CA AIX-EN-PROVENCE (1re ch. D), 23 février 2005
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 730
CA AIX-EN-PROVENCE (1re ch. D), 23 février 2005 : RG n° 00/00111 ; arrêt n° 2005/129
Publication : Juris-Data n° 277692
Extrait : « Aux termes de la clause e) du contrat, il est précisé que « tout retard de paiement entraînera une majoration dite indemnité de retard de 1,5 % par mois ». Monsieur X. soutient qu'une telle clause est abusive au regard de la recommandation n° 79/02 du 30 janvier 1979 de la Commission des clauses abusives et de l'article L. 132-1 du Code de la consommation […]
La SARL BIOT FORAGE, sans répondre à cette argumentation, objecte que cette demande, formulée pour la première fois devant la cour, doit être déclarée irrecevable au sens de l'article 564 du nouveau Code de procédure civile. Il convient cependant de constater que ce moyen ne constitue qu'une défense à la prétention de la SARL BIOT FORAGE qui sollicite le bénéfice de cette clause jusqu'au paiement intégral de sa facture. Il est donc parfaitement recevable. […]
Il est certain qu'une telle clause qui a pour effet de dispenser le professionnel des formalités prévues par la loi, plus particulièrement celle [de] respecter l'obligation de mettre en demeure pour faire courir les intérêts de retard, doit être considérée comme abusive et en conséquence, réputée non écrite. »
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
PREMIÈRE CHAMBRE D
ARRÊT DU 23 FÉVRIER 2005
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Rôle n° 00/00111. Arrêt au fond du 23 février 2005 n° 2005/129.
Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 28 octobre 1999 enregistré au répertoire général sous le n° 96/1387.
APPELANT :
Monsieur X.
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro […] du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de [ville]), né le [date] à [ville], demeurant [adresse], représenté par la SCP TOLLINCHI - PERRET-VIGNERON, avoués à la Cour, plaidant par Maître Michèle MARTINEZ, avocat au barreau de GRASSE
INTIMÉE :
SARL BIOT FORAGE
prise en la personne de son gérant en exercice, dont le siège est [adresse], représentée par la SCP BOISSONNET- ROUSSEAU, avoués à la Cour
[minute page 2]
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 26 janvier 2005 en audience publique devant la Cour composée de : Madame Anne-Marie POIRIER-CHAUX, Président Monsieur Xavier FARJON, Conseiller, Madame Marie-Annick VARLAMOFF, Conseiller, qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Monsieur Christian GARRIGUES.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 23 février 2005.
ARRÊT Contradictoire, Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 février 2005, Signé par Madame Anne-Marie POIRIER-CHAUX, Président et Monsieur Christian GARRIGUES, greffier présent lors de la mise à disposition au greffe de la décision.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 3] FAITS ET PROCÉDURE :
Par jugement rendu contradictoirement le 28 octobre 1999, le tribunal de grande instance de GRASSE a :
- rejeté la demande de nullité du contrat de forme du 2 février 1993 et toutes les demandes subséquentes présentées par Monsieur X.,
- condamné Monsieur X. à payer à la SARL BIOT FORAGE la somme de 29.310,46 francs outre intérêts au taux contractuel de 1,5 % par mois à compter du 1er mai 1994,
- rejeté le surplus des demandes.
Monsieur X. a interjeté appel de ce jugement par déclaration déposée le 29 décembre 1999.
Les parties ont conclu.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 27 décembre 2004.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Monsieur PIROMALLI, appelant, demande à la cour dans ses conclusions récapitulatives déposées le 20 décembre 2004 :
- de réformer le jugement,
sur la procédure,
- de constater que les pièces et conclusions notifiées par la SARL BIOT FORAGE le 28 octobre 1999, 4 jours avant l'ordonnance de clôture, l'ont été tardivement et seront écartées des débats,
sur le fond,
à titre principal.
