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CA PARIS (7e ch. A), 9 octobre 2007

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (7e ch. A), 9 octobre 2007
Juridiction : Paris (CA), 7e ch. sect. A
Demande : 05/05210
Date : 9/10/2007
Nature de la décision : Réformation
Décision antérieure : TGI PARIS (5e ch. 1re sect.), 14 décembre 2004
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CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 1187

CA PARIS (7e ch. A), 9 octobre 2007 : RG n° 05/05210 

Publication : Juris-Data n° 352614

 

Extraits : « Considérant que les premiers juges ont, à tort, indemnisé les époux X. en prenant en compte leur seule déclaration de valeur de 350.000 francs figurant sur le contrat de garde-meubles signé avec la société UCHV ; Qu'en effet cette dernière produit ledit contrat en original, constitué d'un document d'un seul tenant, en double feuille, sur lequel les Conditions Particulières figurent au verso de la première page et les Conditions Générales au recto de la seconde page ; que si effectivement M. X. n'a pas porté sa signature au bas des Conditions Générales, il en a nécessairement eu connaissance en ouvrant le document et en apposant sa signature au bas des Conditions particulières, contrairement à ce que prétend la société FILIA MAIF ; que ces Conditions Générales sont donc opposables aux époux X. »

2/ « Considérant que pour s'opposer à l'application de la clause visant la sanction d'une évaluation forfaitaire au mètre cube, la société FILIA MAIF prétend qu'il s'agit d'une clause abusive ; Qu’en réplique, la société UCHV n'est pas fondée à invoquer l'irrecevabilité de cette demande nouvelle en application des dispositions de l'article 563 du Nouveau Code de procédure civile, une partie pouvant en appel exciper de moyens nouveaux ;

qu'en revanche, cette intimée rétorque, à bon droit, que cette clause qui prévoit une valorisation par défaut des biens remis en dépôt, en l'absence par le déposant de ses obligations déclaratives, ne crée nullement un déséquilibre au profit du dépositaire professionnel, puisque le déposant par ses seules déclarations peut y échapper ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

SEPTIÈME CHAMBRE SECTION A

ARRÊT DU 9 OCTOBRE 2007

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Numéro d'inscription au répertoire général : R.G. n° 05/05210. Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 décembre 2004 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 02/7109.

 

APPELANTE :

SA AXA FRANCE IARD

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux [adresse], Représentée par la SCP GRAPPOTTE-BENETREAU, avoué, Assistée de Maître Carole AMATHIEU-RUCKERT, avocat collaboratrice de Maître Robert PIGNOT

 

INTIMÉE :

Société UNION DES COMMISSIONNAIRES DE L'HOTEL DE VENTES

[adresse], Représentée par la SCP PETIT-LESENECHAL, avoué, Assistée de Maître Jean-Philippe CONFINO, avocat de la SELARL CABINET CONFINO

 

INTIMÉE :

Société FILIA MAIF

[adresse], Représentée par la SCP MIRA-BETTAN, avoué, Assistée de Maître Perrine CROSNIER, avocat

[minute page 2]

COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats et du délibéré :

PRÉSIDENT : Madame Sabine GARBAN

CONSEILLERS : Mme Marie-Bernadette LE GARS-STONE et Mme Janick TOUZERY-CHAMPION

GREFFIER : Dominique BONHOMME-AUCLERE

DÉBATS : A l'audience publique du 3 juillet 2007

ARRÊT : Rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile. Signé par Mme S. GARBAN, président, et par D. BONHOMME-AUCLERE, greffier.

 

EXPOSÉ DU LITIGE            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Le 7 juin 2000, M. X. a signé avec la société UNION DES COMMISSIONNAIRES DE L'HÔTEL DES VENTES (UCHV) deux devis, le premier portant sur l'enlèvement le 3 juillet 2000 de ses meubles de son domicile [adresse 1] à PARIS à destination d'un garde-meubles à Bagnolet, le second en vue du déménagement desdits meubles de ce garde-meubles jusqu'à son nouveau domicile [adresse 2] à PARIS à une date non déterminée, devis aux bas desquels figure la mention manuscrite suivante « y compris assurance pour 250.000 francs ». Puis les époux X.-Y. ont signé avec la même société à une date non précisée un contrat de garde-meubles, avec l'indication que la valeur globale de la totalité du mobilier confié est de 350.000 francs.

Le 3 juillet 2000 la société UCHV a procédé au déménagement des meubles des époux X. pour un volume de 24 mètres cube qu'elle a entreposés dans un garde-meubles situé dans la zone industrielle de la Molette au BLANC-MESNIL, exploité par la société MIOTTO.

[minute page 3] Le 10 septembre 2000 un incendie a détruit la totalité des meubles des époux X.

Les époux X., ayant déclaré ce sinistre à la société FILIA MAIF leur propre assureur, ont perçu de celle-ci une indemnisation d'un montant de 102.020,85 €.

