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CA AMIENS (1re ch. 2e sect.), 22 mai 2008

Nature : Décision
Titre : CA AMIENS (1re ch. 2e sect.), 22 mai 2008
Pays : France
Juridiction : Amiens (CA), 1re ch. sect. 2
Demande : 07/01464
Date : 21/04/2008
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Juris Data
Date de la demande : 29/03/2007
Numéro de la décision : 233
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CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 1235

CA AMIENS (1re ch. 2e sect.), 22 mai 2008 : RG n° 07/01464 ; arrêt n° 233

Publication : Juris-Data n° 365826

 

Extraits : 1/ « Attendu que la banque du groupe Casino fait valoir à juste titre qu'il n'appartient pas au premier juge de soulever d'office un moyen tiré d'une irrégularité du contrat, en invoquant les dispositions de l'article L. 311-10 du code de la consommation ; Attendu que seul l'emprunteur peut se prévaloir de la méconnaissance de règles édictées dans son seul intérêt, seraient-elles d'ordre public ».

2/ « Attendu qu'en revanche conformément à l'article 12 du code de procédure civile le juge peut relever d'office le caractère abusif ou illicite d'une clause sur le fondement de l'article L. 131-2 [N.B. lire sans doute 132-1] du code de la consommation, sous réserve de respecter le principe du contradictoire prévu par l'article 16 du code de procédure civile ; Attendu qu'en l'espèce il ne ressort pas des termes du jugement frappé d'appel que le premier juge a invité la demanderesse à conclure sur le caractère éventuellement abusif et illicite de la clause aux termes de laquelle le montant du découvert convenu initialement peut-être augmenté sur simple accord tacite des parties ; qu'il ne pouvait donc pas déclaré cette clause abusive dans ces conditions ».

3/ « Attendu que devant la cour la demanderesse soutient que cette clause permet à l'emprunteur, qui n'a pas forcément besoin de l'intégralité du crédit consenti dès l'origine de la relation contractuelle, d'utiliser une fraction du crédit consenti comme le prévoit l'article L. 311-9 du code de la consommation ; Attendu que selon les termes de l'offre préalable « le montant maximum du découvert autorisé par le prêteur est fixé à 15.000 € » ; mais que les époux X. avaient sollicité lors de la signature un crédit de 3.100 € ; Attendu que selon l'article 4 des conditions générales figurant au verso « la fraction disponible du découvert peut évoluer sur une demande [spécifique de la part de l'emprunteur dans la limite du montant maximum du découvert autorisé » ; que cette formulation détourne les dispositions de l'article L. 311-10 du code de la consommation selon lequel le prêteur doit préciser le montant du crédit ;

Que cette clause qui permet une augmentation du crédit sans nouvelle offre préalable prive l'emprunteur de la faculté d'ordre public de rétractation ; Attendu qu'il y a lieu en conséquence de déclarer que la clause aux termes de laquelle le montant du découvert convenu initialement peut être augmenté sur simple accord tacite des parties est abusive et doit être réputée non écrite ».

4/ « Attendu que la forclusion constitue une fin de non recevoir d'ordre public, aux termes de l'article L. 313-16 du Code de la consommation, qu'il appartient au juge de la soulever d'office, conformément aux dispositions de l'article 125 du nouveau Code de procédure civile ; qu'il convient de rechercher si la banque du groupe Casino n'est pas forclose en son action ; […] Attendu qu'en l'espèce, aux termes de l'offre préalable d'ouverture de crédit consentie le 8 août 2003, le découvert autorisé n'était pas, contrairement aux prétentions de la banque du groupe Casino d'un montant de 15.000 € mais d'un montant de 3.100 € quelque soit la formulation utilisée ; [...] Que dans ces conditions le dépassement du découvert autorisé de 3.100 en avril 2004 constitue l'événement qui a donné naissance à l'action au sens des dispositions de l'article L. 311-37 du code de la consommation ; que l'action introduite par la banque du groupe Casino par acte en date du 27 décembre 2006, au-delà du délai de deux ans précité, est donc forclose ».

 

COUR D’APPEL D’AMIENS

PREMIÈRE CHAMBRE DEUXIÈME SECTION

ARRÊT DU 22 MAI 2008

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 07/01464. Arrêt n° 233. APPEL D'UN JUGEMENT DU TRIBUNAL D'INSTANCE D'ABBEVILLE du 9 février 2007.

 

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE :

SA BANQUE DU GROUPE CASINO

[adresse], Représentée par la SCP LE ROY, avoué à la Cour et plaidant par Maître Xavier D'HELLENCOURT, avocat au barreau d'AMIENS

 

ET :

INTIMÉS :

Monsieur X.

le [date] à [ville], [adresse], Assigné à domicile suivant exploit de Maître CARTON Huissier de Justice à ABBEVILLE en date du 23 octobre 2007 à la requête de la BANQUE DU GROUPE CASINO. Réassigné à domicile suivant exploit de Maître CARTON Huissier de Justice à ABBEVILLE en date du 4 janvier 2008 à la requête de la BANQUE DU GROUPE CASINO. Non comparant.

