CA PARIS (pôle 4 ch. 9-A), 16 décembre 2021
CERCLAB - DOCUMENT N° 9311
CA PARIS (pôle 4 ch. 9-A), 16 décembre 2021 : RG n° 19/15384
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « Pour les contrats litigieux conclus le 15 septembre 2013 et 27 janvier 2014, il est fait application des dispositions du code de la consommation dans leur rédaction postérieure à l'entrée en vigueur de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, et pour les contrats signés le 19 décembre 2016 et 23 mai 2017, dans la version postérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016. »
2/ « En application de l'article L. 141-4 devenu R. 632-1 du code de la consommation, le juge peut relever d'office toutes les dispositions du présent code dans les litiges nés de son application. Il écarte d'office, après avoir recueilli les observations des parties, l'application d'une clause dont le caractère abusif ressort des éléments du débat.
Ce texte confère au juge une simple possibilité de relever d'office toute violation des dispositions d'ordre public du code de la consommation tandis qu'il lui impose d'écarter d'office une clause abusive. En revanche, il ne pose aucune restriction à l'exercice des prérogatives ainsi conférées au juge pour autant que l'irrégularité résulte des faits litigieux dont l'allégation comme la preuve incombent aux parties.
Par ailleurs, au regard de sa date de conclusion, le contrat signé le 15 septembre 2013 est soumis aux dispositions des articles L. 311-1 et suivants du code de la consommation dans leur rédaction postérieure à la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 qui a porté ratification de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2008, concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil. Il a été dit pour droit par la Cour de justice de l'Union européenne que les articles 8 et 23 de cette directive doivent être interprétés en ce sens qu'ils imposent à une juridiction nationale d'examiner d'office l'existence d'une violation de l'obligation précontractuelle du prêteur d'évaluer la solvabilité du consommateur, prévue à l'article 8 de cette directive et de tirer les conséquences qui découlent en droit national d'une violation de cette obligation, à condition que les sanctions satisfassent aux exigences dudit article 23.
Il s'induit que dans le rôle qui lui est conféré tant par la loi et le règlement internes que par le droit européen, le juge peut soulever d'office toute irrégularité heurtant une disposition d'ordre public et sanctionnée par la déchéance d'un droit qui fonde la demande d'une partie sans être enfermé dans quelque délai.
C'est donc à bon droit que le premier juge, en respectant le principe de contradiction, a examiné la conformité du contrat signé le 15 septembre 2013 à l'article L. 311-9 du code de la consommation et la société Cofidis est mal fondée à invoquer la prescription du moyen discuté. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 4 CHAMBRE 9-A
ARRÊT DU 16 DÉCEMBRE 2021
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/15384 (9 pages). N° Portalis 35L7-V-B7D-CAOU3 - Jonction avec le dossier RG n° 19/17394. Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 mai 2019 - Tribunal d'Instance de MEAUX – R.G. n° 11-19-000370.
APPELANTE :
La société COFIDIS
société à directoire et conseil de surveillance agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié audit siège N° SIRET : XXX [...], [...], [...], représentée par Maître Olivier H. de la SELARL H.-K.-H.-H., avocat au barreau de l'ESSONNE
INTIMÉS :
Madame X. divorcée Y.
née le [date] à [ville], [...], [...], représentée par Maître Marie-Béatrix B., avocat au barreau de PARIS, toque : D2080
Monsieur Y.
né le [date] à [ville], [...], [...], DÉFAILLANT
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 novembre 2021, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère faisant fonction de Présidente, M. Benoît DEVIGNOT, Conseiller, Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère.
Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE
ARRÊT : - DÉFAUT - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère faisant fonction de Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Par plusieurs actes sous seing privé successifs, la société Cofidis affirme avoir consenti à M. Y. et Mme X. épouse Y. plusieurs crédits :
- le 15 septembre 2013 un prêt personnel d'un montant 6.000 euros de remboursable en 72 mensualités moyennant un taux débiteur annuel fixe de 10,5 %,
- le 27 janvier 2014 un prêt personnel d'un montant de 20.500 euros remboursable en 84 mensualités moyennant un taux débiteur annuel fixe de 9,84 %,
- le 19 décembre 2016 un prêt personnel d'un montant de 10.000 euros remboursable en 48 mensualités moyennant un taux débiteur annuel fixe de 3,73 %,
- le 23 mai 2017 un prêt personnel d'un montant de 8.000 remboursable en 72 mensualités moyennant un taux débiteur annuel fixe de 6,38 %.
