CA LYON (1re ch. civ. A), 23 mars 2023
CERCLAB - DOCUMENT N° 10152
CA LYON (1re ch. civ. A), 23 mars 2023 : RG n° 19/04623
Publication : Judilibre
Extraits : 1/ « Conformément à l'article 1134 ancien du code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
Les conditions particulières de l'avenant du 2 décembre 2011 disposent en leur article premier que le contrat emporte convention de compte courant professionnel assortie de la fourniture d'une carte « business » à débit différé, du service filbanque professionnel et des « frais forfaitisés de gestion qui comprennent : les frais de tenue de compte, la commission de mouvement, la commission du plus fort découvert et la commission d'immobilisation ».
L'article 2.2 des conditions générales de cet avenant prévoit par ailleurs que « tout dépassement [fonctionnement du compte en position débitrice] sera productif d'intérêts au taux maximal indiqué dans le recueil des principaux produits et services, sans préjudice de la commission d'intervention prévu à l'article « opérations nécessitant une intervention particulière ». L'article 2.4.1 dispose que « dans le cas où une opération se présenterait sur le compte en l'absence d'une provision suffisante et disponible ou d'un ordre conforme du client, l'examen particulier conduisant à son paiement ou son rejet donnera lieu au prélèvement d'une commission d'intervention conformément au recueil des prix des principaux produits et services ». L'article 2.4.3 prévoit également l'application de frais en cas d'incidents de paiement sur chèques. De manière plus générale, l'article 3.2 des conditions générales dispose que « les frais, intérêts, dates de valeurs et commissions liés à l'ouverture, au fonctionnement et à la clôture du compte, et en particulier les frais et commissions liés aux produits et services dont peut bénéficier le client ainsi qu'aux incidents de fonctionnement du compte et des moyens de paiement seront précisés dans le recueil des principaux produits et services joint à la présente convention. Le client reconnaît en avoir pris connaissance et déclare l'accepter. Ce recueil comporte les tarifs standards applicables en l'absence de convention écrite particulière conclue avec le client ; cependant, en raison d'une utilisation spécifique et peu courante, le prix de certaines opérations peut exceptionnellement ne pas figurer dans ce recueil ; en pareil cas, le client pourra obtenir communication de ce prix sur simple demande aux guichets de la banque. Ce prix lui sera appliqué après accord de sa part... Les conditions tarifaires sont révisables selon les modalités prévues aux articles « modification de la convention et/ou des autres produites et services ».
L'article 20 des conditions générales « modifications de la convention e/ou des autres produits et services » prévoit enfin que « tout projet de modification de la convention et/ou des autres produits ou services à durée indéterminée sera communiqué par écrit au client, sous délai de préavis raisonnable, avant la date d'application envisagée. Cette modification sera réputée acceptée par le client en l'absence de contestation écrite de sa part avant la date de prise d'effet. Lorsque l'envoi de ce projet est signalé par une mention intégrée dans le relevé de compte adressé périodiquement aux clients de la banque, le client qui n'aurait pas reçu son relevé devra en avertir la banque pour qu'elle le lui réexpédie, faute de quoi il ne pourra se prévaloir du défaut de communication du projet de modification ».
Il en résulte : - que les frais forfaitaires de gestion prévus à l'article 1 des conditions particulières du contrat ne sont pas les seuls applicables au fonctionnement du compte, et que des découverts et les incidents de paiement caractérisant un fonctionnement anormal du compte peuvent donner lieu à mise en compte des frais mentionnés dans les conditions tarifaires, - que toute modification de ces frais doit être communiquée en amont au client et recevoir son accord exprès ou tacite.
Les frais litigieux s'entendent de « commissions d'intervention, frais de retrait dab, frais de prélèvement impayé, frais de relance impayé et de frais de lettre compte débiteur » mis en compte du 27 février 2012 au 3 août 2015, en application des plaquettes tarifaires 2012 à 2015.
