TI LILLE, 18 septembre 2007
CERCLAB - DOCUMENT N° 1264
TI LILLE, 18 septembre 2007 : RG n° 07-001371 ; jugt n° 1371/07
(sur appel CA Douai (8e ch. sect. 1), 22 janvier 2009 : RG n° 07/06511)
Extraits : 1/ « L'article L. 311-9 du code de la consommation dispose que « lorsqu'il s'agit d'une ouverture de crédit qui, assortie ou non de l'usage d'une carte de crédit, offre à son bénéficiaire la possibilité de disposer de façon fractionnée, aux dates de son choix, du montant du crédit consenti, l'offre préalable n'est obligatoire pour le contrat initial ». Cette dispense de réitération ne s'étend pas aux nouvelles ouvertures de crédit. Dès lors, toute modification du montant ou du taux du crédit précédemment accordé, qui touche à un des éléments constitutifs du contrat, doit être conclue dans les termes d'une offre préalable comportant les mentions prescrites par l'article L. 311-10 du code de la consommation.
Le contrat de crédit prévoit en son article relatif aux conditions du crédit que .le montant de la fraction disponible à l'ouverture du compte pourra évoluer dans la limite du montant maximum de découvert autorisé fixé au recto, sauf si depuis l'ouverture de crédit ou la dernière augmentation de la fraction disponible du découvert, l'emprunteur se trouve dans un des cas visés à l'article 11.6. Cette clause, si elle autorise les parties à augmenter le montant initial de l'ouverture de crédit, soit 10.000 €, dans la limite de la somme de 15.000 €, et si elle soumet l'exercice de cette faculté aux conditions qu'elle énonce, qui excluent la possibilité d'une augmentation tacite du montant du découvert, ne stipule pas l'obligation de délivrance d'une nouvelle offre préalable et par conséquent la nécessité d'une acceptation formelle de celle-ci et la faculté, pour les emprunteurs, de rétracter leur consentement.
Une telle clause, qui permet au prêteur de ne pas, pour chaque nouveau crédit que constitue l'augmentation du montant du crédit initial, délivrer à l'emprunteur une offre préalable que ce dernier doit formellement accepter, et de priver l'emprunteur de la faculté d'ordre public de rétracter son acceptation, crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, au détriment du consommateur. En application de l'article L. 132-1 du code de la consommation, cette clause doit donc être déclarée abusive. »
2/ « La clause litigieuse, qui aggrave la situation de l'emprunteur au regard des dispositions des articles L. 311-8 et suivants du code de la consommation en ne lui permettant pas de bénéficier des garanties de formes et de délais prévues par le loi, rend l'offre préalable non conforme aux dits articles, ce qui justifie la déchéance du droit aux intérêts mais ne saurait entraîné la nullité du crédit. »
TRIBUNAL D’INSTANCE DE LILLE
JUGEMENT DU 18 SEPTEMBRE 2007
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 07-001371. Jugement n° 1371/07.
DEMANDEUR(S) :
La SA BANQUE SOLFEA
[adresse], représenté(e) par Maître HANUS Christian, avocat du barreau de LILLE, substitué par Maître THIERY
DÉFENDEUR(S) :
Monsieur X.
[adresse], non comparant
Madame X. née Y.
[adresse], assisté(e) de Maître MAZARD Sylviane, avocat au barreau de LILLE
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Président : Emilie PECQUEUR
Greffier : Claudine HEYNDRICKX
DÉBATS : Audience publique du : 3 juillet 2007
JUGEMENT : réputé contradictoire, en premier ressort, rendu le 18 septembre 2007, par Emilie PECQUEUR, Président, assistée de Dominique DEBRUYNE, Greffier, par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] OBJET DU LITIGE :
Suivant offre préalable en date du 4 septembre 2004, la SA PETROFIGAZ, aujourd'hui dénommée la SA SOLFEA a consenti à Monsieur X. et Madame Y. épouse X. une ouverture de crédit utilisable par fractions et remboursable par échéances mensuelles fixées en fonction du solde dû, le taux effectif global de 12,95 % lors de la souscription du contrat étant révisable suivant le montant effectivement emprunté et les variations en plus ou en moins du taux de base que le prêteur applique aux opérations de même nature.
