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CA PARIS (5e ch. sect. B), 18 mai 1995

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (5e ch. sect. B), 18 mai 1995
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), 5e ch. sect. B
Demande : 93/5852
Date : 18/05/1995
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Juris Data
Décision antérieure : TGI MELUN (1re ch.), 8 décembre 1992
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CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 1292

CA PARIS (5e ch. sect. B), 18 mai 1995 : RG n° 93/5852

Publication : Juris-Data n° 021725

 

Extrait : « Que l'article 8-e de la loi du 22 décembre 1972 qu'ils ont cité, exclut cependant de son champ d'application non pas les ventes ou prestations ayant un rapport direct avec l'activité professionnelle du démarcheur ce qui lui ôterait toute portée, mais celles qui « sont proposées pour les besoins d'une exploitation agricole, industrielle ou commerciale ou d'une activité professionnelle » c'est à dire celles qui concernent l'activité lucrative du client qui est présumé connaître suffisamment son métier pour n'avoir pas besoin d'une protection spécifique ; Qu'il n'est pas allégué que le docteur X. disposait de connaissances en mécanique permettant d'inclure la commande d'un fauteuil élévateur de handicapé qui était destiné au malade qu'il était, dans le champ de ses activités professionnelles ; qu'il se trouvait en réalité dans la situation d'un simple particulier devant disposer de la protection instituée par la loi du 22 décembre 1972 ».             

 

COUR D’APPEL DE PARIS

CINQUIÈME CHAMBRE SECTION B

ARRÊT DU 18 MAI 1995

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 93-5852.

PARTIES EN CAUSE :

Monsieur X.

demeurant [adresse]

Madame X.

demeurant [adresse]

Appelants, Représentés par la SCP Fanet, avoué, Assistée de Maître Volkringer, avocat.

Monsieur Y.

demeurant [adresse], Intimé, Représenté par la SCP Garrabos ALizard, avoué, Assistée de Maître Benhamou, avocat.

 

COMPOSITION DE LA COUR Lors du délibéré : Président : Monsieur LECLERCQ Conseillers : Messieurs BOUCHE et LE FEVRE

GREFFIER : Madame LAISSAC

DÉBATS : à l'audience publique du 5 avril 1995, Monsieur LECLERCQ, conseiller chargé du rapport a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposé. Il en a rendu compte à la Cour dans son délibéré.

[minute page 2] ARRÊT : contradictoire - prononcé publiquement par Monsieur LECLERCQ, président, lequel a signé la minute avec Madame LAISSAC, greffier.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Considérant que les époux X. ont fait appel d'un jugement contradictoire du 8 décembre 1992 du Tribunal de Grande Instance de MELUN qui les a condamnés à verser à Monsieur Y. 33.716,40 francs avec intérêts au taux légal à compter du 11 juin 1991 ainsi que 2.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Considérant que les époux X. exposent que leur père et beau père M. X., atteint de la maladie de Parkinson, a accepté le 27 septembre 1990 un devis de 56.215,40 francs établi par l'artisan Monsieur Y. et concernant la fourniture et l'installation dans la cage d'escalier de son pavillon d'un fauteuil mobile, qu'un acompte de 12.500 francs a été versé lors de la commande le 27 septembre 1990, mais que M. X. est décédé le 25 décembre 1990 avant toute installation de l'appareil ;

Qu'ils soutiennent que M. X., en phase terminale de son affection, n'était plus en état de contracter valablement lorsqu'il a passé la commande, et qu'au surplus la vente est nulle pour avoir été conclue à l'occasion d'un démarchage à domicile sans que la règle de l'adjonction d'un formulaire de rétractation imposée par la loi du 22 décembre 1972 soit respectée ;

Qu'ils demandent à la Cour d'infirmer la décision déférée, de déclarer nul le contrat de vente du 27 septembre 1990 et de condamner Monsieur Y. à leur rembourser la somme de 12.500 francs avec intérêts au taux légal à compter du 27 septembre 1990 et à leur verser 10.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Considérant que Monsieur Y. conclut à la nullité de l'appel sans en fournir la raison ce qui dispense la Cour de l'obligation d'une réponse ;

Qu'il expose subsidiairement qu'il a été contacté le 30 août 1990 par téléphone par la belle-fille du docteur M. X. qui souhaitait recevoir une documentation concernant l'installation d'un appareil « Montescalier » constitué d'un « fauteuil fabriqué sur mesure se déplaçant sur un rail fabriqué également sur mesure », qu'il a adressé à M. X. la documentation demandée ainsi qu'une fiche de renseignements, que M. X. lui a adressé le 3 septembre 1990 une lettre comportant diverses précisions et en annexe la fiche dûment remplie, qu'il a établi en [minute page 3] conséquence le devis et l'a adressé le 10 septembre 1990 à M. X., que le devis a été accepté le 27 septembre 1990 à l'occasion d'une visite de contrôle qu'il a opérée, et qu'il a reçu à cette occasion un acompte de 12.500 francs ;

