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CA BOURGES (1re ch.), 29 septembre 2022

Nature : Décision
Titre : CA BOURGES (1re ch.), 29 septembre 2022
Pays : France
Juridiction : Bourges (CA), ch. civ.
Demande : 21/01089
Décision : 22/474
Date : 29/09/2022
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 4/10/2021
Numéro de la décision : 474
Référence bibliographique : 5854 (consommateur personne physique), 5889 (art. L. 221-3), 6389 (droit commun, lisibilité des conditions générales), 7307 (dol juridique)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 9847

CA BOURGES (1re ch.), 29 septembre 2022 : RG n° 21/01089 ; arrêt n° 474

Publication : Judilibre

 

Extraits : 1/ « En l'espèce, le bon de commande litigieux a été signé par Maître Y., mais pour le compte de la SCP X. et Y., personne morale partie au contrat, de sorte que ledit contrat ne saurait être considéré comme un contrat de consommation entre un professionnel et un consommateur, au sens de l'article liminaire du code de la consommation. […]

Les dispositions applicables aux contrats conclus hors établissement pourraient ainsi trouver à s'appliquer au cas d'espèce à la double condition que l'objet du contrat n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité (en l'occurrence, la SCP X. et Y.) et que celle-ci n'emploie que cinq salariés ou moins.

Or la SCP X. et Y. employait au moment de la conclusion du contrat six salariés (le septième n'ayant été embauché qu'en 2020, cf. pièce appelante n°21). Il en résulte que les intimés ne peuvent réclamer l'application de l'extension de protection prévue à l'article L. 221-3 précité. »

2/ « M. X. et M. Y. affirment que ce dernier n'aurait jamais accepté de signer un bon de commande pour remplacer l'installation téléphonique de l'Etude s'il avait été informé de la nécessaire poursuite des relations contractuelles avec la société Locam.

Toutefois, il n'est tout d'abord pas rapporté la preuve du conseil qu'aurait donné à la SCP X. et Y. le commercial de la SAS Dactyl Buro Infogérance selon lequel elle pourrait résilier sans frais le contrat la liant à la société Locam.

M. X. et M. Y., sur qui repose la charge de la preuve du dol qu'ils allèguent, ne démontrent pas davantage le caractère déterminant qu'aurait eu à leurs yeux la possibilité de résilier immédiatement et sans frais leur engagement envers la société Locam.

De plus, la SCP X. et Y., titulaire d'un office notarial et composée de notaires disposant par nature de compétences juridiques aiguisées leur permettant notamment de rédiger des contrats complexes au bénéfice de leurs clients, ne saurait sérieusement prétendre avoir sollicité les conseils d'une société commerciale quant à la portée de ses engagements contractuels antérieurs avec une société tierce, ni a fortiori avoir suivi de tels conseils sans en vérifier la pertinence.

Il peut à titre surabondant être observé, malgré le caractère quasiment illisible du contrat Locam, que les dispositions relatives à la reconduction du contrat prévoient la faculté de dénoncer celui-ci trois mois avant l'expiration de chaque terme annuel. La date de celui-ci étant fixée au 4 avril, les membres d'un office notarial ne pouvaient estimer valable une dénonciation émise le 31 janvier, quelles qu'aient pu être les éventuelles assurances données sur ce point par l'agent commercial d'une société ayant intérêt à leur faire souscrire un engagement envers elle.

Il est particulièrement invraisemblable de soutenir que la SAS Dactyl Buro Infogérance ait parfaitement su que le contrat Locam se poursuivrait tandis que M. X. et M. Y. auraient ignoré cet état de fait, étant rappelé que les compétences juridiques de ces derniers sont sans commune mesure avec celles qui peuvent être attendues du représentant d'une société commerciale, fût-il professionnellement accoutumé au type d'opérations en cause. »

 

COUR D’APPEL DE BOURGES

CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 29 SEPTEMBRE 2022

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 21/01089. Arrêt n° 474. N° Portalis DBVD-V-B7F-DMRS. Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal Judiciaire de BOURGES en date du 29 juillet 2021.

