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CA PARIS (14e ch. sect. B), 22 juillet 2005

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (14e ch. sect. B), 22 juillet 2005
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), 14e ch. sect. B
Demande : 2005/00182
Date : 22/07/2005
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Juris Data
Décision antérieure : T. COM. PARIS (ord. référé), 24 novembre 2004
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CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 790

CA PARIS (14e ch. sect. B), 22 juillet 2005 : RG n° 2005/00182

Publication : Juris-Data n° 280465

 

Extrait : « Considérant que, dans ces conditions et devant la répétition de pareils incidents marqués par des refus répétés du terminal et des tentatives de forcement caractérisées par la répétition des sollicitations à quelques minutes d'intervalle et pour des montant parfois différents mais provenant d'une même carte bancaire étrangère, la BRED-BANQUE POPULAIRE a pu, à juste titre, user de sa faculté de résiliation avec effet immédiat, de même qu'elle a pu, pour pallier la contre-passation qui allait nécessairement devoir suivre le non-encaissement des sommes manifestement excessives prétendument réglées par les transactions litigieuses, placer sur un poste dit « de garantie » du compte courant de sa cliente X., une somme de 15.420 € nécessaire pour garantir les refus de paiement que ne pouvaient manquer d'assortir les transactions à l'évidence frauduleuses effectuées par des détenteurs de cartes étrangères au restaurant de la société X., pour des sommes excédant de façon flagrante celles susceptibles de générer l'activité de cet établissement, même en tenant compte des prix pratiqués pour ses menus gastronomiques, en sorte que le défaut de vigilance de la société X., sinon sa complaisance pour les auteurs de telles manipulations, sont patents et justifient pleinement les mesures prises par la BRED-BANQUE POPULAIRE qui se doit de lutter contre de telles fraudes par une application stricte de la clause de résiliation du contrat, laquelle ne saurait être jugée abusive ».

 

COUR D’APPEL DE PARIS

QUATORZIÈME CHAMBRE SECTION B

ARRÊT DU 22 JUILLET 2005

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Numéro d'inscription au répertoire général de la Cour : RG n° 2005/00182. Décision déférée à la Cour : Ordonnance de référé rendue le 24 novembre 2004 par M. BEAUPÈRE, Président, délégataire du Président du Tribunal de commerce de PARIS (RG n° 2004/086351).

 

APPELANTE :

SARL X.

dont le siège social est [adresse], représentée par la SCP LAGOURGUE et OLIVIER, Avoués à la Cour, assistée par Maître Luc RAVAZ, Toque D. 450, Avocat au barreau de PARIS

 

INTIMÉE :

SA BRED - BANQUE POPULAIRE

[adresse], représentée par la SCP MIRA-BETTAN. Avoués à la Cour, assistée par Maître Sabine DUCROUX-SOUBRY, Toque C.775, Avocat au Barreau de PARIS

[minute page 2]

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 25 mars 2005, en audience publique, devant la Cour composée de : M. CUINAT, président, M. SELTENSPERGER, conseiller, M. MAUNAND, conseiller, qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme DRELIN.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE, prononcé publiquement par M. CUINAT, président, lequel a signé la minute avec Mme MALTERRE-PAYARD, greffier présent lors du prononcé.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu l'appel formé par la SARL X. contre une ordonnance de référé du 24 novembre 2004 rendue par le président du Tribunal de commerce de PARIS qui, statuant sur la demande qu'elle formait à l'encontre de la SA BRED-BANQUE POPULAIRE, aux fins de lui enjoindre de rétablir - sous astreinte - le fonctionnement du système de paiement par cartes bancaires que cette banque lui a résilié unilatéralement, et de restituer à son compte courant la somme de 15.420 € injustement prélevée :

- a dit la société X. mal fondée en l'ensemble de ses demandes et l'en a déboutée ;

- a rejeté la demande d'indemnités formée par la BRED-BANQUE POPULAIRE au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

- a laissé les dépens à la charge de la société X. ;

 

Vu les conclusions du 9 mars 2005 de la SARL X., appelante, qui prie la Cour, au vu des dispositions du contrat d'adhésion au système de paiement par cartes bancaires, de :

- la recevoir en son appel et l'y déclarer bien fondée ;

- dire et juger que l'ordonnance entreprise est entachée de nullité par application des [dispositions] de l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;

- en tout état de cause, l'infirmer en toutes ses dispositions et statuer à nouveau :

- sur la demande de restitution de la somme de 15.4220 € :

* constater qu'aucune disposition du contrat n'autorise la banque à affecter sur un poste dit « de garantie » une somme créditée sur le compte de son client ;

* constater que la BRED n'apporte aucun élément de nature à justifier le prélèvement de la somme de 15.420 € qu'elle a effectué sur le compte de la société X. ;

