CASS. CIV. 1re, 9 janvier 2019
CERCLAB - DOCUMENT N° 7998
CASS. CIV. 1re, 9 janvier 2019 : pourvoi n° 17-14027 ; arrêt n° 12
Publication : Legifrance
Extraits : 1/ « Mais attendu que l’arrêt relève que la banque, en procédant unilatéralement à une conversion des prêts en euros, sans y avoir été expressément autorisée par les emprunteurs, a exécuté la faculté dont elle disposait de convertir les prêts en livres sterling dès lors que l’endettement dépassait un certain seuil, ce qui s’est produit ; que, de ces constatations et énonciations, la cour d’appel, qui n’a pas méconnu l’étendue de ses pouvoirs, a, sans commettre les dénaturations alléguées, fait ressortir l’insuffisante gravité du manquement reproché, ce dont elle a souverainement déduit que la sanction de cette exécution défectueuse ne devait pas être la résolution des contrats de prêt, mais seulement, à défaut de demande contraire des emprunteurs, l’annulation de la conversion ainsi effectuée et le retour à la situation antérieure ; que le moyen n’est pas fondé ».
2/ « Vu l’article L. 313-2 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 ; Attendu que, pour rejeter les demandes des emprunteurs tendant à voir prononcer la déchéance totale des intérêts, l’arrêt retient que le taux d’intérêt applicable, décomposé entre la partie variable et la partie fixe, figurait sur chaque relevé trimestriel, permettant aux emprunteurs de connaître le taux applicable à chaque période ; Qu’en statuant ainsi, alors que la clause prévoyait une variation automatique du taux effectif global en fonction de l’évolution du taux de base décidée par la banque, lequel ne constitue pas un indice objectif, de sorte que le prêteur avait l’obligation de faire figurer sur chacun des relevés reçus par les emprunteurs le taux effectif global appliqué, la cour d’appel a violé le texte susvisé ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR DE CASSATION
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 9 JANVIER 2019
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
N° de pourvoi : 17-14027. Arrêt n° 12.
DEMANDEUR à la cassation : Monsieur X. et Madame Y.
DÉFENDEUR à la cassation : Société Jyske Bank A/S
Mme Batut (président), président. SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat(s).
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. X. et Mme Y. (les emprunteurs) ont souscrit auprès de la société Jyske Bank A/S (la banque) deux prêts libellés en francs suisses ; qu’invoquant l’irrégularité de la clause des contrats prévoyant la conversion de l’endettement en livres sterling, les emprunteurs ont assigné la banque en déchéance du droit aux intérêts, en annulation des contrats et en indemnisation ;
Sur le troisième moyen, qui est préalable :
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que les emprunteurs font grief à l’arrêt de rejeter leur demande de résolution pour inexécution des contrats de prêt, de rejeter leur prétention tendant au prononcé de la déchéance totale des intérêts ainsi que celle visant à la condamnation de la banque à leur verser des dommages-intérêts et de les condamner à payer à celle-ci la somme de 311.626,41 francs suisse au titre des intérêts impayés des prêts ou sa contre-valeur en euros au jour de l’arrêt, alors, selon le moyen :
1°/ que la résolution judiciaire du contrat peut être prononcée en cas d’inexécution partielle, y compris d’une obligation accessoire, à condition qu’elle soit suffisamment grave ; qu’en déboutant les emprunteurs de leur demande en résolution judiciaire des contrats de prêt au seul prétexte que la banque n’avait pas manqué à son obligation principale de mettre à la disposition de ses clients les fonds objet des contrats de prêt, sans apprécier la gravité du manquement qu’elle constatait, à savoir la conversion irrégulière des prêts en euros, la cour d’appel a méconnu l’étendue de ses pouvoirs, et a violé, par refus d’application, l’article 1184 du code civil, dans sa rédaction applicable en la cause ;
