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CA REIMS (ch. civ. 1), 7 juillet 2020

Nature : Décision
Titre : CA REIMS (ch. civ. 1), 7 juillet 2020
Pays : France
Juridiction : Reims (CA), ch. civ. sect. 1
Demande : 18/01133
Date : 7/07/2020
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 7/06/2018
Référence bibliographique : 6151 (application dans le temps de l’art. 1171), 6167 (application dans le temps de l’art. L. 442-6), 6180 (notion de déséquilibre), 6242 (compétence spécialisée), 6252 (effets de l’action)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8512

CA REIMS (ch. civ. 1), 7 juillet 2020 : RG n° 18/01133 

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « La société D. invoque l'article 1171 du code civil, selon lequel dans tout contrat d'adhésion, toute clause créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties est réputée non écrite, dans sa version résultant de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, entrant en vigueur au 1er octobre 2016. Cependant, les contrats conclus avant cette date demeurent soumis à la loi ancienne. La société D. ne peut pas se prévaloir de ce texte, alors que les contrats litigieux ont tous été formés avant le 1er octobre 2016. »

2/ « L'article L. 442-6-I-2°, dans sa version applicable résultant de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008, en vigueur à compter du 1er janvier 2009, dispose qu'engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice le fait, pour tout producteur, commerçant, industriel, ou personne immatriculée au répertoire des métiers de soumettre ou tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties. Compte tenu de sa date d'entrée en vigueur, cette disposition législative n'est pas applicable aux contrats conclus en 2001, 2005, 2006, et 2007, mais aux seuls contrats conclus les 31 juillet 2009 et 13 avril 2010. Les clauses litigieuses des contrats conclus jusqu'en 2007 ne peuvent donc être grevées d'aucun déséquilibre significatif. »

3/ « Il appartient au juge de procéder à une analyse concrète et globale des contrats qui lui sont soumis. La société C. soutient qu'en prévoyant qu'à la fin du contrat, le distributeur pouvait se faire rembourser le prix du matériel alors même que celui-ci était usagé, les contrats litigieux ont créé un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.

Les contrats conclus en 2009 et 2010 ont mis à disposition de la société D. des équipements pour des valeurs à la livraison respectivement de 326,51 euros et 89,70 euros toutes taxes comprises. Il conviendra d'observer que ces équipements ont une valeur à l'achat très sensiblement inférieure à celle des contrats de dépôt précédents, allant de 576,57 euros à 4.235,90 euros.

Même s'il échet de constater qu'en cas d'inexécution contractuelle, aucune obligation n'a été mise à la charge du déposant, mais seulement à la charge du seul dépositaire, ce constat doit être rapporté au bénéfice corrélatif au profit du dépositaire, résultant de la mise à disposition du dit matériel, et à leur exploitation commerciale, sans avoir eu à en supporter le coût d'achat, tout en rappelant le coût limité de la valeur du matériel. Il conviendra de conclure à l'absence de déséquilibre significatif instauré par cette clause. Il n'y a donc pas lieu d'annuler comme créant un déséquilibre significatif entre les parties les clauses contractuelles conférant au déposant un droit d'option entre restitution du matériel et remboursement en valeur, et le jugement sera complété de ce chef. »

 

 

COUR D’APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE PREMIÈRE SECTION

ARRÊT DU 7 JUILLET 2020

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 18/01133. - N° Portalis DBVQ-V-B7C-EPKH.

 

APPELANTS :

d'un jugement rendu le 17 avril 2018 par le tribunal de commerce de REIMS

Monsieur X.

[...], [...], Représenté par Maître Dominique R., avocat au barreau de REIMS

SNC C.-L.

[...], [...]

Représentée par Maître Dominique R., avocat au barreau de REIMS

 

INTIMÉS :

SAS D. SAS

[...], [...], Représentée par Maître Carine B.-S. de la SCP C. P.-M. D.-C.BIA, avocat au barreau de CHALONS-EN-CHAMPAGNE

 

COMPOSITION DE LA COUR : Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, présidente de chambre, Madame Catherine LEFORT, conseiller, Monsieur Cédric LECLERC, conseiller, rédacteur

GREFFIER : Monsieur Nicolas MUFFAT-GENDET

ARRÊT SANS DÉBATS (application des dispositions de l'article 8 de l'ordonnance du 25 mars 2020 N° 304/2020), Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 7 juillet 2020 et signé par Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, présidente de chambre, et Monsieur Nicolas MUFFAT-GENDET, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Entre 2001 et 2010, la société en nom collectif C. L. a signé 6 contrats avec la société anonyme H., puis avec la société par actions simplifiée D.

