CA NÎMES (1re ch.), 23 mars 1999
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 1073
CA NÎMES (1re ch.), 23 mars 1999 : RG n° 98/0024 ; arrêt n° 159
Publication : Gaz. Pal. 2000. Somm. 1820, obs. Depadt
Extrait : « ATTENDU que le « concept MEDICARE » vendu par la société SELECTIF entrait bien dans la sphère d'activité du docteur X., médecin généraliste ; Que l'appelant ne saurait dès lors invoquer une erreur sur les qualités substantielles du bien acquis ; Que s'agissant d'un matériel en rapport direct avec l'activité qu'exerçait le docteur X., les dispositions des articles L. 121-23 à L. 121-28 du Code de la consommation relatives au démarchage ne sont pas applicables ».
COUR D’APPEL DE NÎMES
PREMIÈRE CHAMBRE
ARRÊT DU 23 MARS 1999
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 98/0024. Arrêt n° 159.
Ce jour, VINGT TROIS MARS MIL NEUF CENT QUATRE VINGT DIX NEUF, à l'audience publique DE LA PREMIÈRE CHAMBRE DE LA COUR D'APPEL DE NÎMES, Monsieur DELTEL, Président, assisté de Madame ORMANCEY, Greffier, a prononcé l'arrêt suivant, dans l'instance opposant :
D'une part :
Monsieur X.,
né le […] à […], domicilié [adresse], ayant pour avoué constitué, Maître d'EVERLANGE, et pour avocat, la SCP BRUN CHABADEL EXPERT, APPELANT
[minute page 2]
D'autre part :
La SARL SELECTIF,
dont le siège social est [adresse], prise en la personne de son gérant en exercice, domicilié en cette qualité audit siège, ayant pour avoué constitué, la SCP POMIES RICHAUD ASTRAUD, et pour avocat, Maître TORRES FORET DODELIN, (GRASSE), INTIMÉE
Après que l'instruction ait été clôturée par ordonnance du Conseiller de la Mise en Etat, en date du 14 décembre 1998.
Après que les débats aient eu lieu à l'audience publique du 15 décembre 1995, où siégeaient : - Monsieur DELTEL, Président, - Monsieur PUECFI, Conseiller, - Madame MIQUEL PRIBILE, Conseiller,
assistés de Madame ORMANCEY, Greffier.
La Cour ainsi composée et assistée a entendu les avoués et avocats des parties en leurs conclusions et plaidoiries et renvoyé le prononcé pour plus ample délibéré à l'audience du 23 février 1999, prorogé à celle de ce jour.
Les magistrats du siège en ont ensuite délibéré conformément à la loi.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 3] FAITS, PROCÉDURE et PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Le 13 septembre 1994 Monsieur X., médecin, a commandé à la société SELECTIF, pour le prix de 129.000 Francs hors taxes, soit 152.994 Francs TTC, le « Concept MEDICARE » d'esthétique corporelle et de diététique, comportant :
« I - 1 unité centrale avec télécommande,
« II - 1 serveur périphérique avec télécommande comprenant :
* 1 technique esthétique de drainage lymphatique,
* 1 technique esthétique de physiostimulation,
* 1 technique esthétique d'électrolipolyse,
* 1 technique esthétique de tonification mammaire,
* 1 technique esthétique de ridolyse,
Pour mémoire :
* 1 journée complète sur site pour mise en main du concept,
* 1 cycle complet I.P.M.E (Institut Pratique de Médecine Esthétique),
* 1 package publicitaire et accessoires (voir détail au verso),
* 1 droit d'utilisation du logiciel MEDICARE,
* 1 manuel pratique de médecine esthétique,
* 1 ouvrage « LA BEAUTÉ EN HARMONIE » Dr. Sydney OHANA,
* 1 abonnement d'un an au journal de médecine esthétique,
* 1 adhésion au Syndicat National des Médecins Esthétiques,
* 1 cassette de formation RIDOLYSE,
* 1 manuel d'utilisation. »
Il a versé, le jour de la commande, un chèque de 10.000 Francs tiré sur la Centrale de Banque.
[minute page 4] Le 21 octobre 1994 le docteur X. a adressé un courrier à la société SELECTIF, lui indiquant qu'il ne pouvait « pour l'instant » donner suite à sa commande, et précisant qu'il ne manquerait pas de l'informer « s'il devait donner suite à la commande. »
Par courrier du 31 octobre 1994 la société SELECTIF a répondu au Docteur X. qu'il avait signé une commande ferme et définitive, sur laquelle il était hors de question de revenir, et a sollicité des instructions pour la livraison du matériel, avec paiement du solde du prix.
Le 20 novembre 1994 le docteur X. s'est rendu dans les locaux de la société SELECTIF à NICE et a demandé par écrit que le matériel commandé lui soit livré le 2 décembre 1994.
Le 2 décembre 1994 le docteur X. a refusé de prendre livraison du matériel.
Par jugement du 18 novembre 1997 le Tribunal de Grande Instance de NÎMES a condamné le docteur X., en application de l'article 1134 du Code Civil, à prendre possession du matériel qui lui avait été vendu selon bon de commande du 13 septembre 1994, et à régler à la société SELECTIF la somme de 142.994 Francs, assortie d'intérêts au taux légal à compter du 12 janvier 1995.
