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CA PARIS (pôle 2 ch. 5), 17 octobre 2017

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 2 ch. 5), 17 octobre 2017
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 2 ch. 5
Demande : 16/17422
Décision : 2017/293
Date : 17/10/2017
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 11/08/2016
Numéro de la décision : 293
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CERCLAB - DOCUMENT N° 7103

CA PARIS (pôle 2 ch. 5), 17 octobre 2017 : RG n° 16/17422 ; arrêt n° 2017/293 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Considérant que la convention liant M. X. à la CNP est soumise aux dispositions du code de la consommation relatives aux clauses abusives qui régissent les conventions entre professionnel et consommateur ou non-professionnel, l'adhésion de M. X. n'ayant pas de rapport direct avec son activité professionnelle, dès lors qu'il a adhéré en sa qualité de caution du prêt souscrit par la SCI familiale créée concomitamment à l'acquisition financée afin de lui fournir un cadre juridique ;

Qu'en revanche et ainsi que le soutient l'assureur, l'appréciation du caractère abusif des clauses ne peut pas porter sur la définition de l'objet principal du contrat pour autant que ces clauses soient rédigées de façon claire et précise (article L. 132-1 du code de la consommation dans sa rédaction applicable à la date de souscription) or M. X. prétend voir annuler les dispositions de l'article 4-2 des conditions générales qui définissent l'un des risques assurés et vient caractériser l'une des obligations principales dues par l'assureur, étant au surplus relevé que la critique de M. X. ne porte que sur le fait que l'assureur pourrait décider seul si l'état du souscripteur correspond ou non à la garantie stipulée ;

Or, force est de constater que contrairement aux allégations de M. X., l'invalidité est clairement définie comme l'état d'une personne incapable d'activité lui procurant gains ou profits, aucune disposition conventionnelle ne venant conférer à l'assureur le droit exclusif d'interpréter une clause du contrat ; que la seconde condition (la date de réalisation du risque reconnue par l'assureur se situe avant l'âge limite de 60 ans) ne soumet nullement l'assuré à l'arbitraire de l'assureur, dès lors, que cette stipulation est suivie de l'indication que la date de survenance du risque sera fixée par un contrôle médical et qu'il ressort que le médecin conseil sera amené à se référer à la déclaration d'invalidité établie par le médecin traitant de l'assuré, ou à des décisions d'organisme tiers (décisions de classement en invalidité ou titres de pension) et qu'une procédure de recours à un tiers expert est prévue à l'article 6-4 des conditions générales ;

Que pour les mêmes motifs, M. X. ne peut prétendre à l'application de l'article 1174 (ancien) du code civil, qui sanctionne par la nullité les clauses potestatives ;

Considérant enfin, M. X. ne peut pas soutenir à titre infiniment subsidiaire, que l'âge limite de garantie doit s'entendre comme la survenance de son 61ème anniversaire, au visa des articles 1162 et 1157 du code civil, sauf à dénaturer une clause qui dit que la date de survenance du risque doit se situer avant l'âge limite fixé aux conditions particulières (soit 60 ans) ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 2 CHAMBRE 5

ARRÊT DU 17 OCTOBRE 2017

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 16/17422. Arrêt n° 2017/293 (9 pages). Décision déférée à la Cour : Jugement du 4 juillet 2016 - Tribunal de Grande Instance à compétence commerciale de PARIS - R.G. n° 13/12643.

 

APPELANTE :

CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL PROVENCE CÔTE D'AZUR

agissant par son Directeur Général, domicilié en cette qualité au siège, N° SIRET : XXX, Représentée par Maître Frédérique E., avocat au barreau de PARIS, toque : K0065, Assistée de Maître Bénédicte B. de la SARL B.- AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0121

 

INTIMÉS :

Monsieur X.

né le [date] à [ville]

SCI ANDI

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège, N° SIRET : YYY, Représentés et assistés de Maître Pierre-Emmanuel M., avocat au barreau de PARIS

SA CNP ASSURANCES venant aux droits de de la CNP IAM, suite à la fusion absorption de SA CNP IAM par SA CNP ASSURANCES

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège, N° SIRET : ZZZ, Partie intervenante, représentée et assistée de Maître Thierry L., avocat au barreau de PARIS, toque : D0845

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 septembre 2017, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Monsieur Christian BYK, Conseiller, et Madame Patricia LEFEVRE, Conseillère, entendue en son rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Catherine LE FRANCOIS, Présidente de chambre, Monsieur Christian BYK, Conseiller, Madame Patricia LEFEVRE, Conseillère.