2°/ que les emprunteurs soutenaient dans leurs conclusions que la conversion irrégulière des prêts en euros « a eu pour conséquence la modification aussi bien du capital restant à rembourser, que des intérêts à payer » de sorte que la banque aurait dû leur indiquer le nouveau taux effectif global applicable et que faute de l’avoir fait, la déchéance des intérêts était encourue ; qu’en retenant pourtant « que la conséquence de l’exécution défectueuse de cette faculté [de conversion] ne saurait être la résolution des contrats de prêt, mais seulement, à défaut de demande contraire des emprunteurs, l’annulation de la conversion ainsi effectuée et le retour à la situation antérieure », quand les emprunteurs sollicitaient en réalité la déchéance du droit aux intérêts, la cour d’appel a dénaturé leurs conclusions, en violation de l’article 4 du code de procédure civile ;
3°/ que les emprunteurs soutenaient dans leurs conclusions que la conversion irrégulière des prêts en euros « leur a causé un préjudice financier résultant de la mise en œuvre d’une garantie qui s’est avérée inutile ainsi qu’un préjudice moral important » qu’il convenait de réparer par l’allocation d’une somme de 100.000 euros à titre de dommages-intérêts ; qu’en retenant pourtant « que la conséquence de l’exécution défectueuse de cette faculté [de conversion] ne saurait être la résolution des contrats de prêt, mais seulement, à défaut de demande contraire des emprunteurs, l’annulation de la conversion ainsi effectuée et le retour à la situation antérieure », quand les emprunteurs sollicitaient en réalité outre le retour à la situation antérieure, l’allocation de dommages-intérêts, la cour d’appel a dénaturé leurs conclusions, en violation de l’article 4 du code de procédure civile ;
RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Mais attendu que l’arrêt relève que la banque, en procédant unilatéralement à une conversion des prêts en euros, sans y avoir été expressément autorisée par les emprunteurs, a exécuté la faculté dont elle disposait de convertir les prêts en livres sterling dès lors que l’endettement dépassait un certain seuil, ce qui s’est produit ; que, de ces constatations et énonciations, la cour d’appel, qui n’a pas méconnu l’étendue de ses pouvoirs, a, sans commettre les dénaturations alléguées, fait ressortir l’insuffisante gravité du manquement reproché, ce dont elle a souverainement déduit que la sanction de cette exécution défectueuse ne devait pas être la résolution des contrats de prêt, mais seulement, à défaut de demande contraire des emprunteurs, l’annulation de la conversion ainsi effectuée et le retour à la situation antérieure ; que le moyen n’est pas fondé ;
Sur le premier moyen :
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que les emprunteurs font grief à l’arrêt de rejeter leur demande tendant à ce que soit prononcée la déchéance totale des intérêts et celle tendant, à défaut, à ce que la banque soit condamnée à leur payer à titre de dommages-intérêts délictuels le montant des intérêts dont la banque ne serait pas déchue, et de les condamner solidairement en paiement au titre des intérêts impayés des prêts, alors, selon le moyen, que le juge national est tenu d’examiner d’office le caractère abusif d’une clause contractuelle dès qu’il dispose des éléments de droit et de fait nécessaires à cet effet et que, lorsqu’il considère une telle clause comme étant abusive, il ne l’applique pas, sauf si le consommateur s’y oppose ; que dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ; qu’en l’espèce, il résulte des éléments de fait et de droit débattus devant la cour d’appel que, selon les contrats litigieux, les mensualités étaient susceptibles d’augmenter, sans plafond ; qu’en effet, il était stipulé que les deux prêts étaient libellés en francs suisses et qu’il était prévu « un mécanisme autorisant la banque, en cas de variation des taux de change ayant pour effet que l’endettement en cours dépasse un certain seuil (limite de facilité sterling), de prendre à son entière discrétion » différentes mesures limitant le risque couru par l’établissement de crédit ; qu’il en résultait qu’il appartenait à la cour d’appel de rechercher d’office, notamment, si le risque de change ne pesait pas exclusivement sur les emprunteurs et si, en conséquence, la clause litigieuse n’avait pas pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, au détriment des consommateurs ; des taux de change ayant pour effet que l’endettement en cours dépasse un certain seuil (limite de facilité sterling), de prendre à son entière discrétion » différentes mesures limitant le risque couru par l’établissement de crédit ; qu’il en résultait qu’il appartenait à la cour d’appel de rechercher d’office, notamment, si le risque de change ne pesait pas exclusivement sur les emprunteurs et si, en conséquence, la clause litigieuse n’avait pas pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, au détriment des consommateurs ; qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel a violé l’article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable en la cause ;
RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Mais attendu que la cour d’appel ayant irrévocablement jugé que la sanction de l’exécution défectueuse par la banque de la faculté de conversion des prêts ne devait pas être la résolution des contrats de prêt, mais seulement l’annulation de la conversion effectuée, le moyen est inopérant ;
Mais sur le deuxième moyen :
VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Vu l’article L. 313-2 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 ;
RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que, pour rejeter les demandes des emprunteurs tendant à voir prononcer la déchéance totale des intérêts, l’arrêt retient que le taux d’intérêt applicable, décomposé entre la partie variable et la partie fixe, figurait sur chaque relevé trimestriel, permettant aux emprunteurs de connaître le taux applicable à chaque période ;
CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Qu’en statuant ainsi, alors que la clause prévoyait une variation automatique du taux effectif global en fonction de l’évolution du taux de base décidée par la banque, lequel ne constitue pas un indice objectif, de sorte que le prêteur avait l’obligation de faire figurer sur chacun des relevés reçus par les emprunteurs le taux effectif global appliqué, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il condamne solidairement M. X. et Mme Y. à payer la somme de 311 626,41 francs suisse, ou sa contre-valeur en euros, au titre des intérêts impayés des prêts, l’arrêt rendu le 10 novembre 2016, entre les parties, par la cour d’appel d’Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne la société Jyske Bank A/S aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf janvier deux mille dix-neuf.
ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Moyens produits par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour M. X. et Mme Y.
PREMIER MOYEN DE CASSATION (sur le caractère abusif de la clause d’indexation)
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Il est fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’AVOIR rejeté la demande des exposants tendant à ce que soit prononcée la déchéance totale des intérêts et celle tendant, à défaut, à ce que la société Jyske Bank soit condamnée à payer à M. X. et Mme Y. à titre de dommages et intérêts délictuels le montant des intérêts dont la banque ne serait pas déchue, et d’AVOIR condamné solidairement M. X. et Mme Y. au paiement d’une somme, arrêtée au 9 septembre 2015, de 311.626,41 CHF au titre des intérêts impayés des prêts ou sa contrevaleur en euro au jour de l’arrêt, sauf à parfaire ;
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
AUX MOTIFS QUE : « sur l’obligation précontractuelle d’information : que la Jyske Bank fait grief au jugement d’avoir considéré qu’elle avait manqué à son obligation précontractuelle d’information ; qu’elle observe qu’il y a lieu de distinguer d’un côté les obligations propres aux modalités de variation du taux d’intérêt contractuellement fixé, et, de l’autre, les conséquences du caractère multidevise des prêts ; que concernant l’information relative au taux variable, elle souligne que l’obligation énoncée à l’article L. 312-8 du code de la consommation, prévoyant que l’offre de prêt doit être accompagnée d’une notice présentant les conditions et modalités de variation du taux d’intérêt et d’un document d’information contenant une simulation de l’impact d’une variation de ce taux sur les mensualités, la durée du prêt et le coût total du crédit, résulte de la loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008, laquelle est postérieure à la signature des contrats de prêt ; que jusqu’alors, la jurisprudence n’exigeait pas la fourniture d’une notice séparée, dès lors que les conditions et modalités de variation du taux d’intérêt variable sont énoncées dans l’offre de prêt, ce qui est le cas en l’espèce ; que s’agissant de l’information afférente au caractère multidevise des prêts, elle fait valoir que l’information a été délivrée, et que, M. X. et Mme Y. étant des investisseurs avertis, elle n’était pas débitrice envers eux d’une obligation de mise