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TI CHERBOURG, 12 juillet 2007

Nature : Décision
Titre : TI CHERBOURG, 12 juillet 2007
Pays : France
Juridiction : Cherbourg (TI)
Date : 12/07/2007
Nature de la décision : Admission
Mode de publication : Lamyline
Date de la demande : 19/04/2007
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CERCLAB - DOCUMENT N° 996

TI CHERBOURG, 12 juillet 2007 : RG n° inconnu

Publication : Lamyline

 

Extrait : « Que l'article 8.1 des conditions particulières d'abonnement prévoit que la Société A. n'est soumis qu'à une obligation de moyens compte tenu de la nature de la technologie ADSL ; Que cette clause qui a pour effet de dégager la société A. de son obligation d'assurer l'accès au service promis alors qu'elle a contracté envers ses clients l'obligation de leur fournir la prestation promise laquelle constitue une obligation de résultat rendant l'opérateur présumé responsable de tout dysfonctionnement, crée un déséquilibre significatif au détriment des abonnés justifiant sa suppression sans que la société A. puisse invoquer les difficultés qu'elle rencontrerait du fait de tiers et les spécificités de sa prestation, étant relevé le caractère général de la clause qui ne précise pas les causes mêmes d'interruption de telle sorte que par cette clause la société A. s'exonère en définitive des conséquences de ses propres carences, étant encore relevé qu'est en cause non le fait de la connexion illimitée mais seulement le fait d'accéder au service promis en contrepartie du paiement d'une redevance ; Que la circonstance que le fournisseur d'accès ne soit qu'un maillon dans la chaîne des intervenants n'est pas de nature à influer sur la nature de l'obligation contractée par ce dernier envers l'usager, étant relevé que le fournisseur dispose toujours d'un recours contre ceux dont le comportement est la cause de l'inexécution par le fournisseur de sa propre obligation de résultat ;

Que la clause litigieuse doit s'analyser en une clause limitative de responsabilité ; Attendu que dès lors, en application de l'article L. 132-1 du Code de la consommation, cette clause doit être déclarée abusive et réputée non écrite ;

Que cependant, Monsieur X. ne rapporte pas la preuve du préjudice que lui a causé la clause déclarée abusive puisqu'elle ne l'a pas empêchée d'intenter une action en justice contre la société A pour voir engagée sa responsabilité ».

 

TRIBUNAL D’INSTANCE DE CHERBOURG

JUGEMENT DU 12 JUILLET 2007

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PRONONCÉ PAR MISE A DISPOSITION AU GREFFE DU TRIBUNAL D'INSTANCE DE CHERBOURG, le douze juillet deux mille sept, sous la Présidence de Madame Fabienne AVERTY, Juge auprès du Tribunal de Grande Instance de CHERBOURG, faisant fonction de Juge d'Instance, assistée de Madame Annick LEROUVILLOIS, Adjoint Administratif Principal assermenté, faisant fonction de Greffier ;

 

ENTRE :

Monsieur X.

technicien, né le [date] demeurant [adresse], DEMANDEUR, COMPARANT EN PERSONNE ; D'UNE PART

 

ET :

SOCIÉTÉ A.

dont le siège social est [ville], prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège. DÉFENDERESSE NON COMPARANTE, NI REPRÉSENTÉE (courrier du 4 juin 2007) d'AUTRE PART

 

EXPOSÉ DU LITIGE                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] Par acte d'huissier en date du 19 avril 2007, M. X. a fait assigner la société A. sur le fondement des articles 1134 et 1147 du Code civil et aux fins de la voir condamner au paiement des sommes suivantes sous le bénéfice de l'exécution provisoire :

- 370,22 euros au titre du remboursement des frais d'abonnement mensuel indûment prélevés,

- 54,10 euros au titre de la facturation des communications au service d'assistance téléphonique,

- 5.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi en 2000-2001 et 2004-2006,

- 2.000 euros en réparation du préjudice subi du fait des clauses reconnues abusives,

- 460 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Au soutien de ses prétentions lors de l'audience du 7 juin 2007, Monsieur X. fait valoir qu'en octobre 2000, il a souscrit une offre auprès d'A. pour un accès Internet en bas débit et qu'en raison de difficultés de connexion, il s'est trouvé dans l'obligation de solliciter la hot-ligne à plusieurs reprises au cours de l'année 2003 ; que le 26 août 2004, il a souscrit auprès du même fournisseur un abonnement ADSL (haut-débit) pour 39,90 euros par mois avant de réinstaller une connexion bas-débit compte tenu de l'impossibilité de se connecter en haut-débit. Les difficultés perdurant, il indique avoir résilié le contrat le 30 août 2006.

