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CA PARIS (pôle 4 ch. 9-A), 8 décembre 2022

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 4 ch. 9-A), 8 décembre 2022
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 4 ch. 9
Demande : 20/15871
Date : 8/12/2022
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 4/11/2020
Référence bibliographique : 6629 (prêt affecté, option entre garanties), 5824 (crédit, application dans le temps), 5826 (crédit, ordre public), 6003 (clause confuse), 6048 (pouvoir discrétionnaire du professionnel), 6054 (clause de garantie optionnelle)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 9991

CA PARIS (pôle 4 ch. 9-A), 8 décembre 2022 : RG n° 20/15871

Publication : Judilibre

 

Extraits : 1/ « Le contrat litigieux ayant été conclu le 16 août 2016, il est fait application des dispositions du code de la consommation dans leur rédaction postérieure à l'entrée en vigueur de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, et postérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016. »

2/ « Aux termes de l'article L. 312-19 du code de la consommation dans sa version applicable au contrat, l'emprunteur peut se rétracter sans motifs dans un délai de quatorze jours calendaires révolus à compter du jour de l'acceptation de l'offre de contrat de crédit. En application de l'article L. 312-25, pendant un délai de sept jours à compter de l'acceptation du contrat par l'emprunteur, aucun paiement, sous quelque forme et à quelque titre que ce soit, ne peut être fait par le prêteur à l'emprunteur ou pour le compte de celui-ci, ni par l'emprunteur au prêteur.

Il est admis que le consommateur ne peut renoncer au bénéfice de ces dispositions qui sont d'ordre public.

Ainsi, pendant un délai de sept jours, aucun paiement sous quelque forme que ce soit ne peut être fait par le prêteur à l'emprunteur. Une remise prématurée des fonds a nécessairement pour conséquence une atteinte à la faculté de rétractation et, ce faisant, une atteinte à la liberté de consentement du consommateur.

La méconnaissance des dispositions de l'article L. 312-25 est sanctionnée non seulement pénalement, mais également par la nullité du contrat de crédit en vertu de l'article 6 du code civil laquelle peut être relevée d'office. »

3/ « Il ressort du bon de commande et de la facture du véhicule que « Le transfert de la marchandise livrée n'est effectif qu'après paiement complet par l'acheteur ». Il en résulte que le vendeur, ayant reçu l'intégralité du prix, le transfert de propriété a bien eu lieu entre les mains de l'acheteur, M. Y. par l'effet du contrat de vente.

Mme X. a indiqué, sans être contestée, qu'elle n'a jamais été en possession du véhicule, que son ex-mari en a eu l'usage exclusif et que le véhicule avait été vendu par ce dernier. Elle produit la déclaration de cession du véhicule.

Il convient de relever que l'offre de prêt mentionne en première page que le prêteur se réserve le droit de demander un cautionnement ou une hypothèque, que la fiche d'informations précontractuelles indique que le prêteur se réserve le droit de demander un cautionnement, une hypothèque ou de prendre un gage ou une réserve de propriété et que la page 5 du contrat prévoit à la fois la réserve de propriété et le gage du véhicule. C'est par conséquent à juste titre que le premier juge a relevé les contradictions existant entre ces différentes mentions qui ont légitimement pu engendrer une incompréhension et en tout cas un déséquilibre manifeste en défaveur du consommateur.

En toute hypothèse, Mme X. ne peut être contrainte de restituer ce qui ne lui appartient pas et qui n'a jamais été en sa possession. La société Financo n'a pas contesté l'accord amiable intervenu avec M. Y. et portant sur un versement de 385 euros mensuels. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 4 CHAMBRE 9-A

ARRÊT DU 8 DÉCEMBRE 2022

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 20/15871 (8 pages). N° Portalis 35L7-V-B7E-CCS65. Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 septembre 2020 - Juge des contentieux de la protection de MEAUX - RG n° 11-19-001754.

 

APPELANTE :

La société FINANCO

société anonyme à directoire et conseil de surveillance agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, N° SIRET : XXX, [Adresse 2], [Adresse 2], [Localité 1], représentée par Maître Olivier HASCOET de la SELARL HAUSSMANN-KAINIC-HASCOET-HELAI, avocat au barreau de l'ESSONNE

 

INTIMÉE :

Madame X. divorcée Y.

née le [Date naissance 3] à [Localité 6] (pays), [Adresse 4], [Localité 5], représentée par Maître Solange IEVA-GUENOUN de la SCP IEVA-GUENOUN/PAIN, avocat au barreau de MEAUX

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre, Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère, Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère.