Greffier, lors des débats : Madame Catherine BAJAZET

ARRÊT : - contradictoire - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile - signé par Madame Catherine LE FRANCOIS, présidente et par Madame Catherine BAJAZET, greffier présent lors de la mise à disposition.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

M.., son épouse Y. et leurs enfants ont constitué une société civile immobilière (dénommée ANDI) qui, selon acte authentique en date du 9 mars 2007, a acquis les murs d'un restaurant, exploité sous l'enseigne « Le C. » et des parties communes d'un hôtel situé à [ville G.], dont l'exploitation devait être confiée à madame, son époux ayant le statut de conjoint collaborateur. Cet achat a été financé par un prêt souscrit auprès de la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Provence Côte d'Azur (ci-après la CRCAM), le 20 février 2007, d'un montant de montant de 475.000 euros d'une durée de 180 mois, au taux d'intérêt annuel de 4,35 %.

M. et Mme X. se sont portés cautions de cet engagement et ont sollicité, le 20 février 2007, leur adhésion au contrat d'assurance collective souscrit par l'établissement bancaire auprès de la SA CNP IAM, afin de couvrir les risques décès, perte totale et irréversible d'autonomie et invalidité totale et définitive, reconnaissant avoir reçu et pris connaissance des conditions générales (CG ADI 01-2002) et des conditions particulières (figurant au verso de la demande d'adhésion).

Placé en arrêt de travail le 30 septembre 2011, en longue maladie à compter du 25 novembre 2011 et reconnu inapte par le RSI par décision du 27 décembre 2012 à effet du 1er janvier 2012, M. X. a tenté de mobiliser la garantie invalidité totale et permanente. La CNP IAM lui a notifié le 12 juin 2012, une non-garantie, au motif que l'invalidité était apparue postérieurement au 60ème anniversaire de l'assuré, qui marquait la limite de la couverture prévue au contrat, maintenant cette position après la saisine du médiateur externe de l'assureur.

Le 12 mai 2012, la SCI ANDI a transmis à la CRCAM l'attestation d'incapacité-invalidité établie par le médecin traitant de M. X. et que celui-ci avait adressée au médecin conseil de la CNP IAM, sollicitant un aménagement du prêt souscrit le 3 mars 2007, demande à laquelle il a été fait droit par avenant du 13 juillet 2012. Le prêt a été remboursé par anticipation après la vente de l'immeuble dans le courant du mois d'octobre 2014.

C'est dans ce contexte que, par acte du 23 août 2013, M. X. et la SCI ANDI ont fait assigner la CNP IAM et la CRCAM devant le tribunal de grande instance de Paris, sollicitant à titre principal, le bénéfice de la garantie souscrite et subsidiairement la condamnation de la CRCAM pour manquement à ses devoirs d'information et de conseil. Il était également sollicité, au constat de l'absence d'indication du TEG à l'avenant au contrat de prêt du 13 juillet 2012, la substitution de l'intérêt légal à l'intérêt conventionnel.

Par jugement en date du 4 juillet 2016, le tribunal a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, débouté M. X. et la SCI ANDI de leurs demandes à l'encontre de la CNP IAM, a dit que la CRCAM avait manqué à ses devoirs de conseil et d'information et l'a condamnée à verser à M. X. la somme de 50.000 euros à valoir sur sa quote-part de remboursement du crédit souscrit le 20 février 2007, majorée des intérêts au taux légal à compter du jugement outre une somme de 5000euros à titre de dommages et intérêts et une indemnité de procédure de 2.500 euros, déboutant M. X. et la SCI ANDI du surplus de leurs demandes, disant n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et que la CRCAM et la CNP IAM supporteront chacune la charge de leurs propres dépens.

