CA PARIS (pôle 4 ch. 9-A), 7 avril 2022
CERCLAB - DOCUMENT N° 9555
CA PARIS (pôle 4 ch. 9), 7 avril 2022 : RG n° 19/13045
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « Le présent litige est relatif à un crédit soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 de sorte qu'il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation antérieure à l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et au décret n° 2016-884 du 29 juin 2016.
L'article L. 141-4 (R. 632-1 dans la nouvelle numérotation) du code de la consommation permet au juge de relever d'office tous les moyens tirés de l'application des dispositions du code de la consommation, sous réserve de respecter le principe du contradictoire. Il a été fait application de cette disposition par le premier juge. »
2/ « En matière de crédit à la consommation en particulier, il résulte des dispositions de l'article L. 312-39 (ancien article L. 311-24) du code de la consommation, que si le contrat de prêt d'une somme d'argent peut prévoir que la défaillance de l'emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d'une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle.
En l'espèce, le contrat de prêt contient une clause d'exigibilité anticipée en cas de défaut de paiement (article 5.6) et une mise en demeure préalable au prononcé de la déchéance du terme de payer la somme de 652,78 euros précisant le délai de régularisation (de 15 jours) a bien été envoyée le 16 mai 2017 ainsi qu'il en ressort des justificatifs produits (la LRAR a été retournée à l'expéditeur pli avisé et non réclamé). En l'absence de régularisation dans le délai, ainsi qu'il en ressort de l'historique de compte, la société Sogefinancement a pu régulièrement prononcer la déchéance du terme le 8 juin 2017. »
3/ « En application de l'article L. 141-4 devenu R. 632-1 du code de la consommation, le juge peut relever d'office toutes les dispositions du présent code dans les litiges nés de son application. Il écarte d'office, après avoir recueilli les observations des parties, l'application d'une clause dont le caractère abusif ressort des éléments du débat.
Ce texte confère au juge une simple possibilité de relever d'office toute violation des dispositions d'ordre public du code de la consommation tandis qu'il lui impose d'écarter d'office une clause abusive. En revanche, il ne pose aucune restriction à l'exercice des prérogatives ainsi conférées au juge pour autant que l'irrégularité résulte des faits litigieux dont l'allégation comme la preuve incombent aux parties.
Par ailleurs, au regard de sa date de conclusion, le contrat signé le 26 juin 2013 est soumis aux dispositions du code de la consommation dans leur rédaction postérieure à la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 qui a porté ratification de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2008, concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil. Il a été dit pour droit par la Cour de justice de l'Union européenne que les articles 8 et 23 de cette directive doivent être interprétés en ce sens qu'ils imposent à une juridiction nationale d'examiner d'office l'existence d'une violation de l'obligation précontractuelle du prêteur d'évaluer la solvabilité du consommateur, prévue à l'article 8 de cette directive et de tirer les conséquences qui découlent en droit national d'une violation de cette obligation, à condition que les sanctions satisfassent aux exigences dudit article 23.
Il s'en déduit que dans le rôle qui lui est conféré tant par la loi et le règlement internes que par le droit européen, le juge peut soulever d'office toute irrégularité heurtant une disposition d'ordre public et sanctionnée par la déchéance d'un droit qui fonde la demande d'une partie sans être enfermé dans quelque délai.
C'est donc à bon droit que le premier juge, en respectant le principe de contradiction, a examiné la conformité du contrat litigieux à l'article L. 311-12 devenu L. 312-21 et la société Sogefinancement est mal fondée à invoquer la prescription du moyen discuté. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 4 CHAMBRE 9
ARRÊT DU 7 AVRIL 2022
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 19/13045 (10 pages). N° Portalis 35L7-V-B7D-CAGZV. Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 janvier 2019 - Tribunal d'Instance de BOBIGNY – R.G. n° 11-18-001046.
APPELANTE :
La société SOGEFINANCEMENT
SAS prise en la personne de son président en exercice domicilié ès-qualités audit siège N° SIRET : XXX, [...], [...], [...], représentée par Maître Sébastien M. GIL de la SELAS C. & M.-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173, substitué à l'audience par Maître Christine L. de la SELAS C. & M.-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173
INTIMÉS :
Monsieur X.
né le [date] à [ville], [...], [...], DÉFAILLANT
Madame Y. épouse X.
née le [date] à [ville], [...], [...], DÉFAILLANTE
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 février 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Christophe BACONNIER, Président, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : M. Christophe BACONNIER, Président de chambre, Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère, Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère.
Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE
ARRÊT : - DÉFAUT - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par M. Christophe BACONNIER, Président et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Selon offre préalable acceptée le 26 juin 2013, la société Sogefinancement (SAS) a consenti à M. X. et Mme X. née Y. un crédit personnel de regroupement de crédits d'un montant en capital de 30.000 euros remboursable au taux nominal de 7,40 % l'an (soit un TAEG de 7,81 %) en 72 mensualités de 556,25 euros avec assurance.
Des échéances étant demeurées impayées, la société Sogefinancement a fait assigner M. et Mme X. devant le tribunal d'instance de Bobigny, par acte d'huissier en date du 7 mai 2018, en paiement des sommes suivantes, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :
- 16.593,65 euros au titre du crédit, avec intérêts contractuels au taux de 7,40 % l'an à compter du 8 juin 2017,
- 1.307,46 euros au titre de l'indemnité légale de 8 %,
- 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance.
Devant le premier juge, le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts contractuels a été mis dans le débat d'office.
Par jugement réputé contradictoire du 10 janvier 2019 auquel la cour se réfère pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le tribunal d'instance de Bobigny a rendu la décision suivante :
« REJETTE la fin de non-recevoir soulevée par la société Sogefinancement ;
PRONONCE la déchéance du droit aux intérêts de la société Sogefinancement au titre du prêt souscrit par Monsieur X. et Madame X. née Y. le 26 juin 2013, à compter de cette date ;
ÉCARTE l'application de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier ;
CONDAMNE solidairement Monsieur X. et Madame X. née Y. à payer à la société Sogefinancement la somme de 8.316,28 euros au titre du contrat de crédit du 26 juin 2013, outre les intérêts au taux légal non majoré à compter du 7 mai 2018 ;
REJETTE le surplus des demandes ;
CONDAMNE in solidum Monsieur X. et Madame X. née Y. aux entiers dépens de l'instance ».
Le premier juge a statué dans ces termes après avoir retenu :
- la déchéance du droit aux intérêts au motif que la notice assurance et les justificatifs de charge dont la production est nécessaire pour satisfaire à l'obligation de vérifier la solvabilité de l'emprunteur ne sont pas produits et au motif que l'encadré de l'offre de contrat de crédit ne mentionne pas le montant de la mensualité de remboursement assurance incluse ni le coût total du crédit assurance incluse.
- le rejet de la majoration de plein-droit des intérêts légaux de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier.
La société Sogefinancement a relevé appel de ce jugement par déclaration du 27 juin 2019.
[*]
Par conclusions communiquées par voie électronique en date du 24 septembre 2019, la société Sogefinancement demande à la cour de :
« INFIRMER le jugement rendu par le Tribunal d'instance de Bobigny le 10 janvier 2019 en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir soulevée par la société Sogefinancement ; En ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts de la société Sogefinancement au titre du prêt souscrit par Monsieur X. et Madame X. née Y. le 26 juin 2013 à compter de cette date ; En ce qu'il a limité la condamnation solidaire de Monsieur X. et Madame X. née Y. à payer à la société Sogefinancement la somme de 8 316,28 euros au titre du contrat de crédit du 26 juin 2013 outre intérêts au taux légal non majoré à compter du 7 mai 2018 ; En ce qu'il a débouté la société Sogefinancement de ses demandes, en ce compris sa demande visant à la condamnation solidaire de Monsieur X. et Madame X. née Y. à lui payer la somme de 16 593,65 euros, représentant les mensualités impayées, le capital restant dû et les intérêts échus, augmentée des intérêts de retard courus au taux conventionnel de 7,40 % l'an sur la somme en principal de 16 588,49 euros à compter du 8 juin 2017 jusqu'au jour du parfait paiement, la somme de 1 307,46 euros au titre de l'indemnité légale de 8 % du capital restant dû, la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; En ce qu'il a écarté l'application de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier ;
Statuant à nouveau sur les chefs critiqués,
