CA PARIS (8e ch. sect. B), 14 décembre 1995
![](/application/asset/thumbnails/default.png?v=3.2.0)
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 1287
CA PARIS (8e ch. sect. B), 14 décembre 1995 : RG n° 94/7982
Publication : RJDA 3/96, n° 433
Extrait : « Mais considérant que cette clause qui impose à l'élève le paiement même en cas d'inexécution du contrat imputable à l'Ecole ou causé par un cas fortuit ou de force majeure (par exemple maladie ou décès) revêt un caractère abusif en ce qu'elle procure un avantage excessif au contractant professionnel ; considérant que celui-ci du fait de sa situation économique se trouvait en mesure d'imposer à sa clientèle cette clause ; qui doit être réputée non écrite malgré l'absence d'un décret en ayant prononcé l'interdiction ; que les demandes en paiement de frais de scolarité et en dommages et intérêts en raison du préjudice causé par le retard de paiement sont mal fondées ».
COUR D’APPEL DE PARIS
HUITIÈME CHAMBRE SECTION B
ARRÊT DU 14 DÉCEMBRE 1995
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 94-7982. Sur appel d’un jugement du TI PARIS 20ème arrondissement rendu le 8 février 1994 (Monsieur GOUDET). R.G. n° 93/2737. Date de l’ordonnance de clôture : 1er juin 1995.
PARTIES EN CAUSE :
1°) SOCIÉTÉ SAINT LOUIS UNION ACADÉMIE - SA
dont le siège est [adresse] agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, APPELANTE, Représentée par Maître LECHARNY, Avoué, Assistée de Maître COUILLAUD-MONTIER, Avocat (D 1754)
ET
2°) Madame X. née Y.
demeurant [adresse], INTIMÉE, Représentée par la SCP BOMMART et FORSTER, Avoués, Sans Avocat
COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats et du délibéré : PRÉSIDENT : Madame ANTOINE - CONSEILLERS : Monsieur PIQUARD - Madame PARENTY.
GREFFIER lors des débats : Madame BAUDUIN
DÉBATS : à l'audience publique du 2 NOVEMBRE 1995
[minute page 2] ARRÊT : CONTRADICTOIRE - Prononcé publiquement par Madame ANTOINE, Président, lequel a signé la minute avec Madame BAUDUIN, Greffier.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Suivant acte sous seing privé du 11 septembre 1992, Madame X. a passé un contrat de formation à temps plein avec l'École de Coiffure SAINT LOUIS SA aux fins de préparer un CAP option coiffure pendant deux années - 1992/1993 et 1993/1944 -.
Le montant de la scolarité sur deux ans s'élève à 32.000 francs.
Par courrier recommandé en date du 24 novembre 1992, Madame X. a prévenu l'École que pour des raisons de santé il ne lui était pas possible de suivre la formation prévue. Elle a cessé de régler les frais de scolarité.
Par acte d'huissier du 27 octobre 1993 la société ÉCOLE SAINT LOUIS a assigné Madame X. en paiement de la somme de 28.000 francs avec intérêts légaux, 5.000 francs à titre de dommages et intérêts et 5.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Par jugement en date du 8 février 1994, le Tribunal d'Instance de PARIS 20ème arrondissement, a débouté l'ÉCOLE SAINT LOUIS de l'ensemble de ses demandes, débouté Madame X. de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts, ordonné l'exécution provisoire, condamné l'ÉCOLE SAINT LOUIS au paiement des dépens, ainsi que d'une somme de 3.500 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, motif pris de ce que la maladie de Madame X. irrésistible et imprévisible au moment du contrat, constituait un événement de force majeure, qui rend l'exécution du contrat de formation impossible pour elle.
La société SAINT LOUIS a relevé appel de cette décision et conclut à voir, par infirmation :
- condamner Madame X. à régler la somme de 28.000 francs avec intérêts légaux à compter de la date de mise en demeure ainsi qu'à payer la somme de 10.000 francs à titre de dommages et intérêts à raison du préjudice subi dû au retard du paiement et de 15.000 francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. L'appelante se prévaut d'une clause contractuelle prévoyant un prix forfaitaire pour toute la durée du contrat, excluant toute éventuelle annulation, clause qui ne serait pas selon elle abusive et devrait recevoir application.