Les échéances ont cessé d'être remboursées à compter du mois de février 2018.
Saisi le 22 février 2019 par la société Cofidis d'une demande tendant principalement à la condamnation des emprunteurs au paiement des soldes restant dus, le tribunal d'instance de Meaux, par un jugement réputé contradictoire rendu le 15 mai 2019 auquel il convient de se reporter, a :
- déclaré recevable l'action de la société Cofidis ;
- débouté la société Cofidis de sa fin de non-recevoir ;
- prononcé la déchéance du droit aux intérêts de la société Cofidis au titre des prêts souscrits par M. et Mme Y. les 15 septembre 2013, 27 janvier 2014, 19 décembre 2016 et 23 mai 2017 à compter de ces dates pour chaque contrat ;
- débouté la société Cofidis de sa demande en paiement au titre du contrat de prêt du 15 septembre 2013,
- condamné solidairement M. et Mme Y. à payer à la société Cofidis les sommes de :
- 350,62 euros au titre du contrat de crédit du 27 janvier 2014,
- 6.978,36 euros au titre du contrat de crédit du 19 décembre 2016,
- 6.772,13 euros au titre du contrat de crédit du 23 mai 2017,
- dit que ces sommes ne porteront pas intérêts au taux légal.
Le tribunal a retenu que le prêteur avait consulté tardivement le fichier des incidents de paiement pour les deux premiers prêts et que les informations sur le calcul du TAEG étaient insuffisantes pour les deux derniers prêts. Il a relevé que l'application des articles L. 313-3 du code monétaire et financier et 1231-6 du code civil priverait la sanction de la déchéance du droit aux intérêts de son efficacité et l'a écartée.
[*]
Par une déclaration en date du 24 juillet 2019, la société Cofidis a relevé appel de cette décision.
Aux termes de conclusions remises le 25 février 2020, elle demande à la cour :
- d'infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts contractuels et rejeté la demande de capitalisation des intérêts,
- de condamner solidairement, à titre principal sur le fondement contractuel et à titre subsidiaire sur le fondement de l'article 220 du code civil, M. et Mme Y. à lui payer les sommes de :
- 2.622,55 euros au titre du prêt du 15 septembre 2013, avec intérêts au taux contractuel de 10,50 % l'an à compter des mises en demeure du 22 août 2018 et, à titre subsidiaire, à compter de l'assignation,
- 12.847,83 euros au titre du prêt du 25 janvier 2014, avec intérêts au taux contractuel de 9,84 % l'an à compter des mises en demeure du 22 août 2018 et, à titre subsidiaire, à compter de l'assignation,
- 8.524,05 euros au titre du prêt du 19 décembre 2016, avec intérêts au taux contractuel de 3,73 % l'an à compter des mises en demeure du 22 août 2018 et, à titre subsidiaire, à compter de l'assignation,
- 8.417,44 euros au titre du prêt du 23 mai 2017 avec intérêts au taux contractuel de 6,38 % l'an à compter des mises en demeure du 22 août 2018 et, à titre subsidiaire, à compter de l'assignation,
- à titre subsidiaire, de limiter la déchéance du droit aux intérêts aux deux premiers crédits et de condamner solidairement les emprunteurs à lui payer la somme de 2.622,55 euros pour le premier prêt et la somme de 12 847, 83 euros pour le second prêt,
- de débouter Mme X. divorcée Y. de l'intégralité de ses demandes,
- de condamner solidairement M. et Mme Y. à lui payer la somme de 1 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
L'appelante soutient que les spécimens de signature de Mme X. sont similaires aux signatures figurant sur les offres de prêt de sorte que le faux allégué n'est pas établi. Elle soutient avoir procédé aux vérifications requises par le code de la consommation avant l'octroi des prêts. Elle expose que toute cause de déchéance du droit aux intérêts relative au contrat du 15 septembre 2013 est irrecevable comme prescrite conformément à l'article L. 110-4 du code de commerce.