Le Tribunal a également alloué à la société SELECTIF la somme de 4.000 Francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Le docteur X. a relevé appel de ce jugement.
Par conclusions auxquelles il est expressément fait référence pour le détail de son argumentation il formule les demandes suivantes :
« à titre principal,
[minute page 5] Faisant application des dispositions de l'article 1116 du Code Civil, prononcer la nullité du contrat régularisé entre les parties le 13 septembre 1994 ;
En tant que de besoin, dire et juger que cette nullité découlerait de l'application de l'article 1110 du même Code.
Subsidiairement,
Prononcer la nullité de la convention faute de satisfaire aux dispositions de la loi du 22 décembre 1972 relative à la protection des consommateurs ;
Très subsidiairement,
Constater que l'acte litigieux ne saurait constituer une commande ferme et définitive ;
Dire et juger la rétractation du concluant légitime et fondée ;
En conséquence et en toute hypothèse,
Débouter la SA SELECTIF de l'intégralité de ses demandes fins et conclusions telles que dirigées à l'encontre du Docteur X. ;
Condamner la SA SELECTIF à restituer au Docteur X. la somme versée à titre d'acompte soit 10.000 Francs et ce, avec intérêts de droit à compter du 13 septembre 1994 ;
Condamner la SA SELECTIF à porter et payer au docteur X. à titre de légitimes dommages et intérêts la somme de 30.000 Francs ainsi que 15.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
[minute page 6] Condamner la SA SELECTIF aux entiers dépens de première instance et d'appel... »
La société SELECTIF demande à la Cour :
« Dire et juger que le consentement du docteur X. n'a pas été vicié.
Dire et juger que les formalismes des articles L. 121-23 et suivants du Code de la Consommation concernant le démarchage sont inapplicables en vertu des dispositions de l'article L. 121-22-4° du même Code.
Par conséquent :
Débouter le docteur X. de ses demandes, fins et conclusions.
Le déclarer mal fondé en son appel.
Confirmer en toutes ses dispositions, le jugement du Tribunal de Grande Instance de NÎMES du 18 novembre 1997.
Très subsidiairement en application de l'article 1142 du Code Civil, condamner le docteur X. au paiement de la somme de 100.000 Francs à titre de dommages-intérêts sous déduction faite de l'acompte de 10.000 Francs déjà versé.
Reconventionnellement condamner le docteur X. à paver à la société concluante la somme de 15.000 Francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Condamner le docteur X. en tous les dépens d’appel… »
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 7] MOTIFS et DÉCISION :
ATTENDU que le « concept MEDICARE » vendu par la société SELECTIF entrait bien dans la sphère d'activité du docteur X., médecin généraliste ;
Que l'appelant ne saurait dès lors invoquer une erreur sur les qualités substantielles du bien acquis ;
Que s'agissant d'un matériel en rapport direct avec l'activité qu'exerçait le docteur X., les dispositions des articles L. 121-23 à L. 121-28 du Code de la consommation relatives au démarchage ne sont pas applicables ;
Que la commande du 13 septembre 1994 était ferme et définitive, et qu'il y avait accord sur la chose et sur le prix ;
Que le docteur X., professionnel averti, ne démontre pas que son consentement a pu être vicié en raison de l'utilisation par la société intimée du nom MEDICARE pour son produit ;
ATTENDU que le docteur X. a refusé de prendre livraison du matériel, objet du contrat ; qu'il n'est pas établi que la société SELECTIF ait encore ce matériel en sa possession ; que le docteur X. aurait cessé toute activité professionnelle depuis le mois de septembre 1996 ;
Qu'en l'état de l'inexécution par le docteur X. de son obligation il convient d'allouer, par application des dispositions de l'article 1142 du Code Civil, la somme de 50.000 Francs à titre de dommages-intérêts à la société SELECTIF en réparation du préjudice qui lui a ainsi été occasionné (la somme de 10.000 francs versée à titre d'acompte étant à déduire de cette indemnité) ;
[minute page 8] ATTENDU que le docteur X., qui succombe sera condamné aux dépens de première instance et d'appel ;
Qu'il v a lieu d'allouer à la société SELECTIF la somme de 8.000 francs en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, pour les frais irrépétibles exposés tant en première instance qu'en appel ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort ;
Reçoit en la forme l'appel de Monsieur X. ;
Réforme le jugement déféré ;
Condamne Monsieur X. à paver à la société SELECTIF :
la somme de 50.000 Francs à titre de dommages-intérêts, dont sera déduit l'acompte de 10.000 Francs versé en septembre 1994 ;
la somme de 8.000 Francs en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, pour les frais irrépétibles exposés tant en première instance qu'en appel ;
Déboute les parties de leurs autres demandes, plus amples ou contraires ;
Condamne Monsieur X. aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers étant distraits au profit de la SCP POMIES RICHAUD ASTRAUD, avoués ;
Arrêt qui a été signé par Monsieur DELTEL, Président, et par Madame ORMANCEY, greffier.
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