 

PARTIES EN CAUSE :

I - SAS DACTYL BURO INFOGERANCE

agissant poursuites et diligences de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège social : [Adresse 3], [Localité 1], N° SIRET : XXX, Représentée par la SCP AVOCATS BUSINESS CONSEILS, avocat au barreau de BOURGES, timbre fiscal acquitté, APPELANTE suivant déclaration du 4 octobre 2021

 

II - Maître X.

né le [date] à [Localité 7] ([Localité 7]), [Adresse 4], [Localité 2]

- M. Y.

né le [date] à [Localité 8] ([Localité 8]), [Adresse 5], [Localité 6]

Représentés par Maître Emmanuelle MILET, avocat au barreau de BOURGES, timbre fiscal acquitté, INTIMÉS

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 juin 2022 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. PERINETTI, Conseiller chargé du rapport.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : M. WAGUETTE, Président de Chambre, M. PERINETTI, Conseiller, Mme CIABRINI, Conseiller.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme GUILLERAULT

ARRÊT : CONTRADICTOIRE ; Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ :

Le 31 janvier 2019, Maître Y., notaire associé représentant la SCP X. et Y., titulaire d'un office notarial à [Localité 9], a signé un bon de commande intitulé « Remplacement installation téléphonique » pour l'achat auprès de la SAS Dactyl Buro Infogérance d'un matériel de téléphonie IPBX de marque NS 700 Panasonic, au prix de 188 euros HT. Ce document mentionnait en outre un loyer trimestriel de 287 euros HT.

Par courriel du 7 février 2019, la SAS Dactyl Buro Infogérance a accusé réception de la commande.

Par courrier recommandé avec avis de réception en date du 19 février 2019, M. Y. a informé la SAS Dactyl Buro Infogérance de son souhait de résilier la commande.

Suivant acte d'huissier en date du 15 octobre 2019, la SAS Dactyl Buro Infogérance a fait assigner M. X. et M. Y. devant le Tribunal judiciaire de Bourges aux fins de voir,

- Recevoir la SAS Dactyl Buro Infogérance en son instance et ses demandes ;

- Constater la fraude commise par Maîtres X. et Y., notaires associés, et faire application des dispositions de l'article 32-1 du Code de Procédure Civile ;

- Débouter Maîtres X. et Y., notaires associés de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;

- Condamner conjointement et solidairement Maîtres X. et Y., notaires associés,

* à s'exécuter en prenant livraison du matériel et des prestations convenues sous astreinte de 500 € par jour de retard passé un délai de 8 jours, sur le fondement de l'article L. 131-1 du code des procédures civiles d'exécution ;

* à payer à la SAS Dactyl Buro Infogérance le prix convenu pour l'exécution du contrat, soit la somme de 6.451,56 euros ;

* à payer à la SAS Dactyl Buro Infogérance la somme de 1.000 € à titre de dommages intérêts pour résistance abusive ;

- Ordonner la capitalisation des intérêts échus annuellement, en application des dispositions de l'article 1154 du Code Civil ;

- Assortir la décision à intervenir du bénéfice de l'exécution provisoire en application des dispositions de I'article 515 du code de procédure civile ;

- Condamner conjointement et solidairement Maîtres X. et Y., notaires associés à la SAS Dactyl Buro Infogérance la somme de 5.000 € en application de l'article 700 du CPC, ainsi que les entiers dépens ;

- Dire et juger, en application des dispositions de l'article L. 141-6 du Code de la Consommation, que la partie succombante supportera la charge de l'intégralité des droits proportionnels de recouvrement et d'encaissement prévus aux articles L. 111-8 et L. 124-1 du code des procédures civiles d'exécution.