Si M. X. a expressément reconnu avoir pris connaissance et approuvé les conditions tarifaires applicables au 2 décembre 2011 au-dessus de sa signature, la banque ne justifie pas lui avoir communiqué les plaquettes tarifaires 2012 à 2015, selon les modalités prévues à l'article 20 du contrat, fût-ce par simple mention dans un relevé de compte. Il s'ensuit que les frais ont été appliqués de manière irrégulière, sans communication préalable du tarif à l'appelant, dans les conditions prévues au contrat.
En l'absence de preuve d'une telle communication, l'absence de contestation ne saurait valoir acceptation et il convient d'infirmer le jugement, en ce qu'il a condamné M. X. à s'acquitter de ces frais. »
2/ « La demande tendant à voir une clause abusive réputée non écrite, qui ne s'analyse pas en une demande d'annulation, n'est pas soumise à la prescription (Cass. com., 8 avril 2021 pourvoi n°19-17997). Il s'ensuit que la fin de non-recevoir opposée par la banque à la demande de M. X. n'est pas encourue.
Toutefois, le bénéfice de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable à la date de souscription des deux contrats litigieux, ne s'étend qu'aux consommateurs et non professionnels, à l'exclusion des personnes physiques ou morales ayant contracté dans l'exercice de leur profession, pour les besoins de cet exercice professionnel.
Les contrats litigieux affèrent à un compte courant professionnel, ouvert pour les besoins de l'activité professionnelle indépendante de M. X. La législation sur les clauses abusives ne leur est pas applicable et le moyen n'est pas fondé en droit. »
3/ « Conformément à l'article 1907 du code civil, le taux de l'intérêt conventionnel doit être fixé par écrit. Force est de constater que le taux d'intérêt conventionnel applicable au découvert en compte ne figure pas aux conditions particulières et générales du contrat en date du 2 décembre 2011, l'article 2.2 des conditions générales disposant simplement que « out dépassement [fonctionnement du compte en position débitrice] sera productif d'intérêts au taux maximal indiqué dans le recueil des principaux produits et services, sans préjudice de la commission d'intervention... ». Ce recueil des principaux produits et services, constitué par les plaquettes tarifaires annuelles versées aux débats, prévoit que le taux d'intérêt conventionnel applicable au découvert en compte est égal au plafond du taux réglementaire calculé par la Banque de France pour la catégorie des découverts en compte des personnes morales, minoré de 0,05 %.
Or, les arrêtés trimestriels de compte versés aux débats révèlent que la banque a calculé l'intérêt conventionnel à partir de son taux de base bancaire, dont la preuve n'est pas rapportée qu'il se confonde avec le plafond du taux réglementaire calculé par la Banque de France pour la catégorie des découverts en compte des personnes morales, minoré de 0,05 %, et qu'il ait été communiqué à l'appelant. Il en résulte que la banque a manqué à l'obligation d'indiquer par écrit le taux d'intérêt conventionnel appliqué et violé ce faisant les dispositions de l'article 1907 du code civil. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE LYON
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE A
ARRÊT DU 23 MARS 2023
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 19/04623. N° Portalis DBVX-V-B7D-MOTX. Décision du Tribunal de Grande Instance de BOURG-EN-BRESSE (1ère chambre civile), Au fond du 7 février 2019.
APPELANT :
M. X.
né le [Date naissance 3] à [Localité 4] ([Localité 4]), [Adresse 5], [Localité 2], Représenté par Maître Michel BEL, avocat au barreau de LYON, toque : 64
INTIMÉE :
SA LYONNAISE DE BANQUE
[Adresse 5], [Localité 4], Représentée par la SELARL BERNASCONI-ROZET-MONNET SUETY-FOREST, avocat au barreau d'AIN
Date de clôture de l'instruction : 14 août 2020
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 12 janvier 2023
Date de mise à disposition : 23 mars 2023
Audience tenue par Anne WYON, président, et Julien SEITZ, conseiller, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré, assistés pendant les débats de Séverine POLANO, greffier ; A l'audience, l'un des membres de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.