En visant les articles L. 312-16 et 312-24 du code de la consommation combinés, elle indique que le prêteur est tenu de consulter le FICP avant d'émettre une offre de contrat et non avant l'acceptation de celle-ci par l'emprunteur. Subsidiairement elle note que les emprunteurs n'étaient pas fichés au FICP de sorte que l'absence de consultation du fichier ne leur cause aucun préjudice.
Concernant les prêts du 19 décembre 2016 et du 23 mai 2017, elle rappelle que les taux d'intérêts convenus étaient fixes et qu'il était inutile d'indiquer sur l'offre les modalités de calcul du taux annuel effectif global.
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Par une déclaration en date du 4 septembre 2019, Mme X. divorcée Y. a relevé appel de cette décision.
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Par une ordonnance rendue le 22 mars 2021, le magistrat de la mise en état a prononcé la jonction des affaires RG 19/17394 et 19/15384.
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Par des conclusions remises le 28 novembre 2019, Mme X. divorcée Y., interjette appel et demande à la cour :
- de réformer le jugement dont appel,
- de procéder à la vérification d'écritures de la signature figurant sur les quatre offres de prêt dont elle nie être l'auteur,
- de débouter la société Cofidis de toutes ses demandes formulées à son encontre,
- de condamner la société Cofidis à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Au visa de l'article 1108 du code civil, l'intimée conteste avoir signé les documents contractuels, souligne que les seules informations y figurant concernent son ex-époux et que les différentes signatures sont le fait d'une même main. Elle précise que le couple vit séparément depuis 2012, que depuis son divorce en 2017 elle ne signe plus « Y. » mais « X. ». Elle conteste que les contrats signés du seul fait de son ex-mari lui soient opposables au visa de l'article 220 puisqu'ils n'ont pas servi aux besoins du ménage ni aux dépenses de la vie courante en l'absence de vie commune depuis 2012.
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Régulièrement assigné par acte d'huissier signifié le 23 septembre 2019 conformément aux dispositions des articles 656 et 658 du code de procédure civile, M. Y. n'a pas constitué avocat.
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Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 septembre 2021.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Il résulte du dernier alinéa de l'article 954 du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.
Pour les contrats litigieux conclus le 15 septembre 2013 et 27 janvier 2014, il est fait application des dispositions du code de la consommation dans leur rédaction postérieure à l'entrée en vigueur de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, et pour les contrats signés le 19 décembre 2016 et 23 mai 2017, dans la version postérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016.
La recevabilité de l'action en paiement du prêteur n'étant pas contestée en appel, le jugement sera confirmé en ce qu'il a déclaré la recevabilité de l'action.
Sur la dénégation de signatures par Mme X. :
En application de l'article 1373 du code civil, la partie à laquelle on l'oppose peut désavouer son écriture ou sa signature. Dans ce cas, il y a lieu à vérification d'écriture. En application des articles 287 et suivants, le juge vérifie l'acte contesté et procède à la vérification au vu des éléments dont il dispose.
Si la vérification opérée par le juge ne permet pas de conclure à la sincérité de l'acte, la partie qui fonde sa prétention sur cet acte doit être déboutée.
En l'espèce, Mme X. conteste avoir signé les quatre offres de prêt litigieuse.
Elle produit à l'appui de sa demande de vérification :
- la convention de divorce signée le 17 juillet 2017,
- un dépôt de plainte pénale du 15 février 2019,
- sa carte d'identité établie le 25 novembre 2010,
- son contrat de travail signé le 5 juin 2013,
- une page d'écriture et de signatures non datée.
Il ressort de ces pièces que le couple s'est séparé le 2 janvier 2017 et non en 2012, que le domicile familial était situé à [ville A.], que le couple avait un compte joint jusqu'en 2016 et que les époux sont convenus que les effets du divorce s'appliqueraient à compter du jour de l'enregistrement de la convention de divorce.