Alléguant le défaut de paiement des échéances mensuelles, la SA SOLFEA a fait citer Monsieur X. et Madame Y. épouse X. devant ce tribunal par acte d'huissier en date du 27 mars 2007, en paiement des sommes suivantes :
- 11.166,80 €, outre les intérêts au taux du contrat jusqu'à parfait paiement à compter du 13 juillet 2007 sur la somme de 10.341,40, au titre du prêt impayé,
- 400 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
La SA SOLFEA sollicite en outre l'exécution provisoire de la présente décision. Monsieur X., assigné par dépôt de l'acte à l'étude, n'a pas comparu.
Madame Y. épouse X. a comparu à l'audience et, soulève la nullité du crédit pour vice du consentement et dol au motif que la clause d'augmentation du montant du crédit est abusive, et en raison de l'absence d'information sur la durée des échéances, leur montant, le montant des intérêts prélevés et les frais d'assurance. Elle sollicite que sa dette soit ramenée à 4.088,61 €, et que des délais de paiement lui soit accordés, à raison de 80 € par mois.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION
1) Sur le caractère abusif de la clause de variation du capital :
Vu la directive 93/13/CEE du 5 avril 2003 relative aux clauses abusives ;
Vu les articles L. 132-1 et suivants, et L. 311-8 et suivants du code de la consommation ;
Vu les avis n° 02-04 et 03-04 de la commission des clauses abusives en date du 27 mai 2004 ;
Vu l'avis de la cour de cassation en date du 10 juillet 2006 ;
Vu l'arrêt de la 1ère chambre civile de la Cour de Cassation en date du 1er décembre 1993 (CGL c/ DAGUERRE),
L'article L. 311-9 du code de la consommation dispose que « lorsqu'il s'agit d'une ouverture de crédit qui, assortie ou non de l'usage d'une carte de crédit, offre à son bénéficiaire la possibilité de disposer de façon fractionnée, aux dates de son [minute page 3] choix, du montant du crédit consenti, l'offre préalable n'est obligatoire pour le contrat initial ». Cette dispense de réitération ne s'étend pas aux nouvelles ouvertures de crédit.
Dès lors, toute modification du montant ou du taux du crédit précédemment accordé, qui touche à un des éléments constitutifs du contrat, doit être conclue dans les termes d'une offre préalable comportant les mentions prescrites par l'article L. 311-10 du code de la consommation.
Le contrat de crédit prévoit en son article relatif aux conditions du crédit que .le montant de la fraction disponible à l'ouverture du compte pourra évoluer dans la limite du montant maximum de découvert autorisé fixé au recto, sauf si depuis l'ouverture de crédit ou la dernière augmentation de la fraction disponible du découvert, l'emprunteur se trouve dans un des cas visés à l'article 11.6.
Cette clause, si elle autorise les parties à augmenter le montant initial de l'ouverture de crédit, soit 10.000 €, dans la limite de la somme de 15.000 €, et si elle soumet l'exercice de cette faculté aux conditions qu'elle énonce, qui excluent la possibilité d'une augmentation tacite du montant du découvert, ne stipule pas l'obligation de délivrance d'une nouvelle offre préalable et par conséquent la nécessité d'une acceptation formelle de celle-ci et la faculté, pour les emprunteurs, de rétracter leur consentement.
Une telle clause, qui permet au prêteur de ne pas, pour chaque nouveau crédit que constitue l'augmentation du montant du crédit initial, délivrer à l'emprunteur une offre préalable que ce dernier doit formellement accepter, et de priver l'emprunteur de la faculté d'ordre public de rétracter son acceptation, crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, au détriment du consommateur. En application de l'article L. 132-1 du code de la consommation, cette clause doit donc être déclarée abusive.