Il expose que l'opérateur ne peut s'exonérer de sa responsabilité qu'en apportant la preuve d'une mauvaise exécution du contrat imputable à son client puisqu'il est tenu d'une obligation de résultat. Il indique ainsi que la société A. n'a pu rapporter la preuve d'une telle faute puisqu'il a rigoureusement suivi toutes les indications fournies par l'opérateur. Il soulève le caractère abusif de la clause limitative de responsabilité prévue au contrat selon laquelle A. n'est soumis qu'à une obligation de moyen en ce que cette clause crée un déséquilibre significatif au détriment du consommateur.

Il fait observer dans un premier temps que la société A. a manqué à ses obligations contractuelles en n'exécutant pas le contrat de bonne foi et doit être considérée comme défaillante dans ses obligations de diligence et d'information quant à l'exécution du contrat de mandat qui les liait.

- [minute page 3] Sur la mauvaise foi de la société A., Monsieur X. rappelle que malgré les absences de connexion (en 2000-2001 et à partir d'octobre 2004) dont elle était informée, elle n'a pas suspendu les prélèvements ou remboursé les abonnements indûment prélevés.

- S'agissant de l'obligation de diligence de la société A., le demandeur estime qu'A. a manqué à cette obligation en ne faisant pas preuve de célérité dans l'identification de l'origine de la panne. Suite à la défaillance d'A. dans l'exécution du contrat, le demandeur a contacté l'assistance technique de la société qui n'a jamais envoyé de technicien chez le demandeur.

- Sur l'obligation d'information de la société A., selon Monsieur X. celle-ci ne l'a pas informé de l'origine de la panne, de l'état d'avancement de la résolution du problème et de la date prévisionnelle de rétablissement de la ligne ; mais n'a répondu que de façon dilatoire et évasive aux sollicitations de Monsieur X.

Monsieur X. soutient ensuite que la défaillance d'A. dans la prestation prévue pendant près de deux ans constitue un manquement à une obligation de résultat qui engage sa responsabilité de plein droit selon l'article L. 121-20-3 du Code de la consommation, sauf à celle-ci d'apporter la preuve d'un fait imprévisible et insurmontable d'un tiers au contrat, preuve qu'elle ne rapporte pas.

Assignée par exploit d'huissier remis à personne, la société A. n'a pas comparu.

L'affaire a été mise en délibéré au 12 juillet 2007.

 

MOTIFS (justification de la décision)  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

Sur les clauses abusives :

Attendu que, conformément aux dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non professionnel, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ;

Que l'article 8.1 des conditions particulières d'abonnement prévoit que la Société A. n'est soumis qu'à une obligation de moyens compte tenu de la nature de la technologie ADSL ;

[minute page 4] Que cette clause qui a pour effet de dégager la société A. de son obligation d'assurer l'accès au service promis alors qu'elle a contracté envers ses clients l'obligation de leur fournir la prestation promise laquelle constitue une obligation de résultat rendant l'opérateur présumé responsable de tout dysfonctionnement, crée un déséquilibre significatif au détriment des abonnés justifiant sa suppression sans que la société A. puisse invoquer les difficultés qu'elle rencontrerait du fait de tiers et les spécificités de sa prestation, étant relevé le caractère général de la clause qui ne précise pas les causes mêmes d'interruption de telle sorte que par cette clause la société A. s'exonère en définitive des conséquences de ses propres carences, étant encore relevé qu'est en cause non le fait de la connexion illimitée mais seulement le fait d'accéder au service promis en contrepartie du paiement d'une redevance ;

Que la circonstance que le fournisseur d'accès ne soit qu'un maillon dans la chaîne des intervenants n'est pas de nature à influer sur la nature de l'obligation contractée par ce dernier envers l'usager, étant relevé que le fournisseur dispose toujours d'un recours contre ceux dont le comportement est la cause de l'inexécution par le fournisseur de sa propre obligation de résultat ;

Que la clause litigieuse doit s'analyser en une clause limitative de responsabilité ;

Attendu que dès lors, en application de l'article L. 132-1 du Code de la consommation, cette clause doit être déclarée abusive et réputée non écrite ;

Que cependant, Monsieur X. ne rapporte pas la preuve du préjudice que lui a causé la clause déclarée abusive puisqu'elle ne l'a pas empêchée d'intenter une action en justice contre la société A pour voir engagée sa responsabilité ;

Qu'ainsi, Monsieur X. sera débouté de sa demande en paiement de la somme de 2.000 euros à l'encontre de la société A.

