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CA RENNES (2e ch.), 27 avril 2018

Nature : Décision
Titre : CA RENNES (2e ch.), 27 avril 2018
Pays : France
Juridiction : Rennes (CA), 2e ch.
Demande : 15/03977
Décision : 18/267
Date : 27/04/2018
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 21/05/2015
Numéro de la décision : 267
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CERCLAB - DOCUMENT N° 7563

CA RENNES (2e ch.), 27 avril 2018 : RG n° 15/03977 ; arrêt n° 267 

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « Il ressort de l'offre du 21 novembre 2011 que M. X. a contracté dans le cadre de son activité professionnelle de chauffeur de taxi, et que le contrat n'entre donc pas dans le champ d'application des articles L. 311-1 et suivants du code de la consommationIl était toutefois loisible aux parties de soumettre le contrat du 21 novembre 2011 à ces dispositions, ce qui ressort de l'avenant régularisé le 15 février 2013 renvoyant expressément aux dispositions de l'article D. 311-8 du code de la consommation, dont l'article II-5 des conditions générales est la reprise. »

2/ « Partant, et contrairement à l'analyse du premier juge, la clause de restitution immédiate du véhicule ne faisait pas obstacle à la mise en œuvre par le preneur de la faculté de présentation d'un acquéreur prévue par l'article D. 311-8, cette clause n'étant pas incompatible avec l'exercice par le locataire de cette faculté de présentation d'un acquéreur dans le délai de 30 jours. Il s'ensuit que cette clause de restitution immédiate du véhicule, qui constitue le gage du créancier, ne saurait être analysée comme une clause abusive empêchant l'exercice effectif par le preneur de cette faculté de présentation au motif qu'elle l'aurait empêché de procéder à la recherche d'un éventuel acquéreur. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE RENNES

DEUXIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 27 AVRIL 2018

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 15/03977. Arrêt n° 267.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président, Madame Pascale DOTTE-CHARVY, Conseiller, Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,

GREFFIER : Madame Marlène ANGER, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS : A l'audience publique du 15 mars 2018, devant Monsieur Joël CHRISTIEN, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT : Contradictoire, prononcé publiquement le 27 avril 2018 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

 

APPELANTE :

SAS PRIORIS

Représentée par Maître Erwan L., avocat au barreau de RENNES

 

INTIMÉ :

Monsieur X.

né le [date] à [ville], Représenté par Maître Guillaume B. de la SCP AVOCATS L. G.-G.- B.-A., avocat au barreau de RENNES

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Suivant offre préalable acceptée le 21 novembre 2011, la société Prioris a conclu avec M. X. un contrat de location avec option d'achat d'un véhicule BMW 530 XDA Touring Luxe, à usage professionnel, d'une valeur de 37.900 euros TTC pour une durée de deux ans, moyennant un 1er loyer de 5.685 euros TTC puis 23 loyers de 893,21 euros TTC.

Les loyers étant demeurés impayés à compter de septembre 2012, les parties ont, le 15 février 2013, régularisé un avenant « portant résiliation conventionnelle du contrat de financement », entraînant la restitution et la vente du véhicule financé.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 18 mars 2013, la société Prioris a confirmé à M. X. la résiliation du contrat en précisant que sa créance s'élevait à 28.678,22 euros, et qu'il disposait d'un délai de 30 jours pour lui faire parvenir une proposition d'achat écrite d'un acquéreur.

Le 20 mai 2013, la société Prioris a fait procéder à la vente aux enchères du véhicule pour un prix de 20.400 euros, puis, par lettre recommandée avec accusé de réception du 2 juillet 2013, a mis vainement en demeure M. X. de régler la somme de 8.280,72 euros au titre du solde de sa créance.

C'est dans ces conditions que, par acte du 5 février 2014, la société Prioris a fait assigner M. X. en paiement devant le tribunal d'instance de Rennes.

Reconventionnellement, M. X. invoquait le caractère abusif de la clause de restitution immédiate du véhicule et demandait, en conséquence, la réduction de l'indemnité de résiliation.

Par jugement du 27 avril 2015, le juge d'instance a :

- condamné M. X. à payer à la société Prioris la somme de 8.273,80 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 21 mars 2013,

- condamné la société Prioris à payer à M. X. la somme de 5.500 euros à titre de dommages-intérêts,

- ordonné la compensation entre les créances réciproques des parties,

- débouté M. X. de sa demande de délais de paiement,

- débouté la société Prioris de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. X. au paiement des dépens de l'instance ainsi qu'aux frais éventuels d'exécution.

Par déclarations des 21 mai et 2 juin 2015, la société Prioris a relevé appel de ce jugement, les deux procédures étant jointes par ordonnance du conseiller de la mise en état du 10 juillet 2015.

 

La société Prioris demande à la cour de :

- condamner M. X. au paiement de la somme de 8.280,76 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 18 mars 2013,

- condamner M. X. au paiement d'une indemnité de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

 

M. X. demande quant à lui à la cour de :

- confirmer le jugement, sauf en ce qu'il l'a débouté de sa demande de délais de paiement,

- et faisant droit à son appel incident, lui accorder un moratoire de 24 mois, et à défaut un échelonnement de sa dette sur 24 mois,

- en tout état de cause, condamner la société Prioris à lui régler la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

 

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu'aux dernières conclusions déposées pour la société Prioris le 14 septembre 2015, et pour M. X. le 20 août 2015.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DES MOTIFS :

La disposition du jugement ayant fixé la créance de la société Prioris à la somme de 8.273,80 euros sont exemptes de critiques et s'appuie sur de pertinents motifs que la cour adopte, en sorte que le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné M. X. au paiement de cette somme, sauf toutefois à faire courir les intérêts légaux à compter du 3 juillet 2013, date de réception de la mise en demeure.

