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CA AMIENS (1re ch. 2e sect.), 24 avril 2008

Nature : Décision
Titre : CA AMIENS (1re ch. 2e sect.), 24 avril 2008
Pays : France
Juridiction : Amiens (CA), 1re ch. sect. 2
Demande : 07/00588
Date : 24/04/2008
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 31/01/2007
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2326

CA AMIENS (1re ch. 2e sect.), 24 avril 2008 : RG n° 07/00588

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « Attendu qu'outre le fait que les clauses qui permettent à la société COFINOGA d'augmenter le crédit consenti sans présenter de nouvelle offre informant exactement le débiteur des conditions du nouveau crédit et notamment des charges de remboursement à venir et sans lui offrir une possibilité de rétractation, créent un déséquilibre significatif à son détriment et constituent des clauses abusives réputées non écrites, aux termes de l'article L. 132-1 du Code de la consommation, il convient de constater qu'en l'espèce l'augmentation du découvert autorisé a suivi les dépassements de découvert et a été consentie alors que les clauses du contrat n'avaient pas été respectées ».

2/ « Attendu qu'il convient en outre de relever que la forclusion de l'article de l'article L. 311-37 du Code de la consommation, dans sa rédaction applicable au présent litige n'est pas opposable à M. X. dans la mesure où le moyen tiré du caractère abusif d'une clause dès lors réputée non écrite peut être soulevé d'office par le juge, la cour soulevant ce moyen en tant que de besoin ;

Attendu enfin que la société COFINOGA ne peut arguer utilement d'une spoliation du capital prêté, dès lors qu'elle prétendait se prévaloir d'une clause abusive, qu'elle n'a au demeurant même pas respectée en entérinant les dépassements de découverts, au lieu de les autoriser sur demande, favorisant ainsi un endettement, sans délai de réflexion, toujours plus grand, étant encore observé que, dès avant la nouvelle rédaction de l'article L. 311-9 du Code de la consommation, il était de principe qu'une autorisation de découvert contractuelle ne peut faire l'objet d'une augmentation tacite ».

 

COUR D’APPEL D’AMIENS

PREMIÈRE CHAMBRE DEUXIÈME SECTION

ARRÊT DU 24 AVRIL 2008

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 07/00588. APPEL D'UN JUGEMENT DU TRIBUNAL D'INSTANCE D'AMIENS du 8 janvier 2007.

 

APPELANT :

Monsieur X.

[adresse], Représenté par la SCP MILLON - PLATEAU, avoués à la Cour et ayant pour avocat Maître CHIVOT du barreau d'AMIENS. Bénéficiaire d'une aide juridictionnelle Totale numéro 07/XX du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle d'AMIENS

 

ET :

INTIMÉES :

SA COFINOGA

[adresse], Représentée par la SCP LE ROY, avoué à la Cour et plaidant par Maître GUERREIRO [minute Jurica page 2] collaborateur de Maître Xavier D'HELLENCOURT, avocats au barreau d'AMIENS

Madame X. née Y.

[adresse], Assignée à l'étude suivant exploit de la SCP D. - G. Huissiers de Justice associés à ABBEVILLE en date du 28 septembre 2007 à la requête de M. X. Non comparante.

 

DÉBATS : A l'audience publique du 8 février 2008 devant Madame SCHOENDOERFFER, Président, entendue en son rapport, magistrat rapporteur siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu de l'article 786 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 24 avril 2008.

GREFFIER : M. DELANNOY

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE : Madame Le Président en a rendu compte à la Cour composée de : Madame SCHOENDOERFFER, Président, M. FLORENTIN et Madame SIX, Conseillers qui en ont délibéré conformément à la Loi.

ARRÊT : PRONONCE PUBLIQUEMENT le 24 avril 2008 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ; Mme SCHOENDOERFFER, Président, a signé la minute avec M. DROUVIN, Greffier.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

DÉCISION :

La cour statue sur l'appel interjeté par M. X. d'un jugement rendu, le 8 janvier 2007, par le tribunal d'instance d'Amiens, dans un litige l'opposant à la société COFINOGA et à Mme Y.

