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T. COM RENNES (2e ch.), 6 juin 2000

Nature : Décision
Titre : T. COM RENNES (2e ch.), 6 juin 2000
Pays : France
Juridiction : TCom Rennes. 2e ch.
Demande : 99/00011
Date : 6/06/2000
Nature de la décision : Admission
Date de la demande : 21/12/1998
Décision antérieure : CA RENNES (1re ch. B), 13 septembre 2001
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CERCLAB - DOCUMENT N° 1773

T. COM. RENNES (2e ch.), 6 juin 2000 : RG n° 99/00011

(sur appel CA Rennes (1re ch. B), 13 septembre 2001 : RG n° 00/05935 ; arrêt n° 702)

 

Extrait : « Attendu en second lieu que le non respect invoqué par l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE des dispositions sur le démarchage à domicile résultant des articles L. 121-21 et suivants du code de la consommation, à les supposer établies, ne sauraient être considéré comme applicable en l'espèce au motif principal que ces dispositions s'appliquent aux seules personnes physiques à l'exclusion des personnes morales, cette dernière qualité devant être reconnue à l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE par application des dispositions combinées des articles 5 et 34 de la loi 66-537 du 24 juillet 1966 établissant que les sociétés commerciales, dont l'EURL, « jouissent de la personne morale à dater de leur immatriculation au registre du commerce », que cette dernière a été effectuée pour l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE à la date du 19 juin 1996, soit antérieurement à la passation des contrats litigieux. Attendu subséquemment qu'il est sans conséquence, au regard de l'application des dispositions du code de la consommation relatives au démarchage à domicile, de déterminer la qualité de consommateur ou de professionnel de l'EURL»

 

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

TRIBUNAL DE COMMERCE DE RENNES

DEUXIÈME CHAMBRE

JUGEMENT DU 6 JUIN 2000

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. : n° 99-00011. Jugement prononcé en audience publique par Monsieur GOUIX, Président de chambre, assisté de Maître VETILLARD, Greffier associé.

 

ENTRE :

Société LIONBAIL,

[adresse], Le « Demandeur »,  représenté par Maître BRIAND, Avocat à RENNES

 

ET :

1/ Société RENNES CINÉ MUSIQUE « CINÉ AFFICHES », EURL

[adresse],  représenté par la SCP LEROYER, BESSY, GABOREL, Avocats à RENNES

2/ Société TEP FRANCE, SA

[adresse], représenté par la SCP PLOUTON et DOLMAZON, Avocats à LYON et par la SCP GUYOT, GUYOT-GARNIER, GARNIER J., LOZAC'HMEUR, BOIS, DOHOLLOU, PERSON, SOUET, ARION PH. Avocats à RENNES ; Les « Défendeurs »

 

L'affaire a été retenue à l'audience publique du 28 mars 2000 n° 274 où siégeaient Monsieur GOUIX, Président de chambre, Madame DOURDET, Monsieur COURTEL, juges, qui en ont délibéré, assistés de Maître VETILLARD, Greffier associé.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] Par actes en date des 21 et 28 décembre 1998, la société LIONBAIL a fait donner assignation à l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE et à la société TEP FRANCE d'avoir à comparaître devant le Tribunal de commerce de Rennes pour s'entendre :

S'agissant de l'EURL RENNES CINÉ MUSIOUE :

- Constater que le contrat en date du 8 octobre 1996 a été résilié 8 jours après une mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 15 août 1997,

- Condamner en conséquence l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE à payer à la société LIONBAIL la somme de 22.825,71 Francs en principal,

- Ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir nonobstant appel et sans caution,

- Condamner l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE à payer à la société LIONBAIL la somme de 2.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du NCPC,

- La condamner aux entiers dépens de l'instance.

S'agissant de la société TEP France :

- Entendre la réponse de celle-ci au grief invoqué par l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE de vice de consentement affectant le contrat,

- Que le jugement à intervenir soit commun et opposable à celle-ci.