* constater que la BRED n'a pas respecté la procédure telle que visée dans l'article 9 du contrat ;

* en conséquence, enjoindre à la BRED de restituer au compte courant de la société X. la somme de 15.420 € injustement prélevée, sous astreinte de 150 € par jour de retard à compter du prononcé de la décision ;

- sur la résiliation de la convention de paiement par cartes bancaires :

* enjoindre à la BRED de rétablir le fonctionnement de ce système de paiement, également sous astreinte de 150 € par jour de retard à compter du prononcé de la décision ;

- subsidiairement, constater l'existence de difficultés sérieuses et renvoyer les parties à mieux se pourvoir ;

- condamner la BRED à lui payer la somme de 3.500 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens :

[minute page 3]

Vu les conclusions du 25 février 2005 de la SA BRED-BANQUE POPULAIRE, intimée, qui prie la Cour, au visa des articles 455 et 808 du nouveau code de procédure civile, 1134, 1184 et 1315 du Code civil, de la convention de compte entreprise, de la convention d'utilisation des paiements par Carte bleue, et des pièces versées aux débats, de :

- recevoir la BRED-BANQUE POPULAIRE en son argumentation et l'y déclarant bien fondée, confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance entreprise ;

- en conséquence :

* constater l'existence de difficultés sérieuses ;

* constater l'irrecevabilité et l'absence de fondement des demandes de la SARL X. et, par conséquent, les rejeter ;

- condamner la SARL X. à lui payer la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE, LA COUR,

Considérant qu'il ressort des pièces versées aux débats que la SARL X. exploite un fonds de commerce de restaurant, [adresse], depuis l'année 1987 ; qu'elle a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire en novembre 2002 et qu'un plan d'apurement du passif a été homologué le 13 juillet 2004 ;

que le litige concerne les conditions dans lesquelles la SARL X. s'est vue, le 5 novembre 2004, résilier par sa banque, la SA BRED-BANQUE POPULAIRE, son contrat d'adhésion au système de paiement par cartes bancaires, et ce, avec effet immédiat, la BRED se prévalant de l'article 9 du contrat, et ayant, dans le même temps et sans donner d'explication à la société X., prélevé sur le compte courant de celle-ci une somme de 15.420 € pour l'affecter à un compte dit « de garantie » ;

Considérant qu'au soutien de son appel, la société X. soulève d'abord une exception de nullité pour défaut de motivation de l'ordonnance de référé dont appel, le premier juge n'ayant aucunement motivé sa décision en ce qui concerne le second point de la demande initiale de la société X. qui sollicitait la restitution sur son compte du prélèvement de 15.420 € effectué par la BRED-BANQUE POPULAIRE ;

mais considérant que le premier juge a cité les termes de l'article 9-1 du contrat signé entre les parties, qui prévoient que chacune d'elles peut à tout moment résilier le contrat, sans justificatif ni préavis (sauf dérogation particulière convenue entre les parties) et sous réserve du dénouement des opérations en cours, puis a donné la motivation suivante : « Dès lors, constatant qu'il s'agit de l'application stricte du contrat, nous dirons la société X. mal fondée en l’ensemble de ses demandes et l’en débouterons » ;

que cette motivation fondée sur « l'application stricte du contrat » et faisant référence à « l'ensemble des demandes », même si elle ne s'est pas prononcée plus explicitement sur le prélèvement de 15.420 € effectué par la BRED sur le compte courant de la société X. et contesté par celle-ci, ne saurait pour autant caractériser une absence de motivation contraire aux dispositions de l'article 455 alinéa 1er du nouveau code de procédure civile prescrites a peine de nullité par l'article 458 du même code ;

que l'exception de nullité soulevée par la société X. sera donc rejetée ;

[minute page 4] Considérant qu'au soutien de son appel, la SARL X. prétend qu'aucune disposition du contrat conclu par elle avec la BRED-BANQUE POPULAIRE pour disposer du système de paiement par cartes bancaires n'autorise la banque à affecter à un poste dit « de garantie » une somme figurant au crédit du compte de son client, que la banque n'établit aucun incident imputable à sa cliente et reconnaît même dans ses écritures du 25 février 2005 que « s'agissant d’opérations de novembre 2004, il n'est pas encore possible de savoir si celles-ci sont consécutives à une utilisation frauduleuse » ; que ce retrait est donc abusif et met en péril l'activité du restaurant X. qui est privé de trésorerie et doit faire face à des incidents bancaires en cascade du fait du rejet de ses propres chèques ; qu'au surplus, la BRED n'a pas respecté la procédure de résiliation prévue par l'article 9 du contrat puisqu'elle a adressé à X. une simple télécopie le 5 novembre 2004, et ne lui a adressé la lettre recommandée prescrite par l'article 9 que 15 jours après ; qu'enfin, les motifs de la résiliations seraient inexistants, la société X. ne s'étant pas montré négligente et les paiements frauduleux par cartes bancaires, notamment étrangères, n'étant nullement avérés, tandis qu'elle a toujours respecté scrupuleusement les instructions contractuelles, en sollicitant l'autorisation de la banque lorsque le montant du paiement le requérait, en faisant signer le ticket lorsqu'un code confidentiel n'était pas requis et en vérifiant la conformité de la signature avec celle figurant sur la carte, la période de validité de celle-ci, la liste des cartes en opposition, de sorte qu'en l'absence de faute de sa part, la résiliation unilatérale et immédiate de son contrat en application de l'article 9 constituerait manifestement une clause abusive que la Cour devrait lui déclarer inopposable ;