[*]

En réplique, M. X. et M. Y. ont demandé au Tribunal de :

- Déclarer irrecevables et subsidiairement mal fondées les demandes de la SAS Dactyl Buro Infogérance ;

En conséquence,

- Débouter la SAS Dactyl Buro Infogérance de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- Condamner la SAS Dactyl Buro Infogérance au paiement de la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- Condamner la SAS Dactyl Buro Infogérance aux dépens.

[*]

Par jugement contradictoire du 29 juillet 2021, le Tribunal judiciaire de Bourges a :

- dit que l'action de la SAS Dactyl Buro Infogérance était recevable ;

- débouté la SAS Dactyl Buro Infogérance de l'intégralité de ses demandes ;

- condamné la SAS Dactyl Buro Infogérance à payer à M. X. et M. Y. la somme de 2.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la SAS Dactyl Buro Infogérance aux entiers dépens.

Le Tribunal a notamment retenu que la SAS Dactyl Buro Infogérance avait qualité à agir au vu des signatures portées au bon de commande, que les dispositions protectrices du code de la consommation étaient applicables au contrat litigieux, et que l'office notarial disposait de ce fait du droit de se rétracter dans les 14 jours à compter de la conclusion du contrat.

La SAS Dactyl Buro Infogérance a interjeté appel de cette décision par déclaration en date du 4 octobre 2021.

[*]

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 12 avril 2022, auxquelles il conviendra de se reporter pour un exposé détaillé et exhaustif des prétentions et moyens qu'elle développe, la SAS Dactyl Buro Infogérance demande à la Cour de :

- Recevoir la SAS Dactyl Buro Infogérance en son appel à l'encontre du jugement rendu le 29 juillet 2021 par le Tribunal Judiciaire de BOURGES,

- Constater que le Tribunal a méconnu l'application de la loi et particulièrement l'article 16 alinéa 3 du Code de Procédure Civile ainsi que les dispositions des articles 1358, 1361 et 1362 du Code Civil ;

Vu les dispositions de l'article L. 221-1-1-2 a du Code de la Consommation :

- Constater que le contrat souscrit le 31 janvier 2019 l'a été à l'initiative de Maîtres X. et Y., notaires associés ;

- Dire en conséquence ne pas y avoir lieu à appliquer le régime des contrats hors établissements ;

Vu les dispositions de l'article L 221-3 du Code de la Consommation :

- constater que le contrat entre dans le champ d'activité de Maîtres X. et Y., notaires associés et exclure en conséquence le bénéfice du droit de rétractation ;

- constater que Maîtres X. et Y., notaires associés ne sont pas dans la situation de vulnérabilité protégée par le Code de la Consommation et exclure en conséquence le bénéfice du droit de rétractation ;

- Vu l'article L. 222-7 du Code de la Consommation, constater que s'agissant d'un contrat du 31 janvier 2019, le délai de rétractation de quatorze jours était dépassé le 20 février 2019.

En conséquence, réformer le jugement et :

- Condamner conjointement et solidairement Maîtres X. et Y., notaires associés :

* à payer à la SAS Dactyl Buro Infogérance le prix convenu pour l'exécution du contrat, soit la somme de 6.451.56 € ;

* à payer à la SAS Dactyl Buro Infogérance la somme de 5.000 € à titre de dommages-intérêts ;

- Ordonner la capitalisation des intérêts échus annuellement en application des dispositions de l'article 1154 du Code Civil ;

- Assortir la décision à intervenir du bénéfice de l'exécution provisoire en application des dispositions de l'article 515 du Code de Procédure civile ;

- Constater la fraude commise par Maîtres X. et Y., notaires associés et faire application des dispositions de l'article 32-1 du Code de Procédure Civile ;

- Débouter Maîtres X. et Y., notaires associés de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;

- Condamner conjointement et solidairement Maîtres X. et Y., notaires associés à la SAS Dactyl Buro Infogérance la somme de 10.000 € en application de l'article 700 du CPC, ainsi que les entiers dépens.