Reprochant à la société UCHV diverses fautes à l'origine de leur préjudice, les époux X. l'ont fait assigner avec les assureurs de cette dernière les sociétés AXA ASSURANCES, devenue AXA FRANCE (assureur dommage) et ABEILLE ASSURANCES, devenue AVIVA (assureur responsabilité civile) devant le Tribunal de grande instance de PARIS ; la société UCHV a formé à son tour un appel en garantie à l'encontre de la société MIOTTO et des assureurs de celle-ci, les sociétés AGF (assureur dommage) et AZUR (assureur responsabilité civile).

Par jugement du 14 décembre 2004 ce Tribunal a :

- reçu l'intervention volontaire de la société FILIA MAIF,

- condamné la société UCHV à verser à la société FILIA MAIF, subrogée dans les droits des époux X., la somme de 53.357,16 €,

- dit que la société AXA ASSURANCES devra garantir la société UCHV de la condamnation prononcée à son encontre et ce dans les limites de son contrat soit pour la somme de 48.021,44 €,

- condamné les sociétés MIOTTO et AGF à garantir la société UCHV et la société AXA ASSURANCES dans la limite de la somme de 5.488,08 €,

- rejeté le surplus des demandes,

- condamné la société UCHV, sous les mêmes garanties que ci-dessus, à verser aux époux X. et à la société FILIA MAIF la somme totale de 3.000 € en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile,

- condamné la société UCHV sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile à payer aux sociétés AZUR et AVIVA chacune la somme de 500 €.

Par conclusions du 13 septembre 2005 la compagnie AXA FRANCE IARD, appelante n'a intimé devant la Cour que les sociétés UCHV et FILIA MAIF, pour solliciter l'infirmation de la décision entreprise relative aux condamnations mises à sa charge. Elle fait valoir que l'absence de déclaration détaillée dans le contrat de garde-meubles par les époux X. est sanctionnée par une indemnisation forfaitaire de I.500 francs par mètres cube contractuellement prévue. Elle offre en conséquence de régler à la société PILLA MAIF, subrogée dans les droits des époux X. la somme limitée de 4.939,35 E et lui réclame une indemnité de 5.000 € en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile.

Par conclusions du 29 mai 2007 la société UCHV, intimée formant appel incident, poursuit la confirmation du jugement querellé sauf à réduire le montant des condamnations mises à sa charge. Elle reprend à son compte l'argumentation de la compagnie AXA FRANCE IARD visant le manquement des déposants à leur obligation déclarative de sorte que l'indemnisation forfaitaire doit être calculée selon le volume des biens mis en dépôt. Elle offre de verser à la société FILIA MAIF la somme de 4.939,35 € et conclut au rejet des prétentions de cette dernière. A titre subsidiaire, elle sollicite la garantie de la compagnie AXA FRANCE IARD pour toutes condamnations qui pourraient être mises à sa charge au profit des époux X. ainsi que l'allocation d'une somme de 3.000 € à la charge de la société FILIA MAIF par application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile.

[minute page 4] Par conclusions du 5 décembre 2006, la société FILIA MAIF, intimée formant appel incident, requiert la confirmation du jugement dont appel, en ce qu'il a condamné la société UCHV à lui verser la somme de 53.357,16 €. Elle soutient qu'il n'est pas établi que les Conditions Générales visant une indemnisation calculée sur la base d'un forfait au mètre cube aient été portées à la connaissance de M. X., signataire du contrat de garde-meubles, de sorte qu'elles lui sont inopposables. Elle prétend que les Conditions Particulières, qui prévalent sur les Conditions Générales, proposent deux obligations de déclaration alternative et non cumulatives. Elle revendique l'inapplicabilité de la clause d'indemnisation calculée au mètre cube, dès lors qu'il s'agit d'une clause abusive et contraire au respect de l'article 1135 du Code civil. Plus subsidiairement, elle excipe d'un manquement de la société UCHV à son obligation de conseil et d'information Enfin elle réclame la condamnation de la société AXA FRANCE IARD à lui régler une indemnité de 3.000 au visa de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile.

Vu le rapport fait par le président à l'audience.

 

MOTIFS (justification de la décision)    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE, LA COUR :

Considérant que les premiers juges ont, à tort, indemnisé les époux X. en prenant en compte leur seule déclaration de valeur de 350.000 francs figurant sur le contrat de garde-meubles signé avec la société UCHV ;

Qu'en effet cette dernière produit ledit contrat en original, constitué d'un document d'un seul tenant, en double feuille, sur lequel les Conditions Particulières figurent au verso de la première page et les Conditions Générales au recto de la seconde page ; que si effectivement M. X. n'a pas porté sa signature au bas des Conditions Générales, il en a nécessairement eu connaissance en ouvrant le document et en apposant sa signature au bas des Conditions particulières, contrairement à ce que prétend la société FILIA MAIF ;

que ces Conditions Générales sont donc opposables aux époux X. ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3 des Conditions Générales, paragraphe « Valeur du Mobilier », il est indiqué en caractères gras :

« Afin de déterminer la responsabilité de l'entreprise en cas de perte ou d'avarie survenant au mobilier confié et de fixer les indemnités auxquelles il peut prétendre, il appartient obligatoirement au déposant, dans son propre intérêt :

- d'une part, de déclarer la valeur globale pour l'ensemble du mobilier,

- d'autre part d'établir une déclaration détaillée indiquant la valeur individuelle pour tous objets ou ensemble d'objets présentant à ses yeux une valeur particulière. (…) Dans cette déclaration doivent être identifiés, notamment tous objets à caractère artistique, historique ou de collection ainsi que ceux dont la valeur est égale ou supérieure à 2.000 francs (...)