Mais considérant que la BRED-BANQUE POPULAIRE objecte à juste litre, en produisant les pièces correspondantes, que l'article 9 du contrat d'adhésion au système de paiement par cartes bancaires permet à chacune des parties de résilier le contrat, à tout moment, sans justificatif et sans préavis, sous la seule réserve du « dénouement des opérations en cours » sans qu'il soit nécessaire d'accomplir aucune autre formalité que l'envoi d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception ; qu'en l'espèce, une lettre recommandée a bien été adressée le 5 novembre 2004 à la société X. et lui a été distribuée le 12 novembre ainsi que l'indique l'avis de réception ; que la résiliation est donc régulière au regard des dispositions de l'article 9 du contrat ; qu'en raison de fraudes commises précédemment à partir du terminal carte bancaire confié à la société X., la BRED avait dû rappeler à cette société les instructions pour lutter contre la fraude commise au moyen de cartes bancaires étrangères, et ce, par lettres du 30 avril puis du 21 octobre 2004 ; que de nouvelles transactions suspectes ont été enregistrées sur ce terminal le 3 novembre 2004, à savoir des paiements de 5.300 € et 2.300 € hors de proportion avec l'activité d'un restaurant, bien que X. prétende qu'il s'agisse de repas de groupes ou bien de clients réguliers ne réglant leurs repas que par intervalles, sans toutefois apporter aucune preuve de cette pratique tout à fait invraisemblable compte tenu de l'importance des sommes dont s'agit ;

Considérant que, dans ces conditions et devant la répétition de pareils incidents marqués par des refus répétés du terminal et des tentatives de forcement caractérisées par la répétition des sollicitations à quelques minutes d'intervalle et pour des montant parfois différents mais provenant d'une même carte bancaire étrangère, la BRED-BANQUE POPULAIRE a pu, à juste titre, user de sa faculté de résiliation avec effet immédiat, de même qu'elle a pu, pour pallier la contre-passation qui allait nécessairement devoir suivre le non-encaissement des sommes manifestement excessives prétendument réglées par les [minute page 5] transactions litigieuses, placer sur un poste dit « de garantie » du compte courant de sa cliente X., une somme de 15.420 € nécessaire pour garantir les refus de paiement que ne pouvaient manquer d'assortir les transactions à l'évidence frauduleuses effectuées par des détenteurs de cartes étrangères au restaurant de la société X., pour des sommes excédant de façon flagrante celles susceptibles de générer l'activité de cet établissement, même en tenant compte des prix pratiqués pour ses menus gastronomiques, en sorte que le défaut de vigilance de la société X., sinon sa complaisance pour les auteurs de telles manipulations, sont patents et justifient pleinement les mesures prises par la BRED-BANQUE POPULAIRE qui se doit de lutter contre de telles fraudes par une application stricte de la clause de résiliation du contrat, laquelle ne saurait être jugée abusive ;

qu'ainsi, c'est à juste titre que le premier juge a débouté la société X. de toutes ses demandes ;

qu'il s'ensuit que l'ordonnance entreprise doit être confirmée en toutes ses dispositions ;

Considérant que la société appelante, qui succombe sur son recours, sera condamnée aux dépens d'appel et ne saurait, par conséquent, obtenir l'indemnité de procédure qu'elle sollicite ;

qu'il serait inéquitable de laisser supporter à l'intimée les frais de procédure qu'elle a exposés en appel et qui ne sont pas compris dans les dépens ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

Déclare la SARL X. mal fondée en son appel et l'en déboute ;

Confirme en toutes ses dispositions l'ordonnance entreprise ;

Condamne la SARL X. à verser à la SA BRED-BANQUE POPULAIRE la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile :

La condamne également aux dépens d'appel ; admet la SCP MIRA-BETTAN, avoué, au bénéfice de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.