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT : - CONTRADICTOIRE - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Suivant offre de contrat acceptée le 16 août 2016, la société Financo a consenti à M. Y. et Mme X. un contrat de crédit affecté d'un montant de 17.081,38 euros, remboursable en 60 mensualités de 390,53 euros, assurance comprise, moyennant un taux d'intérêt nominal de 5,88 %.

Ce crédit était affecté au financement d'une moto de marque Suzuki, livrée le 18 août 2016. La société Financo a débloqué les fonds le 19 août 2016.

À la suite d'impayés, la société Financo s'est prévalue de la déchéance du terme et une mise en demeure a été adressée à Mme X. le 28 septembre 2019.

Saisi le 10 décembre 2019 par la société Financo d'une demande tendant principalement à la condamnation de Mme X. au paiement d'une somme de 12.910,13 euros et subsidiairement au prononcé de la résiliation du contrat, le tribunal judiciaire de Meaux, par un jugement contradictoire rendu le 16 septembre 2020 auquel il convient de se reporter, a :

- déclaré recevable l'action de la société Financo,

- prononcé la déchéance du droit aux intérêts contractuels,

- débouté la société Financo de l'ensemble de ses demandes formées à l'encontre de Mme X.

Après avoir constaté que l'action avait été engagée dans le délai prévu par l'article R. 312-35 du code de la consommation, le premier juge a relevé que la déchéance du terme avait été abusivement prononcée, l'emprunteuse n'ayant pas été mise en demeure de régler les échéances impayées. Il a ensuite relevé que la fiche d'informations précontractuelles ne comportait pas l'ensemble des mentions prescrites par l'article R. 312-2 du code de la consommation et que la banque n'établissait pas avoir délivré la notice d'information relative à l'assurance, ce qui justifie la déchéance de la banque de son droit aux intérêts. Il a retenu que l'emprunteuse avait versé une somme de 9 618,61 euros, montant supérieur au capital échu jusqu'au prononcé indu de la déchéance du terme. Il a enfin considéré que la clause de réserve de propriété stipulée dans le contrat de crédit était abusive au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation.

[*]

Par une déclaration ne date du 4 novembre 2020, la société Financo a relevé appel de cette décision.

Aux termes de conclusions remises le 30 août 2022, l'appelante demande à la cour :

- d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- de condamner Mme X. à lui payer la somme de 12.910,13 euros avec intérêts au taux contractuel de 5,88 % l'an à compter de la mise en demeure du 28 septembre 2019,

- d'ordonner la capitalisation annuelle des intérêts par application de l'article 1343-2 du code civil,

- subsidiairement si la cour estimait que la déchéance du terme n'était pas acquise, de constater les manquements graves et réitérés de Mme X. à son obligation contractuelle de paiement des loyers et prononcer la résolution judiciaire du contrat sur le fondement de l'article 1184 du code civil et de condamner Mme X. à lui payer la somme de 12.910,13 euros, outre les intérêts au taux légal à compter de l'arrêt,

- de dire qu'il n'y a lieu à déchéance du droit aux intérêts,

- subsidiairement si la cour prononçait la déchéance du droit aux intérêts contractuels, de condamner Mme X. à lui payer la somme de 8.264,11 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 28 septembre 2019,

- de condamner Mme X. à lui restituer le véhicule financé sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt,

- de condamner Mme X. à lui payer la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Visant l'article 472 du code de procédure civile, l'appelante soutient que le premier juge a excédé ses pouvoirs en relevant d'office le moyen tendant à l'absence de mise en demeure préalable à la déchéance du terme. Elle indique que la déchéance du terme a été prononcée conformément aux stipulations contractuelles et à l'article L. 311-24 du code de la consommation.

Subsidiairement elle soutient que la clause résolutoire est toujours sous-entendue dans un contrat synallagmatique et les manquements graves et réitérés de l'emprunteuse à son obligation de remboursement justifient la résolution judiciaire du contrat.

