que la marge de tolérance est, dans son principe, justifiée par l’impossibilité pour EDF de déterminer avec plus de précision le volume de ses besoins dans le cours de l’exécution du marché ; que le niveau de 5 % de cette marge n’apparaît ni excessif, ni abusif ; que dès lors, la clause d’indemnisation ne peut être considérée comme créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ; qu’elle n’a pas plus de caractère fautif au regard des dispositions de l’article 1382 du code civil ; Considérant qu’il résulte de ces mêmes constatations que le recours aux enchères inversées, l’insertion dans les contrats de clauses d’élimination et d’indemnisation ainsi que la remise de 2,5 % négociée entre les parties ne sauraient être considérés comme constituant des « conditions commerciales ou obligations injustifiées », au sens de l’article L. 442-6 I 2º b) dans sa rédaction antérieure à la loi du 4 août 2008 précitée, sans qu’il soit besoin de déterminer si la société Nexans était placée à l’égard de la société EDF dans une situation de dépendance économique ou était soumise à sa puissance d’achat ; »
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
ALORS QU’engage la responsabilité, de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, pour tout opérateur économique d’abuser de la relation de dépendance dans laquelle il tient un partenaire ou de sa puissance d’achat ou de vente en le soumettant à des conditions commerciales ou obligations injustifiées ; qu’en l’espèce, la société Nexans faisait valoir qu’abusant de la situation de quasi-monopole dont elle bénéficiait sur le marché des câbles moyenne tension destinés à l’alimentation du réseau français, EDF lui avait imposé la stipulation d’une clause lui permettant, en cas de cas de non-respect de ses engagements d’achat, de ne verser qu’une indemnisation sans rapport aucun avec le préjudice effectivement subi par son fournisseur et ainsi de s’affranchir, à moindre coût, de ses obligations contractuelles (conclusions, p. 68s.) ; qu’ainsi, la société Nexans faisait valoir que les commandes adressées par EDF au titre du marché intermédiaire de février/mai 2002, n’avaient représenté que 71,2 % du volume prévu au contrat et que l’application de la clause contestée avait permis à EDF de fixer l’indemnisation allouée à Nexans à 163.000 euros alors qu’elle avait été privée d’une marge brute de 4.716.000 euros (conclusions, p. 67 s. et 185 s.) ; qu’en refusant d’indemniser Nexans du préjudice qu’elle avait subi au titre de l’inexécution, par EDF, du marché intermédiaire, au motif qu’elle avait d’ores et déjà été indemnisée en application de la clause susvisée et que la marge de 5 % prévue par cette clause n’apparaissait « ni excessive, ni abusive », sans rechercher, comme elle y était invitée, si le fait, pour EDF, d’imposer à son fournisseur une clause lui permettant de réduire, dans de telles proportions, le montant de l’indemnité allouée à ce dernier en cas d’inexécution de ses obligations, ne constituait pas un abus de dépendance ou de puissance d’achat, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 442-6, 2° b)
du code de commerce dans sa rédaction applicable en l’espèce ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE : « Sur les demandes reconventionnelles de NEXANS. Attendu que NEXANS ne répond pas aux critères juridiques de la dépendance économique ni à ceux de la relation de dépendance ; attendu qu’en ce qui concerne la caractérisation de la dépendance d’un fournisseur (NEXANS) vis-à-vis d’un distributeur, la jurisprudence retient quatre critères cumulatifs pour établir son existence : l’importance du chiffre d’affaires réalisé par le fournisseur avec le distributeur, - l’importance du distributeur dans la commercialisation du produit concerné, - les facteurs ayant conduit le fournisseur à concentrer ses ventes auprès du distributeur, étant précisé qu’il s’agit de déterminer si le fournisseur a été conduit à une situation de dépendance par choix stratégique ou par nécessité technique, - l’existence et la diversité de solution alternatives pour le fournisseur. Attendu que la part de marché réalisée par NEXANS avec EDF est faible, les produits de NEXANS bénéficient d’une grande