La CRCAM a relevé appel le 11 août 2016 et aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 7 juillet 2017, elle demande à la cour, statuant ce que de droit sur l'appel provoqué de M. X. et de la SCI ANDI et infirmant la décision déférée en ce qu'elle entre en voie de condamnation à son encontre de débouter M. X. et la SCI ANDI de leurs demandes et de les condamner au paiement d'une somme de 7.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 3 septembre 2017, M. X. et la SCI ANDI soutiennent la confirmation du jugement déféré en ce qu'il est entré en voie de condamnation à l'encontre de la CRCAM et son infirmation en ce qu'il les a déboutés de leurs demandes à l'encontre de la CNP et de leur demande de substitution du taux d'intérêts légal au taux conventionnel, sollicitant au principal au constat d'une réalisation du risque avant son 60ème anniversaire, subsidiairement au constat de stipulations ambiguës devant être interprétées en leur faveur et encore plus subsidiairement de stipulations nulles ou non écrites, comme étant potestatives ou constituant une clause abusive, la garantie de la CNP et sa condamnation au règlement de la quote-part (en capital et intérêts) versée par M. X. au titre du remboursement du prêt soit la somme de 217.673,11 euros sauf à parfaire. En tout état de cause, ils réclament la substitution de l'intérêt légal à l'intérêt conventionnel de la date de l'avenant du 13 juillet 2012, jusqu'à la fin du contrat ainsi que la condamnation de la CRCAM au profit de M. X. au paiement d'une somme de 5.000 euros au visa de l'article 559 du code de procédure civile et la condamnation in solidum de la CNP IAM et de la CRCAM au paiement d'une indemnité de procédure de 7.500 euros et leur condamnation solidaire aux entiers dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 3 mars 2017, la SA CNP ASSURANCES soutient la confirmation du jugement déféré et la condamnation solidaire de M. X. et de la SCI ANDI au paiement d'une indemnité de procédure de 3.000 euros et aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La clôture intervenue le 3 juillet 2017 a été révoquée, avec l'accord des conseils des parties, à l'audience de plaidoiries du 11 septembre 2017 et prononcée avant l'ouverture des débats.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE, LA COUR,

Considérant sur l'appel principal de la CRCAM et l'appel incident de M. X. sur la substitution de taux, que la CRCAM rappelle que le tribunal a écarté tout manquement, par la CNP à son obligation d'information, les documents contractuels étant lisibles, clairs et sans ambiguïté quant aux limites des garanties souscrites ; qu'elle écarte l'obligation d'éclairer précisément le souscripteur, formalisée par un arrêt de la Cour de cassation de 2007, soit postérieurement à l'adhésion de M. X. ; qu'elle critique le jugement en ce qu'il a mis à sa charge l'obligation de proposer une assurance plus adaptée, alors que l'emprunt garanti finançait une opération commerciale et patrimoniale complexe intéressant l'ensemble de la famille X. de sorte qu'elle ne pouvait pas apprécier précisément le seul risque supporté par le souscripteur ; qu'elle rappelle que le préjudice ne peut constituer qu'en une perte de chance, en l'espèce inexistante puisque M. X. ne fait pas la démonstration qu'il se serait déterminé autrement et qu'il aurait souscrit une assurance complémentaire alors qu'il avait accepté une couverture limitée à 50 % du prêt ; qu'enfin, elle soutient la confirmation du jugement en ce qu'il rejette la demande de substitution de taux d'intérêts, contestant que l'exigence légale de mention du taux effectif global s'applique à un avenant destiné à assurer l'étalement du remboursement d'un prêt ;

Considérant que les intimés, caution et emprunteur répliquent que la CRCAM devaient remettre à M. X. une notice d'information, obligation qui n'est pas satisfaite en l'espèce dès lors que seules les conditions particulières et les conditions générales ont été remises ; qu'ils critiquent la présentation des conditions particulières (qui seule font apparaître la limite de 60 ans) figurant au verso de la demande d'adhésion et affirment que la limite qui ne figure pas sur la notice remise à l'adhérent lui est inopposable ; qu'ils ajoutent que la CRCAM a manqué à son devoir de conseil en ne conseillant pas à M. X. de souscrire une assurance plus adaptée à sa situation et en n'attirant pas son attention sur la cessation des garanties, avant l'expiration du prêt ; qu'enfin, ils affirment que l'obligation de mentionner un taux effectif global prévue aux articles 1907 du code civil et L. 313-2 du code de la consommation s'applique y compris aux avenants ;