Aux termes d'une offre préalable acceptée le 9 novembre 1999, la société COFINOGA a [minute Jurica page 3] consenti à M. X. une ouverture de crédit utilisable par fractions pour un découvert autorisé de 40.000 francs soit 6.097,96 €.

Certaines mensualités de remboursement étant demeurées impayées, la société COFINOGA s'est prévalue de la déchéance du terme intervenue le 23 septembre 2004 et a obtenu du juge d'instance d'Amiens une ordonnance d'injonction de payer la somme principale de 7.174,52 € outre les intérêts au taux de 15,02 % à compter du 19 juin 2005 et des frais accessoires de 4,57 €, signifiée le 27 juin 2005 à M. X. et le 17 juin 2005 à son épouse Mme Y.

Mme Y. épouse X. a formé opposition et, par jugement rendu le 8 janvier 2007, le tribunal d'instance d'Amiens a :

- reçu l'opposition,

- mis à néant l'ordonnance d'injonction de payer du 3 juin 2005,

- dit forclos M. X. et Mme Y. à invoquer des exceptions tirées de la formation du contrat,

- constaté que le caractère abusif des clauses inscrites dans le contrat du 9 novembre 1999 n'est pas rapporté,

- condamné solidairement M. X. et Mme Y. à payer à la société COFINOGA les sommes de :

* 7.174,52 € avec intérêts au taux de 15,02 % à compter du 19 juin 2005,

* 150 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 nouveau du Code de procédure civile

- accordé à M. X. et Mme Y. des délais de paiement et les a autorisés à s'acquitter de leur dette en 23 versements mensuels de 300 € chacun, le 24ème du solde de la dette, des intérêts et frais, chaque versement devant intervenir au plus tard le 5 de chaque mois et le premier versement devant intervenir au plus tard le 5 du mois suivant la signification de sa décision,

- dit que le défaut de paiement d'une seule mensualité selon les modalités susvisées, entraînera la déchéance du terme et l'intégralité de la dette deviendra immédiatement et de plein droit exigible,

- condamné M. X. à garantir Mme Y. de l'ensemble des sommes acquittées par elle en exécution de sa décision,

- rejeté le surplus des demandes,

- condamné solidairement M. X. et Mme Y. aux dépens.

M. X. a interjeté appel de cette décision le 31 janvier 2007.

Par ses dernières écritures signifiées le 8 octobre 2007, il demande à la cour d'infirmer le [minute Jurica page 4] jugement et de :

- annuler l'ordonnance d'injonction de payer en date du 3 juin 2005, à titre principal

- déclarer la société COFINOGA forclose en ses demandes,

à titre subsidiaire

- prononcer à l'encontre de la société COFINOGA la déchéance du droit aux intérêts,

- condamner la société COFINOGA à imputer sur le capital restant dû les sommes versées au titre des intérêts qui seront elles-mêmes productives d'intérêts au taux légal à compter du jour de leur versement,

- réduire l'indemnité légale à 1 €,

- réduire les intérêts à 1 €,

- ordonner la compensation,

- lui accorder un report de dettes de deux années,

à titre infiniment subsidiaire

- lui accorder les plus larges délais de paiement,

- dire que les paiements effectués s'imputeront d'abord sur le capital,

- « débouter Mme Y. de sa demande de condamnation solidaire » (sic),

- statuer ce que de droit sur les dépens.

La société COFINOGA, par ses dernières conclusions signifiées le 21 novembre 2007, demande à la cour de :

- confirmer le jugement sauf sur les délais de paiement,

- le réformer de ce chef,

- rejeter la demande de délais formée par les époux X.,

- condamner les époux X. à lui payer la somme de 1.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'à supporter les entiers dépens.

