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CA DOUAI (8e ch. 1), 23 septembre 2021

Nature : Décision
Titre : CA DOUAI (8e ch. 1), 23 septembre 2021
Pays : France
Juridiction : Douai (CA), 8e ch. sect. 1
Demande : 19/03062
Décision : 21/979
Date : 23/09/2021
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 31/05/2019
Numéro de la décision : 979
Référence bibliographique : 5705 (imprescriptibilité de l’action), 5823 (crédit, application dans le temps), 5734 (clause réputée non écrite)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 9139

CA DOUAI (8e ch. 1), 23 septembre 2021 : RG n° 19/03062 ; arrêt n° 21/979 

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « Les textes du code de la consommation mentionnés dans l'arrêt sont les textes dans leur version en vigueur à la date de souscription du contrat de crédit. »

2/ « En cas d'octroi d'un crédit à un consommateur ou non-professionnel, le point de départ de la prescription de l'action en nullité ou en déchéance du droit aux intérêts conventionnels en raison d'une erreur affectant le taux effectif global ou les mentions de l'offre de prêt ne court qu'à compter du jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître cette erreur ; il se situe donc à la date de la convention lorsque l'examen de sa teneur permet de constater l'erreur, ou à défaut, à la date à laquelle l'emprunteur normalement avisé et prudent a été en mesure de la déceler. »

3/ « Cependant, la demande tendant à voir constater une clause abusive, dont la sanction n'est pas la nullité mais le caractère non-écrit ne s'analyse pas en une demande de nullité et n'est pas soumise à la prescription quinquennale. Aussi le demande de substitution des intérêts en ce qu'elle repose sur la caractère abusif de la clause susvisée n'est pas prescrite. »

4/ « En application de l'article L. 132-1 du code de la consommation dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 du code de la consommation, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Afin de déterminer si la clause dénoncée entraîne ou non un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, il y a lieu d'apprécier quels sont ses effets sur le coût du crédit.

Or, les appelants qui se contentent d'affirmer sans aucune motivation que la clause serait abusive n'apportent aucun élément démontrant que son application auraient eu un effet sur le coût du crédit, ni a fortiori que cela aurait entraîné un déséquilibre significatif entre les parties.

En conséquence, la demande de ce chef sera rejetée, étant observé la non-application de cette clause, si elle avait été déclarée abusive, n'aurait pas entraîné la substitution des intérêts du crédit. »

5/ « En application combinée des articles 1907 du code civil, des articles L. 313-1, L.313-2 et R. 313-1 du code de la consommation, le taux conventionnel doit, comme le taux effectif global, être calculé sur la base de l'année civile de 365 jours dans tout acte de prêt consenti à un consommateur ou à un non-professionnel.

Le calcul des intérêts sur la base d'une année de 360 jours peut être sanctionné s'il génère un surcoût entraînant une erreur dans l'évaluation du TEG indiqué dans l'offre, lequel doit être calculé en tenant compte, notamment, des intérêts.

Il résulte des articles L. 312-33 et R. 313-1 du code de la consommation que la mention dans l'offre de prêt d'un TEG erroné est sanctionnée exclusivement par la déchéance du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge, et ce, uniquement lorsque l'inexactitude du taux entraîne, au regard du taux stipulé, un écart supérieur à une décimale venant au détriment de l'emprunteur (puisque le TEG est calculé par rapport au taux de période avec une précision d'au moins une décimale selon l'article R. 313-1), inexactitude qu'il appartient à ce dernier de démontrer, en application de l'article 9 du code de procédure civile (en ce sens, par exemple : Civ. 1re, 5 juin 2019, pourvoi n° 18-11.459, 18-23.497, Civ. 1re, 11 mars 2020, pourvoi n° 19-10.875). »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE DOUAI

HUITIÈME CHAMBRE PREMIÈRE SECTION

ARRÊT DU 23 SEPTEMBRE 2021

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 19/03062. Arrêt n° 21/979. N° Portalis DBVT-V-B7D-SMBY. Jugement (arrêt n° 18/01156) rendu le 5 mars 2019 par le tribunal de grande instance de Lille.