 

Sur la responsabilité contractuelle de la société A :

Attendu que l'article 1134 du Code civil énonce que les parties doivent exécuter leurs obligations de bonne foi ;

[minute page 5] Qu'aux termes de l'article L. 121-20-3 du Code de la consommation, le professionnel est responsable de plein droit à l'égard du consommateur de la bonne exécution du contrat conclu à distance, que ces obligations soient à exécuter par le professionnel qui a conclu ce contrat ou par d'autres prestataires de services, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci ;

Que la clause limitative de responsabilité insérée à l'article 8.1 des conditions particulières d'abonnement est réputée non écrite ; Que l'obligation qui résulte du contrat entre la société A et Monsieur X. est donc une obligation de résultat ;

Qu'il n'est pas contesté que Monsieur X. n'a pas pu profiter pleinement de son accès Internet courant 2000-2004 ; Qu'il n'est pas contesté non plus que l'abonnement ADSL souscrit le 26 août 2004 n'a jamais été opérationnel et que Monsieur X. a finalement réinstallé le modem bas débit pour pouvoir bénéficier à nouveau d'une connexion à Internet ; Que prévenue à plusieurs reprises par son client des difficultés auxquelles il se heurtait, la société A. s'est contentée de réponses évasives et dilatoires sans envoyer de technicien pour résoudre la panne ; Que les factures téléphoniques et les mails produits par Monsieur X. démontrent l'inertie de la société quant à sa volonté d'exécuter la prestation qui lui incombe selon le contrat ;

Qu'en conséquence, la société A. a manqué à son obligation contractuelle en ne fournissant pas la prestation prévue au contrat ;

Que l'impossibilité de se connecter à Internet, l'impossibilité de recevoir des appels téléphoniques quand la connexion bas débit a été rétablie, ont nécessairement porté préjudice à Monsieur X. en ce que la société est maintenant imprégnée de cette technologie du fait de la place grandissante qu'Internet a pris dans les échanges entre les hommes et du fait des possibilités de gestion de ses affaires en réseau ; Qu'au surplus, Monsieur X. fait état du stress qu'ont engendré ces difficultés et l'absence de réponse personnalisée de la société A. ;

Que ces préjudices seront réparés par l'allocation à Monsieur X. de sommes suivantes :

- 370,22 euros à titre de remboursement des frais d'abonnement indûment prélevés pour la période d'octobre 2004 à mai 2006,

- 54,10 euros au titre des frais d'appels téléphoniques à la « hot ligne » d'A.,

- 2.000 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral subi ;

[minute page 6]

Sur l'exécution provisoire :

Attendu que les difficultés rencontrées par Monsieur X. dans l'exécution de sa prestation sont anciennes ; Qu'il y a donc lieu d'ordonner l'exécution provisoire de la présente décision ;

 

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

Attendu que Monsieur X. s'est trouvé dans l'obligation, pour la présente instance, d'engager des frais non compris dans les dépens ; Qu'il serait inéquitable de laisser à sa charge ; Que la somme de 460 euros lui sera allouée au titre des frais irrépétibles ;

Attendu que la société A. succombe, elle devra supporter les dépens ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal, statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort :

Constate le caractère abusif de la clause insérée à l'article 8.1 des conditions générales d'abonnement et la déclare non écrite ;

Déclare la société A. responsable de la mauvaise exécution du contrat conclu avec Monsieur X. ;

Condamne la société A. à payer à Monsieur X. les sommes suivantes :

- 370,22 euros au titre du remboursement des frais d'abonnement,

- 54,10 euros au titre des communications au service d'assistance téléphonique,

- 2.000 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi pour l'inexécution du contrat par la société A. ;

Ces sommes portant intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;

Ordonne l'exécution provisoire de la présente décision ;

[minute page 7] Rejette le surplus des demandes ;

Condamne la société A. à verser à Monsieur X. la somme de 460 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et à régler les entiers dépens.

Ainsi juge et prononcé publiquement par mise à disposition au greffe

LE GREFFIER                                                 LE PRÉSIDENT