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CASS. CIV. 1re, 26 mai 1993

Nature : Décision
Titre : CASS. CIV. 1re, 26 mai 1993
Pays : France
Juridiction : Cour de cassation Ch. civile 1
Demande : 92-16327
Date : 26/05/1993
Nature de la décision : Cassation sans renvoi
Mode de publication : Bulletins officiels
Numéro de la décision : 833
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2095

CASS. CIV. 1re, 26 mai 1993 : pourvoi n° 92-16327 ; arrêt n° 833

Publication : Bull. civ. I, n° 192 ; D. 1993. 568, note Paisant ; D. 1994. Somm. 12, obs. Delebecque ; JCP éd. E 1994. I. 313, n° 15, obs. Izorche ; Les petites affiches 9 mars 1994, note Beignier ; Defrénois 1994. 351, obs. D. Mazeaud ; JCP 1993. II. 22158, note Bazin ; ibid. I. 3709, n° 10 s., obs. Marchessaux

 

Extrait : « Attendu qu’en se déterminant par ces motifs alors que le CRESERFI avait retenu la somme litigieuse en vertu d’un contrat fondé sur le principe de mutualisation des risques constitués par les prêts non remboursés par les emprunteurs et que ce contrat n’était pas imposé par un abus de puissance économique et ne conférait pas à cet organisme un avantage excessif, le tribunal d’instance a violé, par fausse application, le texte susvisé ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR DE CASSATION

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 26 MAI 1993

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

N° de pourvoi : 92-16327. Arrêt n° 833.

DEMANDEUR à la cassation : Crédit social des fonctionnaires CSF

DÉFENDEUR à la cassation : Époux X.

Président : M. de Bouillane de Lacoste. Rapporteur : Mme Delaroche. Avocat général : Mme Le Foyer de Costil. Avocat : la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez.

 

Sur le moyen unique, pris en ses deux branches : 

VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée)                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu l’article 35 de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 ;

 

CHAPEAU (énoncé du principe juridique en cause)                              (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu qu’il résulte de ce texte que sont réputées non écrites les clauses relatives à la charge du risque lorsqu’elles apparaissent imposées aux non-professionnels ou consommateurs par un abus de la puissance économique de l’autre partie et confèrent à cette dernière un avantage excessif ;

 

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE                                    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que les époux X., adhérents du Crédit social des fonctionnaires CSF, ont obtenu par son intermédiaire un prêt de 10.000 francs, assorti de la caution solidaire de CRESERFI, organisme financier de cette association ; qu’à titre de dépôt destiné à alimenter le fonds mutuel, ils ont versé 3 % du montant de leur prêt, soit 300 francs, somme stipulée remboursable après retenue de la part du risque constitué par les défaillances de certains débiteurs dans leurs remboursements ; qu’après avoir honoré tous leurs engagements les époux X. ont obtenu la restitution de la seule somme de 60 francs ;

 

RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE                                              (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que, pour accueillir la demande en paiement de la somme de 240 francs formée par ces emprunteurs, la décision attaquée a retenu que l’article 16 du règlement intérieur du CSF-CRESERFI, prévoyant une retenue d’un montant égal à la part du risque supporté par les adhérents, s’analysait en une clause conférant un avantage excessif à cet organisme pour lequel cette part du risque est extrêmement faible, voire nulle, puisqu’il s’adresse à des fonctionnaires dont la stabilité de l’emploi et donc du revenu est assurée, et qui, en contrepartie, n’offre pas à ses adhérents des prêts à un taux d’intérêts concurrentiel ;

 

CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION                                          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu qu’en se déterminant par ces motifs alors que le CRESERFI avait retenu la somme litigieuse en vertu d’un contrat fondé sur le principe de mutualisation des risques constitués par les prêts non remboursés par les emprunteurs et que ce contrat n’était pas imposé par un abus de puissance économique et ne conférait pas à cet organisme un avantage excessif, le tribunal d’instance a violé, par fausse application, le texte susvisé ;

Et attendu qu’il y a lieu de faire application de l’article 627, alinéa 1er, du nouveau Code de procédure civile, la cassation encourue n’impliquant pas qu’il soit à nouveau statué sur le fond ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE le jugement rendu le 19 mars 1992, entre les parties, par le tribunal d’instance de Bar-sur-Aube ;

DIT n’y avoir lieu à renvoi ;

DEBOUTE les époux X. de leur demande.