2) Sur les conséquences de la présence de clauses abusives dans le contrat de crédit :
L'article L. 311-33 du code de la consommation dispose que le prêteur qui accorde un crédit sans saisir l'emprunteur d'une offre préalable satisfaisant aux conditions fixées par les articles L. 311-8 à L. 311-13 est déchu du droit aux intérêts.
La clause litigieuse, qui aggrave la situation de l'emprunteur au regard des dispositions des articles L. 311-8 et suivants du code de la consommation en ne lui permettant pas de bénéficier des garanties de formes et de délais prévues par le loi, rend l'offre préalable non conforme aux dits articles, ce qui justifie la déchéance du droit aux intérêts mais ne saurait entraîné la nullité du crédit.
En conséquence, la créance de la SA SOLFEA sera fixée comme suit :
* Montant total emprunté : 10.300 €
* Montant total remboursé : 2.263 €
Somme restant due : 8.037 €, avec intérêts au taux légal à compter du 16 mai 2007, date de la mise en demeure.
L'article L. 311-33 du code de la consommation exclut la condamnation au paiement de toute somme autre que le montant du capital prêté, il convient de débouter SA SOLFEA de ses demandes au titre des primes d'assurance et de l'indemnité légale.
[minute page 4] Madame Y. épouse X. ne démontre l'existence d'aucune manœuvre frauduleuse de nature à caractériser un dol ou un vice du consentement.
3) Sur la demande de délais de paiement :
En application de l'article 1244-1 du Code civil et eu égard à la situation économique de la partie défenderesse, il y a lieu de lui accorder la possibilité des délais pendant 12 mois selon les modalités définies au présent dispositif, à charge pour Madame X. de saisir la commission de surendettement le cas échéant.
Afin d'assurer le paiement de la dette suivant l'échéancier fixé par le présent jugement, il convient d'ordonner que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital de la dette.
4) Sur l'exécution provisoire :
Compatible avec la nature de l'affaire, l'exécution provisoire du présent jugement sera ordonnée.
5) Sur les dépens et l'article 700 du nouveau Code de procédure civile :
Monsieur X. et Madame Y. épouse X., qui perdent, seront condamnés aux dépens par application de l'article 696 du nouveau Code de procédure civile mais l'équité commande de ne pas allouer l'indemnité demandée par la SA SOLFEA sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS
Le Tribunal, statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort :
DÉCLARE la clause de variation du capital prévue au contrat abusive ;
CONDAMNE solidairement Monsieur X. et Madame Y. épouse X. à payer à la SA SOLFEA, la somme de 8.037 €, avec intérêts au taux légal à compter du 16 mai 2007 ;
DIT que Madame Y. épouse X. pourra s'acquitter du montant de cette condamnation par 11 versements de 80 € et un dernier comprenant le solde ;
DIT que le premier versement devant intervenir dans le mois suivant la signification du présent jugement et les suivants chaque mois avant la date anniversaire du premier versement ;
DIT que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital de la dette ;
[minute page 5] DIT qu'à défaut du respect d'un seul versement à son échéance, Madame Y. épouse X. perdra le bénéfice du présent échéancier, le solde de la dette devenant immédiatement exigible ;
ORDONNE l'exécution provisoire du présent jugement ;
DÉBOUTE la SA SOLFEA du surplus de ses demandes ;
CONDAMNE Monsieur X. et Madame Y. épouse X. aux dépens.
Ainsi jugé aux lieu, jour, mois et an ci-dessus.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
- 5749 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Effets de l’action - Autres effets - Déchéance des intérêts
- 6631 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit à la consommation - Crédits spécifiques - Crédit renouvelable - 2 - Clause de dispense d’offre (augmentation du crédit) - Obligation de faire une offre
- 6633 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit à la consommation - Crédits spécifiques - Crédit renouvelable - 4 - Clause de dispense d’offre (augmentation du crédit) - Clauses abusives
- 6635 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit à la consommation - Crédits spécifiques - Crédit renouvelable - 6 - Clause de dispense d’offre (augmentation du crédit) - Notion d’augmentation du crédit