CA NANCY (2e ch. civ.), 7 septembre 2006
CERCLAB - DOCUMENT N° 1519
CA NANCY (2e ch. civ.), 7 septembre 2006 : RG n° 03/02184 ; arrêt n° 1973/06
Extrait : « Attendu que par son objet même, le contrat de maîtrise d'œuvre entre la SARL CABINET ARCH et la SCI ELIPA n'a pu être conclu par cette dernière qu'en qualité de professionnelle de l'immobilier ; Que la SCI ELIPA ne peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la consommation pour s'opposer à la mise en jeu de la clause prévoyant en cas de résiliation non justifiée par un cas de force majeure le versement au profit de la SARL CABINET ARCH d'une indemnité de 20 % de la partie des honoraires qui aurait été versée si la mission de maîtrise d'oeuvre n'avait pas été interrompue ».
COUR D’APPEL DE NANCY
DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 7 SEPTEMBRE 2006
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 03/02184. Arrêt n° 1973/06.
APPELANTE :
SARL CABINET ARCH
dont le siège est [adresse], agissant poursuites et diligences de son gérant pour ce domicilié audit siège, Suivant déclaration d'appel déposée au Greffe de la Cour d'Appel de NANCY le 01 Août 2003 d'un jugement rendu le 19 juin 2003 par le Tribunal d'Instance de NANCY, Comparant et procédant par le ministère de la SCP MILLOT-LOGIER - FONTAINE, ses avoués associés constitués, Plaidant par Maître SPOR substituant Maître VICQ, Avocat à la Cour
INTIMÉE :
SCI ELIPA
dont le siège est [adresse], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux pour ce domiciliés audit siège, Comparant et procédant par le ministère de la SCP BONET-LEINSTER-WISNIEWSKI, ses avoués associés constitués, Plaidant par Maître FORT substituant Maître GOSSIN, Avocat à la Cour
[minute page 2]
DÉBATS : La cause a été débattue à l'audience publique du 01 juin 2006, devant Monsieur MERLE, Président, Monsieur MAGNIN et Monsieur RUFF, Conseillers, assistés de Madame DEANA, Greffer Divisionnaire,
Les Avocats assistés des Avoués des parties ayant été entendus, Le Président a annoncé que l'arrêt serait rendu à l'audience publique du 07 Septembre 2006, Il a été délibéré de la cause par les Magistrats susdits, qui ont assisté aux débats, Et, à l'audience publique de ce jour, 07 Septembre 2006, la Cour a rendu l'arrêt dont la teneur suit :
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 3] FAITS ET PROCÉDURE :
La SCI ELIPA a, par contrat du 28 décembre 2000, confié à la SARL CABINET ARCH, une mission complète de maîtrise d'œuvre pour la réhabilitation d'une maison lorraine.
Après avoir reçu l'avant projet sommaire le 16 février 2001, la SCI ELIPA a, le 12 avril suivant, résilié le contrat et réglé à la SARL CABINET ARCH la somme de 10.240 francs, pour solde.
La SARL CABINET ARCH a assigné la SCI ELIPA en paiement de ses honoraires pour le travail accompli et de l'indemnité contractuelle prévue par le contrat en cas de résiliation non justifiée par un cas de force majeure.
Un expert, en la personne de M. X., a été désigné, par jugement avant dire droit du 20 juin 2002.
Le tribunal d'instance de Nancy, au vu de l'expertise par lui prescrite, a, par jugement du 19 juin 2003, débouté la SARL CABINET ARCH de sa demande de paiement et l'a condamnée à payer à la SCI ELIPA la somme de 3.870,43 €, en relevant notamment que la responsabilité de la rupture incombait à la SARL CABINET ARCH, qui n'avait pas informé la SCI ELIPA de la nécessité de recourir aux services d'un architecte.
La SARL CABINET ARCH a interjeté appel du jugement dans des conditions dont la régularité ne fait l'objet d'aucune discussion.
La SARL CABINET ARCH demande à la Cour d'infirmer le jugement entrepris, et, statuant à nouveau, de condamner la SCI ELIPA à lui payer la somme de 4.574,16 €, de débouter la SCI ELIPA de ses prétentions, subsidiairement d'ordonner une nouvelle expertise, et de condamner la SCI ELIPA au paiement de la somme de 1.000 € par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers recouvrés conformément à l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.
Elle fait valoir principalement dans ses dernières conclusions déposées le 22 juillet 2005 auxquelles il est référé pour plus ample exposé de ses moyens, que l'expert a exprimé des opinions d'ordre juridique excédant les limites de sa mission ; elle avait fait déposer le dossier de permis de construire par le cabinet Y., architecte DPLG, avec qui elle travaille régulièrement en partenariat, ce dont il résulte qu'il n'existait aucune impossibilité de mener à bien le projet de réhabilitation qui lui avait été confié ; le retard dans l'exécution des travaux n'est pas dû à la rupture anticipée du contrat mais au fait même du maître de l'ouvrage, qui a attendu près d'un an après l'obtention du permis de construire pour faire démarrer le chantier ; l'immeuble, contrairement à ce que prétend la SCI ELIPA, n'était pas destiné à la location.