en garde contre un risque d’endettement excessif, et qu’un tel prêt ne constituait pas un produit spéculatif ; que, en premier lieu, c’est tout d’abord avec raison que la Jyske Bank souligne qu’à la date à laquelle les prêts ont été consentis, elle n’était pas légalement tenue de fournir une notice aux emprunteurs comportant une simulation de l’impact d’une variation du taux d’intérêt sur les échéances de remboursement, la durée du prêt et le coût total du crédit ; que par ailleurs, chacun des contrats décrivait avec précision la composition du taux d’intérêt, en indiquant, qu’à un taux fixe de 1,5 %, s’ajoutait un taux variable égal au Jyske Bank funding rate, défini dans le contrat comme étant le taux de refinancement permettant à la Banque d’obtenir un montant identique au prêt, dans la monnaie du prêt, pour la durée du prêt, sur les marchés interbancaires deux jours ouvrables avant le premier jour au cours duquel courent les intérêts ; que le contrat précisait en outre la périodicité trimestrielle des remboursements et ajoutait que Compte tenu de la formule de détermination du taux, le taux sera révisé à l’issue de chacune des périodes en fonction du taux Jyske Bank funding rate applicable à la date du terme de la période concernée ; qu’enfin, chacun des contrats mentionnait, à titre indicatif, le taux applicable à la date de l’offre, ainsi que le taux effectif global ; que les précisions ainsi apportées étaient conformes aux exigences légales existant à la date de conclusion des prêts ; que, en deuxième lieu, un banquier n’est tenu d’un devoir de mise en garde sur les risques liés à l’octroi du prêt qu’à l’égard des emprunteurs non avertis ; que la Jyske Bank fait valoir, sans être contredite, que M. X. et Mme Y. sont l’un et l’autre diplômés de prestigieuses universités en finance et gestion, qu’ils ont exercé tous deux leur activité dans des agences de notation, qu’ils intervenaient sur les marchés financiers, notamment par son intermédiaire, et élaboraient, géraient ou évaluaient des produits financiers beaucoup plus sophistiqués que des prêts, et qu’ils ont émigré aux États-Unis et créé une société dénommée L&F Investors Services, chargée de conseiller les investisseurs étrangers sur leur installation aux États-Unis ; que les documents produits aux débats, en l’occurrence la présentation que les intéressés font d’eux-mêmes dans un document promotionnel du cabinet L&F Investors Services qu’ils ont fondé, établissent de façon incontestable leur qualité d’emprunteurs avertis ; que, en dernier lieu, un prêt libellé en devises ne constitue par un produit spéculatif mettant à la charge du banquier une obligation particulière de mise en garde ; que M. X. et Mme Y. ne pouvaient ignorer, comme tout investisseur normalement avisé, qu’un emprunt libellé dans une monnaie étrangère était nécessairement soumis aux fluctuations des taux de change ; qu’au demeurant, il résulte d’un courrier adressé par la banque à M. X. et Mme Y. le 12 décembre 2006 que leur attention a été attirée sur le fait que « tout affaiblissement de votre devise de base/revenu par rapport à la devise choisie pour le prêt se traduirait par une augmentation effective du coût de vos échéances de remboursement. Souscrire un prêt en devise peut en conséquence être considéré comme un risque important » ; que le 17 juillet 2007 ils ont par ailleurs signé un document intitulé Déclaration de compréhension (Letter of undestanding) qui comporte notamment la mention « Je déclare comprendre que tout renforcement de la devise de l’emprunt par rapport à ma devise de base peut résulter en une augmentation du coût de remboursement de l’emprunt » ; qu’il résulte de l’ensemble de ce qui précède que la Jyske Bank n’a pas manqué à ses obligations précontractuelles d’information ; que le jugement sera infirmé de ce chef » ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
