CA TOULOUSE (1re ch. 1re sect.), 3 septembre 2007
CERCLAB - DOCUMENT N° 1650
CA TOULOUSE (1re ch. sect. 1), 3 septembre 2007 : RG n° 06/00270 ; arrêt n° 281
Publication : Juris-Data n° 345939
Extrait : « Attendu, sur la demande tendant à l'annulation de la « convention » insérée dans l'acte authentique de vente, que les dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la consommation ne sauraient trouver, ici, application dès l'instant que les époux X. n'avaient pas la qualité de consommateur isolé (dans la mesure où le contrat de vente est passé en la forme authentique) et ont signé, en toute connaissance de cause, un contrat de vente d'immeuble achevé ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE TOULOUSE
PREMIÈRE CHAMBRE SECTION 1
ARRÊT DU 3 SEPTEMBRE 2007
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 06/00270. Arrêt n° 281. Décision déférée du 8 décembre 2005 - Tribunal de Grande Instance de Toulouse - RG n° 03/3368.
APPELANTE :
SA CONSTRUCTIONS PIERRE TOULOUSE
[adresse], représentée par la SCP NIDECKER PRIEU-PHILIPPOT JEUSSET, avoués à la Cour, assistée de la SCP MATHEU RIVIERE-SACAZE ET ASSOCIES, avocats au barreau de TOULOUSE
INTIMÉS :
Monsieur X.
[adresse], représenté par la SCP SOREL-DESSART-SOREL, avoués à la Cour, assisté de la SCP VIALA GOGUYER-LALANDE, avocats au barreau d'ARIEGE
Maître Y.
[adresse], représenté par la SCP RIVES-PODESTA, avoués à la Cour, assisté de la SCP G.L. LARRAT & N. LARRAT, avocats au barreau de TOULOUSE
MUTUELLES DU MANS ASSURANCES
[adresse], représentée par la SCP RIVES-PODESTA, avoués à la Cour assistée de la SCP G.L. LARRAT & N. LARRAT, avocats au barreau de TOULOUSE
Madame Z. épouse X.
[adresse], représentée par la SCP SOREL-DESSART-SOREL, avoués à la Cour, assistée de la SCP VIALA GOGUYER-LALANDE, avocats au barreau d'ARIEGE
COMPOSITION DE LA COUR : Après audition du rapport, l'affaire a été débattue le 18 juin 2007 en audience publique, devant la Cour composée de ; A. MILHET, président, O. COLENO, conseiller, C. FOURNIEL, conseiller, qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : E. KAIM-MARTIN
[minute page 2] ARRÊT : - contradictoire - prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties - signé par A. MILHET, président, et par E. KAIM-MARTIN, greffier de chambre.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Les époux X. ont conclu, le 3 février 2003, avec la Société Constructions Pierre TOULOUSE un contrat de réservation d'une maison en l'état futur d'achèvement moyennant le prix de 244.000 €, la livraison étant prévue pour la fin du mois de mars 2003.
Dès le mois d'avril 2003 un litige est apparu entre les parties quant à la construction d'une piscine et à l'existence de désordres et de malfaçons.
L'acte authentique de vente (contenant une clause intitulée « convention » aux termes de laquelle les époux X. renonçaient à se prévaloir des désordres constatés en contrepartie d'une réduction du prix d'un montant de 2.420 € et mentionnant, au titre de la description du bien vendu, l'existence d'une piscine), portant sur la vente d'un immeuble achevé a été signé le 19 mai 2003 par devant Maître Y., notaire, assuré auprès des Mutuelles du Mans.
Les époux X. ont saisi les premiers juges à l'effet de voir reconnue la responsabilité du notaire pour manquement à son obligation de conseil et de loyauté et d'obtenir la condamnation du vendeur à la réalisation de la piscine (ou à défaut au paiement de dommages-intérêts) ainsi que l'annulation du compromis inclus dans l'acte de vente avec indemnisation des préjudices résultant des malfaçons.