 

APPELANTS :

Monsieur X.

né le [date] à [ville] - de nationalité française, [...], [...]

Madame X. épouse Y.

née le [date] à [ville] - de nationalité française, [...], [...]

SCI Kennedy 117

SCI au capital de 1.000 euros, immatriculée au rcs sous le numéro XXX, agissant poursuite et diligence de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège [...], [...], Représentés par Maître Jérémie B., avocat au barreau de Douai substitué par Maître N., avocat au barreau de Douai

 

INTIMÉE :

SA Société Générale

[...], [...], Représentée par Maître Martine V., avocat au barreau de Lille et Maître Etienne G., avocat au barreau de Paris

 

DÉBATS à l'audience publique du 9 juin 2021 tenue par Catherine Ménegaire magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile). Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Gaëlle Przedlacki

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Madame Dominique Duperrier, président de chambre, Madame Pauline Mimiague, conseiller, Madame Catherine Menegaire, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 23 septembre 2021 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Dominique Duperrier, président et Gaëlle Przedlacki, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 9 juin 2021

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Suivant offre de prêt émise le 2 avril 2005 et acceptée le 15 avril 2005, la Société générale a consenti à la SCI Kennedy 117, représentée par M. X. et Mme Y., un crédit immobilier d'un montant de 330.000 euros, remboursable en 240 échéances mensuelles, au taux d'intérêt de 3,20 %, et au taux effectif global (TEG) de 3,84 %.

Suivant offre de prêt en date du 20 avril 2007 acceptée le 3 mai 2007, la société générale a consenti à la SCI Kennedy 117 un crédit immobilier, d'un montant de 141.000 euros, remboursable en 264 échéances mensuelles, au taux d'intérêt de 4,26 %, et au TEG de 4,72 %.

Au cours de l'année 2014 la SCI Kennedy 117 a demandé la modification du taux d'intérêt du prêt accepté le 3 mai 2007. La Société générale a émis le 5 mars 2014 un avenant accepté le 27 mars suivant par la SCI, portant renégociation du crédit pour un montant de 111.871,17 euros, remboursable sur une durée de 171 mois, au taux d'intérêt de 3,53 %, et au TEG de 4,09 %.

Suivant offre de prêt en date du 31 mars 2005 et acceptée le 13 avril 2005, la Société générale a consenti à M. X. et Mme Y. un crédit immobilier d'un montant de 170.000 euros, remboursable en 240 échéances mensuelles, au taux d'intérêt de 3,20 % avec une variation de ce taux de plus ou moins 2 points, et au TEG de 4,04 %.

Suivant offre de prêt en date du 20 avril 2007 et acceptée le 3 mai 2007, la Société générale à consenti à M. X. et Mme Y. un prêt à l'habitat d'un montant de 205.000 euros, remboursable en 264 échéances mensuelles, au taux d'intérêt de 4,26 % et au TEG de 4,75 %.

Au cours de l'année 2014, les époux X. ont demandé la modification du taux d'intérêt afférent au crédit du 20 avril 2007 accepté le 3 mai 2007. La Société générale a émis le 5 mars 2014 un avenant accepté le 27 mars suivant portant renégociation du crédit pour un montant de 174.958,62 euros, remboursable sur une durée de 190 mois, au taux d'intérêt de 3,85 %, et au TEG de 4,40 %.

Invoquant des erreurs affectant le TEG mentionné dans les actes et le calcul des intérêts conventionnels sur la base d'une année bancaire de 360 jours, la SCI Kennedy 117, M. X. et Mme Y. ont, par acte délivré le 26 janvier 2018, fait assigner la Société générale devant le tribunal de grande instance de Lille aux fins de voir prononcer la nullité de la clause d'intérêts conventionnels, et condamner la banque à leur rembourser le trop-perçu d'intérêts.