ALORS QUE le juge national est tenu d’examiner d’office le caractère abusif d’une clause contractuelle dès qu’il dispose des éléments de droit et de fait nécessaires à cet effet et que, lorsqu’il considère une telle clause comme étant abusive, il ne l’applique pas, sauf si le consommateur s’y oppose ; que dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ; qu’en l’espèce, il résulte des éléments de fait et de droit débattus devant la cour d’appel que, selon les contrats litigieux, les mensualités étaient susceptibles d’augmenter, sans plafond ; qu’en effet, il était stipulé que les deux prêts étaient libellés en francs suisses et qu’il était prévu « un mécanisme autorisant la banque, en cas de variation des taux de change ayant pour effet que l’endettement en cours dépasse un certain seuil (limite de facilité Sterling), de prendre à son entière discrétion » différentes mesures limitant le risque couru par l’établissement de crédit (arrêt, p. 4, antépénultième alinéa) ; qu’il en résultait qu’il appartenait à la cour d’appel de rechercher d’office, notamment, si le risque de change ne pesait pas exclusivement sur les emprunteurs et si, en conséquence, la clause litigieuse n’avait pas pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, au détriment des consommateurs ; qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel a violé l’article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable en la cause.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (sur la déchéance du droit aux intérêts)
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Il est fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’AVOIR rejeté la demande des exposants tendant à voir prononcer la déchéance totale des intérêts, et d’avoir condamné solidairement M. X. et Mme Y. au paiement d’une somme, arrêtée au 9 septembre 2015, de 311 626,41 CHF au titre des intérêts impayés des prêts ou sa contrevaleur en euro au jour de l’arrêt, sauf à parfaire ;
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
AUX MOTIFS QUE : « la Jyske Bank fait grief au jugement d’avoir annulé l’article 4 du contrat de prêt au motif que le choix du Jyske Bank funding rate comme taux n’était pas valable car la variation du taux d’intérêt n’intervenait pas selon des données objectives et externes à la banque ; qu’elle fait valoir, en effet, que la jurisprudence de la Cour de cassation admet depuis des arrêts de l’Assemblée plénière du 1er décembre 2005 la validité de clauses de variabilité fondées sur le taux de base de l’établissement prêteur ; qu’elle précise que le Jyske Bank funding rate n’est pas fixé discrétionnairement, mais qu’il dépend des taux applicables sur le marché interbancaire, et qu’il est, par ailleurs, identique pour toutes les opérations de même nature portant sur la même devise ; qu’en réponse, M. X. et Mme Y. soutiennent que le taux effectif global mentionné au contrat est invérifiable du fait de l’absence de clarté du taux Jyske Bank Funding Rate, lequel est incompréhensible ; qu’ils notent que ce taux n’est d’ailleurs pas mentionné sur les relevés périodiques du compte (Roll-over) adressés par la banque ; que, selon eux, il est impossible de calculer l’impact et le coût financier de l’opération de crédit contracté, et encore moins de les vérifier, que l’on soit d’ailleurs un emprunteur averti ou non-averti ; qu’il prétendent que la banque elle-même serait incapable de justifier de la réalité de ce taux ; qu’une banque peut valablement indexer un taux variable sur le taux de base bancaire qu’elle fixe elle-même en fonction des conditions auxquelles elle se refinance, pour autant qu’une mention du taux effectif global soit portée, de façon indicative, dans le contrat de prêt, ce qui n’est pas discuté en l’espèce ; que la cour constate, en outre, que le taux d’intérêt applicable, décomposé entre la partie variable et la partie fixe, figurait sur chaque relevé trimestriel (roll-over), permettant aux emprunteurs de connaître le taux applicable à chaque période ; que le jugement sera infirmé en ce qu’il a annulé la clause figurant à l’article 4 du contrat de prêt conclu le 23 octobre 2007 » ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
ALORS QU’en présence d’une clause prévoyant une variation automatique du TEG en fonction de l’évolution du taux de base décidée par l’établissement de crédit, qui ne constitue pas un indice objectif, le prêteur a l’obligation de faire figurer le taux effectif global appliqué sur chacun des relevés reçus par les emprunteurs ; qu’en l’espèce, les exposants soulignaient que le taux effectif global appliqué « n’est d’ailleurs pas mentionné sur les relevés périodiques de compte dénommés Rollover par la Jyske Bank alors que le prêt est au taux variable égal au Jyske Bank Funding Rate + 1,5 point. Il est totalement impossible de calculer l’impact et le coût financier de l’opération de crédit contractée et encore moins de le vérifier, que l’on soit