La société Prioris fait en revanche grief au jugement d'avoir considéré qu'elle avait abusé de sa position dominante en imposant au débiteur, dès la résiliation du contrat et la restitution du véhicule, l'empêchant ainsi de mettre concrètement en œuvre, alors qu'il demeurait en possession du véhicule, la faculté de présentation d'un acquéreur que lui réserve l'article D. 311-8 du code de la consommation, par ailleurs prévue au contrat et dans l'avenant, et d'exercer un contrôle sur les conditions de la revente.

Il ressort de l'offre du 21 novembre 2011 que M. X. a contracté dans le cadre de son activité professionnelle de chauffeur de taxi, et que le contrat n'entre donc pas dans le champ d'application des articles L. 311-1 et suivants du code de la consommation.

Il était toutefois loisible aux parties de soumettre le contrat du 21 novembre 2011 à ces dispositions, ce qui ressort de l'avenant régularisé le 15 février 2013 renvoyant expressément aux dispositions de l'article D. 311-8 du code de la consommation, dont l'article II-5 des conditions générales est la reprise.

À cet égard, M. X. soutient que l'article III-19.a des conditions générales, prévoyant que la résiliation du contrat entraîne l'obligation de restitution immédiate du bien loué au bailleur serait abusive, et de ce fait réputée non écrite, comme ne respectant pas les dispositions du code de la consommation, et notamment l'article D. 311-8.

Mais, comme le fait à juste titre observer la société Prioris, l'article II-5 des conditions générales stipule que, lorsque le bailleur a l'intention de vendre le bien, il doit aviser le locataire qu'il dispose d'un délai de 30 jours, à compter de la résiliation du contrat, pour présenter un acquéreur faisant une offre écrite d'achat.

L'avenant régularisé le 15 février 2013 faisait au demeurant application de ces dispositions en mentionnant en son article 2 que le véhicule restitué par le locataire sera vendu par Prioris, ou par toute autre personne qu'elle pourrait substituer, de gré à gré ou aux enchères, au plus tôt dans les 30 jours à compter de la résiliation du contrat, et que conformément aux dispositions de l'article D. 311-8 du code de la consommation le locataire reconnaît être parfaitement informé de ce délai durant lequel il a la possibilité de présenter une offre écrite d'achat émanant d'un tiers solvable.

Partant, et contrairement à l'analyse du premier juge, la clause de restitution immédiate du véhicule ne faisait pas obstacle à la mise en œuvre par le preneur de la faculté de présentation d'un acquéreur prévue par l'article D. 311-8, cette clause n'étant pas incompatible avec l'exercice par le locataire de cette faculté de présentation d'un acquéreur dans le délai de 30 jours.

Il s'ensuit que cette clause de restitution immédiate du véhicule, qui constitue le gage du créancier, ne saurait être analysée comme une clause abusive empêchant l'exercice effectif par le preneur de cette faculté de présentation au motif qu'elle l'aurait empêché de procéder à la recherche d'un éventuel acquéreur.

Il n'est par ailleurs pas contesté que la société Prioris a respecté le délai de l'article D. 311-8, puisque la vente est intervenue le 20 mai 2013, plus de trente jours après la résiliation du contrat et de l'information, rappelée par l'avenant du 15 février 2013, du droit du locataire à la présentation d'un acquéreur.

Or, M. X. ne caractérise ni ne justifie de circonstances précises et concrètes qui l'auraient empêché de rechercher un acquéreur durant ce délai, ni même n'allègue que la société Prioris se serait opposée à l'exercice de cette faculté en privant un éventuel acquéreur de la possibilité de voir le véhicule.

Il s'ensuit que M. X., qui ne caractérise aucune faute de la société Prioris et, au surplus, ne démontre pas avoir subi un préjudice fondé sur une perte de chance de vendre le véhicule à un meilleur prix, sera débouté de sa demande de dommages-intérêts, le jugement étant donc réformé sur ce point.

M. X. sollicite à titre subsidiaire sur le fondement de l'article 1244-1 ancien du code civil, un délai de deux ans pour s'acquitter de sa dette, mais ne produit aucune pièce justifiant de ses ressources actuelles ni de ses difficultés financières.

Ainsi, eu égard à l'ancienneté de la créance et aux larges délais de la procédure dont il a déjà bénéficié, il sera débouté de sa demande de délais de paiement, ainsi que de rééchelonnement de sa dette.

Enfin, il n'y a pas matière à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :

Infirme le jugement rendu le 27 avril 2015 par le tribunal d'instance de Rennes en ce qu'il a :

- assorti la condamnation au paiement de la somme de 8.273,80 euros des intérêts au taux légal à compter du 21 mars 2013,

- condamné la société Prioris à payer à M. X. la somme de 5.500 euros à titre de dommages-intérêts,

- et ordonné la compensation entre les créances réciproques des parties ;

Dit que la condamnation de M. X. au paiement de la somme de 8.273,80 euros portera intérêts au taux légal à compter du 3 juillet 2013 ;

Dit que la clause imposant au preneur de restituer le véhicule loué immédiatement à compter de la résiliation n'est pas abusive ;

Déboute M. X. de sa demande en paiement de dommages-intérêts et en compensation ;

Confirme le jugement attaqué en ses autres dispositions ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. X. aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier,                          Le Président,