DIRE ET JUGER que les arguments visant à faire prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels pour irrégularité du formalisme précontractuel ou contractuel sont prescrits eu égard au délai de prescription quinquennale ;
DECLARER, en conséquence, le moyen irrecevable ;
Subsidiairement,
DIRE ET JUGER que la société Sogefinancement justifie avoir vérifié la solvabilité de l'emprunteur ;
DIRE ET JUGER qu'elle justifie avoir remis la notice d'assurance à l'emprunteur ;
DIRE ET JUGER que les mensualités et le montant total dû doivent être mentionnées dans l'encadré de l'offre hors assurance facultative ;
DIRE ET JUGER, en conséquence, que la déchéance du droit aux intérêts contractuels n'est pas encourue ;
En tout état de cause, CONDAMNER solidairement Monsieur X. et Madame X. née Y. à payer à la société Sogefinancement la somme de 17.514,19 euros majorée des intérêts au taux contractuel de 7,40 % l'an à compter du 08/06/2017 sur la somme de 16.201,57 euros et au taux légal sur le surplus en remboursement du crédit n° 351XX3736 ;
En tout état de cause, CONDAMNER in solidum Monsieur X. et Madame X. née Y. à payer à la société Sogefinancement la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Les CONDAMNER in solidum aux entiers dépens avec distraction au profit de la Selas C. & M.-Gil en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ».
Au soutien de son appel, la société Sogefinancement fait valoir :
- au visa des articles L. 110-4 du code de commerce et 2222 du code civil, que le moyen tiré d'une déchéance du droit aux intérêts pour irrégularité du formalisme précontractuel est irrecevable comme prescrit,
- subsidiairement, que cette déchéance n'est pas encourue dès lors qu'elle a respecté ses obligations,
- que le contrat ayant été conclu dans les locaux de la banque, l'article L. 311-9 du code de la consommation est applicable de sorte qu'en établissant une fiche revenus et charges et en consultant le FICP, elle a correctement vérifié la solvabilité des emprunteurs,
- que le code de la consommation n'impose pas la production de pièces justificatives de charges et le premier juge a donc ajouté aux textes,
- que la production de la copie de la notice d'assurance remise aux intimés et soutient que cette remise est un fait juridique dont la preuve est rapportée par la clause contractuelle aux termes de laquelle les emprunteurs ont expressément reconnu avoir reçu la notice : il incombe aux emprunteurs, le cas échéant, de prouver l'irrégularité de la notice,
- que la teneur de l'encadré de l'offre de crédit est conforme au regard des articles L. 311-18 et R. 311-5 du code de la consommation, étant ajouté que le montant total dû indiqué dans l'encadré n'a pas à inclure l'assurance facultative,
- que les dispositions de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier n'ont pas lieu d'être écartées.
[*]
La déclaration d'appel a été signifiée à M. et Mme X. le 5 septembre 2019 par procès-verbal de remise à étude.
Les conclusions d'appel ont été signifiée à M. et Mme X. le 27 septembre 2019 par procès-verbal de remise à étude.
M. et Mme X. n'ont pas constitué avocat ; conformément à l'article 473 du code de procédure civile, il sera statué par défaut.
[*]
L'ordonnance de clôture a été rendue à la date du 19 octobre 2021.
L'affaire a été appelée à l'audience du 16 février 2022.
Lors de l'audience, l'affaire a été examinée et mise en délibéré à la date du 7 avril 2022 par mise à disposition de la décision au greffe (Art. 450 CPC).
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Selon l'article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne fait droit à la demande que s'il l'estime régulière, recevable et bien fondée.
Sur la demande en paiement :
Le présent litige est relatif à un crédit soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 de sorte qu'il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation antérieure à l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et au décret n° 2016-884 du 29 juin 2016.
L'article L. 141-4 (R. 632-1 dans la nouvelle numérotation) du code de la consommation permet au juge de relever d'office tous les moyens tirés de l'application des dispositions du code de la consommation, sous réserve de respecter le principe du contradictoire. Il a été fait application de cette disposition par le premier juge.