Aux termes de ses dernières écritures du 26 janvier 2006, auxquelles il est référé pour plus ample exposé de ses moyens, la SCI ELIPA conclut à la confirmation du jugement entrepris et à la condamnation de la SARL CABINET ARCH au paiement des sommes de 1.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et 800 €, par application de [minute page 4] l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'appel, recouvrés conformément à l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.
Elle fait valoir pour l'essentiel que la SARL CABINET ARCH n'était pas habilitée à exécuter la demande de permis de construire nécessaire à la réalisation du projet de réhabilitation ; le juge était en droit de s'approprier l'avis de l'expert même si celui-ci avait exprimé des opinions d'ordre juridique excédant les limites de sa mission ; la clause prévoyant une indemnité en cas de résiliation non justifiée par un cas de force majeure est abusive ; la SARL CABINET ARCH ne peut se prévaloir du contrat de collaboration passé avec M. Y., produit pour la première fois en cause d'appel ; il n'y a pas lieu à versement de l'indemnité de résiliation ; l'indemnité de résiliation est excessive ; l'immeuble était destiné à la location et elle a donc été privée d'une contrepartie de loyers.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS ET DÉCISION :
Attendu que le 12 avril 2001, la SCI ELIPA a mis fin unilatéralement à la convention qui la liait à la SARL CABINET ARCH, au motif pris que le coût du projet n'entrait pas dans son budget ;
Qu'elle ne peut tirer argument aujourd'hui de ce que la SARL CABINET ARCH n'était pas habilitée à « exécuter la demande de permis de construire nécessaire à la réalisation de son projet », pour imputer la rupture du contrat à l'intéressée ;
Attendu que la SARL CABINET ARCH ne peut être tenue pour responsable d'un dépassement du coût estimatif des travaux dès lors que n'avait pas été insérée dans la convention liant les parties une évaluation provisionnelle du coût de l'ouvrage ;
Que la SCI ELIPA est mal fondée en sa demande de dommages et intérêts ;
Que la SARL CABINET ARCH a droit à la rémunération de la mission qu'elle a accomplie et qui n'a pas été payée ;
Que la SCI ELIPA est tenue au paiement de la somme non contestée de 1.589,57 €, correspondant aux prestations fournies, déduction faite du versement de 1.561,08 € ;
Attendu que par son objet même, le contrat de maîtrise d'œuvre entre la SARL CABINET ARCH et la SCI ELIPA n'a pu être conclu par cette dernière qu'en qualité de professionnelle de l'immobilier ;
Que la SCI ELIPA ne peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la consommation pour s'opposer à la mise enjeu de la clause prévoyant en cas de résiliation non justifiée par un cas de force majeure le versement au profit de la SARL CABINET ARCH d'une indemnité de 20 % de la partie des honoraires qui aurait été versée si la mission de maîtrise d'oeuvre n'avait pas été interrompue ;
Attendu que la clause prévoyant le versement de l'indemnité de résiliation a été manifestement insérée dans le contrat en dehors de toute notion d'inexécution, la dite [minute page 5] indemnité aménageant simplement les conditions de rupture du contrat et ne représentant que le prix de la faculté de résiliation unilatérale ;
Que la clause litigieuse n'a pas le caractère d'une clause pénale ; Attendu que la SCI ELIPA ne justifie pas d'un cas de force majeure ;
Que la SARL CABINET ARCH est bien fondée à solliciter de la SCI ELIPA la somme de 1.318,57 €, au titre de l'indemnité contractuelle de résiliation, précision étant faite que le coût de l'enveloppe financière prévue par la SCI ELIPA était de 800.000 francs TTC et que rien n'empêchait la SARL CABINET ARCH de recourir aux services d'un architecte pour mener à bonne fin le projet ;
Qu'il y a donc lieu de condamner la SCI ELIPA à payer à la SARL CABINET ARCH la somme totale de 2.908,14 € ;
Attendu que la SCI ELIPA succombant principalement, il convient de la condamner aux dépens sans que l'équité n'impose qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,
RÉFORME le jugement entrepris ;
CONDAMNE la SCI ELIPA à payer à la SARL CABINET ARCH la somme de DEUX MILLE NEUF CENT HUIT EUROS ET QUATORZE CENTIMES (2.908,14 €);
DÉBOUTE les parties de leurs conclusions plus amples ou contraires ;
DIT N'Y AVOIR LIEU à application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
CONDAMNE la SCI ELIPA aux dépens de première instance et d'appel et dit que ces derniers pourront être recouvrés directement par la SOCIÉTÉ CIVILE PROFESSIONNELLE MILLOT LOGIER FONTAINE, avoués associés, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile ;
L'arrêt a été prononcé à l'audience publique du sept septembre deux mil six par Monsieur MERLE, Président, en application de l'article 452 du Nouveau code de procédure civile, assisté de Madame DEANA, Greffier Divisionnaire.
[minute page 6] Et Monsieur le Président a signé le présent arrêt ainsi que le Greffier.
Signé : DEANA. Signé : MERLE.
Minute en six pages.
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