A chaque contrat, la société D. s'est engagée à mettre à disposition du matériel (machine à café, groupe froid, etc.), en échange de quoi la société C. s'est engagée à faire débiter dans son fonds de commerce les boissons livrées par la société H., puis par la société D.

Par lettre recommandée en date du 9 avril 2014, la société D. a mis la société C. en demeure de lui payer la somme de 11.140,32 euros au titre de la valeur des matériels.

Par actes d'huissiers des 12 et 13 janvier 2017, la société D. a attrait la société C., Monsieur X. et Madame Y. devant le tribunal de commerce de Reims.

Dans le dernier état de ses prétentions, la société D. a demandé :

- à être déclarée recevable et bien fondée en ses demandes ;

- la condamnation solidaire de la société C., de Monsieur X. et de Madame Y. à lui payer :

* la somme de 11.140,32 euros à titre d'indemnité égale à la valeur du matériel mis à disposition ;

* les pénalités prévues aux contrats de mise à disposition des 6 novembre 2001, 20 décembre 2005, 23 février 2006 et 1er juin 2007, à savoir 1 % du prix de l'installation par jour de retard de restitution, et ce à compter du 9 mai 2014, jusqu'à parfait paiement de l'indemnité égale à la valeur du matériel mis à disposition ;

* les pénalités prévues aux contrats de mise à disposition des 31 juillet 2009 et 13 avril 2010, à savoir 1 % du prix de l'installation par jour de retard de restitution, et ce à compter du 24 avril 2014, jusqu'à parfait paiement de l'indemnité égale à la valeur du matériel mis à disposition ;

- la condamnation solidaire de la société C. et de Monsieur X. à lui payer la somme de 800 euros à titre de résistance abusive ;

- la condamnation solidaire de la société C., de Monsieur X. et de Madame Y. à lui payer de 2500 euros au titre des frais irrépétibles.

La société C. et Monsieur X. demandent au tribunal :

- de se déclarer territorialement incompétent au profit du tribunal de commerce de Châlons en Champagne, s'agissant des contrats des 20 décembre 2005, 23 février 2006, et 1er juin 2007, comportant une clause attributive de compétence au profit du tribunal de commerce de la ville susdite ;

- constater l'irrecevabilité des demandes présentées à l'encontre de Monsieur X., faute de verser aux débats préalablement à l'assignation un acte extra-judiciaire ;

- mettre hors de cause Monsieur X. ;

- déclarer la société D. irrecevable en ses prétentions sur la base des contrats versés aux débats, faute d'avoir sollicité la restitution préalable de ses matériels par lettre recommandée avec accusé de réception ;

- à titre subsidiaire, constater que la clause prévoyant la récupération du matériel désigné, soit une indemnité égale à la valeur du dit matériel, est en contradiction avec la clause spécifiant qu'en cas d'inexécution, la partie cliente rendra le matériel mis en dépôt après mise en demeure ;

- constater que la société D. ne pouvait que réclamer la restitution du matériel, ce qu'elle n'a aucunement fait par mise en demeure préalable ;

- constater que la clause d'option entre récupération du matériel ou demande d'indemnisation est purement potestative, et sera déclarée nulle et nul effet ;

- constater que la clause d'option entre récupération du matériel ou demande d'indemnisation créée un déséquilibre signification entre les parties, et sera déclarée nulle et nul effet ;

A titre infiniment subsidiaire ;

- constater que la clause d'option prévoit le remboursement du prix du matériel sans indication de date de valorisation du dit matériel ;

- constater que la valorisation du matériel ne peut être faite qu'au jour de la résiliation du contrat ;

- constater que les matériels livrés en 2001, 2005, 2006, 2007, 20009 et 2010 n'ont plus aucune valeur marchande ;

- débouter la société D. de ses demandes fondées sur un prix initial à la fourniture, alors même que la clause ne prévoit nullement cette valeur au jour de la résiliation ;

- donner acte à la société C. de ce qu'elle tient à disposition de la société D. les matériels, objets de la présente action ;

- constater que la société D. a manqué à ses obligations en se gardant bien de réclamer les dits matériels, qui n'ont plus aucune valeur marchande ;

- débouter la société D. de l'ensemble de ses demandes en paiement ;

- condamner la société D. à leur payer la somme de 1500 euros au titre des frais irrépétibles d'appel.

