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CA PAU (2e ch. sect. 1), 14 janvier 2021

Nature : Décision
Titre : CA PAU (2e ch. sect. 1), 14 janvier 2021
Pays : France
Juridiction : Pau (CA), 2e ch. sect. 1
Demande : 19/02046
Décision : 21/200
Date : 14/01/2021
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 17/06/2019
Numéro de la décision : 200
Référence bibliographique : 6638 (prêt immobilier, TEG), 5705 (imprescriptibilité de l’action), 5835 (L. 212-1 C. consom., domaine, absence de clause), 5730 (appel, demande nouvelle)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8737

CA PAU (2e ch. sect. 1), 14 janvier 2021 : RG n° 19/02046 ; arrêt n° 21/200 

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « Mais, en droit, il résulte des articles L. 312-33, devenu L. 341-34, et L. 131-1 alinéa 1, devenu L. 314-1, L. 313-2 alinéa 1, devenu L. 314-5 du code de la consommation que l'inexactitude du TEG mentionné dans une offre préalable de prêt immobilier est exclusivement sanctionnée par la déchéance du droit aux intérêts conventionnels, dans la proportion déterminée par le juge en considération de la gravité de l'erreur. Par conséquent, en prononçant la nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels pour inexactitude du TEG mentionné dans l'offre de prêt immobilier et l'offre d'avenant, le premier juge a méconnu les dispositions légales précitées. »

2/ « Mais, en droit, d'une part, la demande tendant à voir déclarer réputée non écrite une clause abusive n'est pas soumise à la prescription. D'autre part, elle ne se heurte pas, en l'espèce, à la fin de non-recevoir tirée de sa nouveauté en appel dès lors qu'elle tend aux mêmes fins que l'action en nullité de la stipulation d'intérêts en ce que les deux actions visent à écarter l'application de la clause des intérêts conventionnels dans les rapports entre les parties et à obtenir la restitution des intérêts conventionnels réglés en vertu de cette clause.

Cependant, sur le fond, les intimés ne démontrent pas le caractère abusif de la clause litigieuse qui ne peut résulter de la seule affirmation du calcul des intérêts sur 360 jours sans démontrer l'impact réel sur le coût du crédit afin de déterminer si elle entraîne ou non un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

En outre, en l'espèce, la clause stipule que « le taux effectif global des prêts est indiqué sur la base du montant exact des intérêts rapportés à 365 jours l'an », de sorte que le grief n'est pas fondé. Cette demande sera donc rejetée. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PAU

DEUXIÈME CHAMBRE SECTION 1

ARRÊT DU 14 JANVIER 2021

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 19/02046 - N° Portalis DBVV-V-B7D-HJBU. Arrêt n° 21/200. Nature affaire : Prêt - Demande en nullité du contrat ou d'une clause du contrat.

ARRÊT : Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 14 janvier 2021, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

APRES DÉBATS à l'audience publique tenue le 19 novembre 2020, devant : Monsieur Philippe DARRACQ, magistrat chargé du rapport,

assisté de Madame Nathalène DENIS, greffière présente à l'appel des causes,

Philippe DARRACQ, en application des articles 786 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de : Madame Valérie SALMERON, Président, Monsieur Philippe DARRACQ, Conseiller, Monsieur Marc MAGNON, Conseiller, qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

 

APPELANTE :

SA CREDIT LYONNAIS

[...], [...], Représentée par Maître Elisabeth DE B. de la SCP SCP DE B. - E., avocat au barreau de DAX, Assistée de Maître Pierre B., avocat au barreau de LYON

 

INTIMÉS :

Monsieur X.

né le [date] à [ville], de nationalité Française, [adresse], [...]

Madame Y.

née le [date] à [ville], de nationalité Française, [adresse], [...]

Représentés par Maître Pierre Olivier D. de la SELARL ASTREA, avocat au barreau de DAX, Assistés de Maître Alexandre B., avocat au barreau de PARIS

 

sur appel de la décision en date du 15 MAI 2019 rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE DAX

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS - PROCÉDURE - PRÉTENTIONS et MOYENS DES PARTIES :

Suivant offre acceptée le 19 juin 2014, M. X. et Mme Y. (les consorts X.-Y.) ont souscrit auprès de la société Crédit Lyonnais un prêt immobilier d'un montant de 206.670 euros au taux nominal annuel de 3,40 %, le taux effectif global (TEG) étant de 4,13 %.

Un avenant a été régularisé entre les parties le 28 novembre 2016.

Soutenant que le TEG mentionné dans l'offre était erroné, et suivant exploit du 27 novembre 2017, les consorts X.-Y. ont fait assigner la société Crédit Lyonnais par devant le tribunal de grande instance de Dax en nullité de la clause de stipulation des intérêts conventionnels, substitution du taux légal au taux conventionnel, et restitution des intérêts trop versés.