- Dire et juger, en application des dispositions de l'article L. 141-6 du Code de la Consommation, que la partie succombante supportera la charge de l'intégralité des droits proportionnels de recouvrement et d'encaissement prévus aux articles L. 111-8 et L. 124-1 du Code des Procédures Civiles d'Exécution.

[*]

Dans leurs dernières conclusions notifiées le 25 février 2022, auxquelles il conviendra de se reporter pour un exposé détaillé et exhaustif des prétentions et moyens qu'ils développent, M. X. et M. Y. demandent à la Cour de :

Constater que Maîtres X. et Y. ont régulièrement exercé leur droit de rétractation.

- A titre subsidiaire, déclarer nul et de nul effet le bon de commande du 31 janvier 2019.

Ce faisant,

- Confirmer le jugement dans son intégralité.

En conséquence,

- Débouter la SAS Dactyl Buro Infogérance de l'intégralité de ses demandes.

- Condamner la SAS Dactyl Buro Infogérance à payer à Maîtres X. et Y. la somme de 2.500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

- Condamner la SAS Dactyl Buro Infogérance aux entiers dépens.

Y ajoutant :

- Condamner la SAS Dactyl Buro Infogérance au paiement de la somme de 4.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Condamner la SAS Dactyl Buro Infogérance aux dépens.

[*]

L'ordonnance de clôture a été rendue le 24 mai 2022.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

A titre liminaire, il convient de rappeler que les demandes tendant simplement à voir « dire et juger », « rappeler » ou « constater » ne constituent pas des demandes en justice visant à ce qu'il soit tranché un point litigieux mais des moyens, de sorte que la cour n'y répondra pas dans le dispositif du présent arrêt. Il en va de même de la demande de « donner acte », qui est dépourvue de toute portée juridique et ne constitue pas une demande en justice.

 

Sur le droit de rétractation invoqué par M. X. et M. Y. :

L'article liminaire du Code de la consommation prévoit que pour l'application dudit code, on entend par consommateur, toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole et par non-professionnel, toute personne morale qui n'agit pas à des fins professionnelles.

L'article L. 221-1, I, du même code dispose que pour l'application du présent titre, sont considérés comme :

1° Contrat à distance : tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur, dans le cadre d'un système organisé de vente ou de prestation de services à distance, sans la présence physique simultanée du professionnel et du consommateur, par le recours exclusif à une ou plusieurs techniques de communication à distance jusqu'à la conclusion du contrat ;

2° Contrat hors établissement : tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur :

a) Dans un lieu qui n'est pas celui où le professionnel exerce son activité en permanence ou de manière habituelle, en la présence physique simultanée des parties, y compris à la suite d'une sollicitation ou d'une offre faite par le consommateur [...].

L'article L. 221-3 du même code énonce que les dispositions des sections 2, 3, 6 du présent chapitre applicables aux relations entre consommateurs et professionnels, sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq.

En l'espèce, le bon de commande litigieux a été signé par Maître Y., mais pour le compte de la SCP X. et Y., personne morale partie au contrat, de sorte que ledit contrat ne saurait être considéré comme un contrat de consommation entre un professionnel et un consommateur, au sens de l'article liminaire du code de la consommation.

Il doit ensuite être relevé qu'aucune pièce versée aux débats n'établit que la SCP X. et Y. se soit trouvée à l'initiative de la convention passée entre les parties. Le bon de commande a été signé le même jour à [Localité 1] par la SAS Dactyl Buro Infogérance, et à [Localité 9] par le représentant de la SCP X. et Y. En outre, les propres écritures de la SAS Dactyl Buro Infogérance communiquées en première instance faisaient état d'une proposition établie par ses soins à l'issue d'une négociation et acceptée par M. X. et M. Y., sans imputer à ceux-ci ni à la SCP X. et Y. l'initiative du remplacement de l'installation téléphonique.