Composition de la Cour lors du délibéré : - Anne WYON, président - Julien SEITZ, conseiller - Raphaële FAIVRE, conseiller
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile, Signé par Anne WYON, président, et par Séverine POLANO, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
M. X. exploite un laboratoire dentaire en qualité de travailleur indépendant.
Il a ouvert un compte courant professionnel n°18XX001 dans les livres de la société Lyonnaise de banque et souscrit une convention de compte professionnel « Pro global » n°[XXXXXXXXXX01].
Cette convention a été modifiée par avenant du 2 décembre 2011.
M. X. a également souscrit le 17 mars 2015 un produit « carte MOA ».
Par courrier du 22 mai 2015, la société Lyonnaise de banque l'a informé de ce qu'elle n'entendait pas maintenir le découvert en compte dont il bénéficiait dans ses livres.
Par courrier recommandé du 16 novembre 2015, la société Lyonnaise de banque l'a mis en demeure de régulariser ce solde débiteur d'un montant de 10.409,87 euros, avant de l'assigner en paiement de la même somme devant le tribunal de Bourg-en-Bresse par acte d'huissier du 6 janvier 2017.
Par jugement en date du 7 février 2019, le tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse a :
- déclaré prescrite la contestation de M. X. portant sur les frais, commissions et autres agios qui lui ont été prélevés antérieurement au 2 décembre 2011, ainsi que sa contestation sur la clause relative aux frais forfaitisés,
- condamné M. X. à payer à la société Lyonnaise de banque la somme de 8.741,99 euros au titre du solde débiteur du compte n° [XXXXXXXXXX01], avec intérêts au taux légal à compter du 6 janvier 2017,
- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
- condamné M. X. aux dépens,
- débouté les parties du surplus de leurs demandes.
Par déclaration enregistrée le 2 juillet 2019, M. X. a relevé appel de ce jugement.
[*]
Aux termes de ses conclusions récapitulatives déposées le 28 mai 2020, M. X. demande à la cour, au visa des articles 1115 ancien, 1134 ancien et 1359 du code civil, L. 212-1 et suivants du code de la consommation, L. 313-4 et R 313-1 du code monétaire et financier, L. 313-2 et R. 313-1-II du code de la consommation dans leur version applicable au litige et de la recommandation n° 2005-02 relative au calcul des intérêts sur 360 jours, de :
- déclarer son appel bien fondé,
- réformer le jugement du tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse du 7 février 2019,
sur les frais :
- déduire de la demande de la société Lyonnaise de banque les frais prélevés entre le 6 janvier 2012 et le 3 août 2015 de 3.866,92 euros,
sur les factures CIC :
- déduire de la demande de la société Lyonnaise de banque les factures CIC débitées sur les exercices 2012 à 2015 de 1.708,40 euros,
Sur les agios :
- dire la clause non écrite et rejeter la demande de la société Lyonnaise de banque en paiement des intérêts,
- confirmer le jugement en ce qu'il a déduit de la demande de la société Lyonnaise de banque les intérêts prélevés du 6 janvier 2012 au 17 mars 2015 pour 1.667,88 euros,
sur l'article 700 du code de procédure civile :
- condamner la société Lyonnaise de banque à lui verser la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
- la condamner aux dépens avec application au profit de Maître Michel Bel, avocat, des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
[*]
Par conclusions récapitulatives déposées le 28 juillet 2020, la société Lyonnaise de banque demande à la cour, au visa des articles 1103 et 1134 ancien du code civil, de :
- débouter M. X. de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- confirmer intégralement le jugement sauf en ce qu'il a débouté la société Lyonnaise de banque de sa condamnation à payer les agios postérieurs au 2 décembre 2011,
statuant à nouveau sur ce point :
- condamner M. X. à lui payer la somme de 10.409,87 euros outre intérêt légal à compter du 6 janvier 2017,
en tout état de cause :
- condamner M. X. au paiement de la somme de 5.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.,
- condamner M. X. en tous les dépens avec application, au profit de la société Bernasconi Rozet Monnet-Suety Forest de Boysson, des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
[*]
Il est renvoyé aux écritures des parties, ainsi qu'aux développements ci-après, pour plus ample exposé des moyens développés à l'appui de leurs prétentions.
