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CA RENNES (3e ch. correct.), 7 mai 1998

Nature : Décision
Titre : CA RENNES (3e ch. correct.), 7 mai 1998
Pays : France
Juridiction : Rennes (CA), 3e ch. correct.
Demande : 97/00341
Décision : 815/98
Date : 7/05/1998
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Revue de jurisprudence de droit des affaires
Date de la demande : 19/09/1996
Décision antérieure : CASS. CRIM., 9 novembre 1999, TGI BREST (ch. correct.), 10 septembre 1996
Numéro de la décision : 815
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CERCLAB - DOCUMENT N° 1815

CA RENNES (3e ch. correct.), 7 mai 1998 : RG n° 97/00341 ; arrêt n° 815/98

(sur pourvoi Cass. crim., 9 novembre 1999 : pourvoi n° 98-85446 ; arrêt n° 6976)

Publication : RJDA 1998/7, n° 915

 

Extrait : « Considérant que s'il est incontestable que les contrats ont été conclus par les parties civiles à titre professionnel, cette circonstance n'est pas suffisante pour exclure l'application des dispositions relatives au démarchage à domicile, étant rappelé qu'en modifiant la loi du 22 décembre 1972 par celle du 23 juin 1989, le législateur a précisément voulu protéger le professionnel lorsqu'il conclut un contrat dans les mêmes conditions qu'un consommateur privé ; Considérant que l'activité d'aubergiste ou de carrossier exercée par Messieurs A. et C. ne leur donne aucune compétence en matière de télésurveillance, l'objet du contrat étant étranger à leur activité ; qu'en outre, le contrat litigieux n'a pas pour effet par lui-même l'extension et le développement de l'activité commerciale ; qu'il ne peut aussi permettre l'accroissement de la clientèle ; Que dès lors le contrat d'abonnement de télésurveillance conclu par Messieurs A. et C. est sans rapport direct avec leur activité commerciale ou artisanale ; qu'il était donc soumis aux dispositions protectrices des articles L. 121-21 et suivant du Code de la Consommation. ».

 

COUR D’APPEL DE RENNES

TROISIÈME CHAMBRE CORRECTIONNELLE

ARRET DU 7 MAI 1998

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

DOSSIER N° 97/00341. Arrêt n° 815/98. Prononcé publiquement le JEUDI SEPT MAI MIL NEUF CENT QUATRE VINGT DIX HUIT par la 3ème Chambre des appels Correctionnels.

 

PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR :

Monsieur X.

Né le [date] à [ville] Fils de X. et de Y., De nationalité française, marié, gérant d'entreprise, Demeurant [adresse], Prévenu, appelant, libre, jamais condamné, comparant, Assisté de Maître LEYER Benoît, avocat au barreau de QUIMPER,

 

Monsieur A.,

demeurant [adresse], Partie civile, intimé, non comparant, Représenté par Maître GAILLOT-MERCIER Valérie, avocat au barreau de RENNES,

Monsieur B.,

demeurant [adresse], Partie civile, intimé, non comparant, Représenté par Maître BREBION Avoué, substituant Maître ALEGOET, Avocat au barreau de BREST,

Monsieur C.,

demeurant [adresse], Partie civile, intimé, non comparant

DIRECTION DE LA CONCURRENCE, DE LA CONSOMMATION ET DE LA RÉPRESSION DES FRAUDES,

demeurant [adresse], Partie intervenante, intimé, non représentée,       

LE MINISTÈRE PUBLIC

Appelant, [minute page 2]

 

COMPOSITION DE LA COUR : lors des débats et du délibéré : Président :Madame SEGONDAT - Conseillers : Monsieur DEBONS, Madame LEGEARD,

Prononcé à l'audience du 07 MAI 1998 par Mme LEGEARD, conformément aux dispositions de l'article 485 alinéa 3 du Code de Procédure Pénale.

