TI STRASBOURG, 19 mai 2000
CERCLAB - DOCUMENT N° 1649
TI STRASBOURG, 19 mai 2000 : RG n° 99/005980
(sur appel CA Colmar (3e ch. A), 1er septembre 2003 : RG n° 00/02665)
Extrait : « Il est constant que Monsieur X. a commandé à la Société VETTER un ensemble de produits luminaires selon contrat du 30 juin 1999. Monsieur X. qui a été démarché dans son magasin à l'enseigne X. BOUTIQUE spécialisée dans la vente de bijoux et cadeaux a émis une lettre de change le jour même d'un montant de 39.846,24 francs à échéance du 5 octobre 1999. Dès le 5 juillet 1999, Monsieur X. a annulé la commande. La Société VETTER a refusé de prendre en considération cette annulation par courrier du 8 juillet 1999.
Cependant, Monsieur X. peut se prévaloir des dispositions des articles L. 121-21 et suivants du code de la consommation. Aux termes de l'article L. 121-22 ne sont pas soumis aux dispositions des articles L. 121-23 à L. 121-28 les ventes... lorsqu'elles ont un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre d'une exploitation commerciale. La vente de luminaire n'a pas de rapport avec une activité de vente de bijoux et cadeaux. Ainsi, il appartenait au démarcheur de respecter les règles d'ordre public notamment concernant la faculté de rétractation. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL D’INSTANCE DE STRASBOURG
JUGEMENT DU 19 MAI 2000
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
N° 11-99-005980/4C.
PARTIE DEMANDERESSE :
SA VETTER
représentée par son représentant légal, sise [adresse], représenté(e) par Maître DUCOURTIOUX Dominique (C. 170), avocat du barreau de STRASBOURG
PARTIE DÉFENDERESSE :
Monsieur X.
né le [date] à [ville], exploitant l'enseigne [enseigne], demeurant [adresse], représenté(e) par Maître DONAT Michel, avocat du barreau de PERPIGNAN
Nature de l'affaire : Demande en paiement du prix ou tendant à faire sanctionner le non-paiement du prix
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Monsieur Robert DIETENBECK, Président
Madame Marie-Odile GANGLOFF, Greffier
DÉBATS : A l'audience publique du 7 avril 2000
JUGEMENT : contradictoire en premier ressort, prononcé publiquement par Monsieur DIETENBECK, Président et signé par Monsieur DIETENBECK, Président et par Madame GANGLOFF, Greffier
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] FAITS ET PROCÉDURE :
Par exploit d'huissier du 16 décembre 1999 la Société VETTER SA a assigné devant le Tribunal d'Instance de STRASBOURG Monsieur X., aux fins de :
- se déclarer compétent,
- condamner le défendeur à payer à la demanderesse les sommes de :
* 39.846,24 francs, avec les intérêts au taux légal à compter du 5 octobre 1999,
* 78,39 francs, au titre des frais de rejet de la lettre de change,
* 815,50 francs, au titre des frais de transport résultant du retour de la marchandise,
- ordonner l'exécution provisoire de cette condamnation,
- condamner le défendeur à payer à la Société VETTER la somme de 3.000,00 francs, en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
- condamner le défendeur aux dépens.
La partie demanderesse expose :
- que la Société VETTER fabrique des produits luminaires,
- que le 30 juin 1999 le défendeur lui a commandé des spots nécessitant une fabrication spécifique,
- que la livraison était prévue courant juillet et le coût fixé à 39.846,24 francs TTC,
- que Monsieur X. a émis une lettre de change pour le 5 octobre 1999 de ce montant,
- que Monsieur X. a annulé la commande le 7 juillet 1999.
Elle soutient que le défendeur est tenu en vertu de la lettre de change et qu'il ne pouvait annuler une commande ferme qui constitue après acceptation un contrat qui fait la loi des parties.
