CA CAEN (1re ch. sect. civ. com.), 3 mai 2007
CERCLAB - DOCUMENT N° 2244
CA CAEN (1re ch. sect. civ. com.), 3 mai 2007 : RG n° 05/02689
Extraits : 1/ « En l'espèce, aux termes du contrat ci-dessus rappelés, le montant du crédit octroyé était limité à 10.000 francs puis a été porté à 30.000 francs, la somme de 140.000 francs mentionnée ne figurant qu'à titre de renseignement quant aux possibilités offertes aux débiteurs sans qu'aucun engagement contractuel n'en résulte, étant précisé surabondamment que toute clause contractuelle prévoyant l'augmentation du crédit initial sans acceptation par l'emprunteur d'une nouvelle offre de crédit constitue une clause abusive. »
2/ « Le Tribunal a prononcé la déchéance du droit aux intérêts en application de l'article L. 311-9 du Code de la Consommation au motif que les conditions de renouvellement du contrat de crédit litigieux n'étaient pas conformes aux exigences légales.
La directive 93/13 CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, s'oppose à une réglementation interne qui, dans une action intentée par un professionnel à l'encontre d'un consommateur et fondée sur un contrat conclu entre eux, interdit au juge national à l'expiration d'un délai de forclusion de relever, d'office ou à la suite d'une exception soulevée par le consommateur, le caractère abusif d'une clause insérée dans ledit contrat. Le juge national, chargé d'appliquer le droit communautaire, a l'obligation d'assurer le plein effet de ses normes, en laissant inappliquée, de sa propre autorité, toute disposition de la législation nationale, même postérieure, sans attendre l'élimination de ces dispositions par voie législative ou tout autre procédé constitutionnel.
Cependant, cette jurisprudence ne peut être utilement invoquée que s'il est demandé de réputer non écrite une clause abusive et non lorsqu'il est sollicité la nullité du contrat ou la déchéance du droit aux intérêts en raison d'une irrégularité affectant le contrat au regard des obligations légales. En l'espèce, il n'est allégué l'existence d'aucune clause abusive.
Ainsi que l'indique la banque, la contestation relative aux conditions de reconduction du contrat, qui porte sur l'ensemble des renouvellements annuels a été invoquée par Mademoiselle X. pour la première fois lors de l'audience devant le Tribunal du 7 avril 2005 de sorte que le délai de forclusion est expiré pour les renouvellements intervenus plus de deux ans avant cette date. Or le contrat, signé le 15 septembre 1997, modifié le 18 août 2000 a été renouvelé pour la dernière fois le 18 août 2001 du fait de l'acquisition de la déchéance du terme au 18 septembre 2001. La contestation de Mademoiselle X., émise plus de deux ans après le dernier renouvellement est en conséquence irrecevable comme atteinte par la forclusion. »
COUR D’APPEL DE CAEN
PREMIÈRE CHAMBRE SECTION CIVILE ET COMMERCIALE
ARRÊT DU 3 MAI 2007
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 05/02689. ORIGINE : DÉCISION en date du 12 mai 2005 du Tribunal d'Instance de PONT L'ÉVEQUE – R.G. n° 11.04.548.
APPELANTE :
SA FINAREF
[adresse], prise en la personne de son représentant légal, représentée par la SCP MOSQUET MIALON D'OLIVEIRA LECONTE, avoués, assistée de Maître Sandrine GUESDON, avocat au barreau de CAEN
INTIMÉE :
Madame X.
[adresse], représentée par Maître Jean TESNIERE, avoué, assistée de Maître Claudie STRATONOVITCH, avocat au barreau de CAEN, (bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro XX du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de CAEN)
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ : Monsieur LE FEVRE, Président, Madame HOLMAN, Conseiller, Rédacteur, Madame BOISSEL DOMBREVAL, Conseiller.
DÉBATS : À l'audience publique du 8 mars 2007.
[minute Jurica page 2] GREFFIER : Mme LE GALL, greffier.
ARRÊT prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 3 mai 2007 et signé par Monsieur LE FEVRE, Président, et Madame LEDOUX, Greffier.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
La SA FINAREF (la banque) a interjeté appel du jugement rendu le 12 mai 2005 par le Tribunal d'Instance de Pont l'Evêque dans un litige l'opposant à Mademoiselle X.
* * *
Le 15 septembre 1997 la banque a consenti à Mademoiselle X. une ouverture de crédit d'un montant de 10.000 francs utilisable par fraction et assortie d'une carte de crédit, portée à 30.000 francs le 18 août 2000.
En raison d'incidents de paiement, la banque a prononcé la déchéance du terme le 18 septembre 2001, mis en demeure le 20 septembre 2001, et obtenu une ordonnance d'injonction de payer le 21 février 2002 pour la somme de 5.434.98 euros avec intérêts au taux contractuel à compter du 18 septembre 2001.
Mademoiselle X. a régulièrement formé opposition à cette ordonnance et par le jugement déféré, assorti de l'exécution provisoire le Tribunal a condamné Mademoiselle X. à payer à la banque la somme de 5.807,37 euros sous déduction des intérêts au taux contractuel appliqués à compter du 8 septembre 1998, avec intérêts au taux légal à compter du 12 novembre 2004 et dit que Mademoiselle X. pourrait se libérer en 23 mensualités de 50 euros chacune, et la 24ème égale au solde.
