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CASS. CIV. 1re, 27 avril 1994

Nature : Décision
Titre : CASS. CIV. 1re, 27 avril 1994
Pays : France
Juridiction : Cour de cassation Ch. civile 1
Demande : 92-16326
Date : 27/04/1994
Nature de la décision : Cassation sans renvoi
Mode de publication : Les petites affiches
Numéro de la décision : 648
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2085

CASS. CIV. 1re, 27 avril 1994 : pourvoi n° 92-16326 ; arrêt n° 648

Publication :  Petites affiches 3 mars 1995, p. 14, note Bazin 

 

Extrait : « Attendu qu’en se déterminant ainsi, alors que Creserfi, sans la caution duquel le crédit n’aurait pas été obtenu, avait retenu la somme litigieuse en vertu d’un contrat fondé sur le principe de la mutualisation des risques constitués par les prêts non remboursés par les emprunteurs, et que ce contrat n’était pas imposé par un abus de puissance économique et ne conférait pas à cet organisme un avantage excessif, le tribunal d’instance a violé, par fausse application, le texte susvisé ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR DE CASSATION

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 27 AVRIL 1994

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

N° de pourvoi : 92-16326. Arrêt n° 648.

DEMANDEUR à la cassation : Crédit social des fonctionnaires (Creserfi).

DÉFENDEUR à la cassation : Monsieur X.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

 

Sur le moyen unique, pris en sa première branche : 

VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée)                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu l’article 35 de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 ;

 

CHAPEAU (énoncé du principe juridique en cause)                              (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu qu’il résulte de ce texte que sont réputées non écrites les clauses relatives à la charge du risque, lorsqu’elles apparaissent imposées aux non-professionnels ou consommateurs par un abus de la puissance économique de l’autre partie et confèrent à cette dernière un avantage excessif ;

 

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE                                    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que M. X., adhérent du Crédit social des fonctionnaires, a obtenu, par son intermédiaire, de la Banque industrielle et commerciale du Marais un prêt de 50.000 francs, soumis aux dispositions de la loi n° 78-22 du 10 janvier 1978, et garanti par la caution solidaire de Creserfi, organisme financier de cette association ; qu’à titre de dépôt destiné à alimenter le fonds mutuel, il a versé une somme de 1.500 francs, remboursable, selon le règlement intérieur auquel il avait adhéré, après retenue de la part du risque constitué par les défaillances de certains emprunteurs ; qu’après avoir honoré tous ses engagements, M. X. a obtenu la restitution de la seule somme de 435 francs ;

 

RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE                                              (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que, pour accueillir la demande de M. X. en restitution du surplus, la décision attaquée retient que l’article 16 du règlement intérieur du CSF Creserfi, prévoyant une retenue d’un montant égal à la part du risque supportée par les adhérents, s’analysait en une clause conférant un avantage excessif à cet organisme pour lequel ce risque est extrêmement faible, voire nul, puisqu’il s’adresse à des fonctionnaires dont la stabilité de l’emploi, et donc du revenu, est assurée et qui, en contrepartie, n’offre pas à ses adhérents des prêts à un taux d’intérêts concurrentiel ;

 

CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION                                          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu qu’en se déterminant ainsi, alors que Creserfi, sans la caution duquel le crédit n’aurait pas été obtenu, avait retenu la somme litigieuse en vertu d’un contrat fondé sur le principe de la mutualisation des risques constitués par les prêts non remboursés par les emprunteurs, et que ce contrat n’était pas imposé par un abus de puissance économique et ne conférait pas à cet organisme un avantage excessif, le tribunal d’instance a violé, par fausse application, le texte susvisé ; 

Et attendu qu’il y a lieu de faire application de l’article 627 du nouveau Code de procédure civile ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen unique : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 26 mars 1992, entre les parties, par le tribunal d’instance de Bar-sur-Seine ;

Dit n’y avoir lieu à renvoi ;

Déboute M. X. de sa demande ;

Condamne M. X., envers le Creserfi, aux dépens et aux frais d’exécution du présent arrêt ;

Dit qu’il supportera les dépens exposés devant le Tribunal ;

Ordonne qu’à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres du tribunal d’instance de Bar-sur-Seine, en marge ou à la suite du jugement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du vingt-sept avril mil neuf cent quatre-vingt-quatorze.