Madame Y. épouse X.

née le [date] à [ville], [adresse], Assignée à domicile suivant exploit de Maître CARTON Huissier de Justice [minute page 2] à ABBEVILLE en date du 23 octobre 2007 à la requête de la BANQUE DU GROUPE CASINO. Réassignée à sa personne suivant exploit de Maître CARTON Huissier de Justice à ABBEVILLE en date du 4 janvier 2008 à la requête de la BANQUE DU GROUPE CASINO. Non comparante.

 

DÉBATS : A l'audience publique du 14 mars 2008 devant Mme SIX, Conseiller, entendue en son rapport, magistrat rapporteur siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu de l'article 786 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 22 mai 2008.

GREFFIER : Mme AZAMA

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Mme Le Conseiller en a rendu compte à la Cour composée de : Mme SCHOENDOERFFER, Président, M. FLORENTIN et Mme SIX, Conseillers qui en ont délibéré conformément à la Loi.

PRONONCÉ PUBLIQUEMENT Le 22 mai 2008 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ; Mme SCHOENDOERFFER, Président, a signé la minute avec M. DROUVIN, Greffier.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

DÉCISION :

Selon une offre préalable en date du 8 août 2003 la banque du groupe Casino a consenti aux époux X. un montant maximum de découvert de 15.000 €, assorti d'un taux d'intérêt de 17,26 %, le montant de la fraction disponible du découvert s'élevant à 3.100 €.

Plusieurs échéances étant impayées la banque du groupe Casino a mis les emprunteurs en demeure, par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 14 juin 2006 de lui régler la somme de 9.371,67 €.

[minute page 3] Par acte en date du 27 décembre 2006 la banque du groupe Casino a fait assigner les époux X. devant le tribunal d'instance afin de les voir condamner solidairement à lui payer la somme de 9.490,23 € avec intérêt au taux de 16,13 % à compter du 13 juillet 2006 sur la somme de 8.792,90 €, outre la somme de 765 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la somme de 765 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et injustifiée.

Par jugement réputé contradictoire le tribunal d'instance d'Abbeville a déclaré la banque du groupe Casino irrecevable pour cause de forclusion de son action, et laissé les dépens à la charge de cette société.

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 29 mars 2007 la banque du groupe Casino a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions signifiées le 12 décembre 2007 elle demande à la cour de :

- infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- à titre principal dire irrecevable comme ne pouvant être soulevées d'office les prétendues irrégularités relevant de l'ordre public de protection,

- subsidiairement constater qu'en prévoyant un montant de découvert autorisé de 15.000 €, l'offre préalable d'ouverture de crédit ne nécessite pas de nouvel avenant dans la limite de ce montant de 15.000 €,

- condamner solidairement les époux les époux X. à lui payer la somme de 9.490,23 € avec intérêt au taux de 16,13 % sur la somme de 8.792,90 € à compter du 13 juillet 2006 et jusqu'à parfait paiement,

- les condamner solidairement à lui payer la somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- les condamner aux dépens de première instance et d'appel.

Elle fait valoir que la méconnaissance des exigences des articles L. 311-8 et L. 311-9 du code de la consommation ne peut être opposée qu'a la demande de celui que ces dispositions ont pour objet de protéger ; que le premier juge ne pouvait donc relever d'office de prétendues irrégularités relevant de l'ordre public de protection et ne pouvait considérer que le contrat de crédit portait sur un découvert autorisé de 3.100 € qui avait été dépassé à compter du mois d'avril 2004 et estimer que la demande introduite en décembre 2006 est atteinte de forclusion.

Elle affirme que le montant du découvert est resté dans la limite du crédit maximum consenti initialement à hauteur de 15.000 €, désigné sous le vocable de découvert maximum autorisé ; que l'évolution du découvert utile initial de 3.100 €, ne peut constituer la défaillance de l'emprunteur au sens de l'article L. 311-7 du code de la consommation.

Elle soutient que «Si par impossible l'offre préalable d'ouverture de crédit signée le 8 août 2003 était déclarée non conforme, la déchéance du droit aux intérêts prévue par les articles L. 311-8 à L. 311-13 du code de la consommation ne pourrait porter que sur les intérêts échus depuis cette date, sinon depuis le 28 janvier 2005, date à laquelle le premier alinéa de [minute page 4] l'article L. 311-9 du code de la consommation s'est vu modifié en mettant à la charge du prêteur la concrétisation d'une offre préalable non seulement pour le contrat initial mais également pour toute augmentation de crédits consentie » (sic).

Elle ajoute que la suppression de la totalité des intérêts échus depuis la signature du contrat du 8 août 2003 ainsi que de l'indemnité de 8 % entraînerait une rupture d'équilibre de l'économie du contrat.

