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CASS. COM., 16 mai 2018

Nature : Décision
Titre : CASS. COM., 16 mai 2018
Pays : France
Juridiction : Cour de cassation Ch. commerciale
Demande : 17-12458
Décision : 18-422
Date : 16/05/2018
Numéro ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:CO00422
Nature de la décision : Cassation avec renvoi
Mode de publication : Legifrance
Décision antérieure : CA TOULOUSE (2e ch.), 7 décembre 2016
Numéro de la décision : 422
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CERCLAB - DOCUMENT N° 7579

CASS. COM., 16 mai 2018 : pourvoi n° 17-12458 ; arrêt n° 422 

Publication : Legifrance

 

Extrait : « Vu les articles L. 442-6 et D. 442-3 du code de commerce, ensemble les articles 122 et 125 du code de procédure civile ; Attendu que la cour d’appel de Paris est seule investie du pouvoir juridictionnel de statuer sur un litige portant sur l’application de l’article L. 442-6-I-2° du code de commerce ; […] ; Qu’en statuant ainsi, alors qu’elle était dépourvue de tout pouvoir juridictionnel pour connaître d’une défense au fond portant sur l’application de l’article L. 442-6-I-2° du code de commerce, la cour d’appel a violé les textes susvisés ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR DE CASSATION

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU 16 MAI 2018

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

N° de pourvoi : 17-12458. Arrêt n° 422.

DEMANDEUR à la cassation : Société Pharmagest interactive

DÉFENDEUR à la cassation : Société Pharmacie de la Croix Verte

Mme Riffault-Silk (conseiller doyen faisant fonction de président), président. Maître Le Prado, SCP Ohl et Vexliard, avocat(s).

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

 

Sur le moyen relevé d’office, en application de l’article 620 du code de procédure civile, après avertissement délivré aux parties :

VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée)                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu les articles L. 442-6 et D. 442-3 du code de commerce, ensemble les articles 122 et 125 du code de procédure civile ;

 

CHAPEAU (énoncé du principe juridique en cause)                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que la cour d’appel de Paris est seule investie du pouvoir juridictionnel de statuer sur un litige portant sur l’application de l’article L. 442-6-I-2° du code de commerce ;

 

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE                                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que, le 22 avril 2011, la société Pharmacie de la Croix Verte et la société Pharmagest interactive (la société Pharmagest) ont conclu un contrat de fourniture et de maintenance de matériel informatique ; que, la société Pharmacie de la Croix Verte ayant résilié le contrat le 19 septembre 2013, la société Pharmagest, estimant qu’il s’achevait le 1er mai 2015, a obtenu du président du tribunal de commerce de Castres une ordonnance d’injonction de payer à laquelle la société Pharmacie de la Croix Verte a formé opposition ;

 

RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que pour rejeter les demandes de la société Pharmagest, l’arrêt relève que le contrat prévoit la livraison, l’installation et la maintenance d’un matériel que la pharmacie loue, pour les besoins de son activité professionnelle, auprès d’un partenaire financier, pour une durée de quarante-deux mois, la maintenance étant assurée à titre gratuit pendant trente mois ; qu’il ajoute que le contrat stipule qu’à l’issue de cette période le client qui n’aurait pas opté pour le renouvellement de son matériel dans le cadre d’un nouveau financement sera tenu de payer au titre de la maintenance de son matériel une redevance égale au loyer mensuel versé au partenaire financier durant les trente mois de la location, la maintenance étant alors facturée pour les douze derniers mois ; qu’il retient que l’obligation de paiement édictée au terme des trente mois crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, en ce qu’elle contraint le partenaire de la société Pharmagest à souscrire un nouveau contrat sous peine de payer un an de loyers ; qu’il ajoute que la sanction édictée par l’article L. 442-6-I-2° du code de commerce n’étant pas la nullité de la clause, mais l’obligation pour son auteur de réparer le préjudice subi, la société Pharmagest, tenue de réparer le préjudice causé par l’application de la clause litigieuse, ne peut qu’être déboutée de ses demandes, les dommages-intérêts qu’elle doit se compensant avec les sommes dues au titre du contrat ;

 

CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION                                                        (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Qu’en statuant ainsi, alors qu’elle était dépourvue de tout pouvoir juridictionnel pour connaître d’une défense au fond portant sur l’application de l’article L. 442-6-I-2° du code de commerce, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                              (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les griefs du pourvoi : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 7 décembre 2016, entre les parties, par la cour d’appel de Toulouse ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Toulouse, autrement composée ;

Condamne la société Pharmacie de la Croix Verte aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Pharmagest interactive la somme de 3.000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize mai deux mille dix-huit.