Par jugement du 15 mai 2019, auquel il convient expressément de se référer pour un plus ample exposé des faits et des prétentions et moyens initiaux des parties, le tribunal a :

- dit nulle et de nul effet la clause relative au taux d'intérêt stipulé dans l'offre de prêt ainsi que dans l'avenant

- dit en conséquence que le taux de l'intérêt légal doit être substitué au taux d'intérêt conventionnel

- condamné la société Crédit Lyonnais à verser aux requérants la somme de 16.973,92 euros en remboursement des intérêts indûment versés,

- dit que la société Crédit Lyonnais devra remettre aux requérants un tableau d'amortissement prenant en compte la substitution de l'intérêt légal au taux d'intérêt conventionnel sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé le délai de deux mois à compter de la date de la signification de la présente décision et ce pendant un délai de trois mois

- dit se réserver la liquidation de l'astreinte

- condamné la société Crédit Lyonnais à payer une indemnité de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Par déclaration faite au greffe de la cour le 17 juin 2019, la société Crédit Lyonnais a relevé appel de ce jugement.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 07 octobre 2020.

* * *

Vu les dernières conclusions notifiées le 20 juillet 2020 par l'appelante qui a demandé à la cour de :

- réformer le jugement entrepris

- rejeter les demandes des consorts X.-Y. comme irrecevables ou mal fondées

- condamner in solidum les consorts X.-Y. au paiement d'une indemnité de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

- subsidiairement, limiter à 6,44 euros ou à une somme forfaitaire symbolique les intérêts à restituer aux consorts X.-Y.

- plus subsidiairement, dire que le taux d'intérêt légal substitué au taux conventionnel subira les variations périodiques auxquelles la loi le soumet.

* * *

Vu les dernières conclusions notifiées le 12 décembre 2019 par les intimés qui ont demandé à la cour de :

A titre principal :

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris.

A titre subsidiaire :

- déclarer abusive et par conséquent non écrite la clause figurant dans le prêt et l'avenant prévoyant le calcul des intérêts sur la base d'une année bancaire de 360 jours et d'un mois de 30 jours

- condamner la société Crédit Lyonnais à leur verser la somme de 16.973,92 euros correspondant aux intérêts indûment versés au titre du prêt depuis sa conclusion jusqu'au jour de la présente sauf à parfaire

- enjoindre à la société Crédit Lyonnais sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la signification de la décision à intervenir, de produire un tableau d'amortissement prenant en considération cette déchéance du droit aux intérêts à hauteur du taux d'intérêt légal.

A titre infiniment subsidiaire :

- prononcer la déchéance des intérêts conventionnels du prêt litigieux à hauteur du taux d'intérêt légal applicable au jour de la conclusion du contrat soit 0,04 % pour le prêt et 0,93 % pour l'avenant

- condamner la société Crédit Lyonnais à leur verser la somme de 16.973,92 euros correspondant aux intérêts indûment versés au titre du prêt depuis sa conclusion jusqu'au jour de la présente sauf à parfaire

- enjoindre à la société Crédit Lyonnais sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du 8éme jour suivant la signification de la décision à intervenir, de produire un tableau d'amortissement prenant en considération cette déchéance du droit aux intérêts à hauteur du taux d'intérêt légal.

En tout état de cause :

- condamner la société Crédit Lyonnais à leur payer une indemnité de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

1 - Sur la nullité de la clause de stipulation des intérêts conventionnels :

Les consorts X.-Y. soutiennent, expertise mathématique unilatérale à l'appui, que le TEG mentionné dans l'offre de prêt immobilier acceptée le 19 juin 2014 ainsi que dans l'offre d'avenant acceptée le 28 novembre 2016 est erroné, le prêteur ayant omis d'inclure certains frais dans le coût du crédit et calculé les intérêts conventionnels sur une année de 360 jours au lieu d'une année civile de 365 jours. Ils en déduisent que la clause stipulant les intérêts conventionnels doit être annulée en application des articles 1907 et L. 313-1 et suivants du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, au titre de l'offre de prêt, et des articles 1907 et L. 313-19 et suivants et L. 314-1 et suivants du code de la consommation en vigueur à la date de l'avenant.

Mais, en droit, il résulte des articles L. 312-33, devenu L. 341-34, et L. 131-1 alinéa 1, devenu L. 314-1, L. 313-2 alinéa 1, devenu L. 314-5 du code de la consommation que l'inexactitude du TEG mentionné dans une offre préalable de prêt immobilier est exclusivement sanctionnée par la déchéance du droit aux intérêts conventionnels, dans la proportion déterminée par le juge en considération de la gravité de l'erreur.

Par conséquent, en prononçant la nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels pour inexactitude du TEG mentionné dans l'offre de prêt immobilier et l'offre d'avenant, le premier juge a méconnu les dispositions légales précitées.

Le jugement sera par conséquent infirmé de ce chef et les consorts X.-Y. déboutés de leur demande de nullité des clauses litigieuses fondée sur l'inexactitude du TEG.