- de juger qu'il a été victime de manœuvres dolosives de la part de la SARL BIOT FORAGE sans lesquelles il n'aurait pas contracté,
- de prononcer la nullité du contrat de forage,
- de condamner la SARI, BIOT FORAGE à lui restituer les acomptes versés à hauteur de 6.400 francs,
- de la condamner à lui verser la somme de 2.500 euros à titre de dommages et intérêts, à titre subsidiaire,
- de constater qu'il a versé la somme de 6.400 francs à titre d'acompte,
- de juger en conséquence qu'une somme de 22.910,46 francs et non de 29.310,46 francs doit être retenue au titre de la somme restant due,
- de confirmer le jugement en ce qu'il a jugé que l'indemnité contractuelle de 5.000 francs prévue à titre de clause pénale est manifestement excessive et a débouté la SARL BIOT FORAGE de sa demande à ce titre,
- de constater que la clause e) du contrat de forage est abusive,
- en conséquence de l'annuler et de juger que seuls les intérêts moratoires au taux légal pourraient être appliqués,
- de lui accorder les délais de règlement les plus larges,
- de débouter la SARL BIOT FORAGE de sa demande en dommages et intérêts,
- de condamner la SARL BIOT FORAGE à lui payer la somme de 2.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
La SARL BIOT FORAGE, demande à la cour dans ses conclusions récapitulatives déposées le 27 décembre 2004,
- de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Monsieur X. de ses demandes,
et par la voie d'un appel incident,
- [minute page 4] de condamner Monsieur X. à lui verser la somme de 1.948.87 euros augmentés des intérêts au taux contractuel de 1,5 % à compter du 15 novembre 1995 et jusqu'au jour du paiement intégral, outre la somme de 328 euros à titre de dommages et intérêts et celle de 1.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Elle conclut par ailleurs au rejet des demandes nouvelles formées par Monsieur X. devant la cour au titre d'une clause abusive et d'octroi de délais de paiement.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIVATION :
Il sera statué par décision contradictoire en application de l'article 467 du nouveau code de procédure civile.
Sur la procédure :
Monsieur X. fait état de conclusions et de communication de pièces tardives devant le premier juge et demande à la cour que tant ces écritures que ces pièces soient écartées des débats.
Il convient de constater que les parties ont eu un nouveau débat contradictoire devant la cour dont il n'est nullement allégué qu'il n'aurait pas été loyal. Dès lors, une telle demande qui ne concerne que la procédure devant le premier juge ne peut qu'être rejetée.
Sur le contrat signé entre les parties :
Le 2 février 1993, la SARL BIOT FORAGE, entreprise générale de forage, a tout à la fois remis à Monsieur X. un devis estimatif pour « un forage d'un diamètre de 4" et d'une profondeur de 40 mètres » d'un montant de 21.152,31 francs et un contrat de forage au verso duquel étaient précisées ses conditions d'intervention.
Monsieur X. n'aurait retourné ce contrat signé que courant avril 1994, soit plus d'un an plus tard, accompagné d'un chèque de 6.000 francs à titre d'arrhes tel qu'exigé sur ce document.
Il est constant que les travaux ont débuté le 18 avril 1994 pour se terminer le 21 avril suivant alors même que le forage avait atteint la profondeur de 60 mètres à la demande écrite de Monsieur X., sans cependant qu'il y ait eu découverte d'eau.
Sur le dol :
Monsieur X. a refusé le paiement de la facture d'un montant de 35.710,46 francs qui lui a été adressée le 1er mai 1994 au motif qu'il a été trompé par la SARL BIOT FORAGE qui s'était engagée, par l'intermédiaire de son sourcier, à trouver un débit d'eau important à 40 m de profondeur.
Il sollicite la nullité du contrat estimant avoir été victime d'un dol.
Pour tenter d'en justifier, il verse aux débats une attestation émanant de Monsieur Y. qui déclare « J’atteste être présent avec Monsieur X. et que j’ai entendu le sourcier envoyé par la SARL BIOT FORAGE certifier trouver de l’eau dans le forage qu’il allait effectuer à la profondeur de 40 mètres et avec un débit de 12.000 litres par jour ».
Cependant, la SARL BIOT FORAGE conteste employer un sourcier et fait justement valoir que celui-ci ne peut nullement être considéré comme son mandataire ou son salarié. Elle ajoute qu'elle n'est pas tenue à une obligation de résultat et se réfère à ses conditions d'intervention telles que décrites au contrat et notamment à la clause f) « en aucun cas nous ne garantissons la présence d'eau ou les débits, la simple exécution des travaux entraîne l'exigibilité immédiate de leur paiement ».
[minute page 5] Force est de constater que Monsieur X., qui d'ailleurs ne précise pas dans quelles conditions il a rémunéré le sourcier cité, ne justifie pas des manœuvres dolosives à l'initiative de la SARL BIOT FORAGE qui l'auraient incité à contracter, étant observé qu'il a lui-même sollicité que le forage soit porté à la profondeur de 60 mètres.
