CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

CA PARIS (5e ch. sect. C), 19 décembre 1996

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (5e ch. sect. C), 19 décembre 1996
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), 5e ch. sect. C
Demande : 95/2955
Date : 9/12/1996
Nature de la décision : Confirmation
Décision antérieure : T. COM. MEAUX, 10 novembre 1994
Décision antérieure :
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 1324

CA PARIS (5e ch. sect. C), 19 décembre 1996 : RG n° 95/2955 et 96/8072

 

Extrait  : « Considérant que les contrats litigieux ont été conclus par la Société IL PALAZZO aux fins d'assurer la sécurité du restaurant exploité à l'adresse d'installation du matériel ; qu'il s'ensuit que contrairement aux affirmations de la Société IL PALAZZO, l'article 35 de la loi 78-23 du 10 janvier 1978 devenu L. 132-1 du Code de la Consommation n'est pas applicable à l'espèce, ces contrats ayant été conclus pour les besoins du commerce de la société co-contractante et ayant un rapport direct avec l'activité de restauration exercée dans les lieux »

 

COUR D’APPEL DE PARIS

CINQUIÈME CHAMBRE SECTION C

ARRÊT DU 19 DÉCEMBRE 1996

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 95/2955 et 96/8072.

Date de l’ordonnance de clôture : 8 novembre 1996.

 

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE :

1°) - LA SOCIETE IL PALAZZO, SARL,

ayant son siège [adresse], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège, APPELANTE,

 

INTERVENANT :

- MAITRE GARNIER Philippe,

demeurant [adresse], pris en sa qualité de représentant des créanciers de la Société IL PALAZZO déclarée en redressement judiciaire par jugement du Tribunal de Commerce de MEAUX le 12 juin 1995, INTERVENANT

Tous deux représentés par la SCP LECHARNY CHEVILLER, avoué, Assistés de Maître MORET, avocat, du barreau de MEAUX,

 

INTIMÉES :

2°) LA SOCIETE NEW CO venant aux droits de la SOCIETESERVILEASE, S.A.,

 ayant son siège [adresse], agissant poursuites et diligences de ses [minute page 2] représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège, INTIMÉE, Représentée par la SCP VARIN PETIT, avoué, Assistée de Maître GRILLON, avocat, du barreau de PARIS,

3°) LA SOCIETE COMPAGNIE EUROPEENNE DE TELESECURITE « CET », S.A.,

ayant son siège [adresse], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège, INTIMÉE, Représentée par la SCP BERNABE RICARD, avoué, Assistée de Maître FAUQUET, avocat, C 1093,

 

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré : Président : Monsieur ROGNON. Conseillers Madame CABAT Monsieur BETCH.

GREFFIER : Madame ARDES, lors des débats et au prononcé de l'arrêt.

DÉBATS : A l'audience publique du mardi 12 novembre 1996, tenue en application de l'article 786 du NCPC Madame CABAT, Magistrat chargé du rapport a entendu les plaidoiries des avocats des parties, ceux-ci ne s'y étant pas opposés, elle en a rendu compte à la Cour, lors du délibéré.

[minute page 3] ARRÊT : CONTRADICTOIRE, prononcé publiquement à l'audience du jeudi 19 décembre 1996 par Monsieur le Président ROGNON qui a signé la minute avec Madame ARDES, Greffier.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

La Cour statue sur l'appel formé par la Société IL PALAZZO à l'encontre d'un jugement rendu le 10 novembre 1994 par le Tribunal de commerce de MEAUX qui en confirmant l'ordonnance rendue le 6 juillet 1993 sur requête en injonction de payer, l'a condamnée à payer à la Société SERVILEASE la somme de 15.332,13 Francs majorée des intérêts au taux légal courus à compter du 19 août 1993 et à la Société COMPAGNIE EUROPEENNE de TELESECURITE ci-après désignée « CET », la somme de 3.000 Francs au titre de l'application de l'article 700 du N.C.P.C.