 

A – FAITS ET PROCÉDURE :

- Le 8 octobre 1996, un contrat d'abonnement de télésurveillance est signé entre la société TEP France et l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE aux termes duquel la société TEP France installe chez l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE du matériel de télésurveillance, s'occupe de la maintenance dudit matériel et exerce une prestation de télésurveillance, ceci pour une durée de 48 mois, moyennant des mensualités de 570 Francs HT, soit 687,42 Francs TTC.

- Le point de départ du contrat est fixé à la date d'installation, soit suivant procès-verbal le 10 octobre 1996.

- Le 8 octobre 96 est signé un contrat de location entre la société RENNES CINÉ MUSIQUE et la société LIONBAIL concernant la location pendant 48 mois du matériel TEP FRANCE installé chez la société RENNES CINÉ MUSIQUE pour un montant de 570 Francs [minute page 3] HT, soit 687,42 Francs TTC, correspondant au paiement des loyers dus à LIONBAIL et des redevances dues au prestataire TEP FRANCE.

- Après quelques mois d'exécution, l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE n'a plus payé les loyers correspondants.

- Le contrat en date du 8 octobre 1996 a été résilié par LIONBAIL 8 jours après une mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 15 août 1997.

- La société LIONBAIL demande la condamnation de l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE à lui payer :

* Les loyers impayés :                         3.702,33 Francs

* Une indemnité conventionnelle :                    370,23 Francs

* Une indemnité de résiliation :                         20.474,36 Francs

* Application de la clause pénale :                   2.047,44 Francs

* Moins les règlements déjà effectués  - 3.768,65 Francs

22.825,71 Francs

La société LIONBAIL demande 2.000 Francs au titre de l'article 700 du NCPC, l'exécution provisoire et la condamnation de l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE aux entiers dépens.

- L'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE refuse de payer les sommes réclamées et demande le débouté de l'ensemble des demandes de LIONBAIL à titre principal pour nullité des contrats passés avec TEP FRANCE et LIONBAIL pour irrespect de la loi sur le démarchage, le crédit à la consommation et vice du consentement.

L'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE demande également :

- la restitution par LIONBAIL de la somme qu'elle a versée au titre du contrat, soit 8.580,25 Francs, et que les sociétés TEP et LIONBAIL soient condamnées à lui verser 5.000 Francs en réparation de son préjudice,

- à titre subsidiaire, que le tribunal de Rennes sursoit à statuer dans l'attente de la décision du Parquet de LYON concernant la plainte déposée le 8 juillet 1997 à la DDCCRF d'Ille-et-Vilaine par RENNES CINÉ MUSIQUE contre TEP FRANCE, en outre, que TEP et LIONBAIL soient condamnées in solidum à lui payer 2.000 Francs au titre de l'article 700 du NCPC et qu'enfin elles soient condamnées in solidum aux entiers dépens.

- La société TEP demande que l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE soit déboutée de l'ensemble de ses demandes au motif que les contrats ont été régulièrement exécutés pendant plusieurs mois sans contestation de la part de RENNES CINÉ MUSIQUE et doivent donc être regardés comme réguliers. La société TEP précise qu'il ne saurait y avoir lieu à nullité ou annulation des contrats sur la base des dispositions des articles L. 121-21 et suivants du code de la consommation car ceux-ci ne sont pas applicables à l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE en sa qualité de personne morale.

La société TEP demande également le rejet des dispositions réglementant le crédit à la consommation, les contrats concernés ne portant pas sur une opération de crédit.

[minute page 4] Enfin, la société TEP demande la condamnation de l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE à lui payer la somme de 8.000 Francs au titre de l'article 700 du NCPC ainsi que la condamnation de cette dernière en tous les dépens.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

B – EXPOSÉ DES MOTIFS :

Attendu que pour justifier son refus de payer les sommes réclamées par la société LIONBAIL au titre du contrat souscrit par l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE, cette dernière invoque la nullité dudit contrat, ainsi que celui conclu avec la société TEP FRANCE, pour non-respect de la loi sur le démarchage à domicile, le crédit à la consommation et vice du consentement.