L'article L. 311-24 (L. 312-39 dans la nouvelle numérotation) du code de la consommation prévoit qu'en cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu'à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre, le prêteur peut demander à l'emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l'application des articles 1152 et 1231 (dans leur rédaction alors applicable) du code civil, est fixée suivant un barème déterminé par décret. L'article D. 311-6 (D. 312-16 dans la nouvelle numérotation) du même code précise que lorsque le prêteur exige le remboursement immédiat du capital restant dû en application de l'article L. 311-24 (L. 312-39 dans la nouvelle numérotation), il peut demander une indemnité égale à 8 % du capital restant dû à la date de la défaillance.
Ce texte n'a toutefois vocation à être appliqué au titre du calcul des sommes dues qu'après vérification de l'absence de forclusion de la créance, de ce que le terme du contrat est bien échu et de l'absence de déchéance du droit aux intérêts conventionnels.
Sur la forclusion :
L'article L. 311-52 devenu R. 312-35 du code de la consommation dispose que les actions en paiement à l'occasion de la défaillance de l'emprunteur dans le cadre d'un crédit à la consommation, doivent être engagées devant le tribunal d'instance dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion.
En l'espèce, au regard de l'historique du compte produit, il apparaît que le premier incident de paiement non régularisé est intervenu pour l'échéance du 30 juin 2016 de sorte que l'action introduite le 7 mai 2018 n'est pas atteinte par la forclusion dès lors qu'il ne s'est pas écoulé plus de deux ans à compter du premier incident de paiement non régularisé.
Sur la déchéance du terme :
Aux termes de l'article 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.
Par ailleurs, selon l'article 1103 du code civil, les conventions légalement formées engagent leurs signataires et en application de l'article 1224 du même code, lorsque l'emprunteur cesse de verser les mensualités stipulées, le prêteur est en droit de se prévaloir de la déchéance du terme et de demander le remboursement des fonds avancés soit en raison de l'existence d'une clause résolutoire soit en cas d'inexécution suffisamment grave. L'article 1225 précise qu'en présence d'une clause résolutoire, la résolution est subordonnée à une mise en demeure infructueuse s'il n'a pas été convenu que celle-ci résulterait du seul fait de l'inexécution.
En matière de crédit à la consommation en particulier, il résulte des dispositions de l'article L. 312-39 (ancien article L. 311-24) du code de la consommation, que si le contrat de prêt d'une somme d'argent peut prévoir que la défaillance de l'emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d'une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle.
En l'espèce, le contrat de prêt contient une clause d'exigibilité anticipée en cas de défaut de paiement (article 5.6) et une mise en demeure préalable au prononcé de la déchéance du terme de payer la somme de 652,78 euros précisant le délai de régularisation (de 15 jours) a bien été envoyée le 16 mai 2017 ainsi qu'il en ressort des justificatifs produits (la LRAR a été retournée à l'expéditeur pli avisé et non réclamé). En l'absence de régularisation dans le délai, ainsi qu'il en ressort de l'historique de compte, la société Sogefinancement a pu régulièrement prononcer la déchéance du terme le 8 juin 2017.
Sur la déchéance du droit aux intérêts contractuels :
Sur la recevabilité du moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts :
En application de l'article L. 141-4 devenu R. 632-1 du code de la consommation, le juge peut relever d'office toutes les dispositions du présent code dans les litiges nés de son application. Il écarte d'office, après avoir recueilli les observations des parties, l'application d'une clause dont le caractère abusif ressort des éléments du débat.
Ce texte confère au juge une simple possibilité de relever d'office toute violation des dispositions d'ordre public du code de la consommation tandis qu'il lui impose d'écarter d'office une clause abusive. En revanche, il ne pose aucune restriction à l'exercice des prérogatives ainsi conférées au juge pour autant que l'irrégularité résulte des faits litigieux dont l'allégation comme la preuve incombent aux parties.
Par ailleurs, au regard de sa date de conclusion, le contrat signé le 26 juin 2013 est soumis aux dispositions du code de la consommation dans leur rédaction postérieure à la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 qui a porté ratification de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2008, concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil. Il a été dit pour droit par la Cour de justice de l'Union européenne que les articles 8 et 23 de cette directive doivent être interprétés en ce sens qu'ils imposent à une juridiction nationale d'examiner d'office l'existence d'une violation de l'obligation précontractuelle du prêteur d'évaluer la solvabilité du consommateur, prévue à l'article 8 de cette directive et de tirer les conséquences qui découlent en droit national d'une violation de cette obligation, à condition que les sanctions satisfassent aux exigences dudit article 23.
