CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

TI HUNINGUE, 26 juin 2009

Nature : Décision
Titre : TI HUNINGUE, 26 juin 2009
Pays : France
Juridiction : Huningue (TI)
Demande : 11-09-000022
Décision : 157/2009
Date : 26/06/2009
Nature de la décision : Irrecevabilité
Date de la demande : 4/02/2009
Décision antérieure : CA COLMAR (3e ch. civ. sect. A), 3 mai 2010
Numéro de la décision : 157
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 1894

TI HUNINGUE, 26 juin 2009 : RG n° 11-09-000022 ; jugt n° 157/2009

(sur appel CA Colmar (3e ch. civ. sect. A), 3 mai 2010 : RG n° 09/03757 ; arrêt n° 10/485)

 

Extrait : « L'Association DIC a initialement introduit son action sur le fondement de l'article L. 421-6 du code de la consommation, lequel prévoit que « […] ». Dans ses dernières conclusions en date du 15 avril 2009, elle fonde son action sur l'article L. 421-2 du code de la consommation selon lequel « […] ». Il convient donc de statuer sur la recevabilité de l'action de l'Association DIC sur le fondement de l'article L. 421-2 du code de la consommation.

Si ce texte permet à une association de consommateurs de saisir le juge civil aux fins de suppression dans le contrat d'une clause illicite, il renvoie expressément aux conditions d'action prévues par l'article L. 421-1 du code de la consommation. Or, l'article L. 421-1 du Code de la consommation ne permet qu'aux associations de consommateurs d'exercer l'action en réparation d'un dommage causé par une infraction pénale. […]. En l'absence d'infraction pénale reprochée à la société EBM et de poursuites exercées à son encontre, l'action de l'Association DIC sur le fondement de l'article L. 421-2 du code de la consommation doit être déclarée irrecevable pour défaut de qualité à agir.

En outre, il convient de souligner que dans ses dernières conclusions en date du 15 avril 2009, l'Association DIC a expressément maintenu l'article L. 421-2 du code de la consommation comme fondement unique de son action alors que l'irrecevabilité avait été soulevée par la société EBM. Dans ces conditions, il n'appartient pas au juge de requalifier la demande de l'Association DIC et de retenir un autre fondement juridique dès lors qu'il a été exclu par la demanderesse elle-même. »

 

TRIBUNAL D’INSTANCE D’HUNINGUE

JUGEMENT DU 26 JUIN 2009

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 11-09-000022. Jugement n° 157/2009.

Le 26 juin 2009 a été prononcé publiquement par mise à disposition au greffe du Tribunal d'Instance, le jugement suivant, signé par S. GlNDENSPERGER, Président, Juge Placé par ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'Appel de Colmar en date du 31 mars 2009 et BALLIOT Christian, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le dit magistrat ; Après débats à l'audience du 29 mai 2009, sous la Présidence de S. GINDENSPERGER, Juge d'instance, assistée de BALLIOT Christian, Greffier ;

 

ENTRE :

DEMANDEURS :

Association DIC (Défense et Information du Consommateur)

CACL prise en la personne de son représentant légal avec siège [adresse], représentée par Maîtres HAMEL & JANDER, avocats du barreau de MULHOUSE

 

ET :

DÉFENDEUR :

Société Elektra Birseck (EBM)

prise en la personne de son représentant légal avec siège [adresse], représentée par Maître FRICKER Danièle, avocat du barreau de Colmar

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] EXPOSÉ DU LITIGE :

Par acte introductif d'instance enregistré au greffe le 4 février 2009, l'association Défense et Information du Consommateur (ci après l'Association DIC) a saisi le Tribunal d'Instance de HUNINGUE d'une demande dirigée contre la société Elektra Birseck Munchenstein (ci-après, la société EBM) et sollicite, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :

- sa condamnation d'avoir à supprimer la clause de paiement par virement automatique obligatoire sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la signification du jugement ;

- la publication du jugement à intervenir dans le journal l'Alsace Editions Régionales ainsi que dans les Dernières Nouvelles d'Alsace et le journal Basler Zeitung aux frais de la société EBM ;

- la condamnation de la société EBM au paiement de la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé à l'intérêt collectif de ses membres ;

- sa condamnation au paiement de la somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

- sa condamnation aux dépens.

L'Association DIC expose qu'elle est une association de défense des consommateurs régulièrement déclarée dont l'objet statutaire explicite est la défense des consommateurs conformément à l'article L. 421-1 du code de la consommation.