A défaut de déclaration expresse, la valeur du mobilier est réputée déclarée sur la base d'un montant égal à 1.500 francs multiplié par le nombre de mètres cube de mobilier. »

Que l'attention de l'assuré a donc été attirée par cette clause en caractère très apparent, sur la nécessité de déposer deux déclarations cumulatives l'une globale et l'autre détaillée, et, sur la sanction qui s'y rattache en cas d'absence de ces déclarations ;

Qu'aux termes des Conditions Particulières, au bas desquelles M. X. a apposé sa signature et la mention « Bon pour accord » il est précisé au paragraphe :

[minute page 5] « DÉCLARATION DE VALEUR( à établir par le déposant)

- La valeur globale de la totalité du mobilier confié est de :

- Le déposant joint la déclaration détaillée précisant la désignation ainsi que la valeur attribuée à chaque objet et ensemble d'objets à caractère artistique, historique et de collection ou dont la valeur est égale ou supérieure à 2.000

A défaut, le mobilier confié est réputé ne contenir aucun objet répondant aux critères énoncés ci-dessus » ;

Que M. X. a porté manuscritement la somme en chiffres et en lettres de 350.000 francs pour la valeur globale de la totalité du mobilier, sans établir une déclaration détaillée, alors même qu'il apparaît des pièces produites et notamment des photographies qu'il est un collectionneur averti d'objets d'art ;

Considérant que pour s'opposer à l'application de la clause visant la sanction d'une évaluation forfaitaire au mètre cube, la société FILIA MAIF prétend qu'il s'agit d'une clause abusive ;

Qu’en réplique, la société UCHV n'est pas fondée à invoquer l'irrecevabilité de cette demande nouvelle en application des dispositions de l'article 563 du Nouveau Code de procédure civile, une partie pouvant en appel exciper de moyens nouveaux ;

qu'en revanche, cette intimée rétorque, à bon droit, que cette clause qui prévoit une valorisation par défaut des biens remis en dépôt, en l'absence par le déposant de ses obligations déclaratives, ne crée nullement un déséquilibre au profit du dépositaire professionnel, puisque le déposant par ses seules déclarations peut y échapper ;

Considérant que le défaut de conseil reproché par la société FILIA MAIF à la société UCHV n'est pas davantage démontré, dès lors que l'attention des époux X. a été suffisamment attirée par les clauses des Conditions Générales, figurant en caractère gras, et stipulant clairement la nécessité de faire deux déclarations, l'une de valeur globale et l'autre détaillée, ainsi que la sanction en cas d'absence de ces déclarations ; que M. X. architecte et Mme X. dirigeante d'entreprise étaient tout à fait à même de comprendre le mécanisme de la déclaration de valeur, d'autant qu'ils étaient collectionneurs et connaissaient la valeur de leurs biens ou meubles estimé par eux devant les premiers juges à la somme globale de 508.086,89 €, ainsi qu'il ressort des conclusions de la société FILIA MAIF ;

Que le jugement sera donc infirmé ; qu'il sera donné acte aux sociétés UCHV et AXA FRANCE IARD de leur offre de garantie relative à l'évaluation forfaitaire au mètre cube d'un montant de 4.939,35 € correspondant à 24 mètres cube X 1.500 francs = 36.000 francs, dont à déduire une franchise contractuelle de 10 % ; qu'en tant que de besoin, elles seront condamnées solidairement à régler cette somme à la société FILIA MAIF, subrogée dans les droits des époux X. ;

Considérant qu'aucune circonstance d'équité ne commande l'application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile au bénéfice de l'une ou l'autre des parties ;

Considérant que la société FILIA MAIF qui succombe dans son appel supportera l'ensemble des dépens ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)              (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 6] PAR CES MOTIFS :

Réforme le jugement dont appel en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

Donne acte aux sociétés UCHV et AXA FRANCE IARD de leur offre de régler à la société FILIA MAIF, subrogée dans les droits des époux X., la somme de 4.939,35 €,

En tant que de besoin, condamne solidairement les sociétés UCHV et AXA FRANCE IARD à verser à la société FILIA MAIF la somme de 4.939,35 € au titre de l'évaluation forfaitaire du préjudice,

Rejette toutes les autres demandes,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile au profit de quiconque,

Condamne la société FILIA MAIF aux dépens de première instance et d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de procédure civile.

Le Greffier,                  Le Président,