MINISTÈRE PUBLIC : représenté aux débats par Monsieur ABRIAL, Avocat Général et lors du prononcé de l'arrêt par Monsieur CATALAN, Avocat Général.

GREFFIER : en présence de Mlle ROUXEL lors des débats et de Mlle BERNARD lors du prononcé de l'arrêt

DÉROULEMENT DES DÉBATS : À l'audience publique du 26 MARS 1998, le Président a constaté l'identité du prévenu Monsieur X., comparant assisté de Maître LEYER Benoît,

A cet instant, Maîtres LEYER, GAILLOT-MERCIER et BREBION ont déposé des conclusions.

Ont été entendus : Mme LEGEARD, en son rapport, Le prévenu en son interrogatoire, Maître LEYER en sa plaidoirie, L'Avocat Général en ses réquisitions, Maître GAILLOT-MERCIER en sa plaidoirie, Le prévenu qui a eu la parole en dernier,

Puis, la Cour a mis l'affaire en délibéré pour son arrêt être rendu à l'audience publique du 30 AVRIL 1998,

A l'audience du 30 AVRIL 1998, la Cour a prorogé son délibéré pour son arrêt être rendu à l'audience publique du 07 MAI 1998,

Conformément aux prescriptions de l'article 462 alinèa 2 du Code de Procédure Pénale, le Président a avisé les parties présentes de la date de l'audience à laquelle l'arrêt serait rendu.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 3] RAPPEL DE LA PROCÉDURE :

LE JUGEMENT :

Le Tribunal Correctionnel de BREST par jugement Contradictoire en date du 10 SEPTEMBRE 1996, pour :

REMISE DE CONTRAT NON CONFORME AU CLIENT - DÉMARCHAGE À DOMICILE OU DANS UN LIEU NON COMMERCIAL

DEMANDE OU OBTENTION DE PAIEMENT OU D'ACCORD AVANT LA FIN DU DÉLAI DE RÉFLEXION - DÉMARCHAGE

a condamné Monsieur X. à 8.000 francs d'amende,

et, sur l'action civile, l'a condamné à payer à :

- Monsieur B. : 5.000 francs à titre de dommages-intérêts et 2.000 francs sur le fondement de l'article 475-1 du Code de Procédure Pénale,

- Monsieur C. : 5.000 francs à titre de dommages-intérêts,

- Monsieur A. : 5.000 francs à titre de dommages-intérêts,

 

LES APPELS :

Appel a été interjeté par : Monsieur X., le 19 septembre 1996 ; M. le Procureur de la République, le 19 septembre 1996.

 

LA PRÉVENTION :

Considérant qu'il est fait grief à Monsieur X., d'avoir sur le territoire national, courant 1994, après avoir démarché Messieurs B., C. et A. à leur domicile, à leur résidence ou à leur lieu de travail, remis à ceux-ci un contrat, ne comportant pas la formule détachable destinée à faciliter l'exercice de la faculté de renonciation ;

Infraction prévue et réprimée par les articles L. 121-21, L. 121-23, L. 121-24, L. 121-28 du Code de la Consommation ;

Considérant qu'il est fait grief à Monsieur X., d'avoir sur le territoire national, courant 1994, après avoir démarché Messieurs B., C. et A. à leur domicile, à leur résidence ou à leur lieu de travail, exigé ou obtenu d'eux, directement ou indirectement, une contrepartie ou un engagement, en l'espèce une somme de 400, 400 et 500 francs ;

Infraction prévue et réprimée par les articles L. 121-28, L. 121-26 du Code de la Consommation ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 4] EN LA FORME :

Considérant que les appels sont réguliers et recevables en la forme ;

 

AU FOND :

Considérant qu'il ressort du dossier et des débats les éléments suivants :

La société SEGE dont Monsieur X. est le Président Directeur Général exploite sous forme de concession le système de télésurveillance par écoute CIPE.