Madame Y. n'a pas comparu ni n'a été représentée.

[*]

Par jugement réputé contradictoire en date du 17 avril 2018, le tribunal de commerce de Reims :

- s'est déclaré compétent pour statuer sur l'entier litige ;

- a constaté que la société D. venait aux droits de la société H. ;

- a reçu la société D. en ses demandes, et l'a déclarée partiellement bien fondée ;

- a condamné solidairement la société C., Monsieur X. et Madame Y. à payer à la société D. la somme de 11.140,32 euros, outre 1.000 euros au titre des frais irrépétibles ;

- a rejeté toute autre demande.

Le 25 mai 2018, Monsieur X. et la société C. ont relevé appel de ce jugement, en intimant la seule société D. Le dossier de la procédure y afférente a été ouvert sous la référence Rg 18/01133.

Le 7 juin 2018, la société D. a relevé appel de ce jugement, en intimant les trois défendeurs initiaux. Le dossier de la procédure y afférente a été ouvert sous la référence RG 18/01206.

Le 20 juin 2018, a été ordonnée la jonction des deux affaires.

Le 25 juillet 2018, la société D. a signifié à étude sa déclaration d'appel à Madame Y., intimée non constituée.

Le 3 septembre 2018, la société D. a signifié à étude ses écritures et pièces à Madame Y., intimée non constituée.

Le 30 juillet 2019 a été ordonnée la clôture de l'instruction de l'affaire.

Initialement appelée à l'audience de la cour du 16 septembre 2019, l'affaire a été renvoyée à l'audience du 9 mars 2020 en raison d'un mouvement de grève des avocats, puis à l'audience du 19 mai 2020 en raison de la crise sanitaire liée à la pandémie de covid-19.

Par mails adressés au greffe les 4 et 6 mai 2020, les parties ont donné leur accord à l'application de l'article 8 de l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale et aux contrats de syndic de copropriété.

 

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Pour plus ample exposé, il sera expressément renvoyé aux écritures déposées :

- le 29 août 2018 par la société D., appelante et intimée ;

- le 22 juin 2018 par la société C. et Monsieur X., appelants et intimés.

La société D. demande la confirmation intégrale du jugement, sauf en ce qu'elle a été déboutée de ses demandes au titre des pénalités de retard et pour résistance abusive. Elle en réclame l'infirmation sur ces deux derniers chefs, pour lesquels elle réitère ses demandes initiales.

Elle réclame la condamnation solidaire de ses trois adversaires à lui payer la somme de 4.000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel.

Par voie d'infirmation, la société C. et Monsieur X. réitèrent leurs demandes initiales tendant à voir déclarer les prétentions de la société D. irrecevables, et de la débouter de l'intégralité de ses prétentions à leur égard.

La société C. et Monsieur X. demandent la confirmation du jugement en ce qu'il a débouté la société D. de ses demandes au titre des pénalités, ainsi que sa condamnation à leur verser la somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIVATION :

Les parties n'ont pas dévolu à la cour l'examen de la disposition du jugement rejetant l'exception territoriale soulevée par les défendeurs.

L'article 654 du code de procédure civile dispose que la cour n'est saisie que des seules prétentions figurant le dispositif des dernières écritures des parties.

L'article L. 221-1 du code de commerce dispose que les associés en nom collectif ont tous la qualité de commerçants et répondent indéfiniment et solidairement des dettes sociales, mais prévoit que les créanciers de la société ne peuvent poursuivre le paiement des dettes sociales contre un associé, qu'après avoir vainement mis en demeure la société par acte extra-judiciaire.