[minute page 3] La partie défenderesse a conclu par mémoire du 7 avril 2000 :
vu les dispositions des articles L. 121-21 et suivants du code de la consommation,
- dire les dispositions protectrices en matière de démarchage à domicile applicables à Monsieur X.,
- ordonner la nullité du contrat conclu entre la Société VETTER et Monsieur X.,
en conséquence :
- débouter la Société VETTER de l'ensemble de ses demandes et prétentions à l'encontre de Monsieur X.,
- condamner reconventionnellement la Société VETTER au paiement de la somme de 5.000,00 francs de dommages-intérêts pour procédure abusive,
- condamner la Société VETTER au paiement de 5.000,00 francs, au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Elle expose :
- que Monsieur Y., commercial de la Société VETTER, a démarché Monsieur X. pour lui vendre des spots,
- qu'il a passé commande et émis une lettre de change d'un montant de 39.846,24 francs,
- qu'il a annulé la commande,
- que la commande a cependant été exécutée et les spots livrés en juillet,
- que le représentant lui-même a renvoyé la marchandise du fait de l'annulation.
Elle expose que malgré l'annulation, la lettre de change était présentée à l'encaissement.
Elle soutient :
- que les dispositions du code de la consommation relatives aux démarchages à domicile sont applicables dès lors que l'achat de spots est sans rapport direct avec l'activité commerciale exercée (vente de foulards et de bijoux),
- [minute page 4] que les mentions obligatoires ne figurent pas sur le contrat qui doit dès lors être annulé,
- que le demandeur ne pouvait obtenir aucune contrepartie avant l'expiration d'un délai de 7 jours.
Elle estime la demande non fondée et la qualifie d'abusive.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
VU LES PIÈCES DE LA PROCÉDURE :
Il est constant que Monsieur X. a commandé à la Société VETTER un ensemble de produits luminaires selon contrat du 30 juin 1999.
Monsieur X. qui a été démarché dans son magasin à l'enseigne X. BOUTIQUE spécialisée dans la vente de bijoux et cadeaux a émis une lettre de change le jour même d'un montant de 39.846,24 francs à échéance du 5 octobre 1999.
Dès le 5 juillet 1999, Monsieur X. a annulé la commande.
La Société VETTER a refusé de prendre en considération cette annulation par courrier du 8 juillet 1999.
Cependant, Monsieur X. peut se prévaloir des dispositions des articles L. 121-21 et suivants du code de la consommation.
Aux termes de l'article L. 121-22 ne sont pas soumis aux dispositions des articles L. 121-23 à L. 121-28 les ventes... lorsqu'elles ont un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre d'une exploitation commerciale.
La vente de luminaire n'a pas de rapport avec une activité de vente de bijoux et cadeaux.
Ainsi, il appartenait au démarcheur de respecter les règles d'ordre public notamment concernant la faculté de rétractation.
Au demeurant, l'acheteur a usé de cette faculté.
[minute page 5] La Société VETTER a de plus bénéficié immédiatement d'une traite alors qu'aucune contrepartie ne pouvait être offerte au vendeur avant l'expiration du délai de rétractation.
La sanction du non-respect des règles d'ordre public de la Loi est la nullité du contrat.
Il est sans emport de se prévaloir de la lettre de change dès lors que la demande est fondée sur le rapport de droit commun.
La lettre de change n'a aucune cause.
La nullité du contrat emporte le débouté de la demande. L'abus de procédure n'est pas suffisamment caractérisé.
Par contre, l'équité commande que les frais irrépétibles à hauteur de 3.500,00 francs soient supportés par la partie demanderesse qui paiera aussi les frais et dépens de la procédure.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LE TRIBUNAL,
Statuant publiquement par jugement contradictoire en premier ressort
ANNULE le contrat liant les parties,
DÉBOUTE la SA VETTER de sa demande,
DIT que la procédure n'est pas abusive,
CONDAMNE la SA VETTER à payer à Monsieur X. une indemnité de 3.500,00 francs (trois mille cinq cents francs) sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
[minute page 6] la CONDAMNE aux frais et dépens.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT.
- 5826 - Code de la consommation - Clauses abusives - Nature de la protection - Législation d’ordre public - Principe
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- 5923 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Immeubles - Contrats d’aménagement d’un immeuble