Attendu, tout d'abord, que l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE ne conteste pas avoir signé le même jour, soit le 8 octobre 1996, lesdits contrats.

Attendu en second lieu que le non respect invoqué par l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE des dispositions sur le démarchage à domicile résultant des articles L. 121-21 et suivants du code de la consommation, à les supposer établies, ne sauraient être considéré comme applicable en l'espèce au motif principal que ces dispositions s'appliquent aux seules personnes physiques à l'exclusion des personnes morales, cette dernière qualité devant être reconnue à l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE par application des dispositions combinées des articles 5 et 34 de la loi 66-537 du 24 juillet 1966 établissant que les sociétés commerciales, dont l'EURL, « jouissent de la personne morale à dater de leur immatriculation au registre du commerce », que cette dernière a été effectuée pour l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE à la date du 19 juin 1996, soit antérieurement à la passation des contrats litigieux.

Attendu subséquemment qu'il est sans conséquence, au regard de l'application des dispositions du code de la consommation relatives au démarchage à domicile, de déterminer la qualité de consommateur ou de professionnel de l'EURL.

Attendu que l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE invoque par ailleurs le non-respect des dispositions en matière de crédit à la consommation.

Attendu qu'il ne saurait être prétendu par l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE qu'elle a contracté à son insu avec LIONBAIL, alors qu'il résulte des pièces du dossier, non-contestées, que le contrat entre l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE et LIONBAIL a été signé le 8 octobre 96, soit à la même date que le contrat avec TEP FRANCE.

Attendu, par ailleurs, que le contrat souscrit par l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE avec LIONBAIL ne peut s'analyser en un contrat de crédit soumis aux dispositions des articles L. 311-1 et suivants du code de la consommation au motif principal qu'il ne s'agit pas d'une opération de location-vente, aucune clause d'achat ne figurant dans ledit contrat. L'opération ne répond pas non plus à la qualification de paiement échelonné de prestations de service car chaque mensualité correspond à une part de location et une part de prestations de service correspondant au mois calendaire et qu'aucun délai de paiement n'est accordé.

[minute page 5] Attendu en troisième lieu que l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE invoque la nullité pour vice du consentement (dol) des contrats avec TEP FRANCE et LIONBAIL.

Attendu que parmi les arguments avancés ceux relatifs à l'existence de stratagèmes ou de « prestations Alcatel » ou de mirage de non paiement de l'abonnement ne sont corroborés pas aucun élément de preuve et ne peuvent être retenus.

Attendu, par ailleurs, que les arguments selon lesquels le montant global de la prestation de télésurveillance et l'écart de prix, si l'on intègre ou non la TVA, à les supposer établis, ne sauraient davantage être retenus car il est de jurisprudence constante que le seul manquement aux exigences d'information sur les prix formulés par l'article L. 113-3 du code de la consommation, à le supposer applicable, ne peut entraîner la nullité du contrat.

Attendu au surplus qu'indépendamment des dispositions du code de la consommation, la non indication de la TVA pour un commerçant, à la supposer établie, ne saurait être constitutive d'un dol.

Attendu, en conséquence, que les contrats doivent être déclarés valides et que ayant pris effet au 10 octobre 96 suivant procès-verbal d'installation, le contrat conclu entre l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE et LIONBAIL doit être considéré comme ayant été résilié 8 jours après la mise en demeure en date du 15 juillet 97.

Attendu que le tribunal de Rennes ne saurait surseoir à statuer en cette affaire, au motif que la société RENNES CINÉ MUSIQUE aurait introduit une instance à l'encontre de la société TEP FRANCE, les procédures étant distinctes.

Attendu, en conséquence, de tout ce qui précède, que la demande de l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE en nullité des contrats ne peut qu'être rejetée et l'EURL sera déboutée de sa demande de remboursement des sommes qu'elle a versées à LIONBAIL, soit 8.580,52 Francs, de même que sa demande de 5.000 Francs en réparation de son préjudice.