 

Considérant en premier lieu, que l'article L. 312-9 du code de la consommation (dans sa rédaction applicable à la date de l'adhésion) impose à l'établissement bancaire de remettre à l'adhérent au contrat d'assurance emprunteur une notice énumérant les risques garantis et précisant toutes les modalités de la mise en jeu de l'assurance ; qu'il s'agit d'un document distinct des conditions générales et des conditions particulières, regroupant synthétiquement et de façon claire et précise les risques garantis ainsi que les modalités de mise en jeu de l'assurance ;

Qu'en outre, le banquier, qui propose à son client auquel il consent un prêt, d'adhérer au contrat d'assurance de groupe qu'il a souscrit à l'effet de garantir, en cas de survenance de divers risques, l'exécution de tout ou partie de ses engagements, est tenu de l'éclairer sur l'adéquation des risques couverts à la situation personnelle de son client, la remise de la notice ne suffisant pas à satisfaire à cette obligation, la CRCAM ne pouvant pas prétendre qu'elle n'était pas débitrice de cette obligation dès lors qu'elle n'aurait été formalisée par la Cour de cassation que dans un arrêt rendu le 6 mars 2007 soit postérieurement à l'adhésion de M. X., la jurisprudence ayant un caractère déclaratif et ayant vocation à s'appliquer à des faits nécessairement passés ;

Qu'en l'espèce, est annexée à l'acte de prêt, la demande d'adhésion à l'assurance emprunteur signée par M. X., celui-ci certifiant qu'il lui a été remis et qu'il a pris connaissance des conditions générales et particulières du contrat, ces dernières figurant au verso de sa demande d'adhésion ; que les conditions générales certes portent la mention qu'elles valent notice d'assurance, mais force est de constater qu'elles contiennent l'intégralité des dispositions conventionnelles dont celles qui sont étrangères à celles devant figurer dans la notice et qu'elles doivent se lire avec les conditions particulières, auxquelles elles renvoient dans de multiples clauses notamment lorsqu'il s'agit des âges limites ; que dès lors, le constat doit être fait que le préteur n'a pas satisfait à son obligation légale d'information ;

Que le préteur devait également éclairer M. X., sur l'adéquation du risque couvert à sa situation personnelle, obligation qui s'imposait d'autant plus que l'information légale n'avait pas été délivrée selon les formes prévues ; qu'en exécution de ce devoir, il devait attirer l'attention de l'adhérent sur la disproportion entre la durée du prêt (15 ans) et celle de la garantie (limitée au 60ème anniversaire de l'adhérent soit quatre ans et demi après la souscription du prêt) ;

Que la banque ne peut prétendre ignorer le risque supporté par M. X., dès lors que celui-ci s'est porté caution d'un prêt d'une durée de 15 années et qu'il n'était couvert au titre de l'invalidité que pour moins d'un tiers de la durée de ce prêt, le fait que cet emprunt s'inscrive dans une opération financière complexe ne modifiant en rien le risque que prend une caution qui reste tenue à se substituer à l'emprunteur défaillant dans l'exécution de ses obligations alors qu'elle serait privée de ressources, faute de pouvoir poursuivre son activité en raison de son état de santé, le fait que la garantie porte sur la moitié de l'investissement (Mme X. également caution étant assurée pour l'autre moitié) étant indifférente dès lors, que cette limite n'affecte nullement la durée de la garantie ;

Que le choix fait par la caution de se prémunir contre les risques de perte ou de diminution de leurs revenus découlant de la dégradation de son état de santé alors qu'elle s'engageait à se substituer dans l'exécution des engagements de la SCI ANDI, exclut que la perte de chance de M. X. de souscrire de meilleure garantie (dont l'assureur ne dément pas l'existence sur le marché) puisse être qualifiée d'hypothétique ; que l'indemnité allouée par les premiers juges (qui représente moins du tiers de l'indemnité - égale au capital restant dû au jour du constat de l'invalidité- qui aurait été allouée à l'assuré, mieux couvert) est à la mesure de la chance perdue, eu égard au coût financier nécessairement conséquent que la souscription d'une couverture d'une plus longue durée induisait, la décision déférée devant être confirmée sur le principe et le montant de la condamnation de la CRCAM au titre du préjudice financier subi par M. X. ;

