CA AIX-EN-PROVENCE (ch. 3-1), 18 février 2021
CERCLAB - DOCUMENT N° 8804
CA AIX-EN-PROVENCE (ch. 3-1), 18 février 2021 : RG n° 19/03500 ; arrêt n° 2021/47
Publication : Jurica
Extrait : « Cette société invoque l'article L. 442-6-1 du code de commerce remplacé par l'article L 442-1 dudit instauré par l'ordonnance du 24 avril 2019 avec effet au 29 avril 2019. Compte tenu de la date du contrat passé entre les parties, la société appelante est recevable à invoquer l'article L. 442-6-1 du code de commerce.
Il existe un lien entre la demande en paiement de factures et les demandes reconventionnelles de la société appelante qui soutient un déséquilibre dans les relations contractuelles.
Le déséquilibre significatif s'apprécie lors de la signature du contrat entre les parties et notamment les conditions de l'opération de prestation de service. Il appartient à la société LE TOURISME CONNECTÉ de prouver l'existence d'un déséquilibre important.
Selon les termes de la convention conclue reproduite uniquement dans les écritures de la société intimée et non contestés, il était prévu : - la création d'une rubrique avec toute la charte d'i-tourisme sur TOUR MAG, - TOUR MAG mettait à la disposition du TOURISME CONNECTÉ un espace permanent dans lequel la version papier était reproduite aussi fidèlement que possible sous la forme digitale et en outre TOUR MAG adressait a tous ses abonnés et à tous les abonnés du TOURISME CONNECTÉ une newsletter hebdomadaire de façon à ce qu'i-tourisme ait de la publicité et de la visibilité.
Il n'est pas contesté que la société TOUR MAG a vendu à la société le TOURISME CONNECTÉ un « implant » c'est à-dire une présence permanente (quotidienne) sur le journal on ligne TOUR MAG outre l'envoi d'une newsletter hebdomadaire aux abonnées des deux parties et que le TOURISME CONNECTÉ devait une activité rédactionnelle quotidienne d'articles. La société appelante ne mentionne aucunement les dispositions contractuelles entraînant un déséquilibre significatif entre les parties, se bornant à se fonder sur les résultats de son partenariat qu'elle estime insuffisant puisqu'elle soutient que seules deux affaires lui ont été apportées. Il convient de souligner que les courriers adressés par la société le TOURISME CONNECTÉ à la société TOUR MAG font état d'une acceptation de la rétrocession de 30% de la valeur des contrats signées par l'appelante.
Les prestations de la société TOUR MAG n'étaient nullement fictives et il n'est pas démontré que la société intimée aurait obtenu de la société le TOURISME CONNECTÉ un avantage quelconque ne correspondant pas à un service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné au regard du service rendu.
Un déséquilibre significatif dans le contrat conclu entre les parties n'est pas démontré. Dès lors, la société le TOURISME CONNECTÉ ne peut invoquer un préjudice imputable au déséquilibre contractuel invoqué. »
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
CHAMBRE 3-1
ARRÊT DU 18 FÉVRIER 2021
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 19/03500. Arrêt n° 2021/47. N° Portalis DBVB-V-B7D-BD36O. ARRÊT AU FOND. Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de Marseille en date du 22 janvier 2019 enregistré au répertoire général sous le R.G. n° 2018F02839.
APPELANTE :
SAS LE TOURISME CONNECTÉ
dont le siège social est sis [adresse], représentée par Maître Marion G., avocat au barreau d'AIX-EN- PROVENCE, plaidant
INTIMÉE :
SARL TOUR MAG COM
dont le siège social est sis [adresse], représentée par Maître Patricia F., avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 7 janvier 2021, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Pierre CALLOCH, Président, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Monsieur Pierre CALLOCH, Président, Madame Marie-Christine BERQUET, Conseillère, Madame Stéphanie COMBRIE, Conseillère.
