CA RENNES (2e ch.), 26 janvier 2018
CERCLAB - DOCUMENT N° 7411
CA RENNES (2e ch.), 26 janvier 2018 : RG n° 14/09811 ; arrêt n° 44
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « Les parties conviennent que l'offre de prêt soumise à Mme Y. est un contrat type susceptible d'être utilisé pour des montants inférieurs ou supérieurs à 21.500 euros ; le rappel des dispositions du code de la consommation n'est pas suffisant à exprimer clairement l'intention des parties de s'y soumettre dans la mesure où les dispositions de l'article L. 311-3 du même code sont également rappelées, notamment en ce que sont exclus du champ d'application les prêts d'un montant supérieur à 21.500 euros. »
2/ « L'appelante invoque des arguments relatifs au crédit excessif, les dispositions de l'article 1152 précité, désormais reprises sous le nouvel article 1231-5 du code civil depuis le 1er octobre 2016, qui permettent au juge de modérer la pénalité manifestement excessive, et l'article L. 132-1 (ancien) du code de la consommation concernant les clauses abusives et son annexe visant une indemnité d'un montant disproportionnellement élevé. Ce faisant une indemnité de 8 % du capital restant dû n'est ni manifestement excessive, ni d'un montant disproportionnellement élevé ; il sera fait droit à l'appel incident de la société Consumer Finance sur ce chef et la demande de l'appelante de voir déclarer la clause non écrite rejetée ; s'agissant de dommages et intérêts, la somme sera assortie de l'intérêt au taux légal. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
DEUXIÈME CHAMBRE
ARRÊT DU 26 JANVIER 2018
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 14/09811. Arrêt n° 44.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président, Madame Isabelle LE POTIER, Conseiller, Madame Pascale DOTTE-CHARVY, Conseiller, rédacteur,
GREFFIER : Madame Marlène ANGER, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS : A l'audience publique du 14 novembre 2017
ARRÊT : Contradictoire, prononcé publiquement le 26 janvier 2018 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats, après prorogation du délibéré
APPELANTE :
Madame X. divorcée Y.
née le [date] à [ville], Représentée par Maître Michel K. de la SCP K.-G., avocat au barreau de BREST
INTIMÉE :
SA CA CONSUMER FINANCE (anciennement dénommée SOFINCO)
Représentée par Maître Erwan L., avocat au barreau de RENNES
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS et PROCÉDURE :
Suivant offre acceptée le 25 juillet 2007, la société Sofinco désormais dénommée SA CA Consumer Finance (la société Consumer Finance) a consenti à Mme X. divorcée Y. (Mme Y.) un prêt personnel d'un montant de 40.000 euros au taux nominal annuel de 8,338 % et d'une durée de 120 mois, remboursable par mensualités de 541,24 euros avec assurance.
En raison d'échéances impayées depuis octobre 2011, la société de crédit s'est prévalue de la clause d'exigibilité et mis en demeure l'emprunteur de lui régler la somme de 32.051,23 euros par lettre du 20 février 2013, puis l'a fait assigner en paiement par acte du 8 avril 2013.
Par jugement en date du 8 octobre 2014 assorti de l'exécution provisoire, le tribunal de grande instance de Brest a :
- condamné Mme Y. à payer à la société Consumer Finance la somme de 29.849,13 euros avec intérêts au taux contractuel de 8,338 % sur la somme de 27.526,36 euros à compter du 21 février 2013 outre la somme de 1 euro au titre de la clause pénale réduite,
- dit que Mme Y. pourra se libérer de sa dette par 24 mensualités de 1.300 euros, la dernière mensualité soldant la dette, avec clause de déchéance du terme,
- débouté les parties de toutes leurs autres demandes,
- laissé les dépens à la charge de Mme Y. et dit qu'ils seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Mme Y. a formé appel contre cette décision, demande à la cour d'infirmer le jugement déféré et en conséquence à titre principal de :
- ordonner la déchéance du droit aux intérêts et dire qu'elle ne sera tenue aux intérêts au taux légal qu'à compter du 20 février 2013,
- débouter la société Consumer Finance de sa demande de condamnation à payer la somme de 31.811,98 euros outre les intérêts au taux de 8,338 % à compter du 18 février 2013,
- confirmer le jugement en ce qu'il a réduit à la somme de 1 euro l'indemnité contractuelle éventuellement due,
- condamner la société Consumer Finance au paiement de l'amende de 1.500 euros prévue à l'ancien article L. 311-34,
subsidiairement de :
- déclarer la clause 4.2 sur l'indemnité contractuelle de 8 % comme étant non écrite,
- condamner la société Consumer Finance à lui payer la somme de 31.811,98 euros outre les intérêts au taux de 8,338 % à compter du 20 février 2013, et ordonner la compensation de cette somme avec toute somme qui pourrait être due à la société Consumer Finance par l'appelante,
à titre infiniment subsidiaire : accorder à l'appelante des délais de paiement sur deux années sur toute somme éventuellement due,
en tout état de cause :
- condamner la société Consumer Finance à lui payer la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause de première instance et de 2.000 euros en cause d'appel,
- condamner la société Consumer Finance aux entiers dépens.
