CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

CA COLMAR (3e ch. civ. sect. A), 3 mai 2010

Nature : Décision
Titre : CA COLMAR (3e ch. civ. sect. A), 3 mai 2010
Pays : France
Juridiction : Colmar (CA), 3 ch. civ. sect. A
Demande : 09/03757
Décision : 10/485
Date : 3/05/2010
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Jurica
Décision antérieure : TI HUNINGUE, 26 juin 2009
Numéro de la décision : 485
Décision antérieure :
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 2899

CA COLMAR (3e ch. civ. sect. A), 3 mai 2010 : RG n° 09/03757 ; arrêt n° 10/485

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « Attendu qu'il résulte de l'arrêté du Préfet du Haut-Rhin du 13 août 2004 que l'association de défense et d'information du consommateur a été « agréée pour une durée de cinq ans pour exercer l'action civile dans le cadre des dispositions des articles L. 411-1 du code de la consommation » ; qu'il résulte des dispositions des articles L. 421-1, L. 421-2 et L. 421-6 du code de la consommation que les associations de consommateurs agréées peuvent exercer l'action civile devant les juridictions répressives ou civiles, demander la cessation d'agissements illicites, ou encore agir devant les juridictions civiles pour demander la suppression d'une clause illicite ou abusive dans tout contrat ; qu'en considération de l'agrément accordé à l'association DIC, la demande fondée sur les dispositions de l’article L. 421-6 du code de la consommation doit être déclarée recevable »

2/ « Attendu que la clause dont l'association DIC demande la suppression sous astreinte figure dans une lettre circulaire adressée aux abonnés de la société EBM pour les contraindre à adopter le mode de paiement par prélèvement automatique et ce dans les termes suivants « À compter d'août 2007, tous les règlements se feront obligatoirement par prélèvements automatiques. C'est pourquoi nous vous prions de bien vouloir compléter l'autorisation ci-dessous et nous la retourner accompagnée de votre RIB... » ; que la circonstance que cette lettre circulaire prévoie in fine « la présente demande est valable jusqu'à annulation de ma part à notifier en temps voulu au créancier » ne remet pas en cause le caractère obligatoire de ce mode de paiement ; Attendu que la société EBM réplique que la demande de l'association DIC est sans objet alors que la clause ne figure dans aucun contrat-type et que ce courrier a fait l'objet d'une campagne d'incitation très ponctuelle ; qu'elle soutient en outre que lorsque l'action a été introduite, aucune obligation de mode de paiement n'était imposée aux consommateurs ;

Attendu qu'il résulte clairement de la lettre-circulaire litigieuse que celle-ci a été adressée aux abonnés de la société EBM avant le mois d'août 2007, qui constituait le terme pour lequel elle incitait ses abonnés à mettre en place un prélèvement automatique ; que l'association DIC ne produit aucun autre courrier ni aucun contrat d'abonnement reproduisant une telle obligation ; qu'à l'inverse, la société EBM verse aux débats ses abonnements « électricité » actuels prévoyant différents modes de paiement, diverses copies de factures datées notamment des mois de février 2009 et janvier 2010 énonçant différents modes de règlement au choix du consommateur, ainsi qu'un relevé des statistiques au 11 janvier 2010 des différents modes de paiement pratiqués par ses abonnés, montrant qu'environ 66 % des abonnés règlent leurs consommation électrique par prélèvement automatique ;

Attendu que selon la jurisprudence de la cour de cassation (Cour de cassation du 1er février 2005) l'action fondée sur les dispositions de l’article L. 421-6 du code de la consommation ayant une finalité préventive, il est nécessaire que la clause querellée soit présente dans les modèles de contrats proposés aux consommateurs au jour de l'introduction de l'instance, la preuve en incombant à l'association de consommateurs ; qu'en l'espèce, la seule lettre-circulaire antérieure au mois d'août 2007 ne démontre pas que cette clause figurait encore parmi les documents contractuels utilisés par la société EBM lors de l'introduction de la demande le 4 février 2009, ce d'autant que les factures en vigueur à cette date énonçaient différents modes de paiement possibles ; que dans ces conditions, il est sans objet de rechercher si la clause ayant figuré dans une lettre-circulaire antérieure au mois d'août 2007 a pu créer au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au contrat (art L. 132-1 du code de la consommation) ».