Si sa prestation de service fait l'objet d'un abonnement, le matériel nécessaire chez le client est acquis par un établissement financier qui le loue ensuite à l'abonné moyennant le paiement d'une mensualité correspondant au coût de cette location mais incluant également le coût de l'abonnement, la durée « irrévocable » de ce contrat est de 48 mois.

Les 10 octobre 1991, 2 décembre 1992 et 5 janvier 1994, Monsieur B., imprimeur à [ville A], Monsieur A., exploitant de la ferme auberge de […] et Monsieur C., garagiste à [ville B], après avoir été démarchés à domicile, ont signé un contrat d'abonnement de télésurveillance, versant immédiatement pour les frais d'adhésion : 400 francs pour Messieurs B. et A., 500 francs pour Monsieur C.

Non satisfaits de la prestation de service et estimant avoir été trompés sur les conditions de conclusion des contrats, Messieurs B., A. et C. s'adressaient à la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) de [ville A] qui établissait le 29 mai 1995 un procès-verbal de délit pour infraction aux articles L. 121-23, L. 121-24 et L. 121-26 du Code de la Consommation.

Considérant que Monsieur X. souligne qu'au moment où les poursuites ont été engagées, la prescription triennale relative au délit était acquise en ce qui concerne les contrats B. et A. signés les 10 octobre 1991 et 6 décembre 1992 ;

Que sur le fond, il allègue l'absence de délit, motif pris de ce que les trois plaignants ont conclu avec la société SEGE à l'occasion de leur exercice professionnel ; qu'il observe en effet que les loyers ont été inclus dans la comptabilité professionnelle, que le matériel a été installé dans les locaux professionnels ;

Qu'il en déduit que le contrat litigieux a un rapport direct avec l'activité commerciale et artisanale des parties civiles au sens de l'article L. 121-22 du Code de la Consommation et n'est donc pas soumis aux dispositions de la loi relative au démarchage à domicile ;

[minute page 5] Qu'il demande en conséquence à la Cour de le relaxer et de déclarer irrecevable toute constitution de partie civile ;

 

I - Sur la prescription :

Considérant que les faits reprochés au prévenu étant constitutifs de délits instantanés, le point de départ de la prescription se situe à la date à laquelle ils ont été commis c'est à dire en l'espèce lors de la conclusion des contrats soit les 10 octobre 1991 pour Monsieur B., 2 décembre 1992 pour Monsieur A. et 5 janvier 1994 pour Monsieur C.

Considérant que le procès-verbal de délit établi le 29 mai 1995 par la DGCCRF constitue un acte interruptif de prescription ; que celle-ci n'est donc pas acquise en ce qui concerne les faits relatifs à messieurs A. et C. ;

Que par contre les diligences effectuées au préalable par cette administration, y compris les procès-verbaux de déclaration, que ce soit des plaignants ou de Monsieur X. ne constituent pas des actes interruptifs de prescription ;

Que dès lors, le contrat ayant été signé le 10 octobre 1991, la prescription est acquise en ce qui concerne les faits concernant monsieur B. qui n'avait pas lui-même déclenché l'action publique ;

 

II - Sur le fond :

Considérant que Monsieur X. ne conteste pas la non application aux contrats litigieux de la loi du 22 décembre 1972 relative au démarchage à domicile ; qu'en effet les contrats signés par Messieurs A. et C. ne comportent aucun bordereau de rétractation dans le délai légal ; qu'en outre, les parties civiles ont versé des fonds le jour même de la conclusion du contrat ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.121-22 du Code de la Consommation, ne sont pas soumises aux dispositions protectrices de la loi du 22 décembre 1972 les ventes locations ou locations ventes de biens ou de prestation de service lorsqu'elles ont un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre d'une exploitation agricole, industrielle, commerciale ou artisanale ou de toute autre profession ;

