CASS. CIV. 3e, 10 décembre 2002
CERCLAB - DOCUMENT N° 1944
CASS. CIV. 3e, 10 décembre 2002 : pourvoi n° 01-10208 ; arrêt n° 1877
Extrait : « Mais attendu qu'ayant relevé, par motifs adoptés, que les deux composantes du loyer de type binaire comportant une partie fixe et une partie variable étaient contractuellement indivisibles, que la partie variable était d'application automatique dès lors que le chiffre d'affaires du preneur atteignait le pourcentage exigé, qu'il n'existait aucun élément permettant de soutenir que les parties avaient entendu fixer le loyer en fonction de la valeur locative des locaux et ayant retenu, par motifs propres, que la fixation du loyer était déterminée ainsi que les parties l'avaient librement voulu lors de la conclusion du bail et qu'elle n'était pas régie par les dispositions du décret du 30 septembre 1953, de sorte qu'elle n'était pas illicite tant au regard de l'article 35 de ce texte qu'au regard des textes relatifs aux clauses abusives, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, a légalement justifié sa décision ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR DE CASSATION
TROISIÈME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 10 DÉCEMBRE 2002
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
N° de pourvoi : 01-10208. Arrêt n° 1877.
DEMANDEUR à la cassation : Société Optical Shop of Passy, exerçant sous l'enseigne Destray Passy
DÉFENDEUR à la cassation : Société en nom collectif (SNC) SEPF-Seine, anciennement dénommée société Héron Passy
Président : M. WEBER, président.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 22 novembre 2000), que la compagnie Foncière de Passy, aux droits de laquelle se trouve la société SEPF-Seine SNC, a donné à bail à compter du 1er juillet 1993 à la société Optical Shop of Passy (société Optical) un local commercial en l'état de « coque » à usage de vente de lunettes ; que ce bail a été conclu moyennant un loyer de base forfaitaire indexé annuellement sur l'indice du coût de la construction publié par l'Institut national de la statistique et un loyer variable correspondant à la différence éventuelle entre le loyer de base forfaitaire hors taxes et 7 % du chiffre d'affaires annuel du preneur ; que le bailleur s'étant opposé à ce que le loyer soit révisé conformément aux dispositions de l'article 27 du décret du 30 septembre 1953, le preneur a saisi le juge des loyers commerciaux ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que la société Optical fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande, alors, selon le moyen :
1/ qu'en ne recherchant pas, ainsi qu'elle y était invitée, si, telle qu'elle avait été rédigée, la clause du bail stipulant un loyer additionnel variable qui constituait formellement l'une des deux composantes du loyer de type binaire qui aurait été convenu était ou non susceptible de pouvoir trouver concrètement application, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du Code civil et 27 du décret du 30 septembre 1953, devenu l'article L. 145-38 du nouveau Code de commerce ;
2/ qu'en ne recherchant pas davantage, ainsi qu'elle y était également invitée, si la clause du bail stipulant un loyer additionnel variable qui constituait formellement l'une des deux composantes du loyer de type binaire qui aurait été convenu n'avait pas été insérée dans l'acte non pas pour être appliquée, puisque tel ne pouvait, de fait, être le cas, mais pour interdire toute révision triennale du loyer, pour échapper à l'application de l'article 27 du décret du 30 septembre 1953, et, partant, si elle n’était pas destinée à réaliser une fraude à la loi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe selon lequel la fraude corrompt tout, et, plus précisément, des règles applicables à la fraude à la loi, ensemble les articles 1131 et 1133 du Code civil ;
RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Mais attendu qu'ayant relevé, par motifs adoptés, que les deux composantes du loyer de type binaire comportant une partie fixe et une partie variable étaient contractuellement indivisibles, que la partie variable était d'application automatique dès lors que le chiffre d'affaires du preneur atteignait le pourcentage exigé, qu'il n'existait aucun élément permettant de soutenir que les parties avaient entendu fixer le loyer en fonction de la valeur locative des locaux et ayant retenu, par motifs propres, que la fixation du loyer était déterminée ainsi que les parties l'avaient librement voulu lors de la conclusion du bail et qu'elle n'était pas régie par les dispositions du décret du 30 septembre 1953, de sorte qu'elle n'était pas illicite tant au regard de l'article 35 de ce texte qu'au regard des textes relatifs aux clauses abusives, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, a légalement justifié sa décision ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Optical Shop of Passy aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Optical Shop of Passy à payer à la société SEPF-Seine la somme de 1.900 euros ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Optical Shop of Passy ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix décembre deux mille deux.
ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Moyen produit par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils pour la société Optical Shop Of Passy.
MOYEN UNIQUE DE CASSATION
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société OPTICAL SHOP OF PASSY de sa demande tendant à ce qu'il soit procédé à la révision de la partie fixe du loyer du bail commercial qui lui avait été consenti par la société SEPF-SEINE SNC, en application de l'article 27 du décret du 30 septembre 1953,
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
aux motifs que la société OPTICAL soutient que la clause afférente au loyer insérée dans le bail qui la lie à la société SEPF, bailleresse, est nulle, ou à tout le moins réputée non écrite, car elle est abusive ; qu'elle expose d'abord que le loyer se compose d'une partie fixe de 430.237,50 francs par an, hors taxes et hors charges, et d'un loyer variable additionnel correspondant éventuellement à la différence entre le loyer de base et un pourcentage du chiffre d'affaires (7 %) ; que dans ce cas, pour que ce loyer variable s'applique, il faut que le chiffre d'affaires soit supérieur à 6.300.000 francs HT, ce qui est rigoureusement impossible compte tenu du fait qu'elle vend des lunettes dans un local de 35 m2 ; qu'il faudrait donc pour la mise en jeu du loyer variable que la société OPTICAL réalise un chiffre d'affaire de 203.000 francs au m2, contre 87.000 francs, étant précisé que la bailleresse reconnaît que la société OPTICAL est celle qui réalise le meilleur chiffre d'affaires au m2 du centre commercial ; que la société appelante en conclut que le loyer variable n'étant pas susceptible d'entrer en jeu dans la réalité, la bailleresse l'a prévu dans le bail uniquement afin d'échapper aux dispositions d'ordre public de l'article 35 du décret du 30 septembre 1953 relatives à la révision du loyer ; que toujours selon l'appelante, si la clause du loyer variable n'est pas en principe illicite, le but du bailleur en l'espèce est illicite puisque celle-ci a pour effet de le prémunir contre toute baisse de facteurs locaux de commercialité et par un effet de cliquet, le loyer ne pouvant qu'être fixé à la hausse mais jamais à la baisse puisque les conditions de l'article 27 du décret du 30 septembre 1953 ne pourront jamais être réunies,
qu'il est cependant de principe que la fixation du loyer fixe, qui est l'une des composantes du loyer dit binaire, n'est pas régie par les dispositions du décret du 30 septembre 1953 ; qu'elle reste déterminée ainsi que les parties l'ont librement voulu lors de la conclusion du bail ; que dans ces conditions, la clause de fixation du prix du loyer dont il s'agit n'est illicite ni au regard de l'article 35 du décret du 30 septembre 1953, ni au vu des textes relatifs aux clauses abusives, lesquels textes tendent à la protection du consommateur, qualité que le contrat de bail ne donne pas à la société locataire OPTICAL ; qu'il s'ensuit que la demande de révision du loyer en cause ne peut être accueillie,
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
alors, d'une part, qu'en ne recherchant pas, ainsi qu'elle y était invitée, si, telle qu'elle avait été rédigée, la clause du bail stipulant un loyer additionnel variable qui constituait formellement l'une des deux composantes du loyer de type binaire qui aurait été convenu était ou non susceptible de pouvoir trouver concrètement application, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil et 27 du décret du 30 septembre 1953, devenu l'article L. 145-38 du nouveau code de commerce,
et alors, d'autre part, qu'en ne recherchant pas davantage, ainsi qu'elle y était également invitée, si la clause du bail stipulant un loyer additionnel variable qui constituait formellement l'une des deux composantes du loyer de type binaire qui aurait été convenu n'avait pas été insérée dans l'acte non pas pour être appliquée, puisque tel ne pouvait, de fait, être le cas, mais pour interdire toute révision triennale du loyer, pour échapper à l'application de l'article 27 du décret du 30 septembre 1953, et, partant, si elle n'était pas destinée à réaliser une fraude à la loi, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe selon lequel la fraude corrompt tout, et, plus précisément, des règles applicables à la fraude à la loi, ensemble les articles 1131 et 1133 du code civil.
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