Le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de l'instruction par ordonnance du 14 août 2020 et l'affaire a été appelée à l'audience du 12 janvier 2023, à laquelle elle a été mise en délibéré au 23 mars 2023.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS :
Sur les frais d'incident et commissions d'intervention mis en compte :
Vu l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;
M. X. conteste les frais d'incident et les commissions d'intervention appliqués par la banque entre le 27 février 2012 et le 3 août 2015, d'un montant global de 3.866,92 euros, en faisant valoir qu'ils ne correspondent pas aux frais forfaitaires prévus à l'article 1 de l'avenant du 2 décembre 2011.
Il ajoute que la banque justifie la mise en compte de frais non forfaitaires par le fonctionnement prétendument anormal du compte, en se référant à des plaquettes tarifaires éditées entre 2012 et 2015, qu'elle ne justifie pas lui avoir communiquées.
Il se prévaut enfin de ce que le contrat du 17 mars 2015 ne prévoit pas de frais forfaitaires.
La banque fait valoir que les frais forfaitisés sont ceux correspondant à un fonctionnement normal du compte, alors qu'un fonctionnement anormal génère des frais non forfaitaires, tels ceux appliqués à l'appelant en vertu de l'article 2.4.1 du contrat.
Sur ce :
Conformément à l'article 1134 ancien du code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
Les conditions particulières de l'avenant du 2 décembre 2011 disposent en leur article premier que le contrat emporte convention de compte courant professionnel assortie de la fourniture d'une carte « business » à débit différé, du service filbanque professionnel et des « frais forfaitisés de gestion qui comprennent : les frais de tenue de compte, la commission de mouvement, la commission du plus fort découvert et la commission d'immobilisation ».
L'article 2.2 des conditions générales de cet avenant prévoit par ailleurs que « tout dépassement [fonctionnement du compte en position débitrice] sera productif d'intérêts au taux maximal indiqué dans le recueil des principaux produits et services, sans préjudice de la commission d'intervention prévu à l'article « opérations nécessitant une intervention particulière ».
L'article 2.4.1 dispose que « dans le cas où une opération se présenterait sur le compte en l'absence d'une provision suffisante et disponible ou d'un ordre conforme du client, l'examen particulier conduisant à son paiement ou son rejet donnera lieu au prélèvement d'une commission d'intervention conformément au recueil des prix des principaux produits et services ».
L'article 2.4.3 prévoit également l'application de frais en cas d'incidents de paiement sur chèques.
De manière plus générale, l'article 3.2 des conditions générales dispose que « les frais, intérêts, dates de valeurs et commissions liés à l'ouverture, au fonctionnement et à la clôture du compte, et en particulier les frais et commissions liés aux produits et services dont peut bénéficier le client ainsi qu'aux incidents de fonctionnement du compte et des moyens de paiement seront précisés dans le recueil des principaux produits et services joint à la présente convention. Le client reconnaît en avoir pris connaissance et déclare l'accepter. Ce recueil comporte les tarifs standards applicables en l'absence de convention écrite particulière conclue avec le client ; cependant, en raison d'une utilisation spécifique et peu courante, le prix de certaines opérations peut exceptionnellement ne pas figurer dans ce recueil ; en pareil cas, le client pourra obtenir communication de ce prix sur simple demande aux guichets de la banque. Ce prix lui sera appliqué après accord de sa part... Les conditions tarifaires sont révisables selon les modalités prévues aux articles « modification de la convention et/ou des autres produites et services ».