 

ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Moyen produit par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocats aux Conseils pour le Crédit Social des Fonctionnaires.

 

MOYEN UNIQUE DE CASSATION

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN     (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

"Il est fait grief au jugement attaqué d'avoir condamné le C.S.F./CRESERFI à payer à M. X. la somme de 1.065 frs,

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

AUX MOTIFS QU'il résulte des documents produits aux débats, notamment l'offre de prêt, un courrier du C.S.F./CRESERFI en date du 5 février 1992 adressé à la Société Civile Professionnelle BILLION, MASSARD, RICHARD, un courrier type en date du 26 février 1990 adressé à M. X., que le C.S.F./CRESERFI a retenu sur le montant du prêt consenti à M. X. une somme globale de 1.065 frs, soit 2,5 % du capital emprunté, prélevée sur une somme totale de 1.500 frs versée en début de contrat ; que cette somme de dépôt est remboursable à l'échéance du prêt après retenue de la part du risque constitué, dit le C.S.F./CRESERFI, par les inévitables carences dans les remboursements ; que le C.S.F./CRESERFI ne conteste pas que M. X. ait honoré tous ses engagements ; que, cependant, en fin de contrat, seule la somme de 435 frs a été remboursée à M. X. ; que M. X. n'était pas sans connaître la teneur de l'article 16 du Règlement Intérieur du C.S.F./CRESERFI, prévoyant une retenue d'un montant égal à la part du risque supporté par tous les adhérents et constitué par les carences dans les remboursements ; que, cependant, le C.S.F./CRESERFI s'adresse uniquement à des fonctionnaires pour lesquels la stabilité de l'emploi, et donc du revenu, sont assurés ; qu'ainsi, la part du risque définie par le C.S.F./CRESERFI est indubitablement extrêmement faible, voire nulle ; que, d'autre part, le C.S.F./CRESERFI, en contrepartie de cette taxe de risque élevée, n'offre pas à ses adhérents de prêts dont le taux effectif global serait, sur le marché, extrêmement concurrentiel, puisque M. X. a souscrit un prêt au taux annuel de 15,15 %, taux pratiqué par d'autres organismes bancaires pour des prêts à la consommation ; que, dès lors, conformément à l'article 35 de la loi du 10 janvier 1978, il y a lieu de considérer que la clause prévoyant la retenue d'une part de risque à l'issue du contrat de prêt est une clause conférant un avantage excessif au C.S.F./CRESERFI et qu'à ce titre, il s'agit d'une clause abusive ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

ALORS QUE, D'UNE PART, si les juges du fond ont le pouvoir de réputer non écrite une clause contractuelle en la qualifiant d'abusive, c'est à la condition que la clause examinée apparaisse imposée à un non-professionnel ou consommateur par un abus de la puissance économique de l'autre partie et confère à cette dernière un avantage excessif ; qu'en considérant que la clause de partage des risques figurant dans un contrat régi par un principe de mutualité est une clause conférant un avantage excessif à l'association sans but lucratif cocontractante et qu'à ce titre celle-ci a pu se livrer à un abus de puissance économique exclu par l'absence de but lucratif et le recours à la mutualisation d'un risque, le Tribunal a violé tout à la fois l'article 35 de la loi du 10 janvier 1978 et l'article 1134 du Code civil ;

ALORS QUE, D'AUTRE PART, le Tribunal, qui a retenu que la clause prévoyant la retenue d'une part de risque à l'issue du contrat de prêt conférait un avantage excessif au C.S.F./CRESERFI sans avoir contrôlé le caractère excessif de l'avantage litigieux, qui a pour seule contrepartie le coût mutualisé des impayés, à l'exclusion des modalités du prêt, autrement que par le seul présupposé que ce risque d'impayés, émanant de fonctionnaires bénéficiant de la stabilité de l'emploi et donc du revenu, est faible, n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1134 du Code civil et 35 de la loi du 10 janvier 1978."