Par jugement contradictoire en date du 5 mars 2019, le tribunal de grande instance de Lille a :

- dit irrecevables les demandes formées par la SCI Kennedy 117, M. X. et Mme Y. en ce qui concerne les quatre prêts consentis en 2005 et 2007,

- débouté la SCI Kennedy 117 et M. X. et Mme Y. de leurs demandes relatives à l'avenant et à une faute de la banque,

- condamné la SCI 117 M. X. et Mme Y. à payer à la Société Générale la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'en tous les dépens,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes.

[*]

La SCI Kennedy, M. X. et Mme Y. ont relevé appel de l'ensemble des chefs du jugement par déclaration d'appel reçue par le greffe de la cour le 31 mai 2019.

Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 10 mai 2021, ils demandent à la cour de :

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il les a déclarés irrecevables en leur demande, les en a déboutés et les a condamnés à payer la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 et aux dépens,

- statuant à nouveau,

- à titre principal,

sur les demandes de la SCI Kennedy 117,

- constater que le TEG mentionné dans l'offre de prêt en date du 2 avril 2005 est erroné,

- constater que le TEG mentionné dans l'offre de prêt en date du 20 avril 2007 est erroné,

- constater que le TEG mentionné dans l'avenant à l'offre de prêt du 20 avril 2007 est erroné,

- sur l'ensemble des prêts et avenant consentis à la SCI Kennedy, constater que les intérêts périodiques des prêts ont été calculés sur la base autre que l'année civile,

- ordonner en conséquence la substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel depuis la souscription des contrats initiaux,

- condamner la Société Générale à restituer à la SCI Kennedy 117 le trop-perçu correspondant à l'écart entre les intérêts au taux conventionnel et les intérêts au taux légal et notamment la somme à parfaire arrêtée au 7 octobre 2017, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation de :

- 49.455,26 euros au titre de l'offre du 2 avril 2005,

- 21.030,13 euros au titre de l'offre du 20 avril 2007,

- 9.474,19 euros au titre de l'avenant du 5 mars 2014,

sur les demandes de M. X. et Mme Y.,

- constater que le TEG mentionné dans l'offre de prêt en date du 31 mars 2005 est erroné,

- constater que le TEG mentionné dans l'offre de prêt du 20 avril 2007 est erroné,

- constater que le taux effectif global mentionné dans l'avenant à l'offre de prêt du 20 avril 2007 est erroné,

- sur l'ensemble des prêts et avenant consentis consenti à M. X. et Mme Y., constater que les intérêts périodiques des prêts ont été calculés sur une base autre que l'année civile,

- ordonner la substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel depuis la souscription des contrats initiaux,

- condamner la Société Générale à restituer à M. X. et Mme Y. le trop-perçu correspondant à l'écart entre les intérêts au taux conventionnel et les intérêts au taux légal, et notamment les sommes à parfaire arrêtées au 7 octobre 2017, avec intérêts au taux légal à compter l'assignation, de :

- 25.476,95 euros au titre l'offre du 31 mars 2005,

- 31.082,27 euros au titre de l'offre du 20 avril 2007,

- 8.527,72 euros au titre de l'avenant,

- dire et juger que lesdites sommes devront être actualisées au regard des tableaux d'amortissement qui seront établis par la Société Générale au taux légal année par année, le cas échéant semestre par semestre, depuis la date de souscription du contrat,

- subsidiairement, si par impossible la substitution des intérêts légaux aux intérêts conventionnels devait être écartée,

- prononcer la déchéance totale du droit aux intérêts conventionnels des prêts et avenants souscrits auprès de la Société Générale,

- en tout état de cause, condamner la Société Générale à leur payer la somme de 9.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeter toutes les demandes de la Société Générale et la condamner aux entiers dépens d'instance.