Si les signatures des contrats litigieux ne sont pas strictement identiques, elles présentent de fortes similitudes au regard du fait qu'elles ont été rédigées entre septembre 2013 et mai 2017. Le seul fait qu'il ne soit précisé que le mel, le numéro de ligne fixe et le portable de monsieur ne suffit pas à rendre impossible la signature de madame. Mme X. ne conteste pas que jusqu'au divorce, elle signait Y.
De surcroît, il n'est nullement rapporté la preuve d'une résidence séparée et il est manifeste qu'à chaque ouverture de crédit, madame a communiqué ses fiches de paie, y compris celle du mois d'avril 2017, soit quelques mois avant le prononcé du divorce. Elle a admis dans sa plainte pénale que les fonds ont été versés sur le compte courant de la Caisse d'épargne Île-de-France, qu'elle avait une carte bancaire et qu'elle laissait son mari s'occuper des comptes.
La vérification opérée sur les pièces produites ne corrobore pas la contestation élevée par Mme X. et n'étaye pas une différence significative entre les signatures litigieuses et celle de cette dernière. Contrairement à ce qu'elle soutient, la comparaison des signatures n'établit pas de différence flagrante.
En conséquence, la vérification opérée permet de conclure à la sincérité des actes et Mme X. est déboutée de sa demande de nullité.
Sur la recevabilité du moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts :
En application de l'article L. 141-4 devenu R. 632-1 du code de la consommation, le juge peut relever d'office toutes les dispositions du présent code dans les litiges nés de son application. Il écarte d'office, après avoir recueilli les observations des parties, l'application d'une clause dont le caractère abusif ressort des éléments du débat.
Ce texte confère au juge une simple possibilité de relever d'office toute violation des dispositions d'ordre public du code de la consommation tandis qu'il lui impose d'écarter d'office une clause abusive. En revanche, il ne pose aucune restriction à l'exercice des prérogatives ainsi conférées au juge pour autant que l'irrégularité résulte des faits litigieux dont l'allégation comme la preuve incombent aux parties.
Par ailleurs, au regard de sa date de conclusion, le contrat signé le 15 septembre 2013 est soumis aux dispositions des articles L. 311-1 et suivants du code de la consommation dans leur rédaction postérieure à la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 qui a porté ratification de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2008, concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil. Il a été dit pour droit par la Cour de justice de l'Union européenne que les articles 8 et 23 de cette directive doivent être interprétés en ce sens qu'ils imposent à une juridiction nationale d'examiner d'office l'existence d'une violation de l'obligation précontractuelle du prêteur d'évaluer la solvabilité du consommateur, prévue à l'article 8 de cette directive et de tirer les conséquences qui découlent en droit national d'une violation de cette obligation, à condition que les sanctions satisfassent aux exigences dudit article 23.
Il s'induit que dans le rôle qui lui est conféré tant par la loi et le règlement internes que par le droit européen, le juge peut soulever d'office toute irrégularité heurtant une disposition d'ordre public et sanctionnée par la déchéance d'un droit qui fonde la demande d'une partie sans être enfermé dans quelque délai.
C'est donc à bon droit que le premier juge, en respectant le principe de contradiction, a examiné la conformité du contrat signé le 15 septembre 2013 à l'article L. 311-9 du code de la consommation et la société Cofidis est mal fondée à invoquer la prescription du moyen discuté.
Sur le bien-fondé de la déchéance du droit aux intérêts :
L'article L. 311- 48 (désormais L. 341-1 et L. 341-2) du code de la consommation dispose que le prêteur est déchu du droit aux intérêts, lorsqu'il ne satisfait pas aux conditions d'informations précontractuelles prévues par les articles énumérés et contenues dans le code de la consommation.
Il incombe au prêteur de rapporter la preuve de ce qu'il a satisfait à ses obligations précontractuelles et d'établir qu'il a satisfait aux formalités d'ordre public prescrites par le code de la consommation.
L'article L. 311-9 devenu L. 312-16 du code de la consommation dispose qu'avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur consulte le FICP prévu à l'article L. 751-1 (L. 333-4 ancien).