Qu'il ajoute qu'il a réclamé en vain dès le lendemain un complément d'acompte, qu'il a informé également en vain M. X. le 28 novembre 1990 de ce que le fauteuil était fabriqué et pouvait être livré et posé et qu'il a proposé encore en vain à Daniel X. après le décès de M. X. de conserver le matériel en déduisant 10.000 francs toutes taxes comprises du prix convenu ;

Qu'il soutient qu'il ne s'est rendu au domicile de M. X. le 27 septembre 1990 qu'en vue de prendre des mesures destinées à la réalisation d'un travail et nullement pour conclure une vente ; qu'il en déduit que la loi du 22 décembre 1972 n'est pas applicable ; qu'il conteste toute altération du consentement de M. X. et prétend que fabriqué sur mesure le fauteuil ne peut être installé nulle part ailleurs ;

Qu'il demande à la Cour de confirmer le jugement déféré et de condamner les époux X. à lui verser 10.000 francs correspondant au solde qui serait dû sur la commande du 27 septembre 1990, les intérêts au taux légal sur cette somme à compter de la mise en demeure du 27 juin 1991, 20.000 francs de dommages-intérêts et 10.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Considérant que les premiers juges ont écarté l'application des dispositions de la loi du 22 décembre 1972 tendant à assurer la protection des consommateurs à l'occasion de démarchage et de vente à domicile au seul motif que le déplacement pour contrôle de mesures de l'artisan Monsieur Y. au domicile du docteur X. avait un rapport direct avec l'activité artisanale exercée ;

Que l'article 8-e de la loi du 22 décembre 1972 qu'ils ont cité, exclut cependant de son champ d'application non pas les ventes ou prestations ayant un rapport direct avec l'activité professionnelle du démarcheur ce qui lui ôterait toute portée, mais celles qui « sont proposées pour les besoins d'une exploitation agricole, industrielle ou commerciale ou d'une activité professionnelle » c'est à dire celles qui concernent l'activité lucrative du client qui est présumé connaître suffisamment son métier pour n'avoir pas besoin d'une protection spécifique ;

[minute page 4] Qu'il n'est pas allégué que le docteur X. disposait de connaissances en mécanique permettant d'inclure la commande d'un fauteuil élévateur de handicapé qui était destiné au malade qu'il était, dans le champ de ses activités professionnelles ; qu'il se trouvait en réalité dans la situation d'un simple particulier devant disposer de la protection instituée par la loi du 22 décembre 1972 ;

Considérant que le docteur X. a demandé à Monsieur Y. par lettre du 3 septembre 1990 l'envoi d'un « devis approximatif » ; qu'il a reçu par courrier daté du 10 septembre 1990, selon Monsieur Y., ou s'est vu présenter le 27 septembre 1990, selon les époux X. dont l'affirmation est confortée par l'absence de toute trace d'envoi sur l'original versé aux débats, un devis qui comportait une option et ne pouvait établir à lui seul qu'un accord avait été conclu ;

Qu'il n'est pas contesté que le devis a été accepté option barrée, le 27 septembre 1990 à l'occasion d'une visite que Monsieur Y. a rendue au docteur X. à son domicile ; que ce devis concerne la fourniture et l'installation d'un fauteuil ; que Monsieur Y. ne fournit à la Cour aucune justification de ce que le coût de l'installation soit tel qu'il fasse du travail de pose plus qu'un accessoire de la vente du fauteuil et de son rail de circulation ; qu'il ne le prétend d'ailleurs pas ; qu'il ne saurait disconvenir qu'il a conclu le 27 septembre 1990 une vente à domicile ;

Considérant que la demande d'envoi d'une documentation l'envoi préalable d'un devis à supposer encore qu'il soit établi, et la prise sur place de quelques mesures qui n'ont eu aucune influence sur un prix prédéfini ne sauraient suffire à écarter l'application des dispositions générales de la loi du 22 décembre 1972;

Considérant qu'il n'est pas contesté qu'aucun formulaire de rétractation n'a été remis au docteur X. ; que la vente litigieuse est nulle ; que Monsieur X. en sa qualité d'héritier du défunt, est en droit de demander restitution de l'acompte de 12.500 francs versé avec intérêts au taux légal à compter du paiement au besoin en tant que dommages intérêts ;

Qu'il serait inéquitable par ailleurs que les appelants conservent la charge de leurs frais irrépétibles ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 5] PAR CES MOTIFS :

Infirme la décision déférée,

Déclare nulle la vente conclue le 27 septembre 1990 entre le docteur X. et l'artisan Monsieur Y.,

Condamne Monsieur Y. à verser à Monsieur X. la somme de 12.500 francs avec intérêts au taux légal à compter du 27 septembre 1990,

Condamne Monsieur Y. à verser aux époux Monsieur X. 10.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Le condamne en tous les dépens,

Admet la Société civile professionnelle FANET, avoué, au bénéfice des dispositions de l'article 599 du nouveau code de procédure civile.