Vu les écritures signifiées ;
* le 19 octobre 2006 par la banque qui déclare limiter son appel aux dispositions du jugement relatives à la déchéance du droit aux intérêts, conclut à l'infirmation du jugement et demande paiement des intérêts au taux contractuel de 18,93 %, outre une somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
* le 12 septembre 2006 par Mademoiselle X. qui conclut à l'infirmation du jugement, à la forclusion de l'action, subsidiairement à la confirmation du jugement et demande paiement d'une somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
I - Sur la forclusion de l'action :
Conformément à la règle selon laquelle le point de départ d'un délai à l'expiration duquel une action ne peut plus s'exercer se situe à la date d'exigibilité de l'obligation qui lui a donné naissance, le délai biennal prévu par l'article L. 311-37 du Code de la Consommation court, dans le cas d'une ouverture de crédit reconstituable et assortie d'une obligation de remboursement à échéances convenues, à compter de la première échéance impayée non régularisée, laquelle est caractérisée au moment où le montant du dépassement maximum convenu n'est pas régularisé, cette situation constituant un incident qui manifeste la défaillance de l'emprunteur.
En l'espèce, aux termes du contrat ci-dessus rappelés, le montant du crédit octroyé était limité [minute Jurica page 3] à 10.000 francs puis a été porté à 30.000 francs, la somme de 140.000 francs mentionnée ne figurant qu'à titre de renseignement quant aux possibilités offertes aux débiteurs sans qu'aucun engagement contractuel n'en résulte, étant précisé surabondamment que toute clause contractuelle prévoyant l'augmentation du crédit initial sans acceptation par l'emprunteur d'une nouvelle offre de crédit constitue une clause abusive.
L'analyse des relevés de compte démontre qu'à compter du 18 mai 1998, le débit du compte a atteint 18.432,46 francs et s'est aggravé jusqu'en août 2000, que cependant cet impayé a été régularisé le 18 août 2000 par l'octroi d'un nouveau crédit conforme aux conditions légales, et que le premier impayé non régularisé postérieur date de septembre 2000.
Cette dernière date doit en conséquence être retenue comme celle de la première échéance impayée non régularisée, point de départ du délai biennal de forclusion.
L'ordonnance d'injonction de payer ayant été signifiée le 12 mars 2002, l'action de la banque n'est pas atteinte par la forclusion, et le jugement sera confirmé de ce chef.
II - Sur la déchéance du droit aux intérêts :
Le Tribunal a prononcé la déchéance du droit aux intérêts en application de l'article L. 311-9 du Code de la Consommation au motif que les conditions de renouvellement du contrat de crédit litigieux n'étaient pas conformes aux exigences légales.
La directive 93/13 CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, s'oppose à une réglementation interne qui, dans une action intentée par un professionnel à l'encontre d'un consommateur et fondée sur un contrat conclu entre eux, interdit au juge national à l'expiration d'un délai de forclusion de relever, d'office ou à la suite d'une exception soulevée par le consommateur, le caractère abusif d'une clause insérée dans ledit contrat.
Le juge national, chargé d'appliquer le droit communautaire, a l'obligation d'assurer le plein effet de ses normes, en laissant inappliquée, de sa propre autorité, toute disposition de la législation nationale, même postérieure, sans attendre l'élimination de ces dispositions par voie législative ou tout autre procédé constitutionnel.
Cependant, cette jurisprudence ne peut être utilement invoquée que s'il est demandé de réputer non écrite une clause abusive et non lorsqu'il est sollicité la nullité du contrat ou la déchéance du droit aux intérêts en raison d'une irrégularité affectant le contrat au regard des obligations légales.
En l'espèce, il n'est allégué l'existence d'aucune clause abusive.
Ainsi que l'indique la banque, la contestation relative aux conditions de reconduction du contrat, qui porte sur l'ensemble des renouvellements annuels a été invoquée par Mademoiselle X. pour la première fois lors de l'audience devant le Tribunal du 7 avril 2005 de sorte que le délai de forclusion est expiré pour les renouvellements intervenus plus de deux ans avant cette date.
Or le contrat, signé le 15 septembre 1997, modifié le 18 août 2000 a été renouvelé pour la dernière fois le 18 août 2001 du fait de l'acquisition de la déchéance du terme au 18 septembre 2001.
La contestation de Mademoiselle X., émise plus de deux ans après le dernier renouvellement est en conséquence irrecevable comme atteinte par la forclusion.
[minute Jurica page 4] Au vu des clauses contractuelles non contestées, il sera alloué à la banque le taux d'intérêt contractuel du 18,93 % et le jugement sera réformé de ce chef.
Les autres dispositions du jugement, non contestées, seront confirmées par motifs adoptés.
La banque conservera en équité la charge des frais irrépétibles par elle exposés, compte tenu notamment du taux d'intérêts très élevé.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Réforme le jugement en ses dispositions relatives à la déchéance du droit aux intérêts,
Condamne Mademoiselle X. au paiement des intérêts au taux contractuel de 18,93 %,
Confirme le jugement en ses autres dispositions,
Déboute la SA FINAREF de sa demande en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
Condamne Mademoiselle X. aux dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
M. LEDOUX A. LE FEVRE
- 5706 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Procédure - Recevabilité - Délai pour agir - Forclusion - Clauses abusives
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- 5745 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Effets - Suppression de la clause - Conséquences sur l’issue du litige - Effet rétroactif - Point de départ d’une forclusion - Illustrations
- 6633 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit à la consommation - Crédits spécifiques - Crédit renouvelable - 4 - Clause de dispense d’offre (augmentation du crédit) - Clauses abusives
- 6635 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit à la consommation - Crédits spécifiques - Crédit renouvelable - 6 - Clause de dispense d’offre (augmentation du crédit) - Notion d’augmentation du crédit