La société Consumer Finance conclut à la réformation du jugement en ce qu'il a réduit le montant de la clause pénale, le confirmer pour le surplus et en conséquence de :
- condamner Mme Y. à lui payer la somme de 31.811,98 euros avec intérêts au taux de 8,338 % l'an à compter du 18 février 2013,
- débouter Mme Y. de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- si Mme Y. est autorisée à s'acquitter de sa dette par mensualités en application de l'article 1144-1 du code civil, dire qu'à la moindre défaillance le solde redeviendra immédiatement exigible,
- condamner l'appelante au paiement d'une somme de 2.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu'aux dernières conclusions déposées pour Mme Y. le 2 mai 2017, et pour la société Consumer Finance le 7 mai 2015.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 septembre 2017.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE :
Les articles du code de la consommation cités ci-dessous sont ceux du code dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi du 1er juillet 2010, applicable aux contrats dont l'offre a été émise avant le 1er mai 2011.
En l'espèce les conditions générales de l'offre de prêt personnel émise le 31 mai 2007 pour un montant de 40.000 euros et acceptée par l'emprunteur le 25 juillet 2007 précisent que les articles L. 311-1 à L. 311-37 du code de la consommation ne s'appliquent pas aux opérations à caractère professionnel, à celles dont le montant est supérieur à celui fixé par l'article D. 311-1 du code de la consommation (21.500 euros, décret 2001-96 du 02 février 2001) ainsi qu'à celles d'une durée égale ou inférieure à trois mois, reprenant ainsi clairement les dispositions des 2e et 3e de l'article L. 311-3.
Les parties conviennent que l'offre de prêt soumise à Mme Y. est un contrat type susceptible d'être utilisé pour des montants inférieurs ou supérieurs à 21.500 euros ; le rappel des dispositions du code de la consommation n'est pas suffisant à exprimer clairement l'intention des parties de s'y soumettre dans la mesure où les dispositions de l'article L. 311-3 du même code sont également rappelées, notamment en ce que sont exclus du champ d'application les prêts d'un montant supérieur à 21.500 euros.
C'est par conséquent à juste titre que le tribunal a considéré que le prêt de l'espèce échappait à la législation protectrice du crédit à la consommation et aux exigences relatives au bordereau de rétractation, à l'information sur l'assurance et à la taille des caractères pour débouter Mme Y. de sa demande de déchéance du droit aux intérêts.
La demande de l'appelante de voir condamner la société Consumer Finance au paiement de l'amende de 1.500 euros prévue par l'ancien article L. 311-34, qui sanctionne le non-respect des formalités prescrites aux anciens articles L. 311-8 à L. 311-13 et de prévoir un formulaire détachable, est sans objet.
Par ailleurs l'appelante demande également à titre principal le débouté de la demande de condamnation à paiement de la somme de 31.811,98 euros, outre la confirmation de la réduction de l'indemnité contractuelle ; l'intimée quant à elle demande de réformer le jugement en ce qu'il a réduit le montant de la clause pénale, de le confirmer pour le surplus et en conséquence de condamner l'appelante à lui payer la somme de 31.811,98 euros avec intérêts au taux de 8,338 % à compter du 18 février 2013.
Or le tribunal a condamné Mme Y. à payer la somme de 29.849,13 euros avec intérêts au taux contractuel de 8,338 % sur la somme de 27.526,36 euros à compter du 21 février 2013 au vu des pièces produites par le créancier et notamment la copie de sa lettre de mise en demeure adressée le 20 février 2013, sans production de l'avis de réception correspondant, et un décompte arrêté au 20 février 2013 ; la somme de 27.526,36 euros correspond au capital restant dû et échu impayé, et le surplus aux intérêts échus, à courir et aux primes d'assurance impayées.