Monsieur X. se prévaut des dispositions de ce texte, pour observer qu'il n'a pas été mis en demeure préalablement en sa qualité d'associé de la société C. par la société D., et pour en déduire que les prétentions de cette dernière à son encontre sont irrecevables.

Dans les motifs de ses dernières écritures, la société D. fait grief à Monsieur X. de la tardiveté cette exception. Elle observe que devant les premiers juges, l'intéressé avait conclu pour la première fois sur le fond du dossier le 28 mars 2017, sans avoir alors soulevé cette exception. Elle entend en voir déduire que cette exception de procédure doit être déclarée irrecevable comme tardive.

Cependant, la société D. n'a formé aucune prétention en ce sens dans le dispositif de ces dernières écritures, de telle sorte que la cour n'est saisie d'aucune prétention tendant à déclarer irrecevable l'exception présentée par Monsieur X.

 

Sur l'irrecevabilité des prétentions de la société D. formées à l'encontre de Monsieur X. :

L'article L. 221-1 du code de commerce dispose que les associés en nom collectif ont tous la qualité de commerçants et répondent indéfiniment et solidairement des dettes sociales, mais prévoit que les créanciers de la société ne peuvent poursuivre le paiement des dettes sociales contre un associé, qu'après avoir vainement mis en demeure la société par acte extra-judiciaire.

L'acte extra judiciaire de mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception ne n'observe pas formalisme prévue par ce texte. (Cass. com. 1er juin 1993, n° 91-16687).

Avant d'avoir été assignée, la société C. n'a fait l'objet que d'une seule mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 9 avril 2014.

Il conviendra donc d'en déduire que la société C. n'a fait l'objet d'aucune vaine mise en demeure préalable dans les conditions de l'article L. 221-1 du code de commerce, de sorte que la société D. est malhabile à rechercher le paiement des dettes de la société C. auprès de Monsieur X., son associé.

Il conviendra donc de déclarer irrecevables les prétentions formées par la société D. à l'encontre de Monsieur X., de mettre ce dernier hors de cause, et le jugement sera infirmé de ce chef.

 

Sur les clauses contractuelles et leur irrespect par la société C. :

L'ensemble des contrats prévoit qu'en contrepartie de la mise à disposition des distributeurs de boisson par la société D., la société C. :

- s'engage formellement à débiter ou faire débiter continuellement des boissons ;

- et qu'à cet effet, les boissons à faire consommer, quelle qu'en soient la présentation et la nature, ne pourront être que celles fournies par le distributeur.

Les quatre premiers contrats, et non les deux derniers, stipulent que :

« Au cas où la partie cliente ne respecterait pas l'une ou l'autre des obligations mises à sa charge par la présente, il est d'ores et déjà expressément convenu que le distributeur C.H.D. aura droit, soit à récupérer le matériel désigné, soit à réclamer à la partie cliente une indemnité égale à la valeur du dit matériel.

En cas d'inexécution, la partie cliente rendra le matériel mis en dépôt après mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception ».

Les deux derniers contrats, et non pas les quatre premiers, stipulent que :

« Toutes les conditions du présent engagement sont réputées essentielles et constituent un tout indivisible. En cas de violation d'une de ces stipulations par le revendeur, le contrat sera résilié de plein droit sans mise en demeure préalable, et le fournisseur demandera, à sa convenance, la restitution des matériels mis à disposition ou bien le remboursement de leur valeur d'origine, outre les frais de démontage, étant précisé que le fournisseur pourra prendre des options différentes pour chaque matériel. Une indemnité forfaitaire de 1 % du prix TTC du matériel sera appliquée par jour de retard à compter de la résiliation. »

L'ensemble des contrats comporte une clause rédigée comme suit :

« En fin de contrat le revendeur restituera au distributeur CHD le matériel et l'installation prêtés, après mise en demeure par lettre recommandée avec avis de réception, ou le cas échéant, remboursera le prix du matériel.

Passé le délai de 1 mois (pour les deux premiers contrats), ou un mois (pour les quatre derniers contrats, la partie cliente réglera une indemnité forfaitaire de 1 % du prix de l'installation par jour de retard de restitution. »

De l'examen des clauses figurant plus haut, il conviendra d'observer que l'ensemble des contrats comportent une clause résolutoire.