La consultation du fichier doit être réalisée avant l'octroi du crédit.
En l'espèce, s'agissant du contrat signé le 15 septembre 2013, l'appelante justifie avoir consulté ce fichier le 19 septembre 2013, soit avant le déblocage des fonds intervenu le 24 septembre 2013. Le document produit satisfait les prescriptions réglementaires. La société Cofidis n'encourt par conséquent aucune déchéance concernant ce prêt et le jugement est infirmé sur ce point.
S'agissant du contrat signé le 27 janvier 2014, l'appelante justifie avoir consulté ce fichier le 12 février 2014, date à laquelle elle a procédé au déblocage des fonds. Elle ne justifie pas d'une consultation avant l'octroi du crédit et encourt par conséquent une déchéance du droit aux intérêts concernant ce crédit. Partant le jugement est confirmé en ce qu'il a prononcé une déchéance du droit aux intérêts.
En application de l'article L. 312-12 du code de la consommation, préalablement à la conclusion du contrat de crédit, le prêteur ou l'intermédiaire de crédit donne à l'emprunteur, par écrit ou sur un autre support durable, les informations nécessaires à la comparaison de différentes offres et permettant à l'emprunteur, compte tenu de ses préférences, d'appréhender clairement l'étendue de son engagement (…). Cette fiche d'informations comporte, en caractères lisibles, la mention visée au dernier alinéa de l'article L. 311-5. Lorsque le consommateur sollicite la conclusion d'un contrat de crédit sur le lieu de vente, le prêteur veille à ce que la fiche d'informations mentionnées au I lui soit remise sur le lieu de vente.
L'article R. 312-2 11° du code de la consommation prévoit que cette fiche doit mentionner :
10° Sauf en cas de location avec option d'achat, le taux débiteur, les conditions applicables à ce taux et, le cas échéant, tout indice ou taux de référence qui se rapporte au taux initial débiteur, ainsi que les périodes, conditions et procédures d'adaptation du taux. Si différents taux débiteurs s'appliquent en fonction des circonstances, ces informations portent sur tous les taux applicables.
11° Sauf en cas de location avec option d'achat, le taux annuel effectif global, à l'aide d'un exemple représentatif mentionnant toutes les hypothèses utilisées pour le calcul de ce taux.
Les crédits souscrits le 19 décembre 2016 et le 23 mai 2017 sont des prêts à taux fixe, de sorte que le TAEG est lui-même fixe et résulte des conditions d'octroi du crédit relatives au montant, à sa durée, au taux contractuel et aux frais qui sont précisés dans les fiches. Il ne peut donc varier en fonction de l'hypothèse retenue.
Ainsi, le 11° de l'article précité a vocation à s'appliquer, dans le prolongement du 10°, lorsque le taux est variable.
En l'espèce, le TAEG n'est soumis à aucune variable et est déterminé de manière fixe et invariable à 6,89 %. Les FIPEN n'ont donc pas à mentionner les hypothèses pour le calcul de ce taux.
L'article R. 311-5 devenu R. 312-10 du code de la consommation prévoit quant aux mentions qui doivent figurer dans l'offre de crédit :
e) le taux débiteur, les conditions applicables à ce taux, le cas échéant tout indice ou taux de référence qui se rapporte au taux débiteur initial, ainsi que les périodes, conditions et procédures d'adaptation du taux. Si différents taux débiteurs s'appliquent en fonction des circonstances, ces informations portent surtout les taux applicables.
f) le taux annuel effectif global et le montant total dû par l'emprunteur, calculés au moment de la conclusion du contrat de crédit. Toutes les hypothèses utilisées pour calculer ce taux sont mentionnées.
Ainsi, lorsque les hypothèses sont utilisées pour le calcul du TAEG, elles doivent être mentionnées au contrat.
En l'espèce, les conditions d'octroi du crédit ont constitué la seule et unique hypothèse retenue pour le calcul du TAEG qui est fixe et invariable.
La banque a par ailleurs produit les offres de crédit, les notices assurance, les fiches solvabilité, les fiches d'informations précontractuelles, les pièces justificatives de domicile et de revenus et les justificatifs de consultation du FICP.