L'article 20 des conditions générales « modifications de la convention e/ou des autres produits et services » prévoit enfin que « tout projet de modification de la convention et/ou des autres produits ou services à durée indéterminée sera communiqué par écrit au client, sous délai de préavis raisonnable, avant la date d'application envisagée. Cette modification sera réputée acceptée par le client en l'absence de contestation écrite de sa part avant la date de prise d'effet. Lorsque l'envoi de ce projet est signalé par une mention intégrée dans le relevé de compte adressé périodiquement aux clients de la banque, le client qui n'aurait pas reçu son relevé devra en avertir la banque pour qu'elle le lui réexpédie, faute de quoi il ne pourra se prévaloir du défaut de communication du projet de modification ».
Il en résulte :
- que les frais forfaitaires de gestion prévus à l'article 1 des conditions particulières du contrat ne sont pas les seuls applicables au fonctionnement du compte, et que des découverts et les incidents de paiement caractérisant un fonctionnement anormal du compte peuvent donner lieu à mise en compte des frais mentionnés dans les conditions tarifaires,
- que toute modification de ces frais doit être communiquée en amont au client et recevoir son accord exprès ou tacite.
Les frais litigieux s'entendent de « commissions d'intervention, frais de retrait dab, frais de prélèvement impayé, frais de relance impayé et de frais de lettre compte débiteur » mis en compte du 27 février 2012 au 3 août 2015, en application des plaquettes tarifaires 2012 à 2015.
Si M. X. a expressément reconnu avoir pris connaissance et approuvé les conditions tarifaires applicables au 2 décembre 2011 au-dessus de sa signature, la banque ne justifie pas lui avoir communiqué les plaquettes tarifaires 2012 à 2015, selon les modalités prévues à l'article 20 du contrat, fût-ce par simple mention dans un relevé de compte.
Il s'ensuit que les frais ont été appliqués de manière irrégulière, sans communication préalable du tarif à l'appelant, dans les conditions prévues au contrat.
En l'absence de preuve d'une telle communication, l'absence de contestation ne saurait valoir acceptation et il convient d'infirmer le jugement, en ce qu'il a condamné M. X. à s'acquitter de ces frais.
Sur les frais forfaitaires ayant donné lieu à émission de factures :
Vu l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;
En sus des frais liés au découvert en compte et aux incidents de paiement, la banque a appliqué des frais de gestion ayant donné lieu à l'émission de factures mensuelles.
M. X. conteste les montants facturés de janvier 2012 à juillet 2015, d'un montant global de 1.708,40 euros, en faisant valoir que la banque ne justifie pas du bien-fondé de leur mise en compte et de leur nature contractuelle.
La banque réplique que les factures, l'avenant du 02 décembre 2011 et sa notice explicative sont suffisamment explicites pour valider les facturations litigieuses.
Sur ce :
Ainsi qu'il a été retenu précédemment, la banque ne justifie pas avoir communiqué les conditions tarifaires 2012 à 2015 appliquées pour le calcul des frais de gestion litigieux.
Elle n'est pas fondée en conséquence à demander le paiement de ces frais, facturés sur la foi d'un tarif non contractuel.
Sur les intérêts réclamés au titre du découvert en compte :
Vu l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction abrogée par la loi n° 2016-301 du 14 mars 2016, et les articles 1304 et 2224 du code civil, le premier dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
Vu l'article 1907 du code civil ;
Vu l'article 9 du code de procédure civile ;
M. X. soutient en premier lieu que la stipulation d'intérêts conventionnels doit être réputée non écrite comme abusive, en tant qu'opérant le calcul de l'intérêt sur une base de 360 jours, selon la pratique dite de l'année lombarde.
La banque réplique que l'action correspondante est prescrite.
