CA PARIS (pôle 5 ch. 10), 20 septembre 2021
CERCLAB - DOCUMENT N° 9144
CA PARIS (pôle 5 ch. 10), 20 septembre 2021 : RG n° 20/00849
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « Ceci étant exposé, le contrat conclu entre Mme X. et la société Cliqeo portant sur la création d'un site internet et le contrat de location conclu entre Mme X. et la société Locam sont concomitants et s'inscrivent dans une opération incluant une location financière. Ces contrats sont dès lors interdépendants.
L'article 1186 du code civil dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 10 février 2016 entrée en vigueur le 1er octobre 2016 n'est pas applicable au litige portant sur des contrats conclus le 9 juin 2016. »
2/ « Ceci étant exposé la législation applicable aux contrats conclus le 9 juin 2016 est celle résultant l'article L. 132-1 du code de la consommation dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 14 mars 2016 entrée en vigueur à compter du 1er juillet 2016.
Selon cet article : « Dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. » Le non-professionnel était défini par l'ordonnance alors applicable comme toute personne morale qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole.
Dans la présente espèce, Mme X. a conclu le contrat portant sur la création d'un site internet pour les besoins de son activité professionnelle. Elle se trouve dès lors infondée à solliciter le bénéfice du code de la consommation dans sa rédaction applicable à l'espèce.
Sa demande relative au droit de rétractation, au demeurant recevable puisque tendant aux mêmes fins que la demande principale, doit être rejetée. Le jugement déféré doit être infirmé de ce chef. »
3/ « Pour les motifs ci-dessus exposés, Mme X. est infondée à solliciter la protection prévue par le code de la consommation. Concernant l'erreur, par de justes motifs que la cour adopte les premiers juges ont retenu que Mme X. n'avait pas pu se méprendre sur la portée de son engagement. La demande de nullité des contrats doit ainsi être rejetée. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 5 CHAMBRE 10
ARRÊT DU 20 SEPTEMBRE 2021
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 20/00849 (9 pages). N° Portalis 35L7-V-B7E-CBIPJ. Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 octobre 2019 - Tribunal de Grande Instance de Paris – R.G. n° 17/11893.
APPELANTE :
Madame X.
Domiciliée [adresse], [...], née le [date] à [ville], N° SIRET : XXX, Représentée par Maître Olivier H., avocat au barreau de PARIS, toque : E0257 substitué par Maître Constantin H., avocat au barreau de PARIS
INTIMÉES :
SAS LOCAM LOCATION AUTOMOBILES MATÉRIELS
Ayant son siège social [adresse], [...], N° SIRET : YYY, Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, Représentée par Maître Guillaume M. de la SELARL ABM DROIT ET CONSEIL AVOCATS E.B. & M., avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC430
SARL CLIQEO
Ayant son siège social [adresse], [...], N° SIRET : ZZZ, Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, Représentée par Maître Nathalie Z.-K. de l'AARPI Cabinet W. - Z. - K., avocat au barreau de PARIS, toque : K0004, Maître Hélène W. de l'AARPI Cabinet W. - Z. - K., avocat au barreau de PARIS, toque : K0004
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 juin 2021, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Edouard LOOS, Président, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Monsieur Edouard LOOS, Président, Madame Sylvie CASTERMANS, Conseillère, Monsieur Stanislas de CHERGÉ, Conseiller, qui en ont délibéré,
Greffière, lors des débats : Mme Cyrielle BURBAN
ARRÊT : - contradictoire - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par M. Edouard LOOS, Président et par Mme Cyrielle BURBAN, Greffière à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS ET PROCÉDURE :
La société à responsabilité limitée Cliqeo a pour domaine d'activités la programmation informatique, et notamment la création, la gestion et le référencement de sites internet.
Mme X. exerce la profession de podologue.
Le 9 juin 2016, Mme X. a signé un bon de commande portant sur la création d'un site web et son référencement avec la société Cliqeo, et un contrat de location de site web avec la société à actions simplifiée Location automobiles matériels (ci-après la société Locam) pour un loyer mensuel de 380,80 euros ainsi qu'une autorisation de prélèvement bancaire au profit de la société Locam.
Le même jour, Mme X. a apposé sa signature sur le document « procès-verbal de livraison et de conformité ».
Le 29 juin 2016, la société Cliqeo lui a présenté par courriel une maquette de son site. Le 30 juin 2016, Mme X. a communiqué par voie électronique des modifications supplémentaires et la société Cliqeo l'a informée le même jour de sa mise en ligne.