[*]

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 21 mai 2021, la Société générale demande à la cour de :

- sur l'action en nullité, à titre principal

- dire et juger que l'action de la SCI Kennedy 117 et de M. X. et Mme Y. est manifestement prescrite en ce qu'elle tend à obtenir la nullité de la stipulation d'intérêts contractuels,

- dire et juger que les avenants n'ont pas emporté novation de l'offre de prêt initiale,

- dire et juger que l'action de la SCI Kennedy 117 et de M. X. et Mme Y. est manifestement prescrite en ce qu'elle tend à obtenir la nullité de la stipulation d'intérêts contractuels s'agissant des avenants,

- dire et juger que le nouvel article L. 341-1 du code de la consommation prévoyant la sanction unique de la déchéance du droit aux intérêts en cas de défaut de mention ou d'erreur de TEG est applicable immédiatement,

- dire et juger qu'en toute hypothèse, la sanction d'un TEG mentionné dans une offre portant sur un prêt soumis aux articles L. 312-1et suivants du code de la consommation ne saurait consister en la nullité de la clause intérêts contractuels, mais uniquement en la sanction spécifique de la déchéance prévue par l'article L. 312-33 dudit code,

- en conséquence,

- confirmer le jugement rendu le 5 mars 2019 par le tribunal de grande instance de Lille en ce qu'il a déclaré prescrite l'action initiée par la SCI Kennedy 117, M. X. et Mme Y. concernant les offres de prêt,

- déclarer irrecevable l'action de la SCI Kennedy 117, de M. X. et Mme Y.,

- à titre subsidiaire,

- dire et juger que la SCI Kennedy 117, M. X. et Mme Y. n'apportent nullement la preuve de leurs allégations,

- dire et juger que le TEG mentionné dans chacune des offres de prêt et les avenants est conforme à la réglementation qui lui est applicable,

- dire et juger qu'elle a établi le taux d'intérêt conventionnel applicable au prêt sur une base exacte et non en fonction de l'année bancaire de 360 jours,

- dire et juger qu'en tout état de cause, si la cour devait retenir que les intérêts des offres de prêt et de leurs avenants étaient calculés sur la base de l'année bancaire, seule la restitution du trop-perçu d'intérêts chiffré par les emprunteurs pourrait être ordonnée,

- confirmer le jugement rendu le 5 mars 2019 par le tribunal de grande instance de Lille en ce qu'il a débouté la SCI Kennedy 117, M. X. et Mme Y. de leurs demandes relatives aux avenants,

- débouter la SCI Kennedy 117, M. X. et Mme Y. de toutes leurs demandes,

- à titre très subsidiaire,

- dire et juger que le nouvel article L. 341-1du code de la consommation prévoyant la sanction unique de déchéance du droit aux intérêts en cas de défaut de mention ou d'erreur de TEG est applicable immédiatement,

- dire et juger qu'en toute hypothèse la sanction d'un TEG erronée mentionnée dans une offre portant sur un prêt soumis aux articles L. 312-1 et suivants du code de la consommation ne saurait consister en la nullité de la clause d'intérêt contractuels mais uniquement en la sanction spécifique de la déchéance prévue par l'article L. 312-33 dudit code,

- dire et juger que les avenants ont été émis à la demande et dans l'intérêt de la SCI Kennedy 117 M. X. et Mme Y. de sorte que leur émission ne saurait leur causer un préjudice,

- dire et juger que la SCI Kennedy 117 et les époux X. ne démontrent nullement avoir subi un quelconque préjudice et en conséquence les débouter de leurs demandes,

- sur l'action fondée sur les clauses abusives,

- à titre principal, s'agissant des offres du 31 mars 2005 2 avril 2005 et 20 avril 2007, dire et juger que l'action de la SCI Kennedy 117 et des époux X. est manifestement prescrite,

- en conséquence, déclarer l'action fondée sur les clauses abusives irrecevable,

- en toute hypothèse,

- dire et juger que la SCI Kennedy 117 et les époux X. ne démontrent aucunement la présence de clause abusive dans les contrats litigieux, et les débouter de toutes leurs demandes,

- ajoutant au jugement entrepris,

- condamner la SCI Kennedy 117 et les époux X. au paiement de la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'au paiement de l'ensemble des dépens, dont distraction au profit de la Selarl Cabinet Adekwa.