Greffier lors des débats : M. Alain VERNOINE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 18 février 2021.
ARRÊT : Contradictoire, Prononcé par mise à disposition au greffe le 18 février 2021. Signé par Monsieur Pierre CALLOCH, Président et M. Alain VERNOINE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DE L'AFFAIRE :
La SAS LE TOURISME CONNECTÉ est une société de presse qui édite notamment un magazine mensuel i-tourisme dédié aux nouvelles solutions technologiques dans le secteur du tourisme.
La SARL TOUR MAG est une société de presse qui édite notamment un journal en ligne (https://www.tourmag.com) s'adressant aux professionnels du tourisme.
Courant 2014, la SARL TOUR MAG a fait appel à la SAS LE TOURISME CONNECTÉ pour créer une nouvelle rubrique spécialisée dans les nouvelles solutions technologiques et publier trois articles par jour sur son site « Tourmag » dans une rubrique intitulée « I-Tourisme ».
La société TOUR MAG prétendant avoir réalisé les prestations prévues mais qui n'ont pas été réglées, elle a fait assigner la société LE TOURISME CONNECTÉ devant le tribunal de commerce de Marseille en paiement de la somme de la somme de 8.976 € correspondant à neuf factures, outre la somme de 360 € à tire d'indemnité forfaitaire, la somme de 5.000 € en remboursement de l'avance de trésorerie consentie le 24 octobre 2014 et la somme de 1.500 € à titre de dommages et intérêts.
Par jugement réputé contradictoire du 22 janvier 2019, le tribunal précité a statué ainsi :
Condamne la SAS LE TOURISME CONNECTÉ à payer à la SARL TOUR MAG COM les sommes de :
- 8.976 € au titre des factures impayées, avec intérêt au taux de 10,25 % à compter du 7 décembre 2018 ;
- 360 € au titre de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement des neuf factures impayées (articles L. 441-3 et D. 441-5 du Code de Commerce),
- 800 € au titre des frais irrépétibles exposés.
[*]
La société LE TOURISME CONNECTÉ a relevé appel de cette décision et expose :
- que l'assignation est nulle puisque son siège social avait été transféré à Paris, et que l'huissier n'a pas fait les diligences nécessaires pour faire délivrer l'acte,
- qu'elle n'a pu comparaître devant le tribunal,
- que son adresse ne pouvait être ignorée,
- que le jugement doit être infirmé ;
A titre subsidiaire, elle fait valoir :
- qu'elle n'a eu aucune retombée économique du partenariat puisqu'elle n'a encaissé que la somme de 3.450 €,
- qu'elle conteste le montant des factures réclamées, ne reconnaissant devoir que la somme de 828 € TTC,
- qu'elle invoque l'article L. 442-6-I du code de commerce en soutenant l'existence d' un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties puisque chaque vente de publicité était facturée par la société TOUR MAG à hauteur de 30 % du montant de la prestation au TOURISME CONNECTÉ, que la SARL TOUR MAG devait apporter des affaires à la SAS LE TOURISME CONNECTÉ moyennant une commission de 30 % et que la société TOUR MAG n'a apporté que deux affaires ayant permis une recette de 3.450 € en faveur de la SAS Le TOURISME CONNECTÉ, contre 117.218 € en faveur de la SARL TOUR MAG.,
- que les relations contractuelles entre les parties étaient parfaitement disproportionnées, ce qui a nécessairement créé un déséquilibre entre elles, ce qui engage la responsabilité de la société TOUR MAG l'obligeant à réparer le préjudice subi par la société LE TOURISME CONNECTÉ,
- que se fondant sur ce déséquilibre, elle demande paiement de la somme de 241.128 € au titre de l'ensemble des articles rédigés à son profit depuis l'année 2014, 15.000 € HT au titre de la facture relative à la campagne des Big Boss et fait état d'un préjudice financier de 25.000 euros.