Par courrier recommandé du 15 juillet 2016, Mme X. a informé la société Cliqeo de sa volonté de mettre fin au contrat. Elle y faisait état de son incompréhension sur le montant final de la mensualité, sur la signature du procès-verbal de livraison et sollicitait les documents contractuels.
Par courrier du 26 juillet 2016, la société Cliqeo lui a répondu qu'elle avait bien signé le procès-verbal de livraison et donné son accord pour la mise en ligne à son chargé de projet, Monsieur Y., le 29 juin 2016. Elle a ajouté que le procès-verbal de conformité n'existait qu'en un seul exemplaire destiné à la société Locam et a rappelé que le contrat ne pouvait être résilié avant son terme.
Par courrier du 9 août 2016, Mme X. a contesté avoir signé ce procès-verbal de livraison et avoir rencontré un commercial le 29 juin 2016. Elle a soutenu que le procès-verbal signé le 9 juin 2019 ne pouvait en tout état de cause constituer un procès-verbal de livraison dans la mesure où le site ne lui avait pas été présenté à cette date. Elle a réfuté avoir donné son accord oral à Monsieur Y. dans la mesure où elle avait des modifications à apporter à la maquette.
Informée par sa locataire des difficultés rencontrées avec le prestataire, par courrier du 1er août 2016 la société Locam a rappelé à Mme X. qu'elle demeurait tenue de respecter son obligation de paiement des loyers jusqu'au terme du contrat.
Le 11 août 2016, la société Locam lui a demandé de procéder au règlement de ses loyers.
Constatant la cessation des paiements de sa locataire, par courrier recommandé du 16 septembre 2016 la société Locam l'a mise en demeure de lui régler la somme de 1.516,36 euros. Elle l'a informée que, en l'absence de paiement dans les 8 jours, sa créance deviendrait alors exigible en totalité et s'élèverait à 10.312,84 euros comprenant les arriérés, les loyers à échoir, l'indemnité et la clause pénale.
Par exploit du 29 août 2017, à défaut de règlement, la société Locam a assigné en paiement Mme X. devant le tribunal de grande instance de Paris.
Par exploit du 4 décembre 2017, Mme X. a assigné en intervention forcée, la société Cliqeo devant le même tribunal.
Les deux affaires ont été jointes.
* * *
Vu le jugement prononcé le 24 octobre 2019 par le tribunal de grande instance de Paris qui a :
- Débouté Mme X. de l'ensemble de ses demandes ;
- Condamné Mme X. à payer à la société Locam la somme de 10.053,10 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 16 septembre 2016 ;
- Ordonné la capitalisation des intérêts dans les termes de l'article 1343-2 du code civil à compter 28 mai 2019 dès lors qu'ils seront dpour une année entière ;
- Ordonné la restitution par Mme X. du matériel objet du contrat ;
- Débouté la société Locam de sa demande d'astreinte ;
- Condamné Mme X., à payer à la société Locam d'une part et à la société Cliqeo d'autre part une indemnité de procédure de 2.000 euros ;
- Condamné Mme X. aux dépens ;
- Ordonné l'exécution provisoire ;
- Rejeté les demandes plus amples ou contraires.
