5854 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de non professionnel - Présentation générale et évolution des textes
- 5848 - Code de la consommation - Domaine d’application - Personne soumise à la protection - Notion de professionnel - Principes
- 5850 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de consommateur - Particulier personne physique - Principes
- 5855 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de non professionnel - Droit postérieur à l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016
- 5856 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de non professionnel - Droit postérieur à la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014
- 5857 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de non professionnel - Personnes morales (avant la loi du 17 mars 2014) - Clauses abusives - Présentation générale
- 5858 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de non professionnel - Personnes morales (avant la loi du 17 mars 2014) - Clauses abusives - Exclusion explicite
- 5859 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de non professionnel - Personnes morales (avant la loi du 17 mars 2014) - Clauses abusives - Protection explicite
- 5860 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de non professionnel - Personnes morales (avant la loi du 17 mars 2014) - Clauses abusives - Protection implicite
- 5861 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de non professionnel - Personnes morales (avant la loi du 17 mars 2014) - Démarchage à domicile
- 5862 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de non professionnel - Personnes morales (avant la loi du 17 mars 2014) - Autres textes
- 5863 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Principes - Présentation générale
- 5864 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Principes - Droit postérieur à l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016
- 5889 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Contrats conclus hors établissement ou à distance (après la loi du 17 mars 2014 - art. L. 221-3 C. consom.)
- 6723 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Syndic de copropriété (1) - Présentation générale et formation du contrat
- 6979 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de non professionnel - Droit postérieur à la loi n° 2017-203 du 21 février 2017
CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 5854 (11 octobre 2022)
PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION
DOMAINE D’APPLICATION - PERSONNES BÉNÉFICIAIRES DE LA PROTECTION
NOTION DE NON PROFESSIONNEL - PRÉSENTATION GÉNÉRALE ET ÉVOLUTION DES TEXTES
Première période : loi du 10 janvier 1978 et ancien art. L. 132-1 C. consom. avant le premier janvier 1995. Dès la rédaction initiale de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978, rapidement confortée par celle du décret du 24 mars 1978, la protection contre les clauses abusives a été accordée non seulement aux consommateurs, mais aussi aux « non-professionnels ». La solution a été maintenue lors de la codification de l’art. 35 de cette loi dans l’ancien art. L. 132-1 C. consom.
Même si la notion de non-professionnel n’a jamais été définie par les textes, la jurisprudence a fini par considérer qu’elle pouvait recouvrir deux catégories de contractants : d’une part, les personnes morales sans véritable activité professionnelle, d’autre part certains contrats conclus par des professionnels, personne physique ou morale, dès lors que la convention ne concernait pas leur cœur d’activité et de compétence, les critères utilisés pour apprécier ce lien ayant varié (compétence, besoins de l’activité, rapport direct avec l’activité, etc.).
Seconde période : directive du 5 avril 1993 - loi du 1er février 1995 avant la loi du 17 mars 2014. La directive 93/13/CEE du 5 avril 1993, dont l’introduction était prévue au plus tard au premier janvier 1995, a changé les données du problème. Ce texte définissait le consommateur comme « toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité professionnelle ». Directive 93/13/CEE : Cerclab n° 3854 (art. 2, b). § V. pour une confirmation : la notion de consommateur, telle que définie dans la directive 93/13/CEE concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, doit être interprétée en ce sens qu’elle vise exclusivement les personnes physiques. CJCE (3e ch.), 22 novembre 2001, Cape Snc / Idealservice : aff. C-541/99 et C-542/99 ; Cerclab n° 4377 ; JCP 2002. II. 10047, note Paisant ; D. 2002. AJ. 90, note Rondey ; Petites affiches 22 mai 2002, note Nourissat. § Cette conception s’est généralisée en droit de l’Union européenne. V. par exemple la directive n° 2011/83/UE du Parlement européen et du 25 octobre 2011, dont l’art. 2 dispose : « Définitions - Aux fins de la présente directive, on entend par : « consommateur », toute personne physique qui, dans les contrats relevant de la présente directive, agit à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale ».