[*]
La société TOUR MAG rétorque :
- que l'assignation devant le tribunal de commerce signifiée les 23 novembre 2018 et encore le 7 décembre 2018 a été valablement délivrée à l'adresse du siège social de la société mentionnée sur l'extrait Kbis conformément à l’article 690 au CPC,
- que sa demande en paiement est fondée.
- que la demande fondée sur l'article L. 442-1 du code de commerce est irrecevable puisque ce texte a été instauré en avril 2019 et que les parties avaient cessé leurs relations en 2017.
- qu'il n'y a aucun lien suffisant entre la demande en paiement et la demande fondée sur l'article 442-1 du code de commerce qui entré en vigueur en avril 2019 est inapplicable,
- qu'il n'y a eu aucun déséquilibre contractuel,
- que la demande de dommages et intérêts sous forme de règlement des articles rédigés par les journalistes du TOURISME CONNECTÉ en appliquant le tarif de la pige n'a aucun fondement juridique car cela reviendrait à décharger la société appelante de ses obligations contractuelles avec effet rétroactif,
- que la demande en paiement d'une facture de 15.000 euros est irrecevable et que TOUR MAG n'est pas intervenue dans la négociation entre DIGILINX et le TOURISME et ne peut être tenue pour responsable du non aboutissement des discussions,
La société TOUR MAG conclut à la confirmation de la décision déférée.
[*]
La cour renvoie, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties à leurs écritures précitées.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la nullité de l'assignation :
La société LE TOURISME CONNECTÉ ne justifie aucunement avoir fait modifier l'adresse de son siège social au registre du commerce puisqu'un extrait Kbis du 17 décembre 2018 et donc postérieur à la signification de l'assignation des 23 novembre 2018 et 7 décembre 2018, la domicilie à Marseille, adresse indiquée dans sa déclaration d'appel.
Le moyen tiré de la nullité de l'assignation est rejeté.
Sur le paiement des factures :
L'échange de courriers électroniques entre les parties, les copies d'écran démontrent, que la société TOUR MAG a exécuté ses obligations contractuelles conformément à l'accord conclu en 2014.
La société appelante ne démontre pas que les dispositions du contrat prévoyaient un non-paiement en cas d'interruption d'une campagne publicitaire commencée par la société TOUR MAG.
La société appelante justifie avoir réglé la facture IGA par virement européen du 1er décembre 2016.
La société TOURMAG ne peut donc réclamer paiement de la somme de 1.260 euros au titre de cette facture.
Cette société est fondée à obtenir paiement des factures impayées s'échelonnant de février à décembre 2017.
En conséquence la société LE TOURISME CONNECTÉ est condamnée payer à la société TOURMAG les sommes de :
- 8.976 € - 1.260 € soit la somme de 7.716 € au titre des factures impayées, avec intérêt au taux de 10,25 % à compter du 7 décembre 2018 (étant précisé que si dans les motifs de ses conclusions, la société TOURMAG demande que les intérêts courent à compter du 22 mai 2018, dans le dispositif de ses écritures, elle conclut à la confirmation du jugement qui a fixé le point de départ des intérêts au 7 décembre 2018)
- 320 € au titre de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement des huit factures impayées (articles L. 441-3 et D. 441-5 du Code de Commerce).
Le jugement qui a condamné la société LE TOURISME CONNECTÉ à payer la somme de 800 € au titre des frais irrépétibles outre les dépens est confirmé uniquement sur ces condamnations.
Sur les demandes reconventionnelles de la société LE TOURISME CONNECTÉ :
Cette société invoque l'article L. 442-6-1 du code de commerce remplacé par l'article L 442-1 dudit instauré par l'ordonnance du 24 avril 2019 avec effet au 29 avril 2019.
Compte tenu de la date du contrat passé entre les parties, la société appelante est recevable à invoquer l'article L. 442-6-1 du code de commerce.