Par lettre recommandée avec accusé de réception, la société D. a mis en demeure la société C. de lui payer la somme de 11.140,32 euros au titre de la valeur des matériels.

Ce courrier a notamment rappelé la stipulation contractuelle aux termes de laquelle le dépositaire :

- s'engage formellement à débiter ou faire débiter continuellement des boissons ;

- et qu'à cet effet, les boissons à faire consommer, quelle qu'en soient la présentation et la nature, ne pourront être que celles fournies par le distributeur.

Ce courrier observe que malgré une reprise des commandes de quelques mois, la société C. n'a plus procédé à aucune commande depuis le mois de janvier 2014, et ce en contradiction avec les clauses des contrats susvisés.

Ce courrier rappelle enfin la clause contractuelle, prévoyant, en cas d'inexécution de ses obligations par la société C., que la société D. pourrait soit récupérer son matériel, soit réclamer une indemnité égale à la valeur de ce dernier, pour réclamer la somme susdite.

Ce courrier a en outre rappelé que passé un délai d'un mois après sa réception, l'indemnité forfaitaire de 1 % du prix de l'installation courra par jour de retard, dans le paiement des sommes réclamées.

La société C. ne conteste pas l'irrespect de ses obligations contractuelles, telles qu'énoncées dans le courrier de mise en demeure du 9 avril 2014, de telle sorte que les conditions de fond de la résolution des contrats de dépôt litigieux se trouvent suffisamment établies.

 

Sur l'irrecevabilité des prétentions de la société D., faute pour celle-ci d'avoir réclamé la restitution préalable du matériel par lettre recommandée avec accusé de réception :

La condition résolutoire, lorsqu'elle s'accomplit, opère, sans stipulation contraire des parties, la révocation de l'obligation, sans mise en demeure préalable.

La société C. observe que les contrats litigieux stipulent qu'en cas d'inexécution, la partie cliente rendra le matériel mis en dépôt après mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception.

Elle rappelle que la société D. s'était abstenue des formalités de mise en demeure, pour en déduire que celle-ci serait irrecevable à agir sur ce fondement contractuel.

Il sera observé que cette clause n'a été insérée que dans les quatre premiers contrats, selon lesquels : « En cas d'inexécution, la partie cliente rendra le matériel mis en dépôt après mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception ».

Cette clause n'institue en aucune manière un formalisme substantiel déterminant l'acquisition de la clause résolutoire, mais se borne à prévoir une obligation à la charge de la partie cliente dépositaire en cas d'inexécution.

En tout état de cause, ce moyen est inopérant, puisque la société D. n'a pas entendu solliciter la restitution du matériel, mais le paiement de sa contrepartie en valeur.

* * *

Selon la société C., il y a lieu de rechercher la commune intention des parties au sens de l'article 1156 du code civil, et dans le doute, d'interpréter la convention contre celui qui a stipulé, et en faveur de celui qui a contracté l'obligation, par application de l'article 1162 du même code.

La société C. soutient en effet qu'il existerait une contradiction entre la stipulation précisant qu'en cas d'inexécution, la restitution doit s'imposer après mise en demeure, et avec les affirmations de son contradicteur, selon lequel elle peut soit récupérer le matériel, soit réclamer une indemnité d'une valeur équivalente.

Elle entend en voir déduire l'existence d'un doute nécessitant une interprétation à son profit des conventions litigieuses, de telle sorte qu'elle-même pouvait parfaitement proposer la restitution du matériel, tenu à disposition de la société D., tandis que celle-ci ne pouvait pas réclamer le paiement du matériel.

Les quatre premiers contrant seulement prévoient qu'en cas d'inexécution la partie cliente devra rendre le matériel mis en dépôt après mise en demeure.

L'ensemble des contrats prévoit qu'en cas d'inexécution par le dépositaire, le déposant pourra demander à son choix soit la récupération du matériel, soit réclamer au dépositaire une indemnité égale à la valeur du matériel.

Il n'existe donc aucune contradiction entre ces clauses de nature à générer un doute, puisque ;

- la première se borne à préciser les modalités pratiques de restitution du matériel par la dépositaire, au cas où le déposant réclame la restitution ;

- les secondes se bornent à définir le principe de deux sanctions distinctes du dépositaire en cas de manquement à ses obligations, en laissant au déposant le choix d'opter pour l'une ou l'autre de ces sanctions.