La Cour se réfère pour l'exposé des faits et de la procédure à la relation exacte qu'en ont fait les Premiers Juges il suffit de rappeler qu'aux fins d'installation dans ses locaux d'un matériel de télésurveillance, la Société IL PALAZZO a conclu deux contrats, l'un avec la Société CET, et l'autre, avec la Société SERVILEASE aux droits de laquelle déclare venir la Société NEW CO.

Au cours de procédure d'appel, la Société appelante a été déclarée en redressement judiciaire suivant jugement du Tribunal de Commerce de MEAUX prononcé le 12 juin 1995.

Maître GARNIER pris en sa qualité de représentant des créanciers de la Société IL PALAZZO est intervenu volontairement pour se voir adjuger le bénéfice des conclusions prises par cette société.

Celle-ci soutient que les contrats passés sont entachés de nullité du fait qu'ils ne sont pas datés, qu'ils ne mentionnent pas la nature du matériel loué, que le contrat passé avec CET se suffisait à lui-même en raison de ce que cette société y était assignée en qualité de bailleresse, que la Société Financière SERVILEASE liée [minute page 4] à CET lui a été imposée, et que le contrat de financement ne fait pas apparaître le coût de la location, que ces contrats manquent de clarté, la Société SERVILEASE jouant un « rôle d'intermédiaire écran », que les définitions exactes du bailleur et du locataire n'y apparaissent pas.

Aussi, Maître GARNIER es-qualité et la Société IL PALAZZO prient-ils la Cour après infirmation du jugement entrepris, de dire que les prestations contractées par la Société IL PALAZZO auprès de CET ne résultent que des contrats de vidéo sécurité liant exclusivement IL PALAZZO et CET, de prononcer la nullité des contrats intitulés « suite contrat de location » imprimés sur la droite au nom de CET et comportant sur la gauche, le tampon humide de SERVILEASE, de débouter en conséquence cette dernière de ses demandes, de dire l'arrêt opposable à CET, et dans l'hypothèse où la validité du contrat passé entre SERVILEASE et IL PALAZZO serait reconnue, de condamner la Société CET à relever et garantir IL PALAZZO de toutes condamnations pouvant être prononcées contre celle-ci au profit de la Société SERVILEASE, enfin, de condamner solidairement la Société SERVILEASE et la Société CET au paiement d'une somme de 10.000 Francs au titre de l'application de l'article 700 du NCPC.

Par des écritures récentes, la Société IL PALAZZO et Maître GARNIER, fondent également leurs demandes sur l'application de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation qui déclare abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet d'obliger le consommateur à exécuter ses obligations alors même que le professionnel n'exécuterait pas les siennes.

La Société CET intimée, conclut à la confirmation de la décision entreprise en formant contre l'appelante, une demande en paiement de la somme de 10.000 Francs au titre de ses frais irrépétibles d'appel.

A ces fins, elle fait valoir que la Société IL PALAZZO a fait assurer par la Société SERVILEASE le financement de son installation de télésurveillance et s'est plainte auprès de la Société SERVILEASE de la qualité des prestations de CET, ce plusieurs années après l'installation.

La Société CET dénie avoir failli à ses obligations contractuelles, en soutenant que le constat d'huissier versé aux débats par la Société appelante n'a aucune force probante.

[minute page 5] La Société NEW CO, seconde intimée conclut également à la confirmation du jugement entrepris en formant contre les appelants une demande en paiement des sommes de 20.000 Francs et 10.000 Francs aux titres respectifs de dommages-intérêts pour procédure abusive et de ses frais irrépétibles ; eu égard à la procédure collective ouverte contre la Société IL PALAZZO, elle demande la fixation de sa créance à hauteur de la somme globale de 52.601,91 Francs en soulignant que par ordonnance du Juge Commissaire au redressement, elle a été relevée de la forclusion et a déclaré sa créance entre les mains de Maître GARNIER.