Elle rappelle qu'elle a été agréée par arrêté préfectoral du 3 août 2004 pour exercer l'action civile au nom des consommateurs et qu'elle peut à ce titre ordonner, le cas échéant sous astreinte, la suppression d'une clause illicite ou abusive dans tout contrat ou type de contrat proposé ou destiné aux consommateurs.

Elle allègue qu'elle a qualité à agir sur le fondement de l'article L. 421-1 du code de la consommation, son action ayant pour objet la suppression dans le contrat ou le type de contrat proposé au consommateur d'une clause illicite.

Elle soutient que la société EBM, qui distribue de l'électricité dans la région frontalière, impose depuis le mois d'août 2008, à tous ses abonnés de payer obligatoirement leurs factures par prélèvement automatique.

Elle souligne que si les consommateurs doivent obligatoirement payer par prélèvement automatique, c'est qu'ils n'ont pas le choix d'autres modes de paiement.

Elle fait valoir que l'Association DIC ne verse aux débats aucune pièce justifiant de l'existence du préjudice dont elle sollicite réparation et que compte tenu de la faible durée d'émission des courriers litigieux, le risque porté à la collectivité des consommateurs a été négligeable.

Elle fait valoir que la commission des clauses abusives a dénoncé à plusieurs reprises une telle pratique au motif qu'elle est source de déséquilibre contractuel en ce qu'elle est par son automaticité, voire son irrévocabilité, susceptible de réduire la possibilité pour le consommateur d'exercer un recours en cas de contestation sur le prix de la chose ou du service.

Elle allègue que la directive 2003/54/CE en date du 26 juin 2003 concernant les règles communes pour le marché intérieur de l'électricité prévoit dans son annexe A que les consommateurs doivent disposer d'un large choix de modes de paiement.

[minute page 3] Elle souligne qu'il s'agit d'une action préventive pouvant être introduite en l'absence de tout dommage subi par des consommateurs ou de réclamations de leur part et qu'elle peut être exercée par voie de demande initiale.

Elle prétend qu'une association qui obtient la suppression de clauses abusives sur le fondement de l'article L. 421-6 du code de la consommation peut obtenir auprès de la juridiction saisie des dommages et intérêts en réparation du préjudice causé à l'intérêt collectif de ses membres.

La société EBM conclut à l'irrecevabilité de la demande, au débouté de l'Association DIC et à sa condamnation au paiement de la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Elle expose qu'à compter du mois d'août 2007, elle a mené une campagne d'incitation au règlement par voie de prélèvements automatiques, dans le souci de simplifier la gestion de leurs abonnements par les consommateurs, et qu'elle a adressé à ses abonnés un formulaire de demande de prélèvements à compléter précisant qu'à partir du mois d'août 2008, tous les prélèvements se feront obligatoirement par prélèvements automatiques.

Elle soutient que l'Association DIC n'est agréée que pour exercer l'action civile dans le cadre des dispositions des articles L. 411-1 et suivants du code de la consommation et qu'il a été jugé que l'action civile ainsi utilisée ne pouvait désigner que l'action en réparation d'un dommage causé par une infraction pénale.

Elle souligne que l'article L. 421-2 du code de la consommation se réfère clairement à l'action en réparation ouverte à la victime d'une infraction pénale, laquelle n'est pas justifiée par l'Association DIC.

Elle fait valoir que les conditions de recevabilité de l'action sur le fondement de l'article L. 421-6 du code de la consommation ne sont pas réunies dans la mesure où la jurisprudence considère que la clause dont la suppression est sollicitée doit figurer dans les modèles de contrats proposés par les professionnels aux consommateurs au jour de l'introduction de l'instance.

Elle allègue que le modèle type de contrat proposé aux consommateurs au jour de la demande demeure inchangé et propose plusieurs modes de paiement aux consommateurs.

Elle soutient que la clause litigieuse n'a jamais été mentionnée que sur les courriers circulaires adressés aux abonnés au cours du mois de juin 2008.

Elle souligne qu'il ne peut y avoir lieu à suppression d'une clause qui n'existe plus.

A titre subsidiaire, sur le fond, elle rappelle que les recommandations émises par la commission des clauses abusives ne concernent pas les contrats de fourniture d'énergie.

Elle rappelle que ces recommandations ne revêtent qu'un caractère incitatif à l'égard des professionnels et sont dépourvues de force obligatoire et qu'aucun texte ayant force obligatoire ne consacre le principe illicite ou abusif d'une clause imposant un règlement par voie de prélèvement automatique.