Sur le montant de la facture :
Hors le problème des agios qui sera examiné ci-dessous, le montant des travaux effectués par la SARL BIOT FORAGE suivant facture en date du 1er mai I994 s'élève à la somme de 35.710,46 francs, déduction devant être faite des acomptes versés par Monsieur X. à hauteur de 6.400 francs, soit un solde dû de 29.310,46 francs (4.468,35 euros).
Sur les agios :
Aux termes de la clause e) du contrat, il est précisé que « tout retard de paiement entraînera une majoration dite indemnité de retard de 1,5% par mois ».
Monsieur X. soutient qu'une telle clause est abusive au regard de la recommandation n° 79/02 du 30 janvier 1979 de la Commission des clauses abusives et de l'article L. 132-1 du Code de la consommation [N.B. : minute originale mentionnant l’article L. 131-1].
* sur la recevabilité de cette demande
La SARL BIOT FORAGE, sans répondre à cette argumentation, objecte que cette demande, formulée pour la première fois devant la cour, doit être déclarée irrecevable au sens de l'article 564 du nouveau Code de procédure civile. Il convient cependant de constater que ce moyen ne constitue qu'une défense à la prétention de la SARL BIOT FORAGE qui sollicite le bénéfice de cette clause jusqu'au paiement intégral de sa facture. Il est donc parfaitement recevable.
* sur la validité de la clause fixant une indemnité de retard de 1,5 %
Il est certain qu'une telle clause qui a pour effet de dispenser le professionnel des formalités prévues par la loi, plus particulièrement celle [de] respecter l'obligation de mettre en demeure pour faire courir les intérêts de retard, doit être considérée comme abusive et en conséquence, réputée non écrite.
Ainsi, Monsieur X. sera condamné à payer à la SARL BIOT FORAGE la somme de 29.310,46 francs, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure qui lui a été adressée le 6 avril 1995.
Sur la clause pénale :
Il est également prévu, toujours dans ce même paragraphe f) du contrat, que « si le règlement de la facture devait être obtenue par voie contentieuse ou judiciaire, une somme forfaitaire de 5.000 francs HT soit 762,25 euros serait réclamée à la juridiction saisie, à titre de clause pénale, pour tenir compte des honoraires et frais irrépétibles découlant de cette action »
De la formulation de cette clause, il apparaît que malgré la dénomination choisie, elle est destinée à compenser les frais irrépétibles exposés par la SARL BIOT FORAGE et laissée à la libre appréciation de la juridiction saisie. A l'évidence, elle fait double emploi avec la demande formée au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Il n'y a donc pas lieu d'y faire droit.
[minute page 6]
Sur la demande de la SARL BIOT FORAGE :
Celle-ci ne justifie nullement d'un préjudice autre que celui qui sera réparé par le paiement de sa facture augmentée des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure. Elle sera déboutée de sa demande à ce titre.
Sur les délais de paiement :
En raison de la procédure, Monsieur X. a d'ores et déjà bénéficié de délais de fait particulièrement longs, étant ajouté qu'il ne fournit aucun élément relatif à sa situation financière. Il sera débouté de cette demande.
Sur les frais irrépétibles :
Il apparaît équitable d'allouer à la SARL BIOT FORAGE la somme de 1.000 euros à ce titre.
Monsieur X. qui succombe supportera les entiers dépens.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort
En la forme,
Reçoit Monsieur X. en son appel principal et la SARL BIOT FORAGE en son appel incident,
Au fond,
Confirme le jugement en date du 28 octobre 1999 en ce qu'il a débouté Monsieur X. de sa demande en nullité du contrat de forage conclu avec la SARL BIOT FORAGE, l'a condamné au principal à lui verser la somme de 4.468,35 euros et l'a déchargé de la somme fixée à titre de clause pénale,
L'infirme en ce qu'il a dit que la somme de 4.468,35 euros portera intérêts au taux contractuel de 1,5 % par mois à compter du 1er mai 1994,
Dit que cette somme portera intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure en date du 6 avril 1995,
Y ajoutant,
Déboute la SARL BIOT FORAGE de sa demande en dommages et intérêts,
Déboute Monsieur X. de sa demande en octroi de délai de paiement.
Condamne Monsieur X. à verser à SARL BIOT FORAGE la somme de 1.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
[minute page 7] Condamne Monsieur X. aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile et dans le cadre de la loi sur l'aide juridictionnelle.
- 5730 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Procédure - Voies de recours - Appel
- 6092 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Contenu initial du contrat - Intelligibilité (rédaction et langue)
- 6123 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Inexécution du contrat - Responsabilité du consommateur - Retard d’exécution