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CA MONTPELLIER (4e ch. civ.), 4 novembre 2020

Nature : Décision
Titre : CA MONTPELLIER (4e ch. civ.), 4 novembre 2020
Pays : France
Juridiction : Montpellier (CA), 4e ch. civ.
Demande : 17/05187
Date : 4/11/2020
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 2/10/2017
Référence bibliographique : 6021 (indice, contrepartie des obligations secondaires), 6031 (indice, économie du contrat), 6052 (indice, loyauté contractuelle), 6331 (mandat de vente d’immeuble)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8631

CA MONTPELLIER (4e ch. civ.), 4 novembre 2020 : RG n° 17/05187 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Pour s'opposer ensuite à la mise en œuvre de la clause pénale dont les conditions d'application sont réunies, ils soutiennent que cette clause est abusive au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation pour créer un déséquilibre au détriment du non professionnel ou du consommateur et lui imposer le versement d'une indemnité compensatrice d'un montant manifestement disproportionné ;

Toutefois, cette clause n'a pas pour effet de remettre en cause l'économie générale du contrat et notamment l'absence d'exclusivité du mandat dès lors qu'elle ne leur interdit pas de présenter, et le cas échéant de vendre leur bien, à un autre acquéreur trouvé par eux-mêmes ou un autre agent immobilier que ceux présentés par l'agence, ni ne revêt le caractère d'une clause abusive au sens du texte invoqué en ce qu'elle ne crée pas un déséquilibre entre les parties mais assure le respect de la loyauté contractuelle, en mettant à la charge du mandant une obligation d'information particulièrement simple à remplir et en évitant corrélativement à l'agent immobilier d'effectuer des démarches, de procéder à des publicités ou d'organiser des visites le tout en pure perte alors que le bien n'est plus disponible à la vente. »

 

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

QUATRIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 4 NOVEMBRE 2020

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 17/05187. N° Portalis DBVK-V-B7B-NKV6. Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 AOÛT 2017, TRIBUNAL D'INSTANCE DE NARBONNE : R.G n° 11/16/532.

 

APPELANTS :

Monsieur X.

né le [date] à [ville], de nationalité Française, [...], [...], Représenté par Maître Philippe C., avocat au barreau de NARBONNE substitué par Me Mohamed E., avocat au barreau de NARBONNE

Madame Y.

née le [date] à [ville], de nationalité Française, [...], [...], Représentée par Maître Philippe C., avocat au barreau de NARBONNE substitué par Maître Mohamed E., avocat au barreau de NARBONNE

 

INTIMÉE :

EURL MAJESTIC INVEST L'EUROPEENNE D'IMMOBILIER

agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié es qualité audit siège social, [...], [...], Représentée par Maître Marie Camille P. N. de la SCP ERIC N., MARIE CAMILLE P. N., avocat au barreau de MONTPELLIER avocat postulant et Maître Éric N. de la SCP ERIC N., MARIE CAMILLE P. N., avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 SEPTEMBRE 2020, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, Mme Yécile YOUL-PAILHES, Conseillère, M. Frédéric DENJEAN, Conseiller.

Greffier, lors des débats : Mme Nadine CAGNOLATI

ARRÊT : - contradictoire - prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ; - signé par M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, et par Mme Henriane MILOT, Greffier.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Agissant sur le fondement de la clause pénale insérée au mandat de vente du 26 mai 2012, L'EURL MAJESTIC INVEST- L'EUROPÉENNE D'IMMOBILIER (ci-après l'agence) a fait citer M. X. et Mme Y. (ci-après le mandant) devant le tribunal d'instance de Narbonne, lequel, par jugement du 29 août 2017, les condamnait solidairement à payer à l'agence la somme de 5.000 euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement, outre 750 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

[*]

Par déclaration du 2 octobre 2017, M. X. et Mme Y. ont interjeté appel.

Dans le dernier état de leurs écritures déposées le 6 mai 2020, ils demandent, au visa des articles 1134 et 1135 anciens du code civil, 1231-5 et 1382 du code civil, L. 111-1, L. 111-5, L. 211-1 et L. 212-1 du code de la consommation, d'infirmer le jugement déféré et :

- à titre principal, de débouter l'agence de l'intégralité de ses demandes ;

- à titre subsidiaire, de réduire la clause pénale à l'euro symbolique

- en toute hypothèse, de la condamner à lui payer la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Ils soutiennent le manquement de l'agence à son devoir d'information, les conditions essentielles du contrat figurant au verso ne comportant ni paraphe ni signature, la phrase en bas de recto selon laquelle ils reconnaissent avoir pris connaissance des conditions générales de vente n'étant pas visible, alors que le professionnel doit présenter les clauses de façon claire et compréhensible, soulignant encore que la clause imposant l'envoi par lettre recommandée avec avis de réception n'est pas mise en évidence ;

Ils soutiennent le caractère abusif de la clause en ce que seuls les non-professionnels se voient imposer des obligations fermes, entraînant un déséquilibre significatif ;

Ils font encore valoir l'abus de droit que constitue la procédure en ce que l'agence, qui a été informée de la vente, ne justifie d'aucune diligence dans l'exécution du mandat et invoque de mauvaise foi un manquement à une obligation accessoire.

[*]

Dans le dernier état de ses écritures déposées le 20 avril 2020, Maître Bernard S. ès-qualités de liquidateur de L'EURL MAJESTIC INVEST, intervient volontairement et reprend l'instance, faisant siennes les conclusions précédentes notifiées le 20 décembre 2017 par celle-ci au terme desquelles elle demande de confirmer le jugement déféré et d'y ajouter en condamnant solidairement les mandants à lui payer la somme de 2.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens d'appel avec application du droit de recouvrement direct de l'article 699 du code de procédure civile.