Sur ce :
La demande tendant à voir une clause abusive réputée non écrite, qui ne s'analyse pas en une demande d'annulation, n'est pas soumise à la prescription (Cass. com., 8 avril 2021 pourvoi n°19-17997).
Il s'ensuit que la fin de non-recevoir opposée par la banque à la demande de M. X. n'est pas encourue.
Toutefois, le bénéfice de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable à la date de souscription des deux contrats litigieux, ne s'étend qu'aux consommateurs et non professionnels, à l'exclusion des personnes physiques ou morales ayant contracté dans l'exercice de leur profession, pour les besoins de cet exercice professionnel.
Les contrats litigieux affèrent à un compte courant professionnel, ouvert pour les besoins de l'activité professionnelle indépendante de M. X. La législation sur les clauses abusives ne leur est pas applicable et le moyen n'est pas fondé en droit.
M. X. se prévaut en second lieu de l'absence d'indication du taux d'intérêt nominal appliqué au découvert en compte, dans chacun des contrats litigieux, ainsi que de l'absence d'indication du taux de période.
La banque réplique que la contestation est prescrite. Elle ajoute que le taux d'intérêt appliqué au découvert en compte a été communiqué à l'appelant à l'occasion des arrêtés trimestriels de compte.
Sur ce :
Conformément à l'article 1907 du code civil, le taux de l'intérêt conventionnel doit être fixé par écrit.
Force est de constater que le taux d'intérêt conventionnel applicable au découvert en compte ne figure pas aux conditions particulières et générales du contrat en date du 2 décembre 2011, l'article 2.2 des conditions générales disposant simplement que « out dépassement [fonctionnement du compte en position débitrice] sera productif d'intérêts au taux maximal indiqué dans le recueil des principaux produits et services, sans préjudice de la commission d'intervention... ».
Ce recueil des principaux produits et services, constitué par les plaquettes tarifaires annuelles versées aux débats, prévoit que le taux d'intérêt conventionnel applicable au découvert en compte est égal au plafond du taux réglementaire calculé par la Banque de France pour la catégorie des découverts en compte des personnes morales, minoré de 0,05 %.
Or, les arrêtés trimestriels de compte versés aux débats révèlent que la banque a calculé l'intérêt conventionnel à partir de son taux de base bancaire, dont la preuve n'est pas rapportée qu'il se confonde avec le plafond du taux réglementaire calculé par la Banque de France pour la catégorie des découverts en compte des personnes morales, minoré de 0,05 %, et qu'il ait été communiqué à l'appelant.
Il en résulte que la banque a manqué à l'obligation d'indiquer par écrit le taux d'intérêt conventionnel appliqué et violé ce faisant les dispositions de l'article 1907 du code civil.
Conformément aux articles 2224 et 1304 ancien du code civil, l'action en nullité découlant de ce manquement se prescrit par 5 ans à compter de la date à laquelle l'emprunteur professionnel a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer, soit à compter de la souscription du contrat. En outre, lorsque le contrat a fait l'objet d'un commencement d'exécution, l'exception de nullité ne peut être invoquée que tant que la prescription de l'action en nullité n'est pas acquise.
En l'espèce, le délai de prescription applicable à l'action en nullité de la stipulation d'intérêt insérée dans l'avenant du 2 décembre 2011 est expiré le 02 septembre 2016 et cet avenant a commencé à recevoir exécution dès sa souscription. M. X. n'était donc plus recevable à se prévaloir de l'irrégularité litigieuse, fût-ce par voie d'exception, lorsqu'il l'a soulevée pour la première fois par conclusions du 5 juillet 2017.
Rien n'établit par ailleurs que les agios mis en compte l'ont été sur le fondement du contrat du 17 mars 2015, relatif à la souscription d'une carte MOA, ni que ce contrat, dont les conditions générales ne sont pas produites, a remplacé la convention du 2 juillet 2011, plutôt qu'il s'est ajouté à celle-ci.