Attendu que s'agissant des loyers à courir jusqu'à la résiliation du contrat, il résulte des pièces produites par LIONBAIL, non contestées, qu'il reste dû au titre des loyers impayés la somme de (3.702,33 Francs + 370,23 Francs = ) 4.072,56 Francs – 3.768,65 Francs (somme payée), soit 303,91 Francs. L'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE est en conséquence condamnée à payer cette somme à LIONBAIL.

Attendu, par ailleurs, que pour échapper à ses obligations contractuelles et cesser ses paiements de sa propre initiative, l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE invoque, d'une part, l'écart de prix qui serait résulté de l'intégration ou non de la TVA à la somme de 570 Francs et, d'autre part, des dysfonctionnements de matériel.

Attendu qu'il a déjà été établi précédemment que la différence de prix ne pouvait être retenue, seuls les dysfonctionnements allégués par l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE, et non contestés par les parties adverses, peuvent atténuer la responsabilité par lui encourue dans la rupture contractuelle.

Attendu, au surplus, pour déterminer le préjudice de LIONBAIL, que la demande de cette dernière, relative à l'application de l'indemnité de résiliation et de la clause pénale adjacente, soit 20.474,36 Francs + 2.047,44 Francs correspondant à 37 mensualités de la seule location [minute page 6] due à LIONBAIL majorée de 10 %, il y a lieu de considérer que cette pénalité est manifestement excessive au regard de l'importance du préjudice réellement subi à ce jour par LIONBAIL, qui a pu, dans des délais raisonnables, et grâce aux capacités de placement de la société TEP, relouer le matériel en cause à une autre entreprise cliente.

Qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice à la somme de 3.000 Francs.

Attendu, par ailleurs, que l'absence de relocation n'a pas été alléguée par LIONBAIL en justification de son préjudice.

Attendu que le jugement à intervenir, déboutant partiellement LIONBAIL de ses demandes, doit être déclaré commun et opposable à la société TEP FRANCE, rédacteur des contrats contestés.

Attendu que, compte tenu du délai écoulé depuis la rupture des relations contractuelles, il y a lieu de prononcer l'exécution provisoire nonobstant appel et sans caution.

Attendu que l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE, qui succombe, sera déboutée de sa demande de condamnation de TEP et LIONBAIL à 2.000 Francs au titre de l'article 700 du NCPC.

Attendu pour la même raison que l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE sera condamnée à payer la somme de 2.000 Francs à LIONBAIL au titre de l'article 700 du NCPC.

Attendu que la demande de la société TEP FRANCE, appelée à la cause par la société LIONBAIL, de condamner l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE à la somme de 8.000 Francs au titre de l'article 700 du NCPC sera rejetée.

Attendu que l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE, qui succombe, sera condamnée aux entiers dépens.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort,

- Reconnaissant la validité des contrats souscrits par l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE,

- Rejette l'ensemble des demandes, fins et conclusions de l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE,

- Condamne celle-ci au paiement de la somme de 303,91 Francs au titre de l'exécution du contrat et à 3.000 Francs de dommages et intérêts correspondant au préjudice subi par la société LIONBAIL du fait de la rupture du contrat par L'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE,

- Rejette le surplus des demandes de la société LIONBAIL à ce titre,

- Ordonne l'exécution provisoire nonobstant appel et sans caution,

- [minute page 7] Déclare le présent jugement commun et opposable à la société TEP FRANCE,

- Condamne l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE à payer la somme de 2.000 Francs à LIONBAIL au titre de l'article 700 du NCPC,

- Rejette la demande de TEP FRANCE demandant la condamnation de l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE à lui payer 8.000 Francs au titre de l'article 700 du NCPC,

- Condamne l'EURL RENNES CINÉ MUSIQUE en tous les dépens de l'instance.

- Liquide les frais de greffe à la somme de 285,34 Francs TTC conformément aux articles 695 et 701 du NCPC.

LE PRÉSIDENT.                    LE GREFFIER.