Les dispositions applicables aux contrats conclus hors établissement pourraient ainsi trouver à s'appliquer au cas d'espèce à la double condition que l'objet du contrat n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité (en l'occurrence, la SCP X. et Y.) et que celle-ci n'emploie que cinq salariés ou moins.

Or la SCP X. et Y. employait au moment de la conclusion du contrat six salariés (le septième n'ayant été embauché qu'en 2020, cf. pièce appelante n° 21). Il en résulte que les intimés ne peuvent réclamer l'application de l'extension de protection prévue à l'article L. 221-3 précité.

Le droit de rétractation prévu à l'article L. 221-18 du Code de la consommation, applicable seulement aux consommateurs ou aux professionnels répondant aux conditions d'application de l'article L. 221-3 du même code, ne peut donc pas davantage être valablement invoqué par les intimés.

La faculté de rétractation alléguée ne saurait davantage trouver son fondement dans les stipulations contractuelles liant les parties, dans la mesure où le bon de commande renvoie directement aux conditions générales de vente de la SAS Dactyl Buro, dont l'opposabilité n'est pas contestée et qui prévoient en leur article 22 que la rétractation n'est possible que pour les cas où les dispositions des articles L. 221-2 et L. 221-3 du Code de la consommation sont applicables. Les mêmes conditions générales de vente indiquent, en leur article 9, que le client ne peut annuler de commande sans avoir obtenu l'accord écrit de la SAS Dactyl Buro Infogérance à cette fin.

M. X. et M. Y. ne peuvent ainsi se prévaloir d'aucun droit de rétractation, que ce soit sur le fondement légal ou conventionnel.

 

Sur la validité du contrat :

Selon l'article 1131 du Code civil, les vices du consentement sont une cause de nullité relative du contrat.

Aux termes de l'article 1137 du même code, le dol est le fait pour un contractant d'obtenir le consentement de l'autre par des manœuvres ou des mensonges.

Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l'un des contractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre partie.

Néanmoins, ne constitue pas un dol le fait pour une partie de ne pas révéler à son cocontractant son estimation de la valeur de la prestation.

L'article 1139 du même code précise que l'erreur qui résulte d'un dol est toujours excusable ; elle est une cause de nullité alors même qu'elle porterait sur la valeur de la prestation ou sur un simple motif du contrat.

En l'espèce, M. X. et M. Y. soutiennent avoir été victimes d'un dol justifiant l'annulation du contrat de la part de la SAS Dactyl Buro Infogérance.

Ils affirment ainsi que le représentant de la SAS Dactyl Buro aurait indiqué à M. Y. que le contrat liant la SCP X. et Y. à la société Locam pourrait être résilié sans frais et lui aurait fait envoyer à cette société une lettre de résiliation, le 31 janvier 2019.

Par courrier daté du 15 février 2019, la société Locam a indiqué à la SCP X. et Y. qu'en vertu des dispositions contractuelles les liant, la résiliation souhaitée ne pourrait intervenir qu'au 10 avril 2020, après paiement des loyers jusqu'à cette date et restitution du matériel.

M. X. et M. Y. affirment que ce dernier n'aurait jamais accepté de signer un bon de commande pour remplacer l'installation téléphonique de l'Etude s'il avait été informé de la nécessaire poursuite des relations contractuelles avec la société Locam.

Toutefois, il n'est tout d'abord pas rapporté la preuve du conseil qu'aurait donné à la SCP X. et Y. le commercial de la SAS Dactyl Buro Infogérance selon lequel elle pourrait résilier sans frais le contrat la liant à la société Locam.

M. X. et M. Y., sur qui repose la charge de la preuve du dol qu'ils allèguent, ne démontrent pas davantage le caractère déterminant qu'aurait eu à leurs yeux la possibilité de résilier immédiatement et sans frais leur engagement envers la société Locam.

