TI SAINTES, 4 décembre 2006
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 131
TI SAINTES, 4 décembre 2006 : RG n° 06/000589
Publication : Site CCAB
Extraits : 1/ « Attendu que selon l'article 472 du nouveau code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparait pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne fait droit à la demande que s'il l'estime régulière, recevable et bien fondée ; Attendu que l'article 125 du NCPC fait obligation au juge de relever d'office les fins de non-recevoir lorsqu'elles revêtent un caractère d'ordre public ; Qu'aux termes de l'article L. 311-37 du code de la consommation, l'action en paiement née d'un contrat de crédit à la consommation doit être engagée dans le délai de deux ans qui suit l'événement qui lui a donné naissance ».
2/ « Mais attendu que la clause aux termes de laquelle le montant de l'ouverture de crédit fixé initialement peut être dépassé avec l'accord du préteur en fonction des tirages de l'emprunteur ne prévoit pas que l'augmentation du montant du découvert doit être réalisé dans les termes d'une nouvelle offre préalable, qui doit être acceptée par l'emprunteur et qui ouvre une faculté de rétractation ; qu'ainsi cette clause qui laisse penser que le prêteur ne doit pas, pour chaque nouveau crédit que constitue l'augmentation du montant du crédit initial, délivrer à l'emprunteur une nouvelle offre préalable, que ce dernier doit formellement accepter et que l'emprunteur ne dispose pas, à cette occasion, de la faculté d'ordre public de rétracter son acceptation, crée un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au détriment du consommateur, et, de ce fait, se trouve réputée non écrite par application de l'article L. 132-1 du code de la consommation (Commission des clauses abusives, Avis 04-02 et 04-03 du 27 mai 2004 ; Avis C. Cass, 10 juillet 2006) ; qu'en effet l'augmentation du plafond d'une ouverture de crédit ne peut être réalisée que dans les termes d'une offre préalable ; que la stipulation permettant l'augmentation tacite de l'ouverture de crédit n'a donc aucune incidence sur la détermination du point de départ du délai de forclusion ; qu'en toute hypothèse un crédit dont le plafond est stipulé révisable ne peut néanmoins être augmenté sans que l'emprunteur ait été saisi d'une nouvelle offre préalable (Civ. 1ère, 26 octobre 2004 : pourvoi n° 02-50.564) ce dernier ne pouvant renoncer au dispositif protecteur des articles L. 311-8 et suivants du code de la consommation ; que dès lors la stipulation permettant l'augmentation du plafond initial est illicite et réputée non écrite ».
TRIBUNAL D’INSTANCE DE SAINTES
JUGEMENT DU 4 DÉCEMBRE 2006
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 11-06-000589.
DEMANDEUR(S) :
SA F.
[adresse], représenté(e) par SCP A. ROUDET L. ROUDET - P. BOISSEAU N. BOISSEAU, avocat au barreau de SAINTES
DÉFENDEUR(S) :
Monsieur X.
[adresse], comparant en personne
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Président : Philippe FLORES
Greffier : Sylvie COMTE
DÉBATS : Audience publique du 6 novembre 2006 à l'issue de laquelle le Président a indiqué que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 4 décembre 2006.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] Selon offre préalable acceptée le 26 novembre 1998, la société F. a consenti à M. X., une ouverture de crédit d'un montant en capital de 8.000 francs ouvrant pour la société de crédit à la perception d'intérêts au taux effectif global de 17,76 % calculés sur les sommes réellement empruntées.
Plusieurs échéances n'ayant pas été honorées, la société de crédit a provoqué la déchéance du terme.
Par acte du 2 octobre 2006, la société F. a fait assigner M. X. afin d'obtenir avec exécution provisoire, sa condamnation aupaiement des sommes suivantes :
- 4.220,80 euros pour solde du crédit,
- les intérêts conventionnels,
- 500 euros en vertu de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
M. X. a sollicité un délai de paiement de deux ans pour régler sa dette.
Le tribunal a invité les parties à s'expliquer sur la fin de non-recevoir tirée de la forclusion prévue à l'article L. 311-37 du code de la consommation.