Il convient par conséquent d'infirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts contractuels pour les crédits signés le 19 décembre 2016 et le 23 mai 2017.
Sur la demande en paiement :
Pour justifier avoir prononcé, le 22 août 2018, la déchéance du terme du prêt, la société Cofidis verse aux débats quatre mises en demeure préalables de payer les mensualités échues adressées aux emprunteurs le 10 août 2018 et une mise en demeure de payer les soldes dus incluant le capital non échu, en date du 28 août puis du 12 octobre 2018.
Au vu des tableaux d'amortissement, des historiques de comptes et des décomptes détaillés versés aux débats, et en l'absence de toute contestation, la créance de la société Cofidis s'établit comme suit :
- concernant le prêt du 15 septembre 2013 :
- mensualités échues : 965,09 euros
- capital restant dû : 1.478,44 euros
- indemnité conventionnelle de 8 % : 118,27 euros
soit la somme de 2.561,8 euros majorée des intérêts au taux conventionnel de 10,50 % sur la somme de 2.443,53 euros à compter du 28 août 2018, date de la mise en demeure.
- concernant le prêt du 27 janvier 2014 soumis à déchéance du droit aux intérêts :
- capital emprunté : 20.500 euros
- versements : 20.149,38 euros
soit la somme de 350,62 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 28 août 2018.
- concernant le prêt du 19 décembre 2016 :
- mensualités échues : 1.684,06 euros
- capital restant dû : 6.218,80 euros
- indemnité conventionnelle de 8 % : 497,50 euros
soit la somme de 8 400,36 euros majorée des intérêts au taux conventionnel de 3,73 % sur la somme de 7.902,86 euros à compter du 28 août 2018.
- concernant le prêt du 23 mai 2017 :
- mensualités échues : 1.136,94 euros
- capital restant dû : 6.673,90 euros
- indemnité conventionnelle de 8 % : 533,91 euros
soit la somme de 8.344,75 euros majorée des intérêts au taux conventionnel de 6,38 % sur la somme de 7.810,84 euros à compter du 28 août 2018.
Il n'appartient pas à la cour de statuer sur la majoration de ce taux d'intérêt en application de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier qui, relatif à un éventuel défaut d'exécution du présent arrêt relève des seules attributions du juge de l'exécution.
Enfin, il convient de rappeler qu'il n'y a pas lieu à capitalisation des intérêts au regard de l'article L. 311-23 du code de la consommation dans sa version applicable au contrat qui limite strictement les sommes dues par l'emprunteur défaillant.
En conséquence, il est fait droit à la demande de la société Cofidis dans les termes indiqués ci-dessous.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
Statuant après débats en audience publique, par arrêt rendu par défaut mis à disposition au greffe,
- Rejette la demande tendant à faire déclarer prescrits les moyens soulevés d'office par le premier juge ;
- Infirme le jugement dont appel en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a déclaré recevable la demande en paiement' et en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts concernant le prêt personnel signé le 27 janvier 2014 ;
Statuant à nouveau,
- Condamne solidairement M. Y. et Mme X. à payer à la société Cofidis :
- la somme de 2.561,8 euros majorée des intérêts au taux conventionnel de 10,50 % sur la somme de 2.443,53 euros à compter du 28 août 2018, date de la mise en demeure,
- la somme de 350,62 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 28 août 2018,
- la somme de 8.400,36 euros majorée des intérêts au taux conventionnel de 3,73 % sur la somme de 7.902,86 euros à compter du 28 août 2018,
- la somme de 8 344,75 euros majorée des intérêts au taux conventionnel de 6,38 % sur la somme de 7.810,84 euros à compter du 28 août 2018 ;
- Rejette toute autre demande ;
- Condamne in solidum M. Y. et Mme X. à payer à la société Cofidis la somme de 800 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamne in solidum M. Y. et Mme X. aux dépens de première instance et d'appel ces derniers pouvant être recouvrés directement par Maître Olivier H., avocat conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
La greffière La présidente
- 5716 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Procédure - Office du juge - Relevé d’office - Principe - Faculté - Loi du 3 janvier 2008
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