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CASS. CIV. 1re, 20 avril 2022

Nature : Décision
Titre : CASS. CIV. 1re, 20 avril 2022
Pays : France
Juridiction : Cour de cassation Ch. civile 1
Demande : 20-16942
Décision : 22-356
Date : 20/04/2022
Numéro ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:C100356
Nature de la décision : Cassation avec renvoi
Mode de publication : Legifrance
Décision antérieure : CA GRENOBLE (1re ch. civ.), 3 décembre 2019
Numéro de la décision : 356
Référence bibliographique : 5730 (appel, demande nouvelle), 9742 (prêt immobilier, monnaie étrangère)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 9584

CASS. CIV. 1re, 20 avril 2022 : pourvoi n° 20-16942 ; arrêt n° 356 

Publication : Legifrance

 

Extrait : « Vu l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa version antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 : 4. Il résulte de ces textes que, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives et réputées non écrites les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. 5. La Cour de justice des Communautés européennes a dit pour droit que le juge national est tenu d'examiner d'office le caractère abusif d'une clause contractuelle dès qu'il dispose des éléments de droit et de fait nécessaires. Lorsqu'il considère qu'une telle clause est abusive, il ne l'applique pas, sauf si le consommateur s'y oppose (CJCE, arrêt du 4 juin 2009, C-243/08).

6. Pour déclarer irrecevable la demande de l'emprunteur tendant à déclarer abusives certaines clauses du contrat de prêt, l'arrêt retient que celle-ci est présentée pour la première fois en appel.

7. En statuant ainsi, alors qu'il résultait des éléments de fait et de droit débattus devant elle que, selon le contrat litigieux, toute dépréciation de l'euro par rapport au franc suisse avait pour conséquence d'augmenter le montant du capital restant dû et, ainsi, la durée d'amortissement du prêt d'un délai maximal de cinq ans, de sorte qu'il lui incombait, à supposer que les stipulations litigieuses ne définissent pas l'objet principal du contrat ou, dans le cas contraire, qu'elle ne soit pas rédigée de façon claire et compréhensible, de rechercher d'office si la banque avait satisfait à son exigence de transparence à l'égard du consommateur en lui fournissant des informations suffisantes et exactes lui permettant d'évaluer le risque des conséquences économiques négatives, potentiellement significatives, de telles clauses sur ses obligations financières pendant toute la durée du contrat dans l'hypothèse d'une dépréciation importante de la monnaie dans laquelle il percevait ses revenus par rapport à la monnaie de compte et qu'il avait été averti du contexte économique susceptible d'avoir des répercussions sur la variations des taux de change, et si, en conséquence, ladite clause n'avait pas pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, au détriment du consommateur, la cour d'appel a violé les textes susvisés. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR DE CASSATION

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 20 AVRIL 2022

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

N° de pourvoi : D 20-16.942. Arrêt n° 356 F-D.

DEMANDEUR à la cassation : Madame X.

DÉFENDEUR à la cassation : Société BNP Paribas Personal Finance

M. CHAUVIN, président.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Mme X., domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° D 20-16.942 contre l'arrêt rendu le 3 décembre 2019 par la cour d'appel de Grenoble (1re chambre civile), dans le litige l'opposant à la société BNP Paribas Personal Finance, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire, les observations de Me Laurent Goldman, avocat de Mme X., de la SCP Spinosi, avocat de la société BNP Paribas Personal Finance, après débats en l'audience publique du 8 mars 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire rapporteur, M. Vigneau, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

 

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE                                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Faits et procédure :

1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 3 décembre 2019), par acte notarié du 9 avril 2009, la société BNP Paribas Personal Finance (la banque) a consenti à Mme X. (l'emprunteur) un crédit, dénommé Helvet immo, libellé en francs suisses, remboursable en euros et destiné à l'acquisition d'un appartement en état futur d'achèvement.

2. Invoquant un manquement de la banque à son devoir d'information et de mise en garde concernant les stipulations prévoyant une évolution de l'amortissement du capital en fonction des variations du taux de change, ainsi que l'irrégularité du taux effectif global, l'emprunteur a assigné la banque en responsabilité, en indemnisation et en annulation de la stipulation d'intérêts. En appel, il a demandé que les clauses du contrat de prêt relatives aux modalités de remboursement du crédit et aux conséquences des variations du taux de change, ainsi que celles relatives au calcul du taux effectif global, soient réputées non écrites en raison de leur caractère abusif.