Compte tenu de ce texte, il convenait dès lors de trancher le point de savoir si la protection pouvait continuer à être appliquée dans les deux hypothèses précitées. Le législateur français, s’appuyant implicitement sur le fait que la directive ne visait qu’à accorder une protection minimale et qu’un accroissement de la protection n’était pas interdit (V. Cerclab n° 5804), a maintenu dans la loi du 1er février 1995 introduisant la directive la formule antérieurement employée. Il en est résulté deux conséquences :
1/ Le principe d’une protection des personnes morales a été conservé. La Cour de cassation l’a notamment affirmé clairement, dans un arrêt explicitant la différence entre le consommateur et le non-professionnel : si, par arrêt du 22 novembre 2001, la cour de Justice des communautés européennes a dit pour droit : « la notion de consommateur, telle que définie à l’art. 2, sous b), de la directive n° 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, doit être interprétée en ce sens qu’elle vise exclusivement des personnes physiques », la notion distincte de non-professionnel, utilisée par le législateur français, n’exclut pas les personnes morales de la protection contre les clauses abusives. Cass. civ. 1re, 15 mars 2005 : pourvoi n° 02-13285 ; Bull. civ. I, n° 135 ; R., p. 353 ; Cerclab n° 1990 ; D. 2005. 1948, note Boujeka ; ibid. AJ. 887, obs. Rondey ; ibid. Pan. 2840, obs. Amrani Mekki ; JCP 2005. II. 10114, note Paisant ; JCP E 2005. 769, note Bakouche ; Defrénois 2005. 2009, obs. Savaux ; Contr. conc. consom. 2005, n° 100, note Raymond ; LPA 12 mai 2005, note Bert ; RDC 2005. 740, obs. Fenouillet (arrêt réservant la vérification du caractère professionnel du contrat), pourvoi contre CA Paris (15e ch., sect. A), 15 janvier 2002 : Dnd.
Cette position a été globalement partagée par les juges du fond (Cerclab n° 5859 et n° 5860), même si un courant minoritaire contraire a toujours persisté (Cerclab n° 5858) et même si la Cour de cassation en a réduit la portée en excluant systématiquement les sociétés commerciales (Cerclab n° 5858).
2/ Certains contrats conclus entre professionnels, mais sans lien suffisant avec leur activité, ont pu continuer à bénéficier également de la protection contre les clauses abusives. Les hypothèses où la protection était effectivement accordée sont restées cependant minoritaires, en dépit du contentieux très abondant suscité par cette question (la jurisprudence n’appliquait pas, dans son immense majorité le critère très restrictif du cadre de l’activité, figurant dans la directive). Pour la présentation générale, V. (Cerclab n° 5863).
Troisième période : loi du 17 mars 2014 avant l’ordonnance du 14 mars 2016. La loi du 17 mars 2014 a pour la première fois donné une définition générale et unique du consommateur en ajoutant au Code de la consommation un article préliminaire disposant : « au sens du présent code, est considérée comme un consommateur toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale ».
La position adoptée aligne donc la définition du consommateur sur la définition européenne. Alors que, au moins jusqu’à l’arrêt de la Cour de cassation du 15 mars 2005 précité, il était possible d’avoir une conception assez floue des deux notions, la loi du 17 mars 2014 oblige à distinguer rigoureusement les deux situations. Il en résulte que tous les textes du Code de la consommation se contentant de mentionner le « consommateur » ne peuvent être invoqués que par des personnes physiques, agissant à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de leur activité professionnelle. Pour les personnes morales sans activité professionnelle ou les personnes physiques ou morales professionnelles, contractant sans lien suffisant avec leur activité, il est impératif que le texte mentionne précisément qu’il est applicable aux non-professionnels ou que la disposition consumériste soit explicitement étendue à certains professionnels, comme la loi du 17 mars 2014 l’a mentionné à l’ancien art. L. 121-16-1-III C. consom., devenu l’art. L. 221-3 C. consom. (Cerclab n° 5889).
Quatrième période : ordonnance du 14 mars 2016. L’ordonnance du 14 mars 2016 a une nouvelle fois modifié les données du problème. Si l’article liminaire conforte la définition étroite du consommateur donnée par l’article préliminaire de la loi du 17 mars 2014, le texte réduit considérablement la notion de non-professionnel, désormais définis comme « toute personne morale qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole ».
Il en résulte, d’une part, que la notion de non-professionnel ne peut plus concerner une personne physique (Cerclab n° 5855), et, d’autre part, que la protection des personnes physiques ou morales contractant à l’occasion de leur profession, sans lien direct avec leur activité, est sans doute supprimée (Cerclab n° 5864).
V. pour une application stricte : CA Bourges (1re ch.), 29 septembre 2022 : RG n° 21/01089 ; arrêt n° 474 ; Cerclab n° 9847 (matériel de téléphonie pour le compte d’une SCP de notaires, ce qui exclut la qualité de consommateur au sens de l’art. liminaire), sur appel de TJ Bourges, 29 juillet 2021 : Dnd.
Cinquième période : loi n° 2017-203 du 21 février 2017. L’art. 3 de la loi n° 2017-203 du 21 février 2017 ratifiant l’ordonnance du 14 mars 2016 a une nouvelle fois modifié la définition du non-professionnel : « toute personne morale qui n'agit pas à des fins professionnelles » (Cerclab n° 6979).