[minute Jurica page 5] Mme X., assignée par acte signifié à l'étude de l'huissier de justice DA. le 28 septembre 2007 n'a pas constitué avoué.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

CECI EXPOSÉ, LA COUR,

Attendu que Mme Y. n'ayant pas été assignée à personne, l'arrêt sera rendu par défaut ;

Attendu que M. X. fait valoir que la société COFINOGA est forclose en sa demande dès lors que le découvert de 40.000 francs autorisé initialement a été dépassé sans nouvelle offre de crédit, que la société COFINOGA entretient une confusion entre découvert autorisé et découvert pouvant être autorisé ; qu'à titre subsidiaire, il se prévaut du caractère abusif de la clause relative à l'augmentation du découvert autorisé par simple mise à disposition des fonds sur demande de l'emprunteur ; qu'en outre il se prévaut de ce que la liquidation du régime matrimonial qui le liait à Mme X. dont il est divorcé depuis le 7 avril 2005 est en cours pour demander l'infirmation de la décision en ce qu'elle l'a condamné à garantir Mme X. des condamnations prononcées contre elle ;

Attendu que la société COFINOGA fait valoir qu'aux termes de l'article L. 311-9 du Code de la consommation dans sa rédaction applicable au présent contrat, l'offre préalable n'est obligatoire que pour le contrat initial ; qu'en toute hypothèse, elle ne pourrait qu'être privée que des intérêts sur la partie du capital prêté dépassant la fraction disponible et que statuer différemment amènerait une rupture de l'équilibre de l'économie du contrat en conduisant à la priver du capital prêté dans le respect du contrat et aboutirait à sa spoliation au sens des juridictions européennes ;

Attendu qu'aux termes de l'offre de crédit, la société COFINOGA a consenti un «montant du découvert maximum à l'ouverture du compte » de 40.000 francs le « montant maximum du découvert global pouvant être autorisé » étant de 140.000 francs ; qu'il était stipulé que « sauf accord préalable de COFINOGA le montant du financement ne devra, en aucun cas, conduire à un dépassement du montant maximum du découvert autorisé », que «l'accord de COFINOGA pour une augmentation à (la) demande (de l'emprunteur) du plafond du découvert autorisé au terme de la présente offre, résultera de la mise à (sa) disposition effective du montant représentatif de l'augmentation sollicitée et/ou de l'inscription effective de l'opération de débit domiciliée » et qu'en cas de dépassement du montant maximum du découvert autorisé le contrat pourrait être résilié de plein droit au profit de COFINOGA ;

Attendu qu'il convient d'observer qu'il ressort des pièces produites (historique du compte et relevés des 23 juillet 2001 et 23 juillet 2002), que le découvert autorisé avait été porté au 23 juillet 2001 à la somme de 45.000 francs (6.860,21 €) ; que dès le mois de mai 2002 ce découvert a été dépassé, alors qu'il n'est justifié d'une augmentation de découvert autorisé qu'à posteriori en juillet 2002 ; qu'il en ressort que le découvert a été dépassé sans accord préalable du fait des achats du mois de mai 2002 ;

Attendu qu'outre le fait que les clauses qui permettent à la société COFINOGA d'augmenter le crédit consenti sans présenter de nouvelle offre informant exactement le débiteur des conditions du nouveau crédit et notamment des charges de remboursement à venir et sans lui offrir une possibilité de rétractation, créent un déséquilibre significatif à son détriment et constituent des clauses abusives réputées non écrites, aux termes de l'article L. 132-1 du Code de la consommation, il convient de constater qu'en l'espèce l'augmentation du découvert autorisé a suivi les dépassements de découvert et a été consentie alors que les clauses du contrat n'avaient pas été respectées ;

[minute Jurica page 6] Attendu que, conformément à la règle selon laquelle le point de départ d'un délai à l'expiration duquel une action ne peut plus s'exercer se situe à la date de l'exigibilité de l'obligation qui lui a donné naissance, le délai biennal prévu par l'article L. 311-37 du Code de la consommation court, dans le cas d'une ouverture de crédit reconstituable et assortie d'une obligation de remboursement à échéances convenues, comme en l'espèce, à compter du dépassement du découvert autorisé ou en l'absence de dépassement, et compte tenu des termes du contrat à compter de toute échéance impayée non régularisée ;