[*]

L'ordonnance de clôture est intervenue le 9 juin 2021, date à laquelle l'affaire a été plaidée.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux écritures des parties pour l'exposé de leurs moyens.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

Les textes du code de la consommation mentionnés dans l'arrêt sont les textes dans leur version en vigueur à la date de souscription du contrat de crédit.

 

Sur la prescription :

La cour relève que les appelants formulent une demande de substitution des intérêts (alors qu'ils sollicitaient aussi la nullité de la stipulation des intérêts devant le tribunal) en expliquant dans le corps de leurs écritures (page 14) que la seule sanction applicable en matière d'utilisation par la banque de l'année bancaire pour le calcul des intérêts est « la substitution des intérêts laquelle est consécutive à la nullité », que leur demande de substitution des intérêts est faite au visa de l'article 1907 du code civil, de sorte que même s'ils ne la visent pas expressément, il se déduit que leur demande est fondée sur la nullité de la stipulation des intérêts, dont la substitution des intérêts est la conséquence.

L'action en nullité de la stipulation d'intérêts se prescrit par cinq ans, en application de l'article 1304 du code civil.

L'action en déchéance du droit aux intérêts est soumise à la prescription décennale de l'article L. 110-4 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, à laquelle a succédé, à compter de l'entrée en vigueur de celle-ci, le 19 juin 2008, une prescription quinquennale, applicable aux obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants et non-commerçants, sans que la durée totale de la prescription ne puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure (article 26 de la loi de 2008).

En cas d'octroi d'un crédit à un consommateur ou non-professionnel, le point de départ de la prescription de l'action en nullité ou en déchéance du droit aux intérêts conventionnels en raison d'une erreur affectant le taux effectif global ou les mentions de l'offre de prêt ne court qu'à compter du jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître cette erreur ; il se situe donc à la date de la convention lorsque l'examen de sa teneur permet de constater l'erreur, ou à défaut, à la date à laquelle l'emprunteur normalement avisé et prudent a été en mesure de la déceler.

 

* Sur l'action relative aux offres de crédits acceptées par la SCI Kennedy 117 les 15 avril 2005, et 3 mai 2007, et par les époux X. les 13 avril 2005 et 3 mai 2007 :

S'agissant de l'offre de crédit acceptée le 15 avril 2005, la SCI Kennedy 117 fait grief à la banque d'avoir omis d'intégrer dans le calcul du TEG les frais de tenue de compte ainsi que les frais de garantie ; s'agissant de l'offre acceptée le 3 mai 2007, elle fait grief à la banque d'avoir omis d'intégrer dans le calcul du TEG les intérêts intercalaires ainsi que les frais de garantie et de tenue de compte.

Les époux X.-S. invoquent la non-intégration dans le calcul du TEG des frais de tenue de compte, tant dans l'offre de crédit acceptée par eux le 13 avril 2005 que dans celle acceptée le 3 mai 2007.

Néanmoins, c'est par des motifs pertinents que la cour adopte, que le premier juge a relevé que les emprunteurs pouvaient parfaitement déceler les anomalies alléguées dès la lecture des offres de crédit, ce qui ne nécessitait aucune compétence particulière, puisque dans le paragraphe « taux effectif global » de chaque offre de prêts étaient mentionnés de façon exhaustive les frais inclus dans le TEG, ce qui permettait de constater à contrario quels étaient les frais qui n'y étaient pas inclus.

En outre, l'offre acceptée le 3 mai 2007 par la SCI Kennedy comportait clairement une clause excluant du coût du crédit les intérêts intercalaires dont le montant n'est pas connu au jour de l'émission de l'offre, de sorte que l'anomalie alléguée à ce titre était également parfaitement décelable à la lecture de l'offre.