Vu l'appel déclaré le 30 décembre 2019 par Mme X.,
Vu les conclusions signifiées le 14 mai 2021 par Mme X.,
Vu les conclusions signifiées le 12 mai 2021 par la société Locam,
Vu les conclusions signifiées le 31 mars 2021 par la société Cliqeo,
[*]
Mme X. demande à la cour de statuer ainsi qu'il suit :
Vu les articles L. 221-1, L. 221-3, L. 221-5, L. 221-18 et 20 du code de la consommation, les articles 1109 et 1110 du Code civil, dans leur ancienne rédaction, l'article L. 442-6-I-2° du Code de commerce et l'article 700 du code de procédure civile
- Dire recevable la déclaration d'appel formée le 30 décembre 2019 par Mme X. ;
- Infirmer le jugement rendu le 24 octobre 2019 par le tribunal de grande instance de Paris, et statuant à nouveau ;
- Dire que les contrats signés entre Mme X. et les sociétés Cliqeo et Locam sont des contrats interdépendants, car participant à une même opération, à savoir la location financière d'un site Internet ;
A titre principal,
- Rejeter les demandes de paiement formulées par la société Locam, après avoir constaté, sinon dit, que Mme X. a valablement exercé son droit de rétractation, dans les délais, par lettre en date du 15 juillet 2016 ;
A titre subsidiaire,
- Rejeter les demandes de paiement formulées par la société Locam, après avoir prononcé la nullité des contrats, signés le 9 juin 2016, tant avec la société Cliqeo que la société Locam, pour défaut d'informations précontractuelles relatives au droit de rétractation et à ses modalités ;
A titre infiniment subsidiaire,
- Rejeter les demandes de paiement formulées par la société Locam, après avoir prononcé la nullité du contrat principal, signé entre Mme X. et la société Cliqeo, le 9 juin 2016 ;
En tout état de cause,
- Condamner la société Locam à payer à Mme X. la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par le déséquilibre manifeste dans les obligations des parties, conformément à l'article L. 442-6-I-2° du Code de commerce ;
- Condamner in solidum la société Cliqeo et la société Locam à payer à Mme X. la somme de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral qu'elle a subi ;
- Condamner in solidum la société Cliqeo et la société Locam à payer à Mme X. la somme de 5.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
[*]
La société Locam demande à la cour de statuer ainsi qu'il suit :
Vu les dispositions des articles 1103, 1104 et 1343-2 du code civil
- Dire et juger la société Locam - Location Automobiles Matériels recevable et bien fondée en l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
Au contraire,
- Dire et juger Mme X. irrecevable et mal fondée en l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions et l'en débouter.
En conséquence,
Réformer le jugement en ce qu'il a indiqué que le code de la consommation était applicable au contrat objet du présent litige ;
Confirmer le Jugement en toutes ses autres dispositions et y ajoutant ;
Condamner Mme X. au paiement de la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
Condamner Mme X. aux entiers dépens de la présente instance
[*]
La société Cliqeo demande à la cour de statuer ainsi qu'il suit :
Vu les articles 1134 et suivants du code civil, l'article 566 du code de procédure civile et les articles L. 221-1 et suivants du code de la consommation
- Déclarer la société Cliqeo recevable et bien fondée en ses écritures ;
Et y faisant droit :
A titre préalable,
- Déclarer Mme Mélanie irrecevable à se prévaloir des dispositions du code de la consommation pour invoquer son droit de se rétracter des engagements souscrits ;
- Déclarer la demande de dommages et intérêts Mme X. fondée sur l'article L. 442-6-I-2° irrecevable ;
A titre principal,
- Confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont il est fait appel à l'exception de celles ayant déclaré applicable le droit de la consommation ;
- Déclarer que Mme X. est mal-fondée à se prévaloir des dispositions du code de la consommation pour invoquer son droit de se rétracter des engagements souscrits et la nullité de ses engagements ;
- Juger que le consentement de Mme X. n'a nullement été vicié,
- En conséquence,
- Débouter Mme X. de l'ensemble de ses demandes ;
- Condamner Mme X. à payer à la société Cliqeo la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens d'instance.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE,
a) Sur l'interdépendance des contrats :
Mme X. fait valoir que les contrats de prestation de services et de location financière sont interdépendants au motif qu'ils ont été signés dans le cadre d'une même opération commerciale.
Elle ajoute que la société Locam était au courant de l'opération au motif que le cachet de la société Cliqeo a été apposé sur le contrat de location. Elle conteste l'applicabilité de l'article 1186 du code civil, invoqué par la société Locam, en ce que cette disposition ne s'applique qu'aux contrats conclus après le 1er octobre 2016.
La société Locam ne conteste pas l'interdépendance des contrats. Elle soutient, au visa de l'article 1186 du code civil, que la caducité ne pourrait jouer à son égard au motif que la preuve de sa connaissance de l'opération d'ensemble, par la connaissance du bon de commande, n'est pas rapportée.
[*]
Ceci étant exposé, le contrat conclu entre Mme X. et la société Cliqeo portant sur la création d'un site internet et le contrat de location conclu entre Mme X. et la société Locam sont concomitants et s'inscrivent dans une opération incluant une location financière. Ces contrats sont dès lors interdépendants.