Mme Y. ne fait valoir aucun moyen concernant un débouté total de la demande en paiement et l'organisme prêteur aucune remise en cause partielle de la condamnation telle que rappelée ; par conséquent la décision sera confirmée sur ce chef.
L'appelante reprend ses moyens de première instance concernant l'indemnité de 8 % ; le tribunal a considéré que la clause pénale n'était pas abusive au regard de l'économie du contrat et était susceptible de modération en application de l'article 1152 (ancien) du code civil.
Les parties conviennent que la somme réclamée de 2.202,10 euros correspond à 8 % du capital restant dû conformément à la clause 4.2 du contrat.
L'appelante invoque des arguments relatifs au crédit excessif, les dispositions de l'article 1152 précité, désormais reprises sous le nouvel article 1231-5 du code civil depuis le 1er octobre 2016, qui permettent au juge de modérer la pénalité manifestement excessive, et l'article L. 132-1 (ancien) du code de la consommation concernant les clauses abusives et son annexe visant une indemnité d'un montant disproportionnellement élevé.
Ce faisant une indemnité de 8 % du capital restant dû n'est ni manifestement excessive, ni d'un montant disproportionnellement élevé ; il sera fait droit à l'appel incident de la société Consumer Finance sur ce chef et la demande de l'appelante de voir déclarer la clause non écrite rejetée ; s'agissant de dommages et intérêts, la somme sera assortie de l'intérêt au taux légal.
Le tribunal a rejeté les demandes reconventionnelles de Mme Y. au titre d'une prétendue faute de l'organisme prêteur en retenant qu'il avait satisfait à son obligation de conseil et à son devoir de mise en garde, compte tenu des vérifications faites et des caractéristiques du crédit ; pour ce faire, le tribunal a considéré que :
- l'offre était destinée à restructurer 9 crédits à la consommation, pour des mensualités de remboursement d'un total de 1 470 euros et un taux d'endettement de 68,27 %, le crédit souscrit, remboursable par mensualités de 492,49 euros, ramenant le taux d'endettement à 32,11 %,
- lesdites échéances ont d'ailleurs été remboursées entre septembre 2007 et septembre 2011, soit durant 4 années,
- une analyse du projet et de sa viabilité a été effectuée par la société de crédit, à laquelle Mme Y. avait communiqué ses feuilles de paie, sa situation immobilière et conjugale, ses relevés bancaires et crédits en cours,
- Mme Y. a continué à souscrire de nouveaux crédits à la consommation après cette restructuration, situation dégradant à nouveau son budget, ce qui a motivé la décision du juge du surendettement de la considérer comme débitrice de mauvaise foi.
L'appelante reprend manifestement les mêmes arguments qu'en première instance, et l'analyse des pièces produites par la société Consumer Finance (pièces adressées par l'emprunteur et bilan financier signé) tout comme celle du jugement du juge du surendettement en date du 13 juin 2012 ne peut que conduire la cour à adopter les motifs des premiers juges pour confirmer le rejet, étant de plus ajouté que si la société Consumer Finance n'a prononcé la déchéance du terme qu'en février 2013 alors que Mme Y. ne réglait plus les échéances depuis septembre 2011, elle a saisi la commission de surendettement le 6 décembre 2011.
Enfin il est sans intérêt d'examiner la demande de délai de paiement sur deux ans, délai accordé par la décision dont appel qui est assortie de l'exécution provisoire et dont l'appelante a de fait bénéficié, compte tenu de la date du présent arrêt.
Les dépens et le rejet des frais irrépétibles de première instance seront confirmés ; appelante qui succombe, Mme Y. sera tenue aux dépens d'appel et devra verser des frais irrépétibles à la société Consumer Finance.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Confirme le jugement dont appel dans toutes ses dispositions, sauf en ce qui concerne la clause pénale réduite ;
Statuant à nouveau sur ce chef ;
Condamne Mme X. divorcée Y. à payer à la SA CA Consumer Finance la somme de 2.202,10 euros au titre de l'indemnité de défaillance, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;
Y ajoutant ;
Condamne Mme X. divorcée Y. aux dépens de la procédure d'appel, qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile, ainsi qu'à payer à la SA CA Consumer Finance la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute les parties de toutes autres demandes.
Le Greffier, Le Président,
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