Qu'au surplus, et ainsi que l'a retenu le tribunal M. X., atteint d'une lourde pathologie et soumis à de lourds traitements a été confronté à un refus de garantie, alors qu'il devait toujours sa garantie au titre d'un prêt souscrit par la SCI familiale, les tracas et l'angoisse en résultant étant à l'origine d'un préjudice moral dont la réparation a justement été appréciée par les premiers juges, leur décision devant également être confirmée sur ce point ;

Considérant en second lieu, que le taux effectif global tel qu'il est dit à l'article L. 313-1 alinéa 1 du code de la consommation doit être mentionné dans tout écrit constatant un contrat de prêt régi par la présente section (y compris immobilier) ; qu'il s'en déduit que ce texte n'est pas applicable aux avenants à un contrat de prêt précédemment conclu, dont l'objet est d'assurer, comme en l'espèce, l'étalement du prêt, sans modification de ses conditions initiales ; que dès lors, l'appel incident des intimés ne peut pas prospérer ;

Considérant enfin que M. X. et la SCI ANDI qui sont appelants incidents de la décision rendue à l'encontre de la CRCAM prétendent à l'allocation de dommages et intérêts pour appel abusif ; qu'ils se contentent d'évoquer les difficultés d'exécution de la décision déférée, pourtant assortie de l'exécution provisoire dont ils déduisent un usage dilatoire de la voie de recours ; que force est de constater qu'ils ne prennent pas la peine de caractériser le préjudice qui en serait résulté et qu'ils auraient l'un et/ou l'autre subi ; que dès lors, ils seront déboutés de ce chef de demande ;

 

Considérant s'agissant de leur appel dirigé contre le refus de la CNP IAM de mobiliser la garantie invalidité, M. X. et la SCI ANDI font valoir en premier lieu, que la pathologie dont souffre M. X. (une tumeur maligne de la vessie) dont les premières manifestations sont antérieures à son 60ème anniversaire constitue la réalisation du risque assuré prévu à l'article 4-2 des conditions générales, subsidiairement, ils invoquent les dispositions du code de la consommation et celle de l'article 1190 du code civil pour prétendre à une interprétation du contrat, en leur faveur, disant que la demande d'adhésion ne fait nullement apparaître que M. X. serait assuré pour une durée moindre que celle du prêt, ajoutant que la limite de garantie est « difficile à déceler dans la mesure où elle ne ressort que de la lecture combinée de documents distincts, et ce d'autant que la prime n'a pas varié à l'arrivée de son 60ème anniversaire » ; qu'ils soutiennent que le code de la consommation doit recevoir application, y compris dans ses dispositions relatives aux clauses abusives et avancent au visa de celles-ci et de l'ancien article 1174 du code civil, que dans la mesure où l'article 4-2 du contrat d'assurance conditionne l'octroi de la garantie à la reconnaissance par l'assureur de la survenance de la réalisation du risque avant l'âge limite indiqué aux conditions particulières, il confère à la CNP IAM « en l'absence de critères objectifs conditionnant sa mise en œuvre, toute latitude pour décider seule si l'état du souscripteur correspond ou non à la garantie stipulée et ainsi refuser d'exécuter son obligation de garantie » ; qu'en dernier lieu, ils affirment que la limite d'âge est le 61ème anniversaire de l'adhérent et non avant le 60ème que le risque doit être réalisé, ajoutant que le fait que l'âge limite d'adhésion et de garantie soient identiques priverait de tout sens une adhésion à l'approche du 60ème anniversaire ;

Que la CNP réplique que les stipulations contractuelles sont sans ambiguïté, quant aux conditions de la garantie, due jusqu'au 60ème anniversaire de M. X. ; qu'elle conteste l'application du code de la consommation, le contrat d'assurance étant l'accessoire d'un prêt professionnel ajoutant que l'appréciation du caractère abusif d'une clause ne peut pas porter sur la définition de l'objet principal du contrat, en l'espèce, sur les clauses définissant les garanties ;

 

Considérant que, aux termes de l'article 4-2 des conditions générales de la police d'assurance dont M. X. a reconnu, en signant la demande d'adhésion qu'elles lui avaient été, avec les conditions particulières, remises :

« l'assuré est en état d'invalidité lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :

- l'invalidité dont il est atteint le place dans l'impossibilité définitive de se livrer à toute occupation et/ou activité rémunérée ou lui donnant gain ou profit ;

- la date de réalisation du risque reconnue par l'assureur se situe avant l'âge limite indiqué aux conditions particulières » ;

Que dès lors que le tableau à double entrée figurant aux conditions particulières fixe cet âge limite à 60 ans, la phrase sus-mentionnée ne peut se lire que comme imposant que la date de réalisation du risque se situe avant l'âge de 60 ans, cette disposition conventionnelle étant sans ambiguïté et n'étant nullement sujette à interprétation ;

Qu'il ressort également que le risque garanti est non la maladie (ou l'accident) mais l'invalidité soit selon la définition la plus commune, l'état d'une personne incapable d'activité, celle-ci ne constituant la réalisation du risque assuré que lorsqu'elle atteint un degré de gravité tel qu'elle place l'assuré dans l'impossibilité définitive de se livrer à une activité lucrative, aucune disposition contractuelle ne venant altérer cette définition ; qu'en effet, l'article 6-2 des conditions générales partiellement cité par M. X. et la SCI venant tout au contraire la corroborer, l'adhérent voulant mobiliser la garantie invalidité devant produire, selon qu'il est ou non salarié la décision de classement en 2e ou 3ème catégorie ou la copie du titre de pension d'invalidité totale, la production d'un certificat médical indiquant notamment la date de début de la maladie ou si le décès est ou non dû à un risque exclu se rapportant aux autres garanties (ITT et décès) ; qu'elle n'est pas plus contredite par la faculté qu'a l'assureur d'exclure, lors de l'adhésion, certaines pathologies (article 3) ou l'exclusion des accidents, blessures ou maladie ou mutilation résultant d'un fait volontaire de l'assuré (article 5) ou par le recours à un contrôle médical pour fixer la date de survenance du risque à partir notamment des renseignements contenus dans l'attestation sus-mentionnée, le fait que ces renseignements portent sur la pathologie à l'origine de l'invalidité, la date des premiers troubles ainsi que les arrêts de travail étant indifférent dès lors qu'il s'agit de renseigner le médecin conseil sur d'éventuelles exclusions et lui permettre de prendre position sur la consolidation de l'état de santé de l'adhérent et donc de caractériser la date d'apparition de l'invalidité ;

Qu'est également inopérant le recours à la notion de prestation différée, spécifique à la protection collective régie par le code de la sécurité sociale, l'article 7 de la loi Evin du 31 décembre 1989 réglant le sort des prestations, qu'elles soient immédiates ou différées, en cas de résiliation ou de non-renouvellement du contrat d'assurance mais ne prenant nullement position sur la définition du risque (invalidité) garanti, dont l'une des conditions est, en l'espèce, le constat d'une invalidité acquise durant la période de garantie ;

Qu'enfin, la possibilité conventionnelle de souscrire la garantie invalidité jusqu'à l'âge de soixante ans, qui constitue également la date limite de la réalisation du risque (qui priverait d'aléa cette souscription au seuil du soixantième anniversaire de l'assuré, l'assureur ne supportant alors aucun risque) est indifférente en l'espèce, M. X. ayant souscrit la garantie litigieuse plusieurs années avant son soixantième anniversaire ;

Qu'il s'ensuit que le contrat subordonne la garantie à deux conditions, une invalidité plaçant l'assuré dans l'incapacité définitive de se livrer à une activité lucrative et que sa survenance se situe avant l'âge limite de soixante ans, or en l'espèce, à la date de son soixantième anniversaire, le 27 août 2011, si M. X. ressentait les premières manifestations de la pathologie qui sera diagnostiquée au cours du mois d'octobre 2011, aucune réduction de ses capacités à se livrer à ses activités n'a été caractérisée avant le 30 septembre 2011, date de son premier arrêt de travail et qui se situe après la période de garantie ;

Considérant que M. X. et la SCI ANDI ne peuvent invoquer les dispositions relatives à l'interprétation des conventions qu'elles ressortent du code civil (article 1190) ou du code de la consommation (article L. 133-22) dès lors, que les stipulations contractuelles en cause, qu'elles se rapportent à la définition du risque ou à la date de sa survenance (avant l'âge limite de 60 ans) sont claires, précises et dépourvues d'ambiguïté et que les dispositions légales invoquées énoncent, que dans le doute, la convention s'interprète contre le proposant d'un contrat d'adhésion (ou en faveur du consommateur ou du non-professionnel) ;