L'article 1186 du code civil dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 10 février 2016 entrée en vigueur le 1er octobre 2016 n'est pas applicable au litige portant sur des contrats conclus le 9 juin 2016.
b) Sur la rétractation :
A titre principal, Mme X. fait valoir que les dispositions des articles L. 221-1 et L. 221-3 du code de la consommation sont applicables aux contrats qu'elle a conclus au motif qu'ils sont des contrats hors établissement dont l'objet n'entre pas dans le champ de son activité principale. Elle ajoute que le contrat de location ne constitue pas un service financier, comme l'allègue la société Locam, car il a pour objet la mise à disposition d'un site internet moyennant paiement de loyers mensuels.
Elle soutient, sur le fondement des articles L. 221-18 et L. 221-20 du code de la consommation, que sa rétractation du contrat signé avec la société Cliqeo, formulée une première fois par lettre en date du 15 juillet 2016 puis réitérée le 9 août 2016, est valable en ce qu'elle avait jusqu'au 23 juin 2017 pour exercer son droit de rétractation, le délai ayant été prolongé d'un an à compter du 23 juin 2016 en raison de l'absence d'information relative aux modalités de rétraction dans le bon de commande. Elle ajoute que, par suite, le contrat de location est devenu caduc car dépourvu d'objet et de cause.
La société Locam conteste l'application des dispositions du code de la consommation et soutient, au visa des articles L. 221-2 et L. 221-3 du code de la consommation. Elle considère que le code monétaire et financier est le seul droit spécial applicable aux contrats de location financière qui constituent des opérations connexes aux opérations de banque. Elle ajoute que les obligations légales, imposées par les articles L. 341-1 et suivants du code monétaire et financier, ne sont pas applicables au contrat de location au motif que son objet porte sur l'activité professionnelle de Mme X.. En outre, elle soutient que Mme X. a attesté que son contrat était en rapport direct avec son activité professionnelle.
Elle fait valoir que Mme X. ne s'est jamais formellement rétractée tant auprès de la société Cliqeo que de la société Locam mais a sollicité un arrangement moyennant le paiement d'une mensualité.
La société Cliqeo fait valoir, au visa de l'article 566 du code de procédure civile, que le droit de rétractation dont Mme X. entend faire valoir pour s'opposer à la demande de paiement de la société Locam est irrecevable en ce qu'elle constitue une demande nouvelle.
Elle soutient que Mme X. ne peut se prévaloir des dispositions du code de la consommation au motif que ces dernières sont inapplicables au motif qu'elles ne s'appliquent pas aux activités de location de site web contractées dans le cadre de l'activité du professionnel concerné.
[*]
Ceci étant exposé la législation applicable aux contrats conclus le 9 juin 2016 est celle résultant l'article L. 132-1 du code de la consommation dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 14 mars 2016 entrée en vigueur à compter du 1er juillet 2016.
Selon cet article : « Dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. » Le non-professionnel était défini par l'ordonnance alors applicable comme toute personne morale qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole.
Dans la présente espèce, Mme X. a conclu le contrat portant sur la création d'un site internet pour les besoins de son activité professionnelle. Elle se trouve dès lors infondée à solliciter le bénéfice du code de la consommation dans sa rédaction applicable à l'espèce.
Sa demande relative au droit de rétractation, au demeurant recevable puisque tendant aux mêmes fins que la demande principale, doit être rejetée.
Le jugement déféré doit être infirmé de ce chef.
c) Sur la nullité des contrats :
A titre subsidiaire, Mme X. sollicite, au visa des articles L. 221-3 et L. 221-5 du code de la consommation, la nullité des contrats au motif qu'aucune information précontractuelle relative à son droit de rétractation ne lui a été communiquée tant dans le bon de commande que dans le contrat de location.
Elle sollicite également, au visa de l'article 1109 du code civil, la nullité du contrat conclu avec la société Cliqeo, entraînant la caducité du contrat de location, au motif qu'elle a commis une erreur portant sur l'objet du contrat en signant le « bon de commande », étant faussement informée et faussement convaincue que le site internet lui appartiendrait au terme du contrat. Elle ajoute avoir été induite en erreur par les sociétés Cliqeo et Locam et que son erreur est excusable, n'étant ni professionnelle de l'informatique ni juriste et au vu de l'ensemble contractuel complexe mis en place par la société Cliqeo.
La société Locam conteste la nullité du contrat au motif, d'une part, que les dispositions du code de la consommation ne sont pas applicables en l'espèce et, d'autre part, que l'article L. 221-5 du code de la consommation invoqué par Mme X. ne prévoit pas la nullité du contrat.