Elle relève que la mention des hypothèses de calcul du TAEG exigée par l'article R. 312-2 du code de la consommation ne vaut que pour les prêts renouvelables assortis d'un taux d'intérêt variable, alors que le contrat conclu était d'un montant et d'une durée fixes. Elle ajoute que la reconnaissance par l'emprunteuse de la remise de la notice d'assurance fait pleinement foi de sorte que la déchéance du droit aux intérêts n'est pas encourue. Elle fait valoir que l'offre de prêt est conforme aux prescriptions des articles L. 312-28 et R. 312-10 du code de la consommation.

La banque rappelle que le défaut de production des lettres d'information annuelle prévue par l'article L. 312-32 du code de la consommation n'est pas sanctionné par les articles L. 341-2 à L. 341-11 du même code. Elle conteste toute méconnaissance du délai de rétractation en soulignant que l'emprunteuse a sollicité la livraison du véhicule et que le déblocage des fonds a été réalisé dans le respect des dispositions de l'article L. 312-47 nouveau du code de la consommation.

Elle rappelle que l'intimée est débitrice solidaire et que l'intégralité de la créance peut lui être réclamée puis se prévaut du gage contractuel conclu lors de la signature du prêt et de l'article 2347 du code civil pour réclamer la restitution du véhicule. Elle relève enfin que l'emprunteuse a déjà bénéficié de larges délais de paiement et qu'il n'y a lieu de lui en accorder de nouveaux.

[*]

Par des conclusions remises le 25 juillet 2022, Mme X. demande à la cour :

- de confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel,

- de rejeter l'ensemble des demandes de la société Financo,

- de condamner la société Financo à lui payer la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- subsidiairement de retenir l'absence de solidarité entre les co-emprunteurs et ne mettre à sa charge que la moitié de la dette,

- de lui accorder les plus larges délais de paiement pour le crédit et l'autoriser à s'acquitter de sa dette par le paiement mensuel d'une somme de 100 euros,

- de dire que toute somme versée par Mme X. s'imputera par priorité sur le capital et que les sommes dues ne produiront pas d'intérêt et à titre infiniment subsidiaire qu'aucun intérêt conventionnel ne sera applicable, pas plus qu'un intérêt au taux majoré.

L'intimée précise que le contrat a été signé dans l'intérêt de son ex-mari, dont elle est divorcée depuis le 26 février 2018, qui est le seul utilisateur de la moto achetée à crédit et revendue depuis.

Elle ajoute que la société Financo s'est entendue avec son ex-mari pour lui accorder un paiement échelonné de la dette à hauteur de 385 euros par mois.

L'intimée soutient que la déchéance du terme, évoquée devant le premier juge, n'a pas été prononcée conformément aux dispositions de l'article L. 312-36 du code de la consommation en l'absence de mise en demeure préalable. Elle relève que la fiche d'informations précontractuelles ne comprenait pas les hypothèses de calcul du TAEG comme l'impose l'article R. 312-2 du même code avant d'indiquer que cette fiche ne permettait pas la comparaison utile des offres de crédit.

Elle indique que la banque ne produit pas la notice d'assurance, que la régularité de ce document n'est pas établie et ajoute que la fiche « conseil assurance » ne comporte pas l'ensemble des mentions imposées par l'article R. 313-9 du code de la consommation. Elle poursuit en relevant que l'encadré du contrat de prêt ne mentionnait pas la clause de réserve de propriété, méconnaissant les dispositions de l'article R. 312-10 du même code.

Elle dénonce un manquement de la banque à son obligation d'information annuelle prévue par l'article L. 312-32 du code de la consommation, relève que le délai de rétractation prévu par l'article L. 312-20 n'a pas été respecté, que le déblocage des fonds a été fait de façon prématurée et soutient que la pièce n° 12 produite par l'appelante ne lui est pas opposable.

Elle rejette la solidarité invoquée par la banque, rappelle n'être débitrice d'aucune somme et demande subsidiairement la réduction de la clause pénale. Elle explique n'être plus en possession du véhicule litigieux, souligne que la banque n'est pas propriétaire du bien, rappelle qu'un pacte commissoire serait réputé non-écrit et demande subsidiairement l'octroi de délais de paiement en expliquant supporter d'importantes charges.