Il s'en déduit que dans le rôle qui lui est conféré tant par la loi et le règlement internes que par le droit européen, le juge peut soulever d'office toute irrégularité heurtant une disposition d'ordre public et sanctionnée par la déchéance d'un droit qui fonde la demande d'une partie sans être enfermé dans quelque délai.
C'est donc à bon droit que le premier juge, en respectant le principe de contradiction, a examiné la conformité du contrat litigieux à l'article L. 311-12 devenu L. 312-21 et la société Sogefinancement est mal fondée à invoquer la prescription du moyen discuté.
Sur la déchéance du droit aux intérêts tirée du défaut de production de la notice d'assurance :
La société Sogefinancement produit :
- l'offre de contrat de crédit,
- l'avenant de réaménagement,
- la fiche d'informations précontractuelles européennes normalisées,
- la fiche de solvabilité,
- la synthèse des garanties des contrats d'assurance,
- le bordereau de rétractation,
- la fiche d'explications et de mise en garde « regroupements de crédits »,
- le justificatif de consultation du fichier des incidents de paiement du 23 juin 2013 pour chacun des époux,
- le tableau d'amortissement,
- l'historique de prêt,
- les bulletins de salaire de M. et Mme X.,
- la lettre de mise en demeure préalable à la déchéance du terme,
- la lettre de déchéance du terme avec mise en demeure de payer,
- un décompte de créance du 29 août 2017.
A l'examen des pièces produites et des moyens débattus, la cour retient que la société Sogefinancement ne produit pas la notice assurance.
Il appartient au créancier qui réclame des sommes au titre d'un crédit à la consommation de justifier du strict respect du formalisme informatif prévu par le code de la consommation, en produisant des documents contractuels conformes, ainsi que la copie des pièces nécessaires, et notamment la notice d'assurance comportant les conditions générales (article L. 311-19 devenu L. 312-29) à peine de déchéance totale du droit aux intérêts (article L. 311-48 devenu L. 341-4), étant précisé également que la preuve de la remise de la notice et de sa conformité ne sauraient résulter d'une simple clause pré-imprimée selon laquelle l'emprunteur reconnaît la remise, une telle clause ne constitue qu'un indice qu'il incombe au prêteur de corroborer par un ou plusieurs éléments de preuve pertinents, et étant rappelé que la synthèse des garanties ne répond pas à l'exigence légale, le fonctionnement des garanties et les cas particuliers n'y figurant pas.
Et c'est en vain que la société Sogefinancement invoque comme preuve de la remise de la notice d'assurance la formule suivante « Nous soussignons Monsieur X et Madame X. né(e) Y. agissant solidairement, déclarons accepter la présente offre de contrat de crédit et en conserver un exemplaire
X avec assurance DIT
X avec assurance DIT
Après avoir pris connaissance de toutes ces conditions, la synthèse des garanties des contrats d'assurance DIT et Perte d'Emploi, et la notice d'information relative à l'assurance DIT-PE facultative figurant dans les documents annexés le tout représentant 12 pages, formant une convention unique et indivisible ».
En effet cette mention est contredite par l'offre de contrat de crédit qui est numérotée de la page 1/10 à 10/10 à laquelle est jointe une synthèse des garanties des contrats d'assurances DIT « décès PTIA » numérotée de la page 1/6 à la page 6/6 qui comporte les mentions « nous reconnaissons avoir reçu la synthèse des garanties du contrat d'assurance » ; il se déduit de ces énonciations que ce sont 16 pages qui ont été remises et non 12 pages et que dans ces 16 pages il n'y a qu'une synthèse des garanties et non la notice d'information stricto sensu.
Compte tenu de ce qui précède et sans qu'il ne soit nécessaire d'examiner les autres moyens relatifs à la déchéance du droit aux intérêts, la cour prononce la déchéance totale du droit aux intérêts.
Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu'il a prononcé la déchéance totale du droit aux intérêts.