De plus, la SCP X. et Y., titulaire d'un office notarial et composée de notaires disposant par nature de compétences juridiques aiguisées leur permettant notamment de rédiger des contrats complexes au bénéfice de leurs clients, ne saurait sérieusement prétendre avoir sollicité les conseils d'une société commerciale quant à la portée de ses engagements contractuels antérieurs avec une société tierce, ni a fortiori avoir suivi de tels conseils sans en vérifier la pertinence.

Il peut à titre surabondant être observé, malgré le caractère quasiment illisible du contrat Locam, que les dispositions relatives à la reconduction du contrat prévoient la faculté de dénoncer celui-ci trois mois avant l'expiration de chaque terme annuel. La date de celui-ci étant fixée au 4 avril, les membres d'un office notarial ne pouvaient estimer valable une dénonciation émise le 31 janvier, quelles qu'aient pu être les éventuelles assurances données sur ce point par l'agent commercial d'une société ayant intérêt à leur faire souscrire un engagement envers elle.

Il est particulièrement invraisemblable de soutenir que la SAS Dactyl Buro Infogérance ait parfaitement su que le contrat Locam se poursuivrait tandis que M. X. et M. Y. auraient ignoré cet état de fait, étant rappelé que les compétences juridiques de ces derniers sont sans commune mesure avec celles qui peuvent être attendues du représentant d'une société commerciale, fût-il professionnellement accoutumé au type d'opérations en cause.

Il n'est pas davantage démontré, au regard des mêmes observations, que le représentant de la SAS Dactyl Buro Infogérance ait indiqué à M. Y. « comment rédiger sa lettre » destinée à la société Locam. Le simple agrafage de la carte de visite de M. [V], agent commercial de la SAS Dactyl Buro Infogérance, audit document est inopérant sur ce point.

En considération de l'ensemble de ces éléments, il convient de rejeter la demande d'annulation du contrat litigieux présentée par M. X. et M. Y.

Concernant l'indemnité réclamée par la SAS Dactyl Buro Infogérance au titre de l'annulation indue de la commande, il y a lieu de se reporter à l'article 9, alinéa 2 des conditions générales de vente qui prévoient qu'au cas où aucun acompte n'aurait été versé par le client qui annulerait une commande, la SAS Dactyl Buro Infogérance se réserve le droit de réclamer le paiement d'une indemnité d'un montant égal à 30 % du montant TTC de la commande, sans préjudice du remboursement de l'intégralité des frais par elle engagés.

La SAS Dactyl Buro Infogérance ne réclame plus, dans le cadre de la présente instance, l'exécution forcée du contrat, n'offrant notamment pas elle-même d'exécuter les obligations lui incombant en vertu du contrat litigieux, contrairement aux demandes présentées au premier juge.

Il sera en conséquence fait application des stipulations contractuelles précitées pour condamner solidairement M. X. et M. Y. à payer à la SAS Dactyl Buro Infogérance la somme de 1.935,47 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 15 octobre 2019.

La capitalisation annuelle des intérêts sera ordonnée, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil.

 

Sur la demande indemnitaire présentée par la SAS Dactyl Buro Infogérance pour tentative d'escroquerie au jugement :

Aux termes de l'article 32-1 du code de procédure civile, celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10.000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés.

Il est constant que le droit d'agir ou de se défendre en justice ne dégénère en abus pouvant donner lieu à indemnisation que dans le cas de malice, mauvaise foi ou erreur grossière équipollente au dol.

La SAS Dactyl Buro Infogérance vise expressément ce texte pour appuyer sa demande indemnitaire fondée sur une tentative d'escroquerie au jugement qu'elle impute à M. X. et M. Y. dont « l'attitude » dans le cadre de la présente instance constituerait une tentative d'intimidation. Cette attitude condamnable, à lire les écritures de la SAS Dactyl Buro Infogérance, serait caractérisée par la demande subsidiaire présentée par M. X. et M. Y. sur le fondement du dol, soutenue par ce que l'appelante estime être « un faux grossier », à savoir la lettre de résiliation adressée par la SCP X. et Y. à la société Locam à laquelle a été agrafée la carte de visite de M. V.