La société F. a maintenu l'intégralité de ses prétentions. Elle a indiqué que si l'offre a été conclue initialement pour un capital de 8.000 francs, celui-ci pouvait être porté au maximum de 50.000 francs ainsi qu'il résulte des stipulations contractuelles. Elle a ajouté que ces augmentations de capital avaient été faites à la demande de l'emprunteur et rappelée lors des informations annuelles en a déduit que la forclusion n'était pas acquise.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS :
Attendu que selon l'article 472 du nouveau code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparait pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne fait droit à la demande que s'il l'estime régulière, recevable et bien fondée ;
Attendu que l'article 125 du NCPC fait obligation au juge de relever d'office les fins de non-recevoir lorsqu'elles revêtent un caractère d'ordre public ;
Qu'aux termes de l'article L. 311-37 du code de la consommation, l'action en paiement née d'un contrat de crédit à la consommation doit être engagée dans le délai de deux ans qui suit l'événement qui lui a donné naissance ;
[minute page 3] Attendu que conformément à la règle selon laquelle le point de départ à l'expiration duquel une action ne peut plus être exercée, se situe nécessairement à la date d'exigibilité de l'obligation qui lui a donné naissance, le délai biennal de forclusion prévu par l'article L. 311-37 du code de la consommation court, dans le cas d'une ouverture de crédit, d'un montant déterminé et reconstituable, assortie d'une obligation de remboursement à échéances convenues, à compter du moment où le montant du dépassement maximum convenu n'est pas régularisé, cette situation constituant un incident qui caractérise la défaillance de l'emprunteur ;
Attendu que dans son arrêt du 21 novembre 2002 (Cofidis c/ Fredout), la Cour de Justice des communautés européennes a reconnu la possibilité pour le juge de soulever d'office le caractère abusif d'une clause insérée dans un contrat de crédit et que la forclusion biennale n'était pas opposable à un tel moyen ;
Attendu qu'en l'espèce l'offre de crédit a été plafonnée à 8.000 francs ; que la clause de variation est libellée comme suit « le montant du découvert autorisé est fixé à 50.000 francs. Toutefois, d'un commun accord il est limité à la date de l'offre au montant précisé au recto [8.000 francs]. Il pourra être ensuite augmenté à la demande de l'emprunteur ou sur proposition du prêteur dans la limite du découvert maximum autorisé et sous réserve que l'emprunteur ou sur proposition du prêteur dans la limite du découvert maximum autorisé et sous réserve que l'emprunteur ne se trouve pas dans l'un des cas de suspension ou de résiliation ....» ; que la lecture de cette clause montre bien que le crédit consenti à l'ouverture est bien le crédit. qualifié d’ « autorisé » et non le crédit maximal, que l'augmentation dans la limite du crédit maximal n'a rien d'automatique et reste subordonnée à l'accord des deux parties ; qu'il en découle que cette clause ne fait qu'organiser l'augmentation du montant du capital, dans des proportions permettant de sextupler le montant du crédit qui n'a alors aucun rapport avec l'économie initiale du contrat ; que cette cause dispense parallèlement la société de crédit d'émettre une nouvelle offre de crédit et partant de satisfaire à son obligation de mise en garde de l'emprunteur sur les conséquences du crédit sollicité et par suite de vérification de la compatibilité du nouveau crédit avec la situation financière de l'emprunteur (Cass. 1ère civ., 2 novembre 2005 : Bull. civ. I, n° 397), laquelle a pu subir des modifications importantes depuis la signature de l'offre de crédit initiale, puisque l'augmentation accordée résultera du tirage réalisé par le consommateur ;
Mais attendu que la clause aux termes de laquelle le montant de l'ouverture de crédit fixé initialement à peut être dépassé avec l'accord du préteur en fonction des tirages de l'emprunteur ne prévoit pas que l'augmentation du montant du découvert doit être réalisé dans les termes d'une nouvelle offre préalable, qui doit être acceptée par l'emprunteur et qui ouvre une faculté de rétractation ; qu'ainsi cette clause qui laisse penser que le prêteur ne doit pas, pour chaque nouveau crédit que constitue l'augmentation du montant du crédit initial, délivrer à l'emprunteur une nouvelle offre préalable, que ce dernier doit formellement accepter et que l'emprunteur ne dispose pas, à cette occasion, de la faculté d'ordre public de rétracter son acceptation, crée un déséquilibre significatif entre les droits [minute page 4] et les obligations des parties au détriment du consommateur, et, de ce fait, se trouve réputée non écrite par application de l'article L. 132-1 du code de la consommation (Commission des clauses abusives, Avis 04-02 et 04-03 du 27 mai 2004 ; Avis C. Cass, 10 juillet 2006) ; qu'en effet l'augmentation du plafond d'une ouverture de crédit ne peut être réalisée que dans les termes d'une offre préalable ; que la stipulation permettant l'augmentation tacite de l'ouverture de crédit n'a donc aucune incidence sur la détermination du point de départ du délai de forclusion ; qu'en toute hypothèse un crédit dont le plafond est stipulé révisable ne peut néanmoins être augmenté sans que l'emprunteur ait été saisi d'une nouvelle offre préalable (Civ. 1ère, 26 octobre 2004 : pourvoi n° 02-50.564) ce dernier ne pouvant renoncer au dispositif protecteur des articles L. 311-8 et suivants du code de la consommation ; que dès lors la stipulation permettant l'augmentation du plafond initial est illicite et réputée non écrite ;
Que le montant initial du crédit de 8.000 francs autorisé a été dépassé au mois de février 2003 et que l'historique de compte montre que le dépassement n'a jamais été régularisé et qu'au contraire la situation n'a cessé de s'aggraver ; que ce dépassement du plafond constitue un incident de paiement manifestant la défaillance de l'emprunteur, laquelle ne peut être regardée comme utilement effacée par l'octroi de crédit complémentaire dans des conditions irrégulières au regard de la législation en la matière (Civ. 1ère, 30 mars 2005 : Bull. civ. I, n° 159) ;
Que l'assignation ayant été délivrée le 2 octobre 2006, et après l'expiration du délai biennal, l'action est atteinte par la forclusion et les demandes doivent être déclarées irrecevables ;
Attendu que la partie succombante doit supporter les dépens ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, par jugement contradictoire rendu en premier denier ressort,
Constate que l'action engagée par la société F est atteinte par la forclusion ;
Déclare irrecevables les demandes de la société F.
Condamne la société F. aux dépens de l’instance.
Le Greffier Le Juge d’instance
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