d’ailleurs un emprunteur averti ou non-averti » (conclusions, p. 14, alinéas 1 et 2) ; que la banque se bornait à fournir pour les premiers et deuxième prêts respectivement trois et deux relevés bancaires ne couvrant qu’une partie de l’année 2010, et ne mentionnant aucunement le TEG, mais le taux de l’intérêt contractuel ; qu’en retenant pourtant que « la cour constate, en outre, que le taux d’intérêt applicable décomposé entre la partie variable et la partie fixe, figurait sur chaque relevé trimestriel (roll-over) permettant aux emprunteurs de connaître le taux applicable à chaque période » (arrêt, p. 8, alinéa 3), quand les rares relevés produits ne mentionnaient aucunement le TEG et ne portait que sur une infirme partie de la durée du prêt, la cour d’appel a violé l’article L. 313-2 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable en la cause, ensemble l’article 1907 du code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION (sur la résolution du contrat de prêt)
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Il est fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’AVOIR rejeté la demande de résolution pour inexécution des contrats de prêt, d’avoir rejeté la demande des exposants tendant au prononcé de la déchéance totale des intérêts, d’avoir rejeté leur demande tendant à ce que la société Jyske Bank soit condamnée à leur payer la somme de 100.000 € à titre de dommages et intérêts contractuels, et d’avoir condamné solidairement M. X. et Mme Y. au paiement d’une somme, arrêtée au 9 septembre 2015, de 311.626,41 CHF au titre des intérêts impayés des prêts ou sa contrevaleur en euro au jour de l’arrêt, sauf à parfaire ;
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
AUX MOTIFS QUE : « sur la mise en œuvre du droit de la banque de procéder à la conversion des prêts : qu’il sera rappelé que le 9 août 2011, constatant que la parité euro/franc suisse avait atteint un certain niveau, la Jyske Bank a procédé unilatéralement à la conversion des deux contrats de prêt en euros, alors que le contrat ne prévoyait la possibilité d’une telle conversion qu’en livres Sterling ; que la Jyske Bank expose que la limite de facilité Sterling a été fixée en livres Sterling car les prêts étaient initialement gérés par sa succursale londonienne, avant d’être transférés au siège social de la banque au Danemark, mais que ce choix ne résultait pas d’une volonté des emprunteurs ; qu’elle indique que si elle a finalement opté pour une conversion en euros plutôt qu’en livres Sterling, c’est parce que le bien immobilier donné en garantie était situé dans un pays de la zone euro ; que la conversion en euros permettait donc de réduire le risque de change pour ses clients ; qu’elle souligne que par lettre du 25 novembre 2011 , elle a, par l’intermédiaire de son conseil, proposé à M. H. et à Mme M. une conversion en livres Sterling au taux de change applicable le 9 août 2011, proposition à laquelle les intéressés n’ont donné aucune suite ; que s’agissant des conséquences à tirer de la conversion effectuée au profit d’une monnaie non prévue au contrat, la Jyske Bank fait valoir qu’elle ne saurait être la résolution pour inexécution des prêts dans leur ensemble, mais seulement la nullité de la conversion ou l’allocation de dommages-intérêts, ces deux possibilités ne pouvant se cumuler ; que dans cette dernière éventualité, elle note que l’existence d’un préjudice réparable supposerait de démontrer que la conversion aurait été plus avantageuse, si elle avait été effectuée en livres Sterling plutôt qu’en euros ; que selon les calculs auxquels elle a procédé, si le contrat avait été converti en livres Sterling, il en serait résulté, au 9 septembre 2013, un montant cumulé d’intérêts supérieur de 60.194,12 euros au montant des intérêts perçus à la suite de la conversion en euros, ce dont elle déduit que le préjudice est inexistant ; qu’en réponse, M. X. et Mme Y. demandent la confirmation du jugement en ce qu’il a prononcé la résolution des contrats de prêt et dit qu’ils ne sont plus redevables que du principal, déduction faite des intérêts déjà réglés, qui devront s’imputer sur le capital ; que, subsidiairement, ils demandent que la banque soit condamnée à poursuivre les deux prêts immobiliers en francs suisses, sous astreinte ; qu’il n’est pas contestable ni contesté que les contrats ne prévoyaient que la possibilité de convertir les prêts, libellés en