Considérant que s'il est incontestable que les contrats ont été conclus par les parties civiles à titre professionnel, cette circonstance n'est pas suffisante pour exclure l'application des dispositions relatives au démarchage à domicile, étant rappelé qu'en modifiant la loi du 22 décembre 1972 par celle du 23 juin 1989, le législateur a précisément voulu protéger le professionnel lorsqu'il conclut un contrat dans les mêmes conditions qu'un consommateur privé ;

[minute page 6] Considérant que l'activité d'aubergiste ou de carrossier exercée par Messieurs A. et C. ne leur donne aucune compétence en matière de télésurveillance, l'objet du contrat étant étranger à leur activité ; qu'en outre, le contrat litigieux n'a pas pour effet par lui-même l'extension et le développement de l'activité commerciale ; qu'il ne peut aussi permettre l'accroissement de la clientèle ;

Que dès lors le contrat d'abonnement de télésurveillance conclu par Messieurs A. et C. est sans rapport direct avec leur activité commerciale ou artisanale ; qu'il était donc soumis aux dispositions protectrices des articles L. 121-21 et suivant du Code de la Consommation ;

Considérant que les faits visés à la prévention ont aussi été exactement analysés et qualifiés par les premiers juges ;

Que la Cour trouve dans les éléments du dossier les éléments lui permettant de faire une application différente de la loi pénale ; qu'en effet, Monsieur X. n'a pas tenu compte des observations qui lui avaient été faites par la DGCCRF auprès de laquelle il s'était engagé en 1993 à modifier les contrats, ce qu'il n'a pas fait ;

 

Sur l'action civile :

Considérant qu'eu égard à la prescription des faits le concernant reprochés à Monsieur X., la constitution de partie civile de Monsieur B. est irrecevable ;

Considérant que le premier juge, pour le surplus, a correctement apprécié les demandes des parties civiles qui en sollicitent le maintien ; que les dispositions civiles du jugement qui a accordé 5.000 francs de dommages intérêts à Messieurs C. et A. seront confirmées, l'indemnité dûe au titre de l'article 475-1 du Code de Procédure Pénale en cause d'appel étant fixée comme il suit au dispositif ;

Considérant que depuis l'intervention de la loi n° 93-2 du 4 Janvier 1993 et le décret d'application n° 93-867 du 28 Juin 1993, le procès ne donne plus lieu en cas de condamnation pénale de l'auteur de l'infraction à la condamnation aux frais appelés autrefois dépens, que ce soit dans le jugement sur l'action publique ou dans celui sur l'action civile ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

[minute page 7] Statuant publiquement, par arrêt contradictoire à l'égard de Monsieur X., Monsieur A., Monsieur B., par défaut à l'égard de Monsieur C. et la DIRECTION DE LA CONCURRENCE, DE LA CONSOMMATION ET DE LA RÉPRESSION DES FRAUDES,

EN LA FORME

Reçoit les appels,

AU FOND

Sur l'action publique :

Déclare prescrits les faits reprochés à Monsieur X. concernant Monsieur B. ;

Déclare Monsieur X. coupable pour le surplus des faits visés à la prévention ;

Le condamne à la peine de DIX MILLE FRANCS (10.000 Francs) d'amende ; Prononce la contrainte par corps,

La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de 800 Francs dont est redevable le condamné,

Le tout par application des articles susvisés, 800-1, 749 et 750 du Code de Procédure Pénale

Sur l'action civile :

Déclare irrecevable la constitution de partie civile de Monsieur B. ; Confirme les dispositions civiles concernant Messieurs A. et C. ; Y ajoutant,

Condamne Monsieur X. à payer à Monsieur A. la somme de DEUX MILLE FRANCS (2.000 Francs) au titre de l'article 475-1 du Code de Procédure Pénale ;

Dit qu'il n'y a pas lieu à condamnation aux dépens en vertu de la loi n°93-2 du 4 JANVIER 1993 et du décret d'application n°93-867 du 28 JUIN 1993.