Les emprunteurs font également grief à la banque d'avoir utilisé l'année bancaire de 360 jours au lieu de l'année civile de 365 jours pour calculer les intérêts desdites offres ; or, cette anomalie, à la supposer établie, pouvait être décelée dès l'émission des tableaux d'amortissement annexés aux offres par un calcul simple effectué par les appelants dans leurs conclusions ; En outre, ils produisent des tableaux d'amortissement « sur 360 jours », et « sur l'année civile » établis par leur conseil à partir des seuls éléments contenus dans les offres, à savoir le montant du prêt, le taux d'intérêts et le montant de l'assurance.

Dès lors, ils disposaient dès l'émission des offres de l'ensemble des éléments leur permettant de faire des vérifications par eux-mêmes ou par des tiers, et ne peuvent donc se prévaloir plusieurs années après la signature des actes, pour retarder artificiellement par leur seule volonté le point de départ de la prescription, d'arguments révélés par des calculs effectués plusieurs années après l'émission des offres, sur la base de ces éléments déjà connus, dont il pouvait demander une analyse avant l'expiration du délai de prescription.

Il suit que le point de départ du délai quinquennal de prescription de l'action en substitution des intérêts et déchéance du droit aux intérêts à raison de l'omission alléguée de frais et de l'utilisation de l'année de 360 jours pour le calcul des intérêts doit être fixé à la date d'acceptation des offres, soit les 15 avril 2005 et 3 mai 2007 pour les prêts consentis à la SCI Kennedy 117, et les 13 avril 2007 et 3 mai 2007 pour les prêts consentis à M. X. et Mme Y., de sorte qu'au jour de leur exploit introductif d'instance le 26 janvier 2018, ils étaient prescrits en leur action.

Le jugement déféré est confirmé sur ce point.

 

* Sur l'action relative aux avenants du 27 mars 2014

La cour constate que les avenants dénommés « de renégociation de taux » ont eu pour objet et conséquence de modifier le taux d'intérêt et le TEG mentionnés aux contrats de crédits initiaux, et qu'aux termes de ces actes, seules les conditions tant générales que particulières du prêt, autres que celles figurant dans l'avenant, ainsi que les garanties initialement prises demeuraient inchangées et continuaient à s'appliquer sans novation.

C'est donc bien à compter de l'acceptation desdits avenants, soit le 27 mars 2014, qu'a commencé à courir le délai quinquennal de prescription des actions en substitution des intérêts et en déchéance du droit aux intérêts. Or, à la date de l'introduction de l'instance, la prescription qui a commencé à courir à compter du 27 mars 2014 n'était pas acquise. Les demandes relatives aux avenants est donc recevable.

 

* Sur la demande de substitution des intérêts à raison d'une clause abusive

Les appelants soutiennent également à l'appui de leur demande de substitution des intérêts que l'offre de prêt du 20 avril acceptée le 3 mai 2007 la SCI Kennedy 117 contient une clause abusive qui stipule :

« Coût calculé sur le montant de l'offre : ne sont pas compris dans les intérêts intercalaires, dont le montant n'est pas connu au jour de l'émission de l'offre de la présente offre, dus entre la date de mise à disposition des fonds (ou de chacune des mises à disposition) et la date de point de départ de la première échéance. Le mode de calcul et de paiement de ces intérêts et fixés dans les conditions générales de l'offre. Compte tenu de ces compléments d'échéances, la durée totale du prêt prévue est susceptible d'être augmentée d'une durée maximale de 37 jours. »

La banque soulève la prescription de cette demande formée plus de cinq ans après la signature de l'acte.

Cependant, la demande tendant à voir constater une clause abusive, dont la sanction n'est pas la nullité mais le caractère non-écrit ne s'analyse pas en une demande de nullité et n'est pas soumise à la prescription quinquennale.

Aussi le demande de substitution des intérêts en ce qu'elle repose sur la caractère abusif de la clause susvisée n'est pas prescrite.