 

ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Moyen produit par la SCP LYON-CAEN, FABIANI et THIRIEZ, avocats aux conseils pour le Crédit Social des Fonctionnaires.

 

MOYEN UNIQUE DE CASSATION

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN     (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

"Il est fait grief au jugement attaqué d'avoir condamné le C.S.F./CRESERFI à payer à M. et Mme X. la somme de 240 frs,

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

AUX MOTIFS QU'il résulte des documents produits que le C.S.F./CRESERFI a retenu, sur le montant du prêt consenti à M. et Mme X., une somme de 300 frs représentant 3% du capital emprunté ; que cette somme de dépôt est remboursable à l'échéance du prêt après retenue de la part du risque constitué, dit le C.S.F./CRESERFI, par les défaillances de certains débiteurs dans leurs remboursements ; que le C.S.F./CRESERFI ne conteste pas que M. et Mme X. aient honoré tous leurs engagements ; que, cependant, en fin de contrat, seule la somme de 60 frs a été remboursée aux époux X. ; que M. et Mme X. n'étaient pas sans connaître la teneur de l'article 16 du Réglement Intérieur du C.S.F./CRESERFI, prévoyant une retenue d'un montant égal à la part du risque supporté par tous les adhérents et constitué par les carences dans les remboursements ; que, cependant, le C.S.F./CRESERFI s'adresse uniquement à des fonctionnaires pour lesquels la stabilité de l'emploi, et donc du revenu, sont assurés ; qu'ainsi, la part du risque défini par le C.S.F./CRESERFI est indubitablement extrêmement faible, voire nulle ; que, d'autre part, le C.S.F./CRESERFI, en contrepartie de cette taxe de risque prélevée, n'offre pas à ses adhérents de prêts concurrentiels, puisque M. et Mme X. ont souscrit un prêt au taux annuel de 14,03%, taux pratiqué par d'autres organismes bancaires pour des prêts à la consommation ; que, dès lors, conformément à l'article 35 de la loi du 10 janvier 1978, il y a lieu de considérer que la clause prévoyant la retenue d'une part de risque à l'issue du contrat de prêt est une clause conférant un avantage excessif au C.S.F./CRESERFI et qu'à ce (seul) titre, il s'agit d'une clause abusive ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

ALORS QUE, D'UNE PART, si les juges du fond ont le pouvoir de réputer non écrite une clause contractuelle en la qualifiant d'abusive, c'est à la condition que la clause examinée apparaisse imposée à un non-professionnel ou consommateur par un abus de la puissance économique de l'autre partie et confère à cette dernière un avantage excessif ; qu'en considérant que la clause de partage des risques figurant dans un contrat régi par un principe de mutualité est une clause conférant un avantage excessif à l'association sans but lucratif cocontractante et qu'à ce titre celle-ci a pu se livrer à un abus de puissance économique exclu par l'absence de but lucratif et le recours à la mutualisation d'un risque, le Tribunal a violé tout à la fois l'article 35 de la loi du 10 janvier 1978 et l'article 1134 du Code civil ;

ALORS QUE, D'AUTRE PART, le Tribunal, qui a retenu que la clause prévoyant la retenue d'une part de risque à l'issue du contrat de prêt conférait un avantage excessif au C.S.F./CRESERFI sans avoir contrôlé le caractère excessif de l'avantage litigieux, qui a pour seule contrepartie le coût mutualisé des impayés, à l'exclusion des modalités du prêt, autrement que par le seul présupposé que ce risque d'impayés, émanant de fonctionnaires bénéficiant de la stabilité de l'emploi et donc du revenu, est faible, n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1134 du Code civil et 35 de la loi du 10 janvier 1978."