[*]

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 20 septembre 2022 et l'affaire a été appelée à l'audience du 26 octobre 2022.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Le contrat litigieux ayant été conclu le 16 août 2016, il est fait application des dispositions du code de la consommation dans leur rédaction postérieure à l'entrée en vigueur de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, et postérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016.

Vérifiée par le premier juge, la recevabilité de l'action en paiement du prêteur n'est pas contestée en appel.

 

Sur la validité de la mise à disposition des fonds et sur le respect du droit de rétractation :

Aux termes de l'article L. 312-19 du code de la consommation dans sa version applicable au contrat, l'emprunteur peut se rétracter sans motifs dans un délai de quatorze jours calendaires révolus à compter du jour de l'acceptation de l'offre de contrat de crédit.

En application de l'article L. 312-25, pendant un délai de sept jours à compter de l'acceptation du contrat par l'emprunteur, aucun paiement, sous quelque forme et à quelque titre que ce soit, ne peut être fait par le prêteur à l'emprunteur ou pour le compte de celui-ci, ni par l'emprunteur au prêteur.

Il est admis que le consommateur ne peut renoncer au bénéfice de ces dispositions qui sont d'ordre public.

Ainsi, pendant un délai de sept jours, aucun paiement sous quelque forme que ce soit ne peut être fait par le prêteur à l'emprunteur. Une remise prématurée des fonds a nécessairement pour conséquence une atteinte à la faculté de rétractation et, ce faisant, une atteinte à la liberté de consentement du consommateur.

La méconnaissance des dispositions de l'article L. 312-25 est sanctionnée non seulement pénalement, mais également par la nullité du contrat de crédit en vertu de l'article 6 du code civil laquelle peut être relevée d'office.

Aux termes de l'article L. 312-47, tant que l'emprunteur peut exercer sa faculté de rétractation, le vendeur n'est pas tenu d'accomplir son obligation de livraison. Toutefois, lorsque par une demande expresse rédigée, datée et signée de sa main même, l'acheteur sollicite la livraison immédiate du bien, le délai de rétractation ouvert à l'emprunteur par l'article L. 312-19 expire à la date de la livraison, sans pouvoir ni excéder quatorze jours ni être inférieur à trois jours.

L'article R. 312-20 précise que l'acheteur qui sollicite la livraison immédiate du bien doit apposer sur le contrat de vente une demande rédigée de sa main dans les termes suivants : « je demande à être livré(e) immédiatement. Le délai légal de rétractation de mon contrat de crédit arrive dès lors à échéance à la date de la livraison, sans pouvoir être inférieur à trois jours ni supérieur à quatorze jours suivant sa signature. Je suis tenu(e) par mon contrat de vente principal dès le quatrième jour suivant sa signature ».

Il est admis que la sanction du non-respect de ces dispositions est la nullité du contrat affecté.

Ainsi, la faculté de livraison immédiate avec réduction du délai de rétractation est expressément prévue à l'article L. 312-47 qui concerne les crédits affectés.

En l'espèce, les emprunteurs ont accepté l'offre préalable le 16 août 2016, le véhicule a été livré le 18 août 2016 et il n'est pas contesté que les fonds ont été débloqués le 19 août 2016.

La société Financo produit l'offre de crédit affecté signée le 16 août 2016, le bon de commande Factory Moto du véhicule Suzuki neuf en date du 16 août 2016 comportant la mention manuscrite requise et l'attestation de livraison avec demande de financement du crédit après expiration des délais légaux mentionnant une demande de livraison immédiate.

La demande de livraison immédiate a été régulièrement faite et est donc opposable à Mme X.. Il en résulte que les emprunteurs ont accepté que le délai de rétractation de 14 jours soit réduit et arrive à échéance à la date de livraison, sans pouvoir être inférieur à trois jours. Ainsi leur délai légal de rétractation minimum de trois jours susvisé expirait le 19 août 2016 à 24 heures.

Si l'emprunteur a manifestement respecté ses obligations au regard des textes susvisés, la question se pose au regard des obligations du prêteur.

En effet, la demande de livraison immédiate avec réduction du délai de rétractation n'exclut pas l'application du principe d'interdiction de tout paiement, sous quelque forme et à quel titre que ce soit avant l'expiration du délai de rétractation.