Elle souligne que le caractère abusif d'une clause s'apprécie en se référant au moment de la conclusion du contrat au regard de l'économie générale du contrat.

[minute page 4] Elle indique que les contrats proposés aux abonnés offrent la faculté de choisir parmi un large panel de modes de règlement, systématiquement rappelé sur chacune des factures adressées aux consommateurs.

Elle précise en outre que la proposition dénoncée par l'Association DIC n'a été assortie d'aucune menace de mesures comminatoires et que les abonnés qui n'ont pas retourné le formulaire de demande de prélèvements n'ont fait l'objet d'aucune sanction contractuelle.

Elle fait valoir que l'Association DIC ne verse aux débats aucune pièce justifiant de l'existence du préjudice dont elle sollicite réparation et que compte tenu de la faible durée d'émission des courriers litigieux, le risque porté à la collectivité des consommateurs a été négligeable.

Les parties ont été régulièrement représentées. Eu égard à la nature de la demande, il sera statué par jugement contradictoire et en premier ressort.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

L'Association DIC a initialement introduit son action sur le fondement de l'article L. 421-6 du code de la consommation, lequel prévoit que « les associations mentionnées à l'article L. 421-1 et les organismes justifiant de leur inscription sur la liste publiée au journal officiel des communautés européennes en application de l'article 4 de la directive 98/27/CE du parlement européen et du conseil relative aux actions en cessation en matière de protection des consommateurs peuvent agir devant la juridiction civile pour faire cesser ou interdire tout agissement illicite au regard des dispositions transposant les directives mentionnées à l'article 1er de la directive précitée ».

Dans ses dernières conclusions en date du 15 avril 2009, elle fonde son action sur l'article L. 421-2 du code de la consommation selon lequel « les associations de consommateurs mentionnées à l'article L. 421-1 et agissant dans les conditions précisées à cet article peuvent demander à la juridiction civile statuant sur l'action civile ou à la juridiction répressive statuant sur l'action civile d'ordonner au défenseur ou au prévenu, le cas échéant sous astreinte, toute mesure destinée à faire cesser les agissements illicites ou à supprimer dans le contrat ou le type de contrat proposé au consommateur une clause illicite ».

Il convient donc de statuer sur la recevabilité de l'action de l'Association DIC sur le fondement de l'article L. 421-2 du code de la consommation.

Si ce texte permet à une association de consommateurs de saisir le juge civil aux fins de suppression dans le contrat d'une clause illicite, il renvoie expressément aux conditions d'action prévues par l'article L. 421-1 du code de la consommation.

Or, l'article L. 421-1 du Code de la consommation ne permet qu'aux associations de consommateurs d'exercer l'action en réparation d'un dommage causé par une infraction pénale.

En outre, l'article L. 421-2 fait référence à la juridiction civile statuant sur l'action civile ou à la juridiction répressive statuant sur l'action civile, ce qui implique l'existence d'une infraction. Dans le cadre de l'action sur intérêts civils exercée soit devant la juridiction pénale soit devant la juridiction civile, l'association de consommateur aura effectivement la possibilité de solliciter la suppression d'une clause illicite.

[minute page 5] En l'absence d'infraction pénale reprochée à la société EBM et de poursuites exercées à son encontre, l'action de l'Association DIC sur le fondement de l'article L. 421-2 du code de la consommation doit être déclarée irrecevable pour défaut de qualité à agir.

En outre, il convient de souligner que dans ses dernières conclusions en date du 15 avril 2009, l'Association DIC a expressément maintenu l'article L. 421-2 du code de la consommation comme fondement unique de son action alors que l'irrecevabilité avait été soulevée par la société EBM.

Dans ces conditions, il n'appartient pas au juge de requalifier la demande de l'Association DIC et de retenir un autre fondement juridique dès lors qu'il a été exclu par la demanderesse elle-même.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la société EBM les frais irrépétibles exposés dans le cadre de la présente instance. Par conséquent, l'Association DIC est condamnée à payer à la société EBM la somme de 300 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

L'Association DIC qui succombe à l'instance est condamnée aux dépens.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal statuant publiquement, par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort ;

DÉCLARE l'action de l'Association DIC irrecevable sur le fondement de l'article L. 421-2 du code de la consommation ;

CONDAMNE l'Association DIC à payer à la société EBM la somme de 300 € (trois cents euros) sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

CONDAMNE l'Association DIC aux dépens de l'instance.

Le Président,                         Le greffier.