Il existe un lien entre la demande en paiement de factures et les demandes reconventionnelles de la société appelante qui soutient un déséquilibre dans les relations contractuelles.
Le déséquilibre significatif s'apprécie lors de la signature du contrat entre les parties et notamment les conditions de l'opération de prestation de service. Il appartient à la société LE TOURISME CONNECTÉ de prouver l'existence d'un déséquilibre important.
Selon les termes de la convention conclue reproduite uniquement dans les écritures de la société intimée et non contestés, il était prévu :
- la création d'une rubrique avec toute la charte d'i-tourisme sur TOUR MAG,
- TOUR MAG mettait à la disposition du TOURISME CONNECTÉ un espace permanent dans lequel la version papier était reproduite aussi fidèlement que possible sous la forme digitale et en outre TOUR MAG adressait a tous ses abonnés et à tous les abonnés du TOURISME CONNECTÉ une newsletter hebdomadaire de façon à ce qu'i-tourisme ait de la publicité et de la visibilité.
Il n'est pas contesté que la société TOUR MAG a vendu à la société le TOURISME CONNECTÉ un « implant » c'est à-dire une présence permanente (quotidienne) sur le journal on ligne TOUR MAG outre l'envoi d'une newsletter hebdomadaire aux abonnées des deux parties et que le TOURISME CONNECTÉ devait une activité rédactionnelle quotidienne d'articles.
La société appelante ne mentionne aucunement les dispositions contractuelles entraînant un déséquilibre significatif entre les parties, se bornant à se fonder sur les résultats de son partenariat qu'elle estime insuffisant puisqu'elle soutient que seules deux affaires lui ont été apportées.
Il convient de souligner que les courriers adressés par la société le TOURISME CONNECTÉ à la société TOUR MAG font état d'une acceptation de la rétrocession de 30% de la valeur des contrats signées par l'appelante.
Les prestations de la société TOUR MAG n'étaient nullement fictives et il n'est pas démontré que la société intimée aurait obtenu de la société le TOURISME CONNECTÉ un avantage quelconque ne correspondant pas à un service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné au regard du service rendu.
Un déséquilibre significatif dans le contrat conclu entre les parties n'est pas démontré.
Dès lors, la société le TOURISME CONNECTÉ ne peut invoquer un préjudice imputable au déséquilibre contractuel invoqué.
Les demandes présentées par la société le TOURISME CONNECTÉ sont rejetées.
La société intimée qui ne justifie pas d'un préjudice autre que celui résultant de l'obligation de plaider indemnisé par la somme de 3000 euros est déboutée de sa demande de dommages et intérêts.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Rejette la demande de nullité de l'assignation présentée par la société le TOURISME CONNECTÉ,
Déclare recevables les demandes formées par la société le TOURISME CONNECTÉ sur le fondement de l'article L. 442-6-1 du code de commerce mais l'en déboute,
Confirme le jugement en ce qu'il a condamné la société le TOURISME CONNECTÉ à payer à la société TOUR MAG une somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et aux dépens,
L'infirmant pour le surplus et statuant à nouveau,
Condamne la société le TOURISME CONNECTÉ à payer à la société TOUR MAG les sommes de :
- 7.716 € au titre des factures impayées, avec intérêt au taux de 10,25 % à compter du 7 Décembre 2018 ;
- 320 € au titre de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement des huit factures impayées (articles L. 441-3 et D. 441-5 du Code de Commerce),
Condamne la société le TOURISME CONNECTÉ à payer à la société TOUR MAG une somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute les parties de leurs demandes autres ou plus amples,
Condamne la société le TOURISME CONNECTÉ aux dépens recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
Le GREFFIER Le PRÉSIDENT
- 6167 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Présentation - Application dans le temps
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- 6189 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Notion de déséquilibre - Présentation par contrat - Apporteur d’affaires
- 6242 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Régime de l’action - Compétence territoriale