A ces fins, elle soutient sur le fond du litige qu'alors que la télésurveillance devait être assurée par CET et n'incombait pas à la Société SERVILEASE, la Société IL PALAZZO a prétexté du non fonctionnement du matériel pour cesser tout paiement, ce qui a motivé l'envoi le 25 mai 1993, d'une lettre de résiliation conforme à l'article 10 des conditions générales du contrat.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE, LA COUR :

Considérant que les contrats litigieux ont été conclus par la Société IL PALAZZO aux fins d'assurer la sécurité du restaurant exploité à l'adresse d'installation du matériel ; qu'il s'ensuit que contrairement aux affirmations de la Société IL PALAZZO, l'article 35 de la loi 78-23 du 10 janvier 1978 devenu L 132-1 du Code de la Consommation n'est pas applicable à l'espèce, ces contrats ayant été conclus pour les besoins du commerce de la société co-contractante et ayant un rapport direct avec l'activité de restauration exercée dans les lieux ;

Considérant qu'il y a lieu d'observer au surplus que l'abus dénoncé sur ce fondement n'existe même pas ; qu'en effet, la clause qualifiée d'abusive par les appelants est prétendument celle qui aurait interdit à la Société IL PALAZZO d'exercer un quelconque recours contre la Société SERVILEASE ou la Société CET, alors que l'article 6 du contrat de télésurveillance précise au contraire que la responsabilité civile de la Société CET est assurée auprès de l'UAP et que l'article 5 du contrat de location permet au locataire sous la condition d'en informer le loueur, d'engager une action à l'encontre de la SA CET en cas de dysfonctionnement, et que seule est interdite à la Société locataire, l'exception d'inexécution des obligations de CET au regard du fonctionnement du matériel, opposée à la Société SERVILEASE ;

[minute page 6] Considérant que comme l'a justement relevé la Société SERVILEASE, la plupart des anomalies des contrats dont fait état la Société IL PALAZZO aux fins de voir reconnaître la nullité de ces conventions, ne concernent pas le contrat conclu entre IL PALAZZO et la Société SERVILEASE mais, l'autre contrat conclu entre IL PALAZZO et la Société LOCA PLUS dont l'exécution n'est pas l'objet du présent litige ;

Considérant que contrairement aux affirmations de la Société IL PALAZZO, le contrat du 20 juin 1990 suivi de celui du 18 juillet 1990 qui a complété l'installation, n'est pas un contrat de location mais un contrat intitulé « contrat de télésurveillance » d'une durée de 48 mois conclu entre la Société IL PALAZZO et la Société CET, la première étant désignée comme étant l'abonnée ;

Considérant que comme la Société CET le rappelle, cette convention précisait que CET ou toute autre société mandatée par elle à cet effet, se chargerait du recouvrement des loyers et assurerait la répartition de la part de ces loyers correspondant à la rémunération de la prestation de télésurveillance et de la part correspondant au coût de location des matériels, la même convention étant conclue sous la condition de l'acceptation du dossier de location, la Société CET s'engageant en outre à soumettre le dossier à la Société devant en faire la location financière, pour les louer à l'abonné ;

Qu'en exécution de ces obligations, a été passé entre la Société SERVILEASE et la Société IL PALAZZO dont le représentant légal n'a pas dénié la signature figurant sur ce second contrat, un contrat intitulé contrat de location sur lequel figure en P.1 les conditions générales de la location et en P.2, les conditions particulières de celle-ci avec l'indication du locataire, de la caution du locataire, du matériel concerné par la location, de la durée de la location, et du montant mensuel du loyer H.T. ;

Considérant qu'il n'existe aucune contradiction entre les clauses claires de ces deux conventions qui se complètent et définissent précisément les obligations respectives de la Société IL PALAZZO, de la Société CET et de la Société SERVILEASE ;

Considérant que les contrats ont expressément exclu la possibilité pour la Société IL PALAZZO de cesser le paiement des mensualités dans le cas où la télésurveillance n'aurait plus été assurée ;

[minute page 7] Considérant que cette interdiction a été en l'espèce transgressée, ce qui a normalement conduit la Société SERVILEASE à résilier le contrat de location et à réclamer à la Société locataire, les sommes contractuellement définies en cas de résiliation ;