 

2 - Sur le caractère abusif de la clause 360 jours :

Les consorts X.-Y. font observer que l'offre de prêt et d'avenant stipulent que « les intérêts courus entre deux échéances seront calculés sur la base de 360 jours, chaque mois étant compté pour 30 jours rapportés à 360 jours l'an. [...]. Nous vous précisions que le taux effectif global des prêts est indiqué sur la base du montant exact des intérêts rapportés à 365 jours l'an ». Ils en déduisent que cette clause qui, selon eux, a pour effet de calculer les intérêts conventionnels sur 360 jours est abusive au sens de l'article L. 132-1, devenu L. 212-1 du code de la consommation et, partant, réputée non écrite.

La société Crédit Lyonnais soulève l'irrecevabilité de cette demande comme nouvelle en appel au sens de l'article 564 du code de procédure civile et, sinon, comme prescrite en application de l'article 2224 du code civil.

Mais, en droit, d'une part, la demande tendant à voir déclarer réputée non écrite une clause abusive n'est pas soumise à la prescription.

D'autre part, elle ne se heurte pas, en l'espèce, à la fin de non-recevoir tirée de sa nouveauté en appel dès lors qu'elle tend aux mêmes fins que l'action en nullité de la stipulation d'intérêts en ce que les deux actions visent à écarter l'application de la clause des intérêts conventionnels dans les rapports entre les parties et à obtenir la restitution des intérêts conventionnels réglés en vertu de cette clause.

Cependant, sur le fond, les intimés ne démontrent pas le caractère abusif de la clause litigieuse qui ne peut résulter de la seule affirmation du calcul des intérêts sur 360 jours sans démontrer l'impact réel sur le coût du crédit afin de déterminer si elle entraîne ou non un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

En outre, en l'espèce, la clause stipule que « le taux effectif global des prêts est indiqué sur la base du montant exact des intérêts rapportés à 365 jours l'an », de sorte que le grief n'est pas fondé.

Cette demande sera donc rejetée.

 

3 - Sur la demande de déchéance des intérêts conventionnels :

Les consorts X.-Y. sollicitent, à titre infiniment subsidiaire, la déchéance des intérêts conventionnels sanctionnant l'inexactitude du TEG mentionné dans l'offre de prêt et dans l'offre d'avenant, en application des textes ci-avant rappelés.

Mais, en droit, n'encourt pas la déchéance des intérêts conventionnels l'erreur qui affecte le taux effectif global lorsque l'écart entre le taux mentionné dans le contrat de crédit et le taux réel est inférieur à la décimale prescrite par l'article R. 313-1, devenu. 314-1 et suivants du code de la consommation.

En l'espèce, les consorts X.-Y. n'ont produit aucun élément établissant que les erreurs de calcul imputés à la banque auraient entraîné une erreur du TEG supérieure à la décimale admise.

Il peut être observé, s'agissant de l'offre de prêt, que même en multipliant le taux de période de 0,34 par le coefficient fourni par les intimés, soit 12,166667, alors même que celui-ci n'est pas exact, on obtient un TEG de 4,1366678 % au lieu de 4,13 mentionné dans l'offre, soit une prétendue erreur, après arrrondi, de 0,007 points.

Et, s'agissant de l'avenant, l'étude financière fait ressortir un TEG de 2,635 % au lieu de 2,604, soit une erreur de 0,031 points.

Par ces seuls motifs, la demande de déchéance des intérêts doit être rejetée.

Les consorts X.-Y. seront condamnés aux dépens de première instance et d'appel ainsi qu'au paiement d'une indemnité de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

la cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

INFIRME en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

et statuant à nouveau,

DEBOUTE les consorts X.-Y. de leur demande de nullité de la clause d'intérêts conventionnels stipulés dans l'offre de prêt immobilier du 19 juin 2014 et dans l'offre de l'avenant du 28 novembre 2016,

REJETTE les fins de non-recevoir tirées de la nouveauté en appel et de la prescription de la demande tendant à voir déclarer réputée non écrite la clause de calcul des intérêts conventionnels sur 360 jours insérée dans ces mêmes offres,

DEBOUTE les consorts X.-Y. de leur demande tendant à voir déclarer réputée non écrite la clause de calcul des intérêts conventionnels sur 360 jours insérée dans ces mêmes offres,

DEBOUTE les consorts X.-Y. de leur demande de déchéance des intérêts conventionnels,

CONDAMNE les consorts X.-Y. aux entiers dépens de première instance et d'appel,

CONDAMNE les consorts X.-Y. à payer à la société Crédit Lyonnais une indemnité de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Le présent arrêt a été signé par Madame Valérie SALMERON, Président, et par Madame Nathalène DENIS, greffière suivant les dispositions de l'article 456 du Code de Procédure Civile.

LA GREFFIÈRE,                LE PRÉSIDENT,