 

Sur le fond : sur le caractère abusif de la clause :

En application de l'article L. 132-1 du code de la consommation dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 du code de la consommation, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Afin de déterminer si la clause dénoncée entraîne ou non un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, il y a lieu d'apprécier quels sont ses effets sur le coût du crédit.

Or, les appelants qui se contentent d'affirmer sans aucune motivation que la clause serait abusive n'apportent aucun élément démontrant que son application auraient eu un effet sur le coût du crédit, ni a fortiori que cela aurait entraîné un déséquilibre significatif entre les parties.

En conséquence, la demande de ce chef sera rejetée, étant observé la non-application de cette clause, si elle avait été déclarée abusive, n'aurait pas entraîné la substitution des intérêts du crédit.

 

Sur l'action en substitution des intérêts et en déchéance du droit aux intérêts relative aux avenants :

Les appelants invoquent l'utilisation de l'année bancaire pour le calcul des intérêts au titre des deux avenants consentis d'une part à la SCI Kennedy 117 et d'autre part à M. X. et Mme Y. Il produisent deux tableaux d'amortissement « sur 360 jours » et « sur l'année civile » établis par leur conseil, se rapportant à l'avenant de renégociation de taux intervenu entre la SCI Kennedy 117 et la banque.

En application combinée des articles 1907 du code civil, des articles L. 313-1, L.313-2 et R. 313-1 du code de la consommation, le taux conventionnel doit, comme le taux effectif global, être calculé sur la base de l'année civile de 365 jours dans tout acte de prêt consenti à un consommateur ou à un non-professionnel.

Le calcul des intérêts sur la base d'une année de 360 jours peut être sanctionné s'il génère un surcoût entraînant une erreur dans l'évaluation du TEG indiqué dans l'offre, lequel doit être calculé en tenant compte, notamment, des intérêts.

Il résulte des articles L. 312-33 et R. 313-1 du code de la consommation que la mention dans l'offre de prêt d'un TEG erroné est sanctionnée exclusivement par la déchéance du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge, et ce, uniquement lorsque l'inexactitude du taux entraîne, au regard du taux stipulé, un écart supérieur à une décimale venant au détriment de l'emprunteur (puisque le TEG est calculé par rapport au taux de période avec une précision d'au moins une décimale selon l'article R. 313-1), inexactitude qu'il appartient à ce dernier de démontrer, en application de l'article 9 du code de procédure civile (en ce sens, par exemple : Civ. 1re, 5 juin 2019, pourvoi n° 18-11.459, 18-23.497, Civ. 1re, 11 mars 2020, pourvoi n° 19-10.875).

Or, les appelants n'allèguent ni ne démontrent l'existence d'une telle erreur dans le calcul du TEG à raison du calcul des intérêts.

En conséquence la demande principale, comme la demande subsidiaire de déchéance du droit aux intérêts, doivent être rejetées.

 

Sur les demandes accessoires :

Le jugement déféré est confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile.

La SCI Kennedy 117, M. X. et Mme Y. qui succombent en leur appel sont condamnés aux dépens d'appel dont distraction au profit de la Selarl Cabinet Adekwa conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile. Il n'y a pas lieu d'allouer une indemnité supplémentaire au titre des frais irrépétibles.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant par arrêt contradictoire ;

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant ;

Déclare la SCI Kennedy 117 recevable en sa demande de substitution des intérêts à raison du caractère abusif de la clause afférente aux intérêts intercalaires mentionnée à l'offre de prêt du 20 avril acceptée par elle le 3 mai 2007 ;

Rejette la demande de la SCI Kennedy 117 de substitution des intérêts à raison du caractère abusif de la clause afférente aux intérêts intercalaires mentionnée à l'offre de prêt du 20 avril acceptée par elle le 3 mai 2007 ;

Rejette les demandes plus amples ou contraires ;

Condamne la SCI Kennedy 117, M. X. et Mme Valérie S. aux dépens d'appel dont distraction au profit de Selarl Cabinet Adekwa conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffier,                            Le président,

G. Przedlacki                        D. Duperrier