Sur le montant de la créance :
Aux termes de l'article L. 311-48 devenu L. 341-8 du code de la consommation, lorsque le prêteur est déchu du droit aux intérêts, l'emprunteur n'est tenu qu'au seul remboursement du capital suivant l'échéancier prévu, ainsi que, le cas échéant, au paiement des intérêts dont le prêteur n'a pas été déchu. Les sommes déjà perçues par le prêteur au titre des intérêts, qui sont productives d'intérêts au taux de l'intérêt légal à compter du jour de leur versement, sont restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû.
En l'espèce, le prêteur a été déchu du droit aux intérêts de sorte qu'il n'y a pas lieu de faire droit à sa demande formulée au titre des intérêts échus ; les sommes versées au titre des intérêts seront imputées sur le capital restant dû.
Au regard de l'historique du prêt, il y a lieu de faire droit à la demande en paiement de la société Sogefinancement à hauteur de la somme de 10.311,34 euros calculés comme suit : 30.000 euros correspondant au montant emprunté
- 21.66,32 euros versés par M. et Mme X.
+ 1'677,66 euros au titre des cotisations d'assurance échues jusqu'à la date de la déchéance du terme qui restent dues, car elles ne sont pas concernées par une déchéance du droit aux intérêts.
Le prêteur, bien que déchu de son droit aux intérêts, demeure fondé à solliciter le paiement des intérêts au taux légal, en vertu de l'article 1153 devenu 1231-6 du code civil, sur le capital restant dû, majoré de plein-droit deux mois après le caractère exécutoire de la décision de justice en application de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier.
La somme restant due en capital au titre du crédit litigieux portera donc intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure de payer effectuée simultanément au prononcé de la déchéance du terme.
Rien ne justifie que la cour écarte l'application de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier.
Le jugement déféré est donc infirmé en ce qu'il a condamné solidairement M. et Mme X. à payer à la société Sogefinancement la somme de 8.316,28 euros au titre du contrat de crédit du 26 juin 2013, outre les intérêts au taux légal non majoré à compter du 7 mai 2018 et statuant à nouveau de ce chef, la cour condamne solidairement M. et Mme X. à payer à la société Sogefinancement la somme de 10.311,34 euros au titre du capital restant dû avec intérêts au taux légal à compter du 8 juin 2017.
Sur les autres demandes :
La cour condamne in solidum M. et Mme X. aux dépens en application de l'article 696 du code de procédure civile.
Le jugement déféré est confirmé en ce qui concerne l'application de l'article 700 du code de procédure civile.
Il n'apparaît pas inéquitable, compte tenu des éléments soumis aux débats, de laisser à la charge de la société Sogefinancement les frais irrépétibles de la procédure d'appel.
Les motifs qui précèdent rendent sans objet les prétentions et moyens subsidiaires des parties.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
Statuant par arrêt rendu par défaut et en dernier ressort, mis à disposition au greffe,
Infirme le jugement mais seulement en ce qu'il a condamné solidairement M. X. et Mme Anne-Marie S. à payer à la société Sogefinancement la somme de 8.316,28 euros au titre du contrat de crédit du 26 juin 2013, outre les intérêts au taux légal non majoré à compter du 7 mai 2018 ;
Et statuant à nouveau de ce chef,
Condamne solidairement M. X. et Mme X. à payer à la société Sogefinancement la somme de 10.311,34 euros au titre du capital restant dû avec intérêts au taux légal à compter du 8 juin 2017 ;
Confirme le jugement en toutes ses dispositions, dans les limites de l'appel ;
Ajoutant,
Déboute la société Sogefinancement de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Rejette le surplus des demandes ;
Condamne in solidum M. X. et Mme X. aux dépens.
La greffière Le président
- 5707 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Procédure - Recevabilité - Délai pour agir - Forclusion - Crédit à la consommation
- 5716 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Procédure - Office du juge - Relevé d’office - Principe - Faculté - Loi du 3 janvier 2008
- 5721 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Procédure - Office du juge - Relevé d’office - Principe - Obligation - Loi du 17 mars 2014
- 5824 - Code de la consommation - Autres textes - Application dans le temps - Crédit à la consommation
- 6622 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit à la consommation - Régime général - Obligations de l’emprunteur - Déchéance et résiliation - Griefs généraux