Il ne peut qu'être observé, tout d'abord, que M. X. et M. Y. n'affirment nullement que ce courrier aurait émané de la SAS Dactyl Buro Infogérance ou de son représentant, et assurent au contraire expressément que ce courrier a bien été rédigé par l'office notarial, ainsi qu'en témoigne au demeurant son en-tête.

Par ailleurs, l'imputation par M. X. et M. Y. à la SAS Dactyl Buro Infogérance d'un dol ne caractérise pas en soi de comportement fautif de leur part. Il ne peut davantage être imputé à M. X. et M. Y. d'abus de leur droit de se défendre en justice dans le cadre d'une instance initiée par l'appelante elle-même, qui les a vus opposer de simples moyens sans que leur appréciation inexacte des droits respectifs des parties en présence puisse leur être reprochés.

La demande indemnitaire présentée à ce titre par la SAS Dactyl Buro Infogérance sera en conséquence rejetée, de même que sa demande tendant à « faire application des dispositions de l'article 32-1 du code de procédure civile », formule elliptique dont il ne peut qu'être supposé, à défaut de toute précision de l'appelante, qu'elle recouvre une demande de condamnation à une amende civile qu'il n'y a pas lieu de prononcer en l'espèce à l'encontre de M. X. et M. Y.

 

Sur l'article 700 et les dépens :

L'équité et la prise en considération de l'issue du litige commandent de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et de condamner M. X. et M. Y., qui succombent en l'essentiel de leurs prétentions, à verser à la SAS Dactyl Buro Infogérance la somme de 2.000 euros au titre des frais exposés en première instance et en cause d'appel qui ne seraient pas compris dans les dépens.

Aux termes de l'article 696 du Code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge de l'autre partie. M. X. et M. Y., parties succombantes, seront condamnés à supporter les dépens de première instance et d'appel.

Le jugement entrepris sera infirmé de ces chefs.

Il n'y a enfin pas lieu de dire qu'à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par la présente décision, le montant des sommes retenues par l'huissier au titre de son exécution forcée devra être supporté par M. X. et M. Y. En effet cette demande, s'inscrivant dans l'hypothèse où les intimés ne régleraient pas spontanément les sommes dues et où la SAS Dactyl Buro Infogérance serait contrainte de recourir à des procédures d'exécution forcée, ne procède pas d'un intérêt né et actuel qui la rendrait recevable et relèvera, le cas échéant, du juge de l'exécution susceptible d'être saisi de telles difficultés. Elle sera donc écartée par application des dispositions de l'article 31 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

INFIRME le jugement rendu le 29 juillet 2021 par le Tribunal judiciaire de Bourges en l'intégralité de ses dispositions ;

Et statuant de nouveau,

DÉBOUTE M. X. et M. Y. de leur demande d'annulation du contrat litigieux ;

CONDAMNE solidairement M. X. et M. Y. à payer à la SAS Dactyl Buro Infogérance la somme de 1.935,47 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 15 octobre 2019 ;

ORDONNE la capitalisation annuelle des intérêts ;

DÉBOUTE la SAS Dactyl Buro Infogérance de ses demandes indemnitaire et de condamnation à paiement d'une amende civile fondées sur l'article 32-1 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE la SAS Dactyl Buro Infogérance de sa demande tendant à voir condamner M. X. et M. Y. à supporter les frais d'exécution forcée de la présente décision ;

CONDAMNE in solidum M. X. et M. Y. à verser à la SAS Dactyl Buro Infogérance la somme de 2.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

REJETTE toutes autres demandes, plus amples ou contraires ;

CONDAMNE in solidum M. X. et M. Y. aux entiers dépens de première instance et d'appel.

L'arrêt a été signé par M. WAGUETTE, Président et par Mme MAGIS, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,                               LE PRÉSIDENT,

S. MAGIS                                         L. WAGUETTE