Elle conteste l'erreur alléguée par Mme X. au motif qu'elle est inexcusable, Mme X. ne pouvant ignorer que le contrat comprenait une mise à disposition et non une vente du site internet. Au surplus, elle ajoute que Mme X. ne peut prétendre avoir commis une erreur sur la nature du site et sur les obligations réciproques des parties au motif que les conditions générales de la société Cliqeo détaillent les prestations qu'elle fournit.
La société Cliqeo conteste la nullité du contrat au motif que les dispositions du code de la consommation ne sont pas applicables. Elle soutient, au visa de l'article 1110 du code civil, que Mme X. n'a pu commettre aucune erreur sur l'objet des prestations contractuelles au motif qu'elle a été consultée et a été informée du contenu de son site internet. Au surplus, elle ajoute que l'erreur commise serait inexcusable au regard de l'ensemble des informations dont disposait Mme X.
[*]
Pour les motifs ci-dessus exposés, Mme X. est infondée à solliciter la protection prévue par le code de la consommation.
Concernant l'erreur, par de justes motifs que la cour adopte les premiers juges ont retenu que Mme X. n'avait pas pu se méprendre sur la portée de son engagement.
La demande de nullité des contrats doit ainsi être rejetée.
d) Sur la réparation des préjudices :
Mme X. sollicite, au visa de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce, la réparation du préjudice qu'elle a subi en raison du déséquilibre significatif existant entre les parties par l'allocation de dommages-intérêts à hauteur de 10.000 euros. Elle ajoute que l'article 18 des conditions générales du contrat de location n'a pas été porté à sa connaissance et contrevient à l'article précité au motif, qu'aux termes de l'article, elle ne peut se défaire du contrat de location. Elle sollicite également la réparation de son préjudice moral.
La société Locam fait valoir, sur le fondement de l'article 480 du code de procédure civile, que les demandes de réparation de Mme X. sont irrecevables au motif qu'elles sont invoquées pour la première fois en cause d'appel. Elle ajoute que Mme X. a eu connaissance des conditions générales de location et que l'article 18 des conditions générales a pour but d'assurer équilibre financier à la société Locam, celle-ci ayant acquis le site internet à la demande de Mme X..
La société Cliqeo fait valoir, au visa de l'article 566 du code de procédure civile, que la demande de réparation du préjudice, causé par le déséquilibre dans les obligations des parties, par Mme X. est irrecevable en ce qu'elle constitue une demande nouvelle.
[*]
Ceci étant exposé, la demande de dommages et intérêts présentée par Mme X. sur le fondement de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce est formulée pour la première fois en cause d'appel. Les intimés sont bien fondés à soulever son irrecevabilité sur le fondement de l'article 564 du code de procédure civile.
La solution du litige conduit à débouter Mme X. de sa demande au titre du préjudice moral.
Les contestations soulevées par Mme X. étant rejetées, le jugement déféré non autrement contesté doit être confirmé sauf en ce qu'il a dit applicable le code de la consommation.
e) Sur l'article 700 du code de procédure civile :
Une indemnisation complémentaire doit être allouée aux intimés sur ce fondement.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour,
DIT irrecevable la demande d'indemnisation au titre de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce ;
CONFIRME le jugement déféré sauf en ce qu'il a dit applicable le code de la consommation ;
Statuant de nouveau de ce chef :
DIT inapplicable le code de la consommation ;
CONDAMNE Mme X. à verser sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile 1.500 euros à la société Locam et 1.500 euros à la société Cliqeo ;
REJETTE toutes autres demandes ;
CONDAMNE Mme X. aux dépens.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT
C. BURBAN E. LOOS
- 5821 - Code de la consommation - Clauses abusives - Application dans le temps - Illustrations : Réforme du Code de la consommation - Ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016
- 5889 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Contrats conclus hors établissement ou à distance (après la loi du 17 mars 2014 - art. L. 221-3 C. consom.)
- 5944 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Promotion de l’activité : site internet
- 6151 - Code civil et Droit commun - Sanction directe des déséquilibres significatifs - Droit postérieur à l’ordonnance du 10 février 2016 et à la loi du 20 avril 2018 - Art. 1171 C. civ. - Application dans le temps
- 6392 - Code civil et Droit commun - Sanction indirecte des déséquilibres significatifs – Indivisibilité dans les locations financières - Droit postérieur aux arrêts de Chambre mixte