Considérant que la convention liant M. X. à la CNP est soumise aux dispositions du code de la consommation relatives aux clauses abusives qui régissent les conventions entre professionnel et consommateur ou non-professionnel, l'adhésion de M. X. n'ayant pas de rapport direct avec son activité professionnelle, dès lors qu'il a adhéré en sa qualité de caution du prêt souscrit par la SCI familiale créée concomitamment à l'acquisition financée afin de lui fournir un cadre juridique ;

Qu'en revanche et ainsi que le soutient l'assureur, l'appréciation du caractère abusif des clauses ne peut pas porter sur la définition de l'objet principal du contrat pour autant que ces clauses soient rédigées de façon claire et précise (article L. 132-1 du code de la consommation dans sa rédaction applicable à la date de souscription) or M. X. prétend voir annuler les dispositions de l'article 4-2 des conditions générales qui définissent l'un des risques assurés et vient caractériser l'une des obligations principales dues par l'assureur, étant au surplus relevé que la critique de M. X. ne porte que sur le fait que l'assureur pourrait décider seul si l'état du souscripteur correspond ou non à la garantie stipulée ;

Or, force est de constater que contrairement aux allégations de M. X., l'invalidité est clairement définie comme l'état d'une personne incapable d'activité lui procurant gains ou profits, aucune disposition conventionnelle ne venant conférer à l'assureur le droit exclusif d'interpréter une clause du contrat ; que la seconde condition (la date de réalisation du risque reconnue par l'assureur se situe avant l'âge limite de 60 ans) ne soumet nullement l'assuré à l'arbitraire de l'assureur, dès lors, que cette stipulation est suivie de l'indication que la date de survenance du risque sera fixée par un contrôle médical et qu'il ressort que le médecin conseil sera amené à se référer à la déclaration d'invalidité établie par le médecin traitant de l'assuré, ou à des décisions d'organisme tiers (décisions de classement en invalidité ou titres de pension) et qu'une procédure de recours à un tiers expert est prévue à l'article 6-4 des conditions générales ;

Que pour les mêmes motifs, M. X. ne peut prétendre à l'application de l'article 1174 (ancien) du code civil, qui sanctionne par la nullité les clauses potestatives ;

Considérant enfin, M. X. ne peut pas soutenir à titre infiniment subsidiaire, que l'âge limite de garantie doit s'entendre comme la survenance de son 61ème anniversaire, au visa des articles 1162 et 1157 du code civil, sauf à dénaturer une clause qui dit que la date de survenance du risque doit se situer avant l'âge limite fixé aux conditions particulières (soit 60 ans) ;

Considérant que la décision déférée sera, par conséquent, également confirmée en ce qu'elle déboute M. X. de ses prétentions à l'encontre de la CNP IAM ;

Considérant que les premiers juges ont justement alloué une indemnité de procédure à M. X., indemnité mise à la charge de la CRCAM ; que s'agissant des frais irrépétibles exposés par les parties devant la cour, la CRCAM sera condamnée à rembourser les frais irrépétibles de M. X. dans la limite de 2.000 euros, ce dernier devant supporter dans cette même limite les frais exposés par la CNP IAM pour assurer sa défense devant la cour ;

Considérant que les dépens seront supportés par moitié par M. X. et la SCI ANDI d'une part et la CRCAM d'autre part ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant en dernier ressort, contradictoirement et publiquement par mise à disposition de la décision au greffe,

Confirme le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris, le 4 juillet 2016 ;

Y ajoutant,

Déboute M. X. et la SCI ANDI de leurs demandes de dommages et intérêts pour appel abusif ;

Condamne la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Provence Côte-d'Azur à payer à M. X. la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. X. à payer à la CNP IAM la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Fait masse des dépens d'appel et dit qu'ils seront supportés par moitié par la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Provence Côte-d'Azur d'une part et M. X. et la SCI ANDI d'autre part ;

Dit que les dépens seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER                                LA PRÉSIDENTE