M. X., réassigné à personne, et Mme X., réassignée à domicile par actes du 4 janvier 2008 n'ont pas constitué avoué.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE LA COUR,

Attendu que M. X. n'ayant pas été assigné à personne, il sera statué par arrêt par défaut ;

Attendu que la banque du groupe Casino fait valoir à juste titre qu'il n'appartient pas au premier juge de soulever d'office un moyen tiré d'une irrégularité du contrat, en invoquant les dispositions de l'article L. 311-10 du code de la consommation ;

Attendu que seul l'emprunteur peut se prévaloir de la méconnaissance de règles édictées dans son seul intérêt, seraient-elles d'ordre public ;

Attendu qu'en revanche conformément à l'article 12 du code de procédure civile le juge peut relever d'office le caractère abusif ou illicite d'une clause sur le fondement de l'article L. 131-2 [N.B. lire sans doute 132-1] du code de la consommation, sous réserve de respecter le principe du contradictoire prévu par l'article 16 du code de procédure civile ;

Attendu qu'en l'espèce il ne ressort pas des termes du jugement frappé d'appel que le premier juge a invité la demanderesse à conclure sur le caractère éventuellement abusif et illicite de la clause aux termes de laquelle le montant du découvert convenu initialement peut-être augmenté sur simple accord tacite des parties ; qu'il ne pouvait donc pas déclaré cette clause abusive dans ces conditions ;

Attendu que devant la cour la demanderesse soutient que cette clause permet à l'emprunteur, qui n'a pas forcément besoin de l'intégralité du crédit consenti dès l'origine de la relation contractuelle, d'utiliser une fraction du crédit consenti comme le prévoit l'article L. 311-9 du code de la consommation ;

Attendu que selon les termes de l'offre préalable « le montant maximum du découvert autorisé par le prêteur est fixé à 15.000 € » ; mais que les époux X. avaient sollicité lors de la signature un crédit de 3.100 € ;

Attendu que selon l'article 4 des conditions générales figurant au verso « la fraction disponible du découvert peut évoluer sur une demande [minute page 5] spécifique de la part de l'emprunteur dans la limite du montant maximum du découvert autorisé » ; que cette formulation détourne les dispositions de l'article L. 311-10 du code de la consommation selon lequel le prêteur doit préciser le montant du crédit ;

Que cette clause qui permet une augmentation du crédit sans nouvelle offre préalable prive l'emprunteur de la faculté d'ordre public de rétractation ;

Attendu qu'il y a lieu en conséquence de déclarer que la clause aux termes de laquelle le montant du découvert convenu initialement peut être augmenté sur simple accord tacite des parties est abusive et doit être réputée non écrite

Attendu que la forclusion constitue une fin de non recevoir d'ordre public, aux termes de l'article L. 313-16 du Code de la consommation, qu'il appartient au juge de la soulever d'office, conformément aux dispositions de l'article 125 du nouveau Code de procédure civile ; qu'il convient de rechercher si la banque du groupe Casino n'est pas forclose en son action ;

Attendu qu'il ressort des dispositions de l'article L. 311-37 du Code de la consommation, dans sa rédaction applicable au présent litige, que les actions engagées en matière de crédit à la consommation doivent être formées dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance, à peine de forclusion ;

Attendu que, conformément à la règle selon laquelle le point de départ d'un délai à l'expiration duquel une action ne peut plus s'exercer se situe à la date de l'exigibilité de l'obligation qui lui a donné naissance, le délai biennal prévu par l'article L. 311-37 du Code de la consommation court, dans le cas d'une ouverture de crédit reconstituable et assortie d'une obligation de remboursement à échéances convenues, à compter du dépassement du découvert autorisé ou en l'absence de dépassement, et compte tenu des termes du contrat à compter de toute échéance impayée non régularisée ;

Attendu qu'en l'espèce, aux termes de l'offre préalable d'ouverture de crédit consentie le 8 août 2003, le découvert autorisé n'était pas, contrairement aux prétentions de la banque du groupe Casino d'un montant de 15.000 € mais d'un montant de 3.100 € quelque soit la formulation utilisée ;

Attendu qu'il ressort de l'historique du compte versé aux débats que le montant du découvert initial de 3.100 €, hors assurance et hors frais, a été dépassé dès le mois d'avril 2004 sans, au demeurant, que la banque du groupe Casino ne justifie de la demande spécifique des emprunteurs exigée par l'article 4 précité du contrat ;

Que dans ces conditions le dépassement du découvert autorisé de 3.100 en avril 2004 constitue l'événement qui a donné naissance à l'action au sens des dispositions de l'article L. 311-37 du code de la consommation ; que l'action introduite par la banque du groupe Casino par acte en date du 27 décembre 2006, au-delà du délai de deux ans [minute page 6] précité, est donc forclose ; que la banque du groupe Casino doit être déboutée de toutes ses demandes

Attendu que le jugement doit être confirmé en toutes ses dispositions

Attendu qu'il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile

Attendu que la banque du groupe Casino doit être condamnée aux dépens d'appel.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

Statuant par défaut,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant :

Dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne la banque du groupe Casino aux dépens d'appel et autorise leur recouvrement conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER,           LE PRÉSIDENT