 

 

ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Moyen produit par Maître Z., avocat aux Conseils, pour la société Pharmagest interactive

 

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

LE MOYEN reproche à l’arrêt attaqué, D’AVOIR débouté la société Pharmagest interactive de ses demandes à l’encontre de la société Pharmacie de la croix verte,

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

AUX MOTIFS QUE « sur la nullité de la clause stipulant le paiement de la maintenance au-delà de 30 mois, le premier fondement invoqué par la SARL Pharmacie de la croix verte, à savoir les dispositions des articles L. 132-1 et R. 132-1 § 5 du code de la consommation relatives aux clauses abusives est inapplicable en l’espèce, le contrat ayant été conclu par la SARL Pharmacie de la croix verte pour les besoins de son activité professionnelle, de telle sorte que celle-ci ne peut être qualifiée de non-professionnel et a fortiori de consommateur ; que l’article L. 442-6-I-2° du code de commerce permet quant à lui d’engager la responsabilité du producteur, commerçant ou industriel soumet ou tente de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ; que l’examen des deux contrats qui ont été soumis en même temps à la signature de la SARL Pharmacie de la croix verte, et qui sont interdépendants, puisqu’il est fait expressément référence aux modalités du contrat de financement dans le contrat de fourniture et maintenance, révèle : - que sauf dénonciation expresse par le locataire 180 jours avant le terme, manifestant son intention de restituer le matériel, le contrat de location financière, d’une durée de 30 mois, se poursuit par tacite reconduction par durées de 12 mois, aux mêmes conditions et sur la base du dernier loyer, -

qu’ainsi, en application de l’article 6 du contrat de fourniture et de maintenance, si le locataire ne résilie pas le contrat de location à son terme, il devra régler, pour les douze mois restants du contrat de maintenance, un montant équivalant au double du loyer (loyer dû à la SAS Healthlease et redevance de même montant pour la maintenance, due à la SA Pharmagest interactive), et que s’il résilie le contrat de location, il est tenu à la restitution du matériel, de sorte que la maintenance est privée de cause ; que cette situation ne peut être évitée, selon les termes du contrat, que si le locataire accepte, aux termes des 30 premiers mois du contrat de fourniture et maintenance, de conclure un nouveau contrat de maintenance de 42 mois avec un nouveau matériel financé par un nouveau contrat de financement ;

que ces constatations suffisent à démontrer que l’obligation de paiement édictée au terme des 30 mois crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, en ce qu’elle contraint le partenaire de la SA Pharmagest interactive à souscrire un nouveau contrat sous peine de payer un an de loyers ; que la SA Pharmagest interactive soutient qu’à l’issue du contrat de location, le matériel a été laissé à la disposition du client ; que cela peut être effectivement le cas, mais cela ouvre le droit au bailleur de prétendre au paiement des loyers, le contrat se poursuivant ; que la sanction édictée par l’article L 442-6-I-2° du code de commerce n’est pas la nullité de la clause, mais l’obligation pour son auteur de réparer le préjudice subi ; qu’en l’espèce, celui qui en résulte pour la SARL Pharmacie de la croix verte est le montant de cette sanction prévue par le contrat ; que, dès lors la SA Pharmagest interactive, tenue de réparer ce préjudice, ne peut qu’être déboutée de ses demandes, les dommages-intérêts qu’elle doit opérant une compensation complète avec les sommes dues au titre du contrat » ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

1°/ALORS, d’une part, QUE, suivant l’article L. 442-6-I-2° du code de commerce, engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ; qu’en statuant comme elle l’a fait, pour décider que la société Pharmagest interactive avait engagé sa responsabilité envers la société Pharmacie de la croix verte sur le fondement de l’article L. 442-6-I-2° du code de commerce, sans relever l’existence d’un partenariat entre ces deux sociétés, la cour d’appel a violé la disposition susvisée.

2°/ALORS, d’autre part, QUE, suivant l’article L. 442-6-I-2° du code de commerce, engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ; qu’en statuant comme elle l’a fait, pour décider que la société Pharmagest interactive avait engagé sa responsabilité envers la société Pharmacie de la croix verte sur le fondement de l’article L. 442-6-I-2° du code de commerce, sans relever que la société Pharmagest aurait soumis ou tenté de soumettre la seconde à un déséquilibre contractuel significatif, la cour d’appel a violé la disposition susvisée.

3°/ALORS, enfin et en toute hypothèse, QUE, suivant l’article L. 442-6-I-2° du code de commerce, engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ; que, dans ses écritures d’appel (concl., p. 8-9), la société Pharmagest a démontré que la clause litigieuse ne créait aucun déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ; qu’elle a invoqué la clarté des conditions générales du contrat, suivant lesquelles « les pharmaciens bénéficient de la possibilité, à l’issue de 30 mois de location, d’opter pour la fourniture d’un nouveau matériel dans le cadre d’un nouveau contrat de 42 mois », à défaut de quoi « le contrat se poursuit jusqu’à son terme, soit durant 12 mois supplémentaires » ; qu’elle en déduisait qu’« à l’issue des 30 mois de location, le matériel est laissé à la disposition de l’officine et ce jusqu’au terme du contrat » et qu’ainsi elle « ne règle plus de loyer, puisque le contrat de location a pris fin, mais règle désormais la maintenance à la société Pharmagest interactive » ; qu’elle en concluait que la société Pharmacie de la croix verte « était donc malvenue de soutenir s’être vue facturer de la maintenance sur du matériel qui n’était plus en sa possession, alors que le matériel n’a jamais été récupéré ni par le loueur ni par la société Pharmagest interactive » et qu’ainsi elle « ne démontrait nullement en quoi la clause querellée créerait un déséquilibre significatif dans ses droits » ; qu’en décidant cependant que l’obligation de paiement édictée au terme des 30 mois crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, sans se prononcer sur ces chefs de conclusions établissant le contraire, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de la disposition susvisée.