En tout état de cause, il sera rappelé que la société D. n'a pas entendu solliciter la restitution du matériel, mais le paiement de sa contrepartie en valeur.

* * *

Il conviendra donc de déclarer recevables les demandes de la société D. à l'encontre de la société C. L. et de Madame Y., et le jugement sera confirmé de ce chef.

 

Sur le caractère potestatif de l'option entre la restitution du matériel et son remboursement en valeur au choix du déposant :

L'article 1170 du code civil dispose que la condition potestative est celle qui fait dépendre l'exécution de la convention d'un événement qui est dans le pouvoir de l'une ou l'autre des parties contractantes de faire arriver ou empêcher ; l'article 1174 du même code dispose que toute obligation est nulle lorsqu'elle a été contractée sous une condition potestative de la part de celui qui s'oblige.

Il y a obligation alternative lorsque l'obligation du débiteur a plusieurs objets, un seul pouvant être exigé du créancier, le choix appartenant en principe au débiteur.

Selon la société C., cette clause est potestative, en ce que l'option appartient seulement à la société D., non seulement en choisissant le terme de l'option, mais encore en choisissant au second terme de l'option la valeur du matériel au jour de sa livraison, qui remontait pour certains contrats à plus de 15 ans.

De manière liminaire, l'exécution de cette clause ne dépend pas exclusivement du déposant, mais se trouve expressément subordonnée au manquement du dépositaire à ses obligations, circonstance objective qu'il n'est pas au pouvoir du déposant de faire advenir ou empêcher.

En outre, cette clause, qui se borne au cas d'inexécution du débiteur à conférer un droit d'option au profit au créancier, parmi deux obligations distinctes strictement définies par le contrat, ne peut que s'analyser en une obligation alternative.

Enfin, le montant de l'indemnité y afférente, loin d'être soumise à la seule discrétion du créancier, se trouve défini avec clarté par la volonté des parties, notamment en ce que les contrats font chacun référence à la valeur des matériels mis en dépôt lors de leur livraison, en rappelant que cette valeur est justifiée sur facture.

Il n'y a donc pas lieu d'annuler comme potestative les clauses contractuelles conférant au déposant un droit d'option entre restitution du matériel et remboursement en valeur, et le jugement sera complété de ce chef.

 

Sur le déséquilibre significatif entre parties :

La société D. invoque l'article 1171 du code civil, selon lequel dans tout contrat d'adhésion, toute clause créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties est réputée non écrite, dans sa version résultant de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, entrant en vigueur au 1er octobre 2016.

Cependant, les contrats conclus avant cette date demeurent soumis à la loi ancienne.

La société D. ne peut pas se prévaloir de ce texte, alors que les contrats litigieux ont tous été formés avant le 1er octobre 2016.

 

L'article L. 442-6-I-2°, dans sa version applicable résultant de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008, en vigueur à compter du 1er janvier 2009, dispose qu'engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice le fait, pour tout producteur, commerçant, industriel, ou personne immatriculée au répertoire des métiers de soumettre ou tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties.

Compte tenu de sa date d'entrée en vigueur, cette disposition législative n'est pas applicable aux contrats conclus en 2001, 2005, 2006, et 2007, mais aux seuls contrats conclus les 31 juillet 2009 et 13 avril 2010.

Les clauses litigieuses des contrats conclus jusqu'en 2007 ne peuvent donc être grevées d'aucun déséquilibre significatif.

Il appartient au juge de procéder à une analyse concrète et globale des contrats qui lui sont soumis.

La société C. soutient qu'en prévoyant qu'à la fin du contrat, le distributeur pouvait se faire rembourser le prix du matériel alors même que celui-ci était usagé, les contrats litigieux ont créé un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.

Les contrats conclus en 2009 et 2010 ont mis à disposition de la société D. des équipements pour des valeurs à la livraison respectivement de 326,51 euros et 89,70 euros toutes taxes comprises. Il conviendra d'observer que ces équipements ont une valeur à l'achat très sensiblement inférieure à celle des contrats de dépôt précédents, allant de 576,57 euros à 4.235,90 euros.