Le tribunal de grande instance de Toulouse a, par jugement du 8 décembre 2005, constaté que la Société Constructions Pierre TOULOUSE s'était engagée à livrer aux époux X. une maison avec piscine, condamné ladite société au paiement de la somme de 15.000 € à titre de dommages-intérêts, et débouté les parties du surplus de leurs demandes.
La société Constructions Pierre TOULOUSE a régulièrement interjeté appel de cette décision et conclut au rejet des demandes des époux GUEGUAN et à l'octroi de la somme de 5.000 € au titre des frais irrépétibles en soutenant que les pièces contractuelles ne font pas mention d'une piscine, que le notaire a commis une erreur matérielle dans l'acte authentique en mentionnant l'existence d'une piscine, que d'autres éléments confirment que la piscine revendiquée par les époux X. n'a jamais été contractuellement prévue, que la demande de dommages-intérêts formée par les époux X. n'est pas justifiée dans son quantum et que l'accord des parties dénommé convention ne saurait être remis en cause.
Les époux X. sollicitent, par appel incident, l'allocation des sommes de 30.000 € à titre de dommages-intérêts au titre de la non réalisation de la piscine, de 5.000 € à titre de dommages-intérêts en réparation de leur préjudice moral et de 3.000 € au titre des frais irrépétibles ainsi que la désignation d'un expert chargé d'investiguer sur les préjudices résultant des désordres constatés en faisant valoir que l'analyse des pièces produites confirme que la piscine est due par le constructeur, que les pièces et l'argumentation opposées sur ce point [minute page 3] par le vendeur et par le notaire ne sont pas pertinentes, que le coût de réalisation d'une telle piscine s'élève plutôt à 30.000 €, que le contrat doit être requalifié en vente en l'état futur d'achèvement, que la clause intitulée « convention » doit, donc, être réputée non écrite et que cette clause est, au surplus, atteinte de nullité.
Maître Y. et les Mutuelles du Mans, concluent au rejet des demandes des autres parties et à l'octroi des sommes de 3.000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et de 3.000 € au titre des frais irrépétibles en considérant que l'acte authentique du 19 mai 2003 est entaché d'une erreur matérielle quant aux stipulations relatives à la piscine, qu'en tout état de cause le notaire n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité civile professionnelle dès lors que cette erreur matérielle ne lui est pas imputable, que le régime de la VEFA ne pouvait pas être appliqué à la vente litigieuse et que les époux X. se sont engagés en pleine connaissance de cause de leurs droits et obligations.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR QUOI, LA COUR :
Attendu, sur la délivrance de la piscine, qu'il est constant, en la cause, que l'acte authentique de vente énonce que la maison est vendue avec une piscine alors que cette dernière n'a pas été réalisée ;
Que la mention de cette piscine dans la description du bien vendu oblige le vendeur à la délivrer à moins qu'il ne démontre que cette mention constitue une erreur matérielle ;
Qu'il convient de relever à cet égard que l'acte authentique précise que les parties ont signé avec le notaire « après lecture faite » ;
Qu'une telle mention, qui porte sur des faits accomplis en la présence de l'officier ministériel, fait foi jusqu'à inscription de faux ;
Or, attendu qu'il apparaît que le vendeur (qui était présent) n'a pas signalé, malgré la lecture de l'acte en l'étude du notaire, ce qu'il considère, à présent, comme une erreur qui ne pouvait, cependant, passée inaperçue, s'agissant de la construction (non convenue selon lui entre les parties) d'un ouvrage tel qu'une piscine ;
Que l'allégation d'une erreur matérielle est d'autant moins vraisemblable que l'acte authentique de vente a été précédé de la rédaction de deux projets soumis aux parties et que la société appelante n'a, à aucun moment, attiré l'attention du notaire ou de l'acquéreur sur l'existence d'une quelconque erreur ou d'une mention erronée ;
Attendu, de plus, qu'il apparaît que l'omission du parking dans l'acte de vente, au cours d'une relecture postérieure de l'acte, a été décelée (ce qui a conduit la collaboratrice du notaire à confirmer cette omission dans un fax du 26 juin 2003) et qu'a cette occasion aucune remarque ni réserve n'a été faite quant à la stipulation (pourtant plus notable et apparente) de la réalisation d'une piscine prétendument non prévue entre les parties ;