 

Examen du moyen :

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Enoncé du moyen :

3. L'emprunteur fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable sa demande relative aux clauses abusives, alors « que le juge national est tenu d'examiner d'office le caractère abusif d'une clause contractuelle dès qu'il dispose des éléments de droit et de fait nécessaires à cet effet et que, lorsqu'il considère une telle clause comme étant abusive, il ne l'applique pas, sauf si le consommateur s'y oppose ; que bien qu'il résultait des éléments de fait et de droit débattus devant elle que, selon le contrat litigieux, les mensualités étaient susceptibles d'augmenter, sans plafond, lors des cinq dernières années, la cour d'appel qui, nonobstant le caractère nouveau en appel de la demande, s'est abstenue de rechercher d'office, notamment, si le risque de change ne pesait pas exclusivement sur les emprunteurs et si, en conséquence, la clause litigieuse n'avait pas pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, au détriment des consommateurs, a violé l'article L. 132-1, devenu L. 212-1 et L. 241-1, du code de la consommation. »

 

RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN                                    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Réponse de la Cour :

 

VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée)                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa version antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 :

 

CHAPEAU (énoncé du principe juridique en cause)                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

4. Il résulte de ces textes que, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives et réputées non écrites les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

5. La Cour de justice des Communautés européennes a dit pour droit que le juge national est tenu d'examiner d'office le caractère abusif d'une clause contractuelle dès qu'il dispose des éléments de droit et de fait nécessaires. Lorsqu'il considère qu'une telle clause est abusive, il ne l'applique pas, sauf si le consommateur s'y oppose (CJCE, arrêt du 4 juin 2009, C-243/08).

 

RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

6. Pour déclarer irrecevable la demande de l'emprunteur tendant à déclarer abusives certaines clauses du contrat de prêt, l'arrêt retient que celle-ci est présentée pour la première fois en appel.

 

CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION                                                        (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

7. En statuant ainsi, alors qu'il résultait des éléments de fait et de droit débattus devant elle que, selon le contrat litigieux, toute dépréciation de l'euro par rapport au franc suisse avait pour conséquence d'augmenter le montant du capital restant dû et, ainsi, la durée d'amortissement du prêt d'un délai maximal de cinq ans, de sorte qu'il lui incombait, à supposer que les stipulations litigieuses ne définissent pas l'objet principal du contrat ou, dans le cas contraire, qu'elle ne soit pas rédigée de façon claire et compréhensible, de rechercher d'office si la banque avait satisfait à son exigence de transparence à l'égard du consommateur en lui fournissant des informations suffisantes et exactes lui permettant d'évaluer le risque des conséquences économiques négatives, potentiellement significatives, de telles clauses sur ses obligations financières pendant toute la durée du contrat dans l'hypothèse d'une dépréciation importante de la monnaie dans laquelle il percevait ses revenus par rapport à la monnaie de compte et qu'il avait été averti du contexte économique susceptible d'avoir des répercussions sur la variations des taux de change, et si, en conséquence, ladite clause n'avait pas pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, au détriment du consommateur, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                              (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare Mme X. irrecevable en sa demande relative aux clauses abusives, l'arrêt rendu le 3 décembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ;

Remet, sur ce point ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;

Condamne la société BNP Paribas Personal Finance aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société BNP Paribas Personal Finance et la condamne à payer à Mme X. la somme de 3.000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt avril deux mille vingt-deux.

 

 

ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Moyen produit par Maître Laurent Goldman, avocat aux Conseils, pour Mme X..

 

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Mme X. fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable sa demande relative aux clauses abusives ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

ALORS QUE le juge national est tenu d'examiner d'office le caractère abusif d'une clause contractuelle dès qu'il dispose des éléments de droit et de fait nécessaires à cet effet et que, lorsqu'il considère une telle clause comme étant abusive, il ne l'applique pas, sauf si le consommateur s'y oppose ; que bien qu'il résultait des éléments de fait et de droit débattus devant elle que, selon le contrat litigieux, les mensualités étaient susceptibles d'augmenter, sans plafond, lors des cinq dernières années, la cour d'appel qui, nonobstant le caractère nouveau en appel de la demande, s'est abstenue de rechercher d'office, notamment, si le risque de change ne pesait pas exclusivement sur les emprunteurs et si, en conséquence, la clause litigieuse n'avait pas pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, au détriment des consommateurs, a violé l'article L. 132-1, devenu L. 212-1 et L. 241-1, du code de la consommation.