notoriété résultant de la position de leader mondial de NEANS dans le secteur de l’industrie du câble et NEXANS disposait de solutions alternatives et de débouchés facilement accessibles ; le tribunal dira qu’il y avait pas de dépendance économique entre les parties ; en ce qui concerne l’abs de puissance économique invoqué, le recours à un mécanisme d’appel d’offre avec élimination de participants correspond à un processus normal et classique de mise en concurrence et ne peut donc être assimilé à un abus de puissance économique ; attendu enfin que ce qui concerne la menace de rupture des relations commerciales invoquée, les mécanismes d’enchères électroniques inversées et d’appel d’offres avec élimination d’un ou plusieurs candidats ne peuvent pas être assimilés à une menace de rupture des relations visant à obtenir des avantages manifestement dérogatoires et injustifiées »
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
ALORS QU’aux termes de l’article L. 442-6, 2° b) du code de commerce, dans sa rédaction applicable en l’espèce, engage la responsabilité, de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers, d’abuser de la relation de dépendance dans laquelle il tient un partenaire ou de sa puissance d’achat ou de vente en le soumettant à des conditions commerciales ou obligations injustifiées ; qu’en écartant l’action indemnitaire de la société Nexans France au motif qu’il n’existait pas de situation de dépendance entre les parties, sans rechercher, comme elle y était invitée (conclusions, p. 10, 27, 182, 184), si EDF qui, à l’achat, représentait pas moins de 70 % du marché des câbles HTA, et qui était un acteur incontournable pour tout câblier souhaitant avoir accès à ce marché, n’avait pas, en imposant à Nexans France une clause d’indemnisation lui permettant de s’affranchir de ses obligations moyennant le versement d’une indemnité sans rapport aucun avec le préjudice que celle-ci pourrait effectivement subir, abusé de sa puissance d’achat, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 442-6, 2° b) du code de commerce dans sa rédaction applicable en l’espèce ;
ALORS QU’ aux termes de l’article L. 442-6, 2° b) du code de commerce, dans sa rédaction applicable en l’espèce, engage la responsabilité, de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout opérateur économique d’abuser de « la relation de dépendance » dans laquelle il tient un partenaire en le soumettant à des conditions commerciales ou obligations injustifiées ; que « la relation de dépendance » s’entend de toute forme de sujétion, économique ou juridique, dans laquelle un opérateur économique se trouve placé vis-à-vis de son partenaire commercial sur un marché déterminé ; qu’en l’espèce, la société Nexans France faisait valoir que la société EDF lui avait imposé une clause d’indemnisation lui permettant de s’affranchir à moindre coût de ses obligations contractuelles, profitant ainsi de la situation de dépendance dans elle tenait la société Nexans France sur le marché des câbles moyenne tension destinés à l’alimentation du réseau français ; que cette situation de sujétion vis-à-vis d’EDF résultait, comme l’exposait Nexans France (conclusions, p. 20s.) du fait notamment qu’EDF dernière représentait la quasi-totalité de la demande, qu’elle définissait elle-même les normes techniques des câbles échangés sur ce marché et qu’elle disposait d’un pouvoir d’homologation des produits fabriqués par ses fournisseurs et de leur outil de production, ce qui en faisait un acteur incontournable pour l’accès et le maintien sur ce marché spécifique ; qu’elle rappelait qu’elle intervenait sur ledit marché depuis près de 30 ans et qu’une usine entière employant 256 salariés était entièrement dédiée à la fabrication des câbles moyenne tension destinés au réseau français ; qu’elle ajoutait que le marché des câbles moyenne tension destinés à l’alimentation du réseau français constituait, comme l’avait retenu le Conseil de la concurrence, un marché parfaitement autonome sur lequel EDF disposait d’un quasi-monopole (ibid) ; qu’en estimant que « Nexans France ne répondait pas aux critères juridique de la dépendance économique ni à ceux de la relation de dépendance » au motif que, de