Attendu, également, qu'il n'est pas indifférent de noter que la mention de la piscine dans le lot vendu aux époux X. figure au dossier de permis de construire déposé par la société appelante ainsi qu'au règlement de copropriété et à l'état descriptif de division du lotissement ;
Que les seuls éléments opposés à ces constatations par la société Constructions Pierre TOULOUSE et par Maître Y., qui ne sont pas déterminantes et qui manquent de pertinence, ont été, [minute page 4] à bon droit et en de justes motifs qui seront adoptés, écartés par les premiers juges ;
Attendu, en conséquence et à défaut pour la société appelante et le notaire de rapporter à suffisance la preuve du caractère erroné de la mention d'une piscine dans l'acte authentique, qu'il y a lieu de considérer que la réalisation d'un tel ouvrage était incluse dans l'obligation de délivrance du vendeur ;
Que le préjudice résultant du manquement à cette obligation a été, exactement, apprécié en première instance ;
Attendu, sur la demande de requalification du contrat d'immeuble achevé en contrat de VEFA, qu'il n'est pas établi qu'au moment de la vente (soit le 19 mai 2003) l'immeuble n'aurait pas été achevé au sens de l'article R. 261-1 du Code de la construction et de l'habitation
Que cette demande, formée pour la première fois en cause d'appel et qui n'est pas autrement explicitée ni motivée, sera, dès lors, rejetée ;
Attendu, sur la demande tendant à l'annulation de la « convention » insérée dans l'acte authentique de vente, que les dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la consommation ne sauraient trouver, ici, application dès l'instant que les époux X. n'avaient pas la qualité de consommateur isolé (dans la mesure où le contrat de vente est passé en la forme authentique) et ont signé, en toute connaissance de cause, un contrat de vente d'immeuble achevé ;
Attendu, également, que le premier juge a retenu, en des motifs pertinents et suffisants qui seront adoptés, à bon droit que les notions de violence et de contrainte économique n'étaient pas, en l'espèce, caractérisées ;
Attendu, aussi, que le déséquilibre significatif des concessions tel qu'invoqué par les époux X. n'est pas établi et qu'il s'évince, au contraire, de l'examen de l'acte litigieux que la concession de la part du vendeur n'est pas négligeable en considération des prétentions des acquéreurs ;
Que cette transaction intervenue entre les parties n'est pas nulle et qu'aucune cause de nullité n'affecte la clause du contrat de vente intitulée « convention » ;
Que la demande d'expertise formée par lesdits époux ne saurait, donc, prospérer ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations et constatations la responsabilité du notaire ne saurait être retenue ;
Que les époux X., qui ne justifient pas de leur préjudice moral, seront déboutés de leur demande formée à ce titre ;
Que Maître Y. et son assureur, qui n'établissent pas la faute ou l'intention de nuire des époux X., seront déboutés de leur demande de dommages-intérêts ;
Que l'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile au bénéfice de Maître Y. et des Mutuelles du Mans ;
Que la cour estime, par contre, équitable d'allouer aux époux X. la somme de 1.200 € au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 5] PAR CES MOTIFS :
et ceux non contraires des premiers juges,
LA COUR,
Reçoit, en la forme, les appels principal et incident jugés réguliers ;
Confirme la décision déférée ;
Y ajoutant
Déboute les parties du surplus de leurs demandes
Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile au bénéfice de Maître Y. et des Mutuelles du Mans Assurances ;
Condamne la société Constructions Pierre TOULOUSE à payer aux époux X. la somme de 1.200 € en application du texte susvisé ainsi qu'aux dépens d'appel dont distraction au profit de la SCP SOREL-DESSART-SOREL et de la SCP RIVES-PODESTA, avoués, conformément à l'article 699 dudit code.
LE GREFFIER : LE PRÉSIDENT :
E. KAIM-MARTIN A. MILHET
- 5827 - Code de la consommation - Clauses abusives - Nature de la protection - Législation d’ordre public - Conséquences : clauses de renonciation dans le contrat
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