En l'espèce, la société Financo a débloqué les fonds au profit du vendeur le 19 août 2016 alors que les emprunteurs étaient encore en mesure de faire usage de leur droit de rétractation et la mise à disposition des fonds ne pouvaient donc valablement intervenir avant le 20 août à 0 heure.

Il y a donc lieu de constater que la remise prématurée des fonds a nécessairement eu pour conséquence une atteinte à la liberté de consentement du consommateur qu'il convient de sanctionner non par la déchéance du droit aux intérêts mais par la nullité du contrat de crédit affecté.

Partant le jugement est infirmé et la société Financo a droit au remboursement du capital emprunté, dont il convient de déduire les versements effectués depuis l'origine du contrat (390,53 x 19 + 849,27 x 2 + 500 = 9.618,61 euros), soit la somme de 7.462,77 euros (17.081,38 – 9.618,61).

Le contrat étant annulé, il n'y a pas lieu de faire application de la clause contractuelle de solidarité et Mme X., en tant que co-emprunteur, ne sera tenue que du paiement de la moitié de la somme due, soit la somme de 3.731,39 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du prononcé de l'arrêt.

 

Sur la demande de restitution du véhicule :

Il ressort du bon de commande et de la facture du véhicule que « Le transfert de la marchandise livrée n'est effectif qu'après paiement complet par l'acheteur ». Il en résulte que le vendeur, ayant reçu l'intégralité du prix, le transfert de propriété a bien eu lieu entre les mains de l'acheteur, M. Y. par l'effet du contrat de vente.

Mme X. a indiqué, sans être contestée, qu'elle n'a jamais été en possession du véhicule, que son ex-mari en a eu l'usage exclusif et que le véhicule avait été vendu par ce dernier. Elle produit la déclaration de cession du véhicule.

Il convient de relever que l'offre de prêt mentionne en première page que le prêteur se réserve le droit de demander un cautionnement ou une hypothèque, que la fiche d'informations précontractuelles indique que le prêteur se réserve le droit de demander un cautionnement, une hypothèque ou de prendre un gage ou une réserve de propriété et que la page 5 du contrat prévoit à la fois la réserve de propriété et le gage du véhicule. C'est par conséquent à juste titre que le premier juge a relevé les contradictions existant entre ces différentes mentions qui ont légitimement pu engendrer une incompréhension et en tout cas un déséquilibre manifeste en défaveur du consommateur.

En toute hypothèse, Mme X. ne peut être contrainte de restituer ce qui ne lui appartient pas et qui n'a jamais été en sa possession. La société Financo n'a pas contesté l'accord amiable intervenu avec M. Y. et portant sur un versement de 385 euros mensuels.

Partant, le jugement est confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.

 

Sur la demande reconventionnelle de délais :

Mme X. a subsidiairement fait valoir qu'elle était divorcée, qu'elle était femme de ménage avec un salaire de 1.050 euros avec un enfant à charge de quatorze ans. Elle ajoute qu'elle rembourse également deux crédits immobiliers et supporte des charges importantes qu'elle justifie.

L'appelante s'y est opposée, estimant que la somme proposée était insuffisante pour s'acquitter de la dette.

L'article 1343-5 du code civil permet au juge, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins des créanciers, de reporter ou d'échelonner le paiement des sommes dues dans la limite de deux années.

En considération des difficultés avérées de l'intimée et des remboursements effectués par l'emprunteur, il sera fait application des dispositions de l'article 1343-5 du code civil et un échéancier de 24 mois lui sera accordée conformément au dispositif de l'arrêt.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

Statuant après débats en audience publique, par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a déclaré la société Financo recevable en son action et en ce qu'il a rejeté la demande de restitution du véhicule ;

Statuant de nouveau,

Condamne Mme X. à payer à la société Financo la somme de 3.731,39 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du prononcé de l'arrêt ;

Dit que Mme X. pourra s'acquitter de sa dette en 23 versements mensuels de 155 euros et en un 24ème versement égal au solde de la dette en capital et intérêts, chaque versement devant intervenir avant le 10ème jour du mois, le premier, avant le 10ème jour du mois suivant la signification du présent arrêt ;

Dit qu'à défaut de paiement d'une mensualité à son échéance, l'ensemble de la dette deviendra de plein droit immédiatement exigible sans mise en demeure préalable ;

Rejette les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme X. aux entiers dépens de première instance et d'appel.

La greffière                                       La présidente