francs suisses, en livres Sterling ; qu’il est également constant que la banque a procédé unilatéralement à une conversion en euros, sans y avoir été expressément autorisée par les emprunteurs ; qu’en procédant de la sorte, la banque n’a pas manqué à son obligation principale de mettre à la disposition de ses clients les fonds objet des contrats de prêt, mais a exécuté de manière défectueuse la faculté dont elle disposait de convertir les prêts en livres Sterling, dès lors que l’endettement dépassait un certain seuil (limite de facilité Sterling), ce qui s’est effectivement produit ; qu’il s’ensuit que la conséquence de l’exécution défectueuse de cette faculté ne saurait être la résolution des contrats de prêt, mais seulement, à défaut de demande contraire des emprunteurs, l’annulation de la conversion ainsi effectuée et le retour à la situation antérieure ; que M. X. et Mme Y. se trouvent donc toujours débiteurs de prêts libellés en francs suisses, supportant des intérêts dont la part variable correspond au taux de base bancaire de la Jyske Bank (Jyske Bank funding rate) applicable à un prêt libellé dans cette devise ; qu’il n’est pas contesté que les emprunteurs ont cessé de rembourser les intérêts depuis le mois de septembre 2011, tout en continuant de rembourser le principal ; que selon les indications fournies par la banque et que ne contestent pas les intimés, les sommes dont ces derniers auraient été redevables envers elle au titre des intérêts si le prêt n’avait pas été converti se seraient élevées, déduction faite des paiements partiels reçus, à 230.608,66 CHF en ce qui concerne le prêt n° 1 et à 81.017,75 CHF au titre du prêt n° 2, soit un total de 311.626,41 CHF à la date du 9 septembre 2015 ; qu’il convient d’accueillir la demande et de réformer le jugement en conséquence » ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
ALORS 1/ QUE la résolution judiciaire du contrat peut être prononcée en cas d’inexécution partielle, y compris d’une obligation accessoire, à condition qu’elle soit suffisamment grave ; qu’en déboutant M. X. et Mme Y. de leur demande en résolution judiciaire des contrats de prêt au seul prétexte que la banque n’avait pas manqué à son obligation principale de mettre à la disposition de ses clients les fonds objet des contrats de prêt, sans apprécier la gravité du manquement qu’elle constatait, à savoir la conversion irrégulière des prêts en euros, la cour d’appel a méconnu l’étendue de ses pouvoirs, et a violé, par refus d’application, l’article 1184 du code civil, dans sa rédaction applicable en la cause ;
ALORS 2/ QUE M. X. et Mme Y. soutenaient dans leurs conclusions que la conversion irrégulière des prêts en euros « a eu pour conséquence la modification aussi bien du capital restant à rembourser, que des intérêts à payer » de sorte que la banque aurait dû leur indiquer le nouveau TEG applicable et que faute de l’avoir fait, la déchéance des intérêts était encourue (conclusions, p. 18, alinéas 2 à 4) ; qu’en retenant pourtant « que la conséquence de l’exécution défectueuse de cette faculté [de conversion] ne saurait être la résolution des contrats de prêt, mais seulement, à défaut de demande contraire des emprunteurs, l’annulation de la conversion ainsi effectuée et le retour à la situation antérieure », quand les emprunteurs sollicitaient en réalité la déchéance du droit aux intérêts, la cour d’appel a dénaturé leurs conclusions, en violation de l’article 4 du code de procédure civile ;
ALORS 3/ QUE M. X. et Mme Y. soutenaient dans leurs conclusions que la conversion irrégulière des prêts en euros « leur a causé un préjudice financier résultant de la mise en œuvre d’une garantie qui s’est avérée inutile ainsi qu’un préjudice moral important » qu’il convenait de réparer par l’allocation d’une somme de 100.000 € à titre de dommages et intérêts (conclusions, p. 18, alinéas 6 et 7) ; qu’en retenant pourtant « que la conséquence de l’exécution défectueuse de cette faculté [de conversion] ne saurait être la résolution des contrats de prêt, mais seulement, à défaut de demande contraire des emprunteurs, l’annulation de la conversion ainsi effectuée et le retour à la situation antérieure », quand les emprunteurs sollicitaient en réalité outre le retour à la situation antérieure, l’allocation de dommages et intérêts, la cour d’appel a dénaturé leurs conclusions, en violation de l’article 4 du code de procédure civile.