Le moyen tiré de l'irrégularité de ce second contrat est donc inopérant.
Il n'en demeure pas moins que la banque ne justifie pas des taux de base bancaires successivement appliqués, non plus partant que de l'exactitude des intérêts réclamés.
Il n'y a pas lieu en conséquence de faire droit à la demande en paiement, en tant qu'elle porte sur les intérêts conventionnels appliqués au découvert en compte, d'un montant total de 1.667,88 euros.
Après déduction des sommes mises en compte au titre des agios, des frais de gestion et des frais et commissions pour incidents de paiement, la somme due à la banque s'établit, au vu du décompte produit (d'un montant total de 10.409,87 euros) au montant résiduel de 2.966,67 euros.
Il y a donc lieu d'infirmer le jugement entrepris, en ce qu'il a condamné M. X. à payer à la banque la somme de 8.741,99 euros au titre du solde débiteur du compte courant litigieux et de ramener cette condamnation au montant de 2.966,67 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 6 janvier 2017, date de l'assignation valant mise en demeure.
La cour relève que M. X. ne forme plus de contestation au titre des frais et agios antérieurs au 2 décembre 2011, non plus qu'il ne reprend la contestation élevée en première instance sur la clause relative aux frais forfaitisés. Il ne développe aucun moyen à l'appui de la réformation du chef de dispositif par lequel le tribunal de Bourg-en-Bresse a déclaré prescrite les demandes portant sur les frais, commissions et autres agios qui lui ont été prélevés antérieurement au 02 décembre 2011, ainsi que sa contestation relative aux frais forfaitisés. Ce chef de dispositif sera donc confirmé.
De même, M. X. ne développe aucun moyen à l'appui de l'appel des chefs de dispositif ayant rejeté la demande d'exécution provisoire de la banque et dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Ces chefs de dispositif seront donc confirmés.
Sur l'exécution provisoire, les frais irrépétibles et les dépens de l'instance :
Vu les articles 696, 699 et 700 du code de procédure civile ;
M. X. reste débiteur d'un solde au titre du compte litigieux et la banque s'est vue contrainte d'agir en justice pour la délivrance d'un titre. Il convient en conséquence de confirmer sa condamnation aux dépens de première instance.
La banque succombe en revanche à l'instance d'appel et il convient de la condamner aux dépens correspondants.
L'équité commande par ailleurs de la condamner à payer la somme de 2.000 euros à l'appelant, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire prononcé en dernier ressort,
Confirme le jugement prononcé le 7 février 2019 entre les parties par le tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse, sauf en ce qu'il a condamné M. X. à payer à la société Lyonnaise de banque la somme de 8.741,99 euros au titre du solde débiteur du compte courant n°[XXXXXXXXXX01] ;
Statuant à nouveau de ce chef et y ajoutant :
Condamne M. X. à payer à la société Lyonnaise de banque la somme de 2.966,67 euros, au titre du solde débiteur du compte courant n°[XXXXXXXXXX01], avec intérêts au taux légal à compter du 06 janvier 2017 ;
Condamne la société Lyonnaise de banque aux dépens de l'instance d'appel, avec droit de recouvrement direct au profit de Me Michel Bel, avocat, sur son affirmation de droit ;
Condamne la société Lyonnaise de banque à payer à M. X. la somme de 2.000 euros en indemnisation des frais non répétibles de l'instance d'appel ;
Rejette la demande formée par la société Lyonnaise de banque sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Le Greffier Le Président
- 5705 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Procédure - Recevabilité - Délai pour agir - Prescription
- 5735 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Effets - Suppression de la clause - Nature - Clause nulle
- 5878 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Clauses abusives - Critères alternatifs : besoins de l’activité
- 5936 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Financement de l’activité - Conventions de compte et trésorerie
- 6389 - Code civil et Droit commun - Sanction indirecte des déséquilibres significatifs - Acceptation et opposabilité des clauses