Même s'il échet de constater qu'en cas d'inexécution contractuelle, aucune obligation n'a été mise à la charge du déposant, mais seulement à la charge du seul dépositaire, ce constat doit être rapporté au bénéfice corrélatif au profit du dépositaire, résultant de la mise à disposition du dit matériel, et à leur exploitation commerciale, sans avoir eu à en supporter le coût d'achat, tout en rappelant le coût limité de la valeur du matériel.

Il conviendra de conclure à l'absence de déséquilibre significatif instauré par cette clause.

Il n'y a donc pas lieu d'annuler comme créant un déséquilibre significatif entre les parties les clauses contractuelles conférant au déposant un droit d'option entre restitution du matériel et remboursement en valeur, et le jugement sera complété de ce chef.

 

La société D. invoque l'article 1171 du code civil, selon lequel dans tout contrat d'adhésion, toute clause créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties est réputée non écrite, dans sa version résultant de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, entrant en vigueur au 1er octobre 2016.

Cependant, les contrats conclus avant cette date demeurent soumis à la loi ancienne.

La société D. ne peut pas se prévaloir de ce texte, alors que les contrats litigieux ont tous été formés avant le 1er octobre 2016.

La société D. invoque l'article 1171 du code civil, selon lequel dans tout contrat d'adhésion, toute clause créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties est réputée non écrite, dans sa version résultant de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, entrant en vigueur au 1er octobre 2016.

Cependant, les contrats conclus avant cette date demeurent soumis à la loi ancienne.

La société D. ne peut pas se prévaloir de ce texte, alors que les contrats litigieux ont tous été formés avant le 1er octobre 2016.

 

Selon l'article 1162 du code civil, dans le doute, la convention s'interprète contre celui qui a stipulé et en faveur de celui qui a contracté l'obligation.

Les quatre premiers contrats ne définissent pas le montant de l'indemnité due par le dépositaire, à défaut de restitution.

Il convient d'observer la très grande imprécision de ces premiers contrats quant au montant de l'indemnité, ceux-ci évoquant tout à la fois :

- une obligation de remboursement du prix du matériel ;

- une indemnité égale à la valeur du matériel.

Or, il convient d'observer que si chacune de ses conventions définissent la valeur du matériel lors de sa mise en service, elles prévoient également que celui-ci demeure l'entière propriété du déposant, et que celui-ci l'amortira au prorata conformément à la loi.

Il conviendra d'observer la contradiction, et à tout le moins l'obscurité du contrat quant à la détermination du montant de l'indemnité due par le dépositaire et quant à la date à laquelle celle-ci doit être appréciée.

Il conviendra donc de considérer que le montant de l'indemnité, égal à la valeur du matériel, n'est pas le prix de celui, mentionné dans le contrat, à sa date d'installation, mais sa valeur finale amortie selon les règles comptables, à la date de rupture contractuelle.

Il s'en déduira suffisamment que la valeur comptable afférente aux matériels objet des contrats d'installation des 6 novembre 2001, 20 décembre 2005, 23 février 2006, 1er juin 2007 était devenue nulle en 2014, année au cours de laquelle est intervenue la résiliation contractuelle.

Les demandes d'indemnités de la société D. au titre de quatre contrats ne pourront donc prospérer, et les demandes au titre de la clause pénale de 1 %, ayant pour assiette la valeur du matériel, suivront le même sort.

La société D. sera donc déboutée de ses prétentions relatives à la sa demande principale au titre de ces quatre premiers contrats, et le jugement sera infirmé de ces chefs.

En revanche, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté la société D. de ses demande au titre de l'indemnité de retard afférente à ces quatre premiers contrats.

* * *

Au rebours des contrats précédents, il ne peut pas être fait grief aux contrats des 22 juillet 2009 et 13 avril 2010, portant mention de la valeur ttc du matériel mis à disposition, d'une quelconque imprécision quant au montant de l'indemnité due par le dépositaire en cas d'inexécution de ses obligations.

Ces contrats prévoient en effet que le déposant peut réclamer le remboursement de la valeur d'origine des matériels, outre des frais de démontage.

Chacun de ces deux contrats précisent que la valeur du matériel, justifiée sur facture, est respectivement de 326,51 euros et 89,70 euros ttc.