Considérant qu'à supposer même que le constat d'huissier ait pu constituer un commencement de preuve du dysfonctionnement du matériel litigieux, ce qui ne correspond pas à l'espèce, ce fait n'est pas propre à permettre à la Société IL PALAZZO d'opposer à la Société SERVILEASE une exception d'inexécution qui a été expressément exclue par les conventions litigieuses ;

Qu'il y a donc lieu de débouter la Société PALAZZO et Me GARNIER de leur demande tendant à voir prononcer la nullité des contrats litigieux, ainsi que du recours en garantie qu'elles ont formé à titre subsidiaire ;

Considérant que la Société NEW CO justifie de la réalité de la cession dite « cession de contrats » passée le 23 novembre 1994 qui lui permet de dire qu'elle vient aux droits de la Société SERVILEASE ;

Considérant que Maître GARNIER ne soutient pas n'avoir reçu de la Société SERVILEASE aucune déclaration de créance, cette société ayant précisé sans être contredite, qu'elle a sollicité et obtenu un relevé de forclusion aux fins d'être autorisée à déclarer sa créance ;

Considérant qu'en application des règles d'ordre public de la loi du 25 janvier 1985, il convient de substituer à la décision de condamnation de la Société IL PALAZZO, une décision de condamnation au paiement d'une somme de même montant, celui-ci ne faisant en l'espèce l'objet d'aucune contestation pour son calcul, outre des intérêts au taux légal sur le mime montant pour la période comprise entre le 19 août 1993 et la date du jugement déclaratif du 12 juin 1995, et de la somme fixée par les Premiers Juges en application de l'article 700 du NCPC ;

Considérant qu'à supposer exact le fait pour les appelants d'avoir abusé du droit de résister à la demande en paiement puis, de celui de former un recours contre la décision de condamnation, l'intimée la Société NEW CO n'en démontre pas pour autant l'existence d'un préjudice né de cet abus et distinct de celui qui est déjà indemnisé par les intérêts moratoires ;

[minute page 8] Qu'il y a donc lieu de débouter cette société de sa demande en dommages-intérêts formée de ce chef ;

Considérant que les appelants qui succombent et qui seront condamnés aux dépens, ne peuvent utilement prétendre au bénéfice des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Considérant que l'équité ne commande pas pour autant de faire au profit des intimées une nouvelle application de ce texte, l'indemnité allouée à CET par les Premiers Juges, apparaissant suffisante ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS

ET CEUX NON CONTRAIRES DES PREMIERS JUGES:

La Cour,

- Vu le jugement du 12 juin 1995 ayant prononcé le redressement judiciaire de la Société IL PALAZZO ;

- DONNE acte à Maître GARNIER de son intervention en sa qualité de représentant des créanciers de la Société IL PALAZZO ;

- CONFIRME la décision entreprise en ce qu'elle a reconnu la validité des contrats litigieux et en ce qu'elle a dit que la Société IL PALAZZO devait à la Société SERVILEASE la somme de 15.332,13 Francs avec intérêts au taux légal courus à compter du 19 août 1993, et devait à la Société CET la somme de 3.000 Francs au titre de l'application de l'article 700 du NCPC.

- L'INFIRME pour le surplus et statuant de nouveau des chefs réformés ;

- SUBSTITUE à la décision de condamnation aux paiements ci-dessus, la fixation de créances de mêmes montants au profit des mêmes créanciers, le décompte des intérêts au taux légal sur la somme de 15.332,13 Francs étant arrêté au 12 juin 1995 ;

- [minute page 9] DÉBOUTE les parties de leurs demandes incompatibles avec la motivation ci-dessus retenue, en ce comprises celles formées devant la Cour, en application de l'article 700 du NCPC ;

- ADMET en frais privilégiés au redressement judiciaire de la Société IL PALAZZO, les dépens de Première instance et d'appel, et admet pour ceux-ci, les avoués des intimées, au bénéfice de l'article 699 du NCPC.