 

COUR D’APPEL DE COLMAR

TROISIÈME CHAMBRE CIVILE SECTION A

ARRÊT DU 3 MAI 2010

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 09/03757. Arrêt n° 10/485. Décision déférée à la cour : jugement rendu le 26 juin 2009 par le Tribunal d'instance de HUNINGUE.

 

APPELANTE :

Association DIC,

ayant son siège social [adresse], représentée par Maître Frédérique DUBOIS (avocat à la cour)

 

INTIMÉE :

Société ELEKTRA BIERSECK EBM,

ayant son siège social [adresse], représentée par Maître Martine RICHARD-FRICK (avocat à la cour)

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 29 mars 2010, en audience publique, devant la cour composée de : Madame RASTEGAR, président de chambre, Madame SCHNEIDER, conseiller, M. JOBERT, conseiller, qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : M. UTTARD

ARRÊT : Contradictoire. Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile. Signé par Madame F. RASTEGAR, président et M. Christian UTTARD, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu le rapport ;

Par acte du 4 février 2009, l'association de défense et d'information du consommateur dite association DIC a fait assigner la société Elektra Birseck dite EBM devant le tribunal d'instance de Huningue pour obtenir sa condamnation sous astreinte à supprimer de ses documents contractuels la clause de paiement par virement automatique, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, pour obtenir la publication du jugement dans les journaux locaux et la condamnation de la société EBM à lui payer la somme de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts pour le préjudice apporté à l'intérêt collectif de ses membres.

Elle soutient que la commission des clauses abusives a dénoncé cette pratique source de déséquilibre contractuel, et ajoute que selon la directive relative au marché intérieur de l'électricité, les consommateurs doivent avoir le choix du mode de paiement.

Concluant à l'irrecevabilité et au débouté de la demande, la société EBM a répliqué que l'association DIC n'était agréée que pour exercer l'action civile dans le cadre d'une action pénale.

Elle a indiqué que le contrat-type soumis aux consommateurs proposait plusieurs modes de paiement, que la clause n'avait jamais été mentionnée que dans un courrier adressé aux abonnés en juin 2007, qu'il n'avait qu'un caractère incitatif, et qu'il n'était justifié d'aucun préjudice.

Par jugement du 26 juin 2009, le tribunal d'instance de Huningue a relevé que l'association s'était fondée sur les dispositions de l'article L. 421-2 du Code la consommation lesquelles renvoient à l'article L. 421-1 qui ne permet aux associations que d'exercer l'action en réparation d'un dommage causé par une infraction pénale.

Le tribunal en a conclu qu'en l'absence d'infraction pénale, l'action était irrecevable et a en outre condamné l'association DIC à payer à la société EBM la somme de 300 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

L'association de défense et d'information du consommateur a régulièrement interjeté appel de ce jugement.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu les dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile ;

Vu les conclusions de l'appelante l'association DIC reçues au greffe le 20 novembre 2009 tendant à l'infirmation du jugement déféré, à ce que la cour déclare sa demande recevable, condamne la société EBM à supprimer la clause de paiement par virement automatique obligatoire sous peine d'astreinte de 500 euros par jour de retard à compter du huitième jour suivant la signification de l'arrêt, ordonne la publication de l'arrêt à intervenir dans le journal les Dernières Nouvelles d'Alsace, le journal l'Alsace et le journal Basler Zeitung aux frais de la société EBM et condamne l'intimée à lui payer la somme de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts ainsi qu'un montant de 1.500 euros en application de l’ article 700 du Code de procédure civile ;

Vu les conclusions de l'intimée la société EBM reçues au greffe le 2 février 2010 tendant à la confirmation du jugement déféré, subsidiairement au rejet de la demande et à la condamnation de l'association DIC au paiement d'une somme de 1.500 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Vu les pièces de la procédure ;

 

Sur la recevabilité de la demande :