Ces contrats prévoient en outre une indemnité forfaitaire de 1 % du prix ttc du matériel, par jour de retard à compter de la résiliation.

Il sera rappelé que l'indemnité de 1 % n'est absolument pas assujettie à une mise en demeure du dépositaire aux fins de restitution du matériel.

 

Sur les condamnations :

Il y aura donc lieu de condamner la société C. et Madame Y. à payer à la société D. la somme de 416,21 euros, et ce avec une pénalité de 1 % appliquée à la somme susdite, par jour de retard, et ce à compter du 24 avril 2014 jusqu'à paiement de la somme de 416,21 euros, mais la société D. sera déboutée du surplus de ses prétentions, à l'encontre de la société C., et le jugement sera infirmé de ces chefs.

 

Sur les dommages-intérêts pour résistance abusive :

Alors que la société D. s'était bornée à réclamer non pas la restitution des matériels, mais le remboursement de leur valeur d'achat, elle n'a pas suffisamment caractérisé le préjudice de son chef résultant du seul défaut de paiement à ce titre par la société D., qui de surcroît se trouve suffisamment réparé par les intérêts de retard contractuels alloués ci-dessus.

La société D. sera donc déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive, et le jugement sera confirmé de ce chef.

* * *

Il sera rappelé que le présent arrêt vaudra titre de restitution des sommes allouées en exécution du jugement déféré.

Aucune considération d'équité ne conduira à allouer d'indemnité de procédure.

Le jugement sera confirmé pour avoir débouté Monsieur X. et la société C. de leur demande à titre de frais irrépétibles de première instance.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné la société C., Monsieur X. et Madame Y. à payer à la société D. une somme à titre de frais irrépétibles de première instance.

Il sera aussi infirmé pour avoir condamné solidairement la société C. et Madame Y. aux entiers dépens de première instance. Il sera infirmé pour avoir condamné Monsieur X. aux dépens de première instance.

La société D., Monsieur X. et la société C. seront déboutés de leurs demandes au titre des frais irrépétibles d'appel.

La société C. et Madame Y. seront en outre condamnées in solidum aux entiers dépens d'appel.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant sans audience, publiquement par mise à disposition au greffe, par défaut, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a :

- déclaré recevables les demandes de la société par actions simplifiée D. à l'encontre de la société en nom collectif C. L. et de Madame Y. ;

- débouté la société par actions simplifiée D. de sa demande au titre de la pénalité de retard de 1 % au titre des contrats souscrits les 6 novembre 2001, 20 décembre 2005, 23 février 2006, et 1er juin 2007 ;

- débouté la société par actions simplifiée D. de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive ;

- débouté la société en nom collectif C. et Monsieur X. de leur demande

au titre de frais irrépétibles de première instance ;

- condamné solidairement Madame Y. et la société en nom collectif C. L. aux dépens de première instance ;

Confirme le jugement des seuls chefs plus haut cités ;

Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant :

Déclare irrecevables les prétentions formées par la société par actions simplifiée D. à l'encontre de Monsieur C. et met ce dernier hors de cause ;

Dit n'y avoir lieu d'annuler, comme créant un déséquilibre significatif entre les parties, ou comme potestatives, les clauses contractuelles conférant au déposant un droit d'option entre restitution du matériel et remboursement en valeur, en cas d'inexécution contractuelle par le dépositaire ;

Condamne solidairement la société en nom collectif C.-L. et Madame Y. à payer à la société par actions simplifiée D. la somme de 416,21 euros, avec une pénalité de 1 % appliquée à la somme susdite, par jour de retard, et ce à compter du 24 avril 2014 jusqu'à paiement de la somme de 416,21 euros ;

Déboute la société par actions simplifiée D. du surplus de ses prétentions ;

Ordonne restitution des sommes allouées en exécution du jugement déféré ;

Déboute la société par actions simplifiée D. de sa demande au titre des frais irrépétibles de première instance ;

Dit n'y avoir lieu à allocation de frais irrépétibles d'appel ;

Condamne in solidum la société en nom collectif C.-L. et Madame Y. aux entiers dépens d'appel.

Le greffier                             La présidente