Attendu qu'il convient de constater qu'en l'espèce, dès le mois de juin 2002, le montant du découvert autorisé était dépassé, ce qui donnait naissance à l'action de la société COFINOGA, conformément à l'article 6 de l'offre préalable ;

Attendu que les 17 et 27 juin 2005, dates de la signification de l'injonction de payer délivrée aux époux X. l'action de la société COFINOGA était donc forclose, quelle que soit la sanction prévue à l'article L. 311-33 du Code de la consommation qu'elle pouvait, par ailleurs, se voir opposer si elle avait agi dans un délai utile ;

Attendu qu'il convient en outre de relever que la forclusion de l'article de l'article L. 311-37 du Code de la consommation, dans sa rédaction applicable au présent litige n'est pas opposable à M. X. dans la mesure où le moyen tiré du caractère abusif d'une clause dès lors réputée non écrite peut être soulevé d'office par le juge, la cour soulevant ce moyen en tant que de besoin ;

Attendu enfin que la société COFINOGA ne peut arguer utilement d'une spoliation du capital prêté, dès lors qu'elle prétendait se prévaloir d'une clause abusive, qu'elle n'a au demeurant même pas respectée en entérinant les dépassements de découverts, au lieu de les autoriser sur demande, favorisant ainsi un endettement, sans délai de réflexion, toujours plus grand, étant encore observé que, dès avant la nouvelle rédaction de l'article L. 311-9 du Code de la consommation, il était de principe qu'une autorisation de découvert contractuelle ne peut faire l'objet d'une augmentation tacite ;

Attendu qu'il convient donc d'infirmer le jugement et de dire la société COFINOGA irrecevable en ses demandes à l'encontre de M. X. ;

Attendu que M. X. fait valoir par ailleurs qu'il ne peut être condamné à garantir Mme Y. des condamnations prononcées contre elle, dès lors que le jugement qui a prononcé le divorce a ordonné la liquidation du régime matrimonial et que cette liquidation est en cours ;

Attendu qu'il convient de constater que rien dans le jugement de divorce visé par le tribunal ne permet de condamner M. X. à garantir Mme Y. des condamnations prononcées contre elle, ce jugement n'ayant fait, ainsi que le relève M. X., qu'ordonner la liquidation du régime matrimonial ;

Que le jugement sera également réformé sur ce point ;

[minute Jurica page 7] Attendu que, devant la Cour, l'équité commande de ne pas prononcer de condamnation sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Statuant par arrêt par défaut et dans les limites de l'appel,

Infirme le jugement en ce qu'il a dit forclos M. X. à invoquer des exceptions tirées de la formation du contrat, constaté que le caractère abusif des clauses inscrites dans le contrat du 9 novembre 1999 n'est pas rapporté, condamné solidairement M. X. avec Mme Y. à payer à la société COFINOGA les sommes de 7 174,52 € avec intérêts au taux de 15,02 % à compter du 19 juin 2005 et de 150 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 nouveau du Code de procédure civile, accordé à M. X. des délais de paiement et l'a autorisé à s'acquitter de la dette en 23 versements mensuels de 300 € chacun, le 24ème du solde de la dette, des intérêts et frais, chaque versement devant intervenir au plus tard le 5 de chaque mois et le premier versement devant intervenir au plus tard le 5 du mois suivant la signification de sa décision, dit que le défaut de paiement d'une seule mensualité selon les modalités susvisées, entraînera la déchéance du terme et l'intégralité de la dette deviendra immédiatement et de plein droit exigible, condamné M. X. à garantir Mme Y. de l'ensemble des sommes acquittées par elle en exécution de sa décision, condamné solidairement M. X. avec Mme Y. aux dépens ;

Statuant à nouveau sur ces points ;

Dit la société COFINOGA forclose en son action et irrecevable en ses demandes à l'encontre de M. X. ;

Dit n'y avoir lieu à garantie par M. X. des condamnations prononcées contre Mme Y. ;

Dit n'y avoir lieu à prononcer de condamnation sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne la société COFINOGA aux entiers dépens d'appel qui seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle.

LE GREFFIER,        LE PRÉSIDENT,