Attendu qu'il résulte de l'arrêté du Préfet du Haut-Rhin du 13 août 2004 que l'association de défense et d'information du consommateur a été « agréée pour une durée de cinq ans pour exercer l'action civile dans le cadre des dispositions des articles L. 411-1 du Code de la consommation » ;

qu'il résulte des dispositions des articles L. 421-1, L. 421-2 et L. 421-6 du Code de la consommation que les associations de consommateurs agréées peuvent exercer l'action civile devant les juridictions répressives ou civiles, demander la cessation d'agissements illicites, ou encore agir devant les juridictions civiles pour demander la suppression d'une clause illicite ou abusive dans tout contrat ;

qu'en considération de l'agrément accordé à l'association DIC, la demande fondée sur les dispositions de l’article L 421-6 du Code de la consommation doit être déclarée recevable ;

 

Au fond :

Attendu que la clause dont l'association DIC demande la suppression sous astreinte figure dans une lettre circulaire adressée aux abonnés de la société EBM pour les contraindre à adopter le mode de paiement par prélèvement automatique et ce dans les termes suivants « A compter d'août 2007, tous les règlements se feront obligatoirement par prélèvements automatiques. C'est pourquoi nous vous prions de bien vouloir compléter l'autorisation ci-dessous et nous la retourner accompagnée de votre RIB... » ;

que la circonstance que cette lettre circulaire prévoie in fine « la présente demande est valable jusqu'à annulation de ma part à notifier en temps voulu au créancier » ne remet pas en cause le caractère obligatoire de ce mode de paiement ;

Attendu que la société EBM réplique que la demande de l'association DIC est sans objet alors que la clause ne figure dans aucun contrat-type et que ce courrier a fait l'objet d'une campagne d'incitation très ponctuelle ;

qu'elle soutient en outre que lorsque l'action a été introduite, aucune obligation de mode de paiement n'était imposée aux consommateurs ;

Attendu qu'il résulte clairement de la lettre-circulaire litigieuse que celle-ci a été adressée aux abonnés de la société EBM avant le mois d'août 2007, qui constituait le terme pour lequel elle incitait ses abonnés à mettre en place un prélèvement automatique ;

que l'association DIC ne produit aucun autre courrier ni aucun contrat d'abonnement reproduisant une telle obligation ;

qu'à l'inverse, la société EBM verse aux débats ses abonnements 'électricité' actuels prévoyant différents modes de paiement, diverses copies de factures datées notamment des mois de février 2009 et janvier 2010 énonçant différents modes de règlement au choix du consommateur, ainsi qu'un relevé des statistiques au 11 janvier 2010 des différents modes de paiement pratiqués par ses abonnés, montrant qu'environ 66 % des abonnés règlent leurs consommation électrique par prélèvement automatique ;

Attendu que selon la jurisprudence de la cour de cassation (cour de cassation du 1er février 2005) l'action fondée sur les dispositions de l'article L. 421-6 du Code de la consommation ayant une finalité préventive, il est nécessaire que la clause querellée soit présente dans les modèles de contrats proposés aux consommateurs au jour de l'introduction de l'instance, la preuve en incombant à l'association de consommateurs ;

qu'en l'espèce, la seule lettre-circulaire antérieure au mois d'août 2007 ne démontre pas que cette clause figurait encore parmi les documents contractuels utilisés par la société EBM lors de l'introduction de la demande le 4 février 2009, ce d'autant que les factures en vigueur à cette date énonçaient différents modes de paiement possibles ;

que dans ces conditions, il est sans objet de rechercher si la clause ayant figuré dans une lettre-circulaire antérieure au mois d'août 2007 a pu créer au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au contrat (art L. 132-1 du Code de la consommation) ;

Attendu qu'il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais exposés et non compris dans les dépens ;

qu'il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

DÉCLARE l'appel recevable ;

Au fond le DIT fondé pour partie ;

INFIRME le jugement déféré en ce qu'il a déclaré la demande de l'association de défense et d'information du consommateur irrecevable ;

Et, statuant à nouveau,

DÉCLARE la demande recevable ;

Au fond, DIT la demande sans objet ;

CONFIRME le jugement déféré pour le surplus ;

DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNE l'association de défense et d'information du consommateur aux frais et dépens d'appel.