façon générale, la part de marché réalisée par elle avec EDF était faible, que ses produits bénéficiaient d’une grande notoriété compte tenu de sa position de leader mondial dans le secteur de l’industrie du câble et que Nexans France disposait de solutions alternatives et de débouchés facilement accessibles, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le marché des câbles moyenne tension à destination du réseau électrique français ne constituait pas un marché autonome, et si EDF n’avait pas abusivement exploité la situation de dépendance dans laquelle elle tenait la société Nexans France pour l’accès et le maintien sur ce marché, en lui imposant une clause d’indemnisation lui permettant de s’affranchir à moindre coût de ses obligations contractuelles, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 442-6 2° b du code de commerce ;
ALORS EN TOUTE HYPOTHESE QU’en s’abstenant de rechercher si en imposant, dans ces circonstances, une clause réduisant dans de telles proportions l’indemnité allouée à son fournisseur en cas d’inexécution de ses obligations, EDF n’avait pas commis un abus au sens de l’article 1382 du code civil, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de cette disposition ;
SECOND MOYEN DE CASSATION (sur l’inexécution du second marché)
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Il est fait grief à l’arrêt confirmatif attaqué d’AVOIR débouté la société Nexans France de sa demande tendant à la condamnation solidaire d’EDF et ERDF à lui payer une somme de 1.851.746 euros en réparation du préjudice subi au titre des manquements commis par EDF/ERDF dans l’exécution des marchés.
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
AUX MOTIFS QUE : « que s’agissant du deuxième marché, la société Nexans ne démontre pas que ses niveaux de réalisation en année 1 et en année 2 étaient contraires aux stipulations du contrat ; que sur la durée du contrat, le taux de réalisation s’est avéré supérieur aux prévisions, puisqu’il s’est élevé à 109 % ; que la société Nexans sera dès lors déboutée de sa demande »
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
ALORS D’UNE PART QUE la preuve de l’exécution d’une obligation incombe à son débiteur ; qu’en déboutant la société Nexans France de sa demande indemnitaire fondée sur le non-respect par EDF de ses engagements d’achat pris dans le cadre du marché 2002/2004, au motif que « la société Nexans France ne démontre pas que ses niveaux de réalisation en année 1 et 2 étaient contraires aux stipulations du contrat », la Cour d’appel a inversé la charge de la preuve et violé l’article 1315 du code civil ;
ALORS D’AUTRE PART QUE pour s’opposer aux demandes indemnitaires de la société Nexans France fondées sur le non-respect des volumes d’achat définis dans le marché 2002/2004, EDF et ERDF faisaient valoir que ce marché avait finalement été exécuté sur 32 mois et non 24 mois, comme prévu initialement, et que, sur ces 32 mois, le taux d’achat, par rapport aux quantités initialement prévues, était de 109 % (conclusions, p. 158) ; qu’en écartant les demandes indemnitaires de Nexans France au motif encore que « sur la durée du contrat, le taux de réalisation s’est avéré supérieur aux prévisions, puisqu’il s’est élevé à 109 % », sans rechercher, comme elle y était invitée (conclusions, p. 69 s. et p. 197 s.), si EDF n’avait pas respecté ses engagements sur une durée plus longue que la durée initialement prévue et si le retard ainsi accusé par EDF et le caractère erratique des commandes qui lui avait adressées, n’avaient pas été à la source de préjudice, chiffré par un cabinet d’expert et consistant notamment dans une perte de productivité, dans l’immobilisation de l’outil de travail sur une durée plus longue, et dans le placement consécutif de 115 salariés en chômage technique, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1147 du code civil ;
- 6181 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Notion de déséquilibre - Indices - Réciprocité
- 6225 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Notion de déséquilibre - Présentation par contrat - Vente
- 6243 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Régime de l’action - Recevabilité - Délai pour agir