[minute page 3] En réplique Madame X. conclut à la confirmation du jugement et à l'allocation d'une somme de 10.000 francs pour procédure abusive et 6.000 francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Elle soutient être exonérée de tout dommages et intérêts en raison de la maladie qui l'a empêchée de poursuivre sa scolarité.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE, LA COUR,
Qui se réfère expressément pour la relation des faits au jugement attaqué, pour l'énoncé des moyens et prétentions des parties aux écritures d'appel de celles-ci.
CONSIDÉRANT qu'il est acquis aux débats que l'état de santé de Madame X. ne lui a pas permis de suivre l'enseignement donné par l'ÉCOLE SAINT LOUIS en 1992 et 1993 ; qu'il résulte en effet des certificats médicaux du docteur Z. que pendant toute cette période Madame X. a dû subir des soins constants lui interdisant toute activité professionnelle ;
CONSIDÉRANT que cette maladie imprévisible et irrésistible au moment du contrat, constitue un événement de force majeure qui rend l'exécution du contrat impossible pour X. bien que n'étant pas extérieure à celle-ci ;
CONSIDÉRANT que nonobstant les dispositions des articles 1147 et 1148 du code civil l'appelante sollicite paiement du prix convenu au contrat en arguant de la stipulation contractuelle aux termes de laquelle :
- « Le contrat devient définitif après la signature,
- « Le montant du contrat sera dû en totalité,
- « Aucun motif ne sera retenu pour une éventuelle annulation.
Mais CONSIDÉRANT que cette clause qui impose à l'élève le paiement même en cas d'inexécution du contrat imputable à l'Ecole ou causé par un cas fortuit ou de force majeure (par exemple maladie ou décès) revêt un caractère abusif en ce qu'elle procure un avantage excessif au contractant professionnel ;
CONSIDÉRANT que celui-ci du fait de sa situation économique se trouvait en mesure d'imposer à sa clientèle cette clause ; qui doit être réputée non écrite malgré l'absence d'un décret en ayant prononcé l'interdiction ; que les demandes en paiement de frais de scolarité et en dommages et intérêts en raison du préjudice causé par le retard de paiement sont mal fondées ;
CONSIDÉRANT que la société ÉCOLE SAINT LOUIS n'a pas agi dans l'intention de nuire, ou avec une légèreté blâmable ; que la demande en dommages et intérêts, formée par l'intimée, a été à bon droit rejetée ; que le jugement [minute page 4] sera confirmé en toutes ses dispositions ;
CONSIDÉRANT que l'équité commande d'allouer à Madame X. la somme de 5.000 francs au titre des frais irrépétibles engagés en appel ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Se substituant en tant que de besoin à ceux du premier juge,
CONFIRME le jugement du 8 février 1994 en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
CONDAMNE la société ÉCOLE SAINT LOUIS à payer à Madame X. une somme de CINQ MILLE FRANCS (5.000 Frs) au titre des frais irrépétibles d'appel,
CONDAMNE l'appelante aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
- 5802 - Code de la consommation - Clauses abusives - Évolution de la protection (2) - Cass. civ. 1re, 14 mai 1991 - Application directe de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 : principe
- 5803 - Code de la consommation - Clauses abusives - Évolution de la protection (2) - Cass. civ. 1re, 14 mai 1991 - Application directe de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 : illustrations
- 6119 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Inexécution du contrat - Responsabilité du consommateur - Clauses sur les causes d’exonération et la force majeure
- 6122 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Inexécution du contrat - Responsabilité du consommateur - Clauses pénales ou d’indemnité forfaitaire - Droit antérieur au décret du 18 mars 2009 (indices)
- 6321 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Enseignement - Enseignement scolaire et professionnel - Rupture du contrat