Il réplique à chaque moyen adverse.

[*]

L'ordonnance de clôture est en date du 31 août 2020.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

Vu l'article 1134 du code civil dans sa rédaction alors applicable

Les appelants ont donné mandat de vente numéro XX en date du 26 mai 2012, aux fins de vendre leur bien immobilier sis à [ville V.] moyennant une commission de 10.000 euros.

Le mandat stipule au verso paragraphe XIV « vente sans votre concours » : « dans le cas de vente sans votre concours, quelle que soit l'option choisie, nous nous engageons à vous informer immédiatement par lettre recommandée avec accusé de réception, en vous précisant les noms et adresses de l'acquéreur, du notaire chargé de l'acte authentique et de l'agence éventuellement intervenue, ainsi que le prix de vente finale, ce, pendant la durée du présent mandat et deux ans après son expiration. »

CLAUSES PÉNALES : EN CAS DE NON-RESPECT DE LA CLAUSE CI-DESSUS, LE MANDANT VERSERA UNE INDEMNITÉ COMPENSATRICE FORFAITAIRE CORRESPONDANT À LA MOITIÉ DE LA RÉMUNÉRATION CONVENUE...

Selon la mention manuscrite figurant au document dénommé Fiche Privée, c'est le 18 janvier 2013 que Mme Y. a avisé l'agence par appel téléphonique que le bien était vendu depuis novembre à un acquéreur Z. et que le notaire était Maître A.

Les mandants ne sauraient utilement soutenir le manquement de l'agence à son devoir d'information de professionnel, peu important que la clause se trouve au verso.

Ils signent un MANDAT DE VENTE et ne peuvent ignorer être LE MANDANT.

Il n'est nul besoin de faire parapher ou signer la page verso de ce document, sur laquelle figure en termes intelligibles l'obligation à laquelle ils sont tenus et sa sanction dès lors qu'en bas de page recto, précédant immédiatement leurs signatures, figure la mention, dactylographiée en caractère gras, en majuscules, certes dans un police de caractères plus petits que certaines autres mentions mais parfaitement lisible : « LE MANDANT RECONNAÎT AVOIR PRIS CONNAISSANCE DES CONDITIONS GÉNÉRALES AU VERSO ».

Cette mention est-elle même immédiatement précédée d'une autre, écrite en caractère gras, selon laquelle « le mandant reconnaît expressément avoir pris connaissance, tant par lui-même que par les explications qui lui ont été fournies, préalablement à la signature, de l'intégralité des caractéristiques du présent mandat (conformément à la loi 526 du 12 mai 2009 modifiant l'article 1 du code de la consommation. »

Il est donc parfaitement établi que l'agence a satisfait à son devoir d'information de professionnel.

Pour s'opposer ensuite à la mise en œuvre de la clause pénale dont les conditions d'application sont réunies, ils soutiennent que cette clause est abusive au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation pour créer un déséquilibre au détriment du non professionnel ou du consommateur et lui imposer le versement d'une indemnité compensatrice d'un montant manifestement disproportionné ;

Toutefois, cette clause n'a pas pour effet de remettre en cause l'économie générale du contrat et notamment l'absence d'exclusivité du mandat dès lors qu'elle ne leur interdit pas de présenter, et le cas échéant de vendre leur bien, à un autre acquéreur trouvé par eux-mêmes ou un autre agent immobilier que ceux présentés par l'agence, ni ne revêt le caractère d'une clause abusive au sens du texte invoqué en ce qu'elle ne crée pas un déséquilibre entre les parties mais assure le respect de la loyauté contractuelle, en mettant à la charge du mandant une obligation d'information particulièrement simple à remplir et en évitant corrélativement à l'agent immobilier d'effectuer des démarches, de procéder à des publicités ou d'organiser des visites le tout en pure perte alors que le bien n'est plus disponible à la vente.

Quant à l'abus de droit prétendument commis par l'agence, la reconnaissance de la validité de la clause et la réunion de ses conditions d'application excluent tout abus dans l'action judiciaire de l'agence qui ne recherche que l'exécution de bonne foi du contrat signé, sans qu'il soit ni nécessaire ni opportun d'examiner les diligences qu'elle a pu effectuer ;

Cependant, le montant de la clause apparaît excessif au regard des circonstances propres à l'espèce qui démontrent que Mme Q. a effectivement avisé l'agence, dans un délai qui n'est pas déraisonnable même s'il dépasse l'immédiateté exigée par la clause, de la vente du bien et a permis à celle-ci de mettre fin aux diligences accomplies en vue de la découverte d'un acquéreur et de vérifier que l'acquéreur n'avait pas été présenté par elle, de telle sorte que le montant sera réduit à la somme de 1.500 euros.

Les appelants, succombant dans le principal de leurs prétentions, supporteront les dépens d'appel.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, en dernier ressort,

Infirme le jugement déféré,

Et statuant à nouveau,

Condamne solidairement M. X. et Mme Y. à payer à Maître Bernard S., ès-qualités, la somme de 1.500 € à titre de dommages et intérêts en exécution de la clause pénale insérée au mandat de vente,

Rejette toute autre demande et dit inutiles ou mal fondées celles plus amples ou contraires formées par les parties,

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne in solidum M. X. et Mme Y. aux dépens et accorde à la SCP N.P.N., le bénéfice